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Full text of "Journal de Physique, de Chimie et d'Histoire Naturelle"

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JOURNAL 
DE PHYSIQUE. 


DE PHYSIQUE, 
DE CITIMIE, 
D'HISTOIRE NATURELLE 


EATND ETS ART S: 
AVEC DES PLANCHES EN TAILLE-DOUCE; 
Par M. H.-M. DUCROTAY ne BLAINVILLE, 


Docteur en Médecine de la Faculté de Paris, Professeur de Zoologie, d’Ana- 
tomie et de Physiologie comparées, à la Faculté des Sciences et à l'Ecole 
normale ; ex-Suppléant de M. Cuvier au Jardin du Roi etau Collége de France, 
Membre et Secrétaire de la Société Philomathique, Membre de la Société 
Vernérienne d'Edimbourg et de la Société d'Histoire naturelle de Dublin, etc. 


JUILLET 4x 1818. 


— 


TOME LXXXVIL 


À PARIS, 


$CHEZ M“ V° COURCIER, IMPRIMEUR-LIBRAIPRE, 
rue du Jaydinet, quartier St.-André-des-Arcs. 


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VIOL RNAE 


D EBTEET SOU: Er 
DE CHIMIE 
ET D'HISTOIRE NATURELLE, 


JUILLET an 1818. 


SUITE DES OBSERVATIONS 
Sur la Famille naturelle des plantes appelées Composces; 


Par ROBERT BROWN. 
TRADUITES DE L'ANGLOIS, ET ANNOTÉES 


PAR HENRI CASSINI. 
Calea. 


C: genre fut établi par Linné dans la 6° édition de son Ge- 
nera Plantarum, où il a donné le caractère naturel ; mais c’est 
dans la 12° édition du Systema Naturæ, 3° section de la Poly- 
gamie égale, que l’on trouve, pour la première fois, le caractère 
essentiel suivant, conservé jusqu'aujourd'hui : Beceptaculum pa- 
leaceum, pappus pilosus, calix imbricatus. 

Les espèces primitivement rapporlées au Calea, dans la se- 
conde édition du Species Plantarum, sont les C. Jamaicensis, op- 
positifolia et amellus, décrites sur les échantillons de l’herbier 
de la Jamaïque de Brown, que Linné avoit recu peu d'années 
auparavant, et qu'il avoit réuni à son propre herbier. 

Linné avoit originairement rapporté ces trois plantes au San- 
tolina (Amcænit. acad., vol. V, pag. 404), ce qui me surprend 
moins que la réunion qu'il en a formée depuis pour faire son 


“6 JOURNAL DE PUYSIQUE, DE CHIMIE 


genre Calea ; en effet, selon lui, deux de ces plantes sont sans 
aigrelte, ce qui est une erreur à l'égard de l’une des deux, et 
du reste, elles s'accordent avec le caractère générique du San- 
tolina; la lroisième, que Brown avoit rapportée avec doute au 
même genre , est pourvue d'une aigrette, mais elle ressemble aux 
autres par ses feuilles opposées. 

Cependant toutes ces plantes diffèrent tellement par le port 
de l'espèce originaire du genre Santolina, que Linné fut pro- 
bablement déterminé par cette considération , à les retirer de 
ce genre; et quoique le caractère tiré de l’aigrette ne convienne 
qu'au Calea Jamaicensis, il ÿ réunit les deux autres espèces, 
peut-être en considération du port. Remarquez que pas une de 
ces trois espèces primitives de Calea, ne s'accorde entièrement 
avec le caractère générique établi par Linné , et que réellement 
elles constituent trois genres tès-distincts, fondés sur des bases 
que Linné lui-même auroit admises, je crois. ! 

La première espèce (Calea Jamaicensis) est la seule qui semble 
S’accorder avec le caractère générique, parce qu'elle a une ai- 
grelte qui, vue légèrement et à l'œil nu, peut paroître simple- 
ment capillaire, mais qui soigneusement examinée, offre une 
structure très-différente , et presque particulière à ce genre. Je 
ne connois qu'un échantillon authentique de cette espèce, recu 
de Brown par Ehret, et qui se trouve maintenant dans l’herbier 
de sir Joseph Banks, Cet échantillon, quoiqu'incomplet, appar- 
üent évidemment à la même espèce que la Conyza fruticosa ciste 
odore, floribus pallidè purpureis, summitatibus ramulorum inst- 
dentibus de Sloane (ist. Jam., tome I, pag. 257, tab. 151, fig. 5), 
dont j'ai examiné les échantillons originaires irès-parfaits dans 
son herbier, conservé dans le Muséum britannique; et je me 

. Suis assuré que son aigrette est de la même structure que celle 
du Calea cordifolia de Swartz, qui a été bien décrite par ce 
botaniste, tandis qu'il a décrit comme différente celle du C: 
Janaicensis (Flor. Ind. occid., vol. HT, pag. 1528). Ces deux 
plantes sont les seules espèces de ce genre qui soient publiées; 
on doit leur conserver le nom de Calea, et on peut leur assi- 
gner le caracière générique suivant. } PRET 

Carr (Caleæ species, Linné.)Involuere imbriqué. Réceplacle 
paléacé. Fleurons tubuleux, uniformes, hermaphrodites. An- 
thères mutiques à la base. Stigmates aigus. Aïgrette paléacée, 
composée de rayons uninervés, marqués de stries pennées. — 
Arbrisseaux de l'Amérique équinoxiale , pubescens, scabres. 
Feuilles opposées, indivises. Capitules en corymbe, ou termi- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 7 


naux, Où axillaires. Involucre ovoide, à folioles nerveuses, 
obtuses. Réceptacle convexe, à paillettes distinctes analogues 
aux folioles de l’involucre. Corolles jaunes -rougeätres, selon 
Swartz, glabres, à lanières munies de deux nervures. Achène 
sub-cylindracé, ou obscurément anguleux, glabre ou pubescent, 
muni à la base d’une callosité un peu oblique. Aigretle persis- 
tante, blanche, brillante, à rayons disposés sur un seul rang, 
subulés, indivis, denticulés supérieurement. 

Dans l’herbier de sir Joseph Banks, se trouvent deux plantes 
très-voisines des Culea, et qui n’en diffèrent que parce qu'elles 
ont un rayon de fleurettes femelles ligulées. Si l'on croit cette 
différence suflisante pour constituer un genre distinct, celui-ci 
peut-être nommé Caleacte. La première de ces plantes (C. ur- 
ticifolia), à feuilles presque ovales, aiguës, crénelées, trouvée 
par Houston près Véra-Crux, est le Solidago urticæfolia de 
Millér, qui paroît l'avoir cultivée. La seconde (C. pinnatifida), 
à feuilles profondément lobées ou pinnatifides, a été dernière- 
ment envoyce du Brésil par M. Sellow. 


Tsocarpha, 


La Calea oppositifolin, qui est la secônde espèce linnéenne 
de Calea, n’a que tres-peu d'ahinité avec la première. Elle pour- 
roit êtré rapportée au Samtolina, si l'on s’arrétoit au caractère 
technique de ce genre; mais elle en diffère tellement par d’autres 
points desa struclure, ainsi que par le port, qu’il ne peut y avoir de 
doute sur la nécessité de l’en séparer. C’est ce qu'on peut faire en la 
nommant /socarphe, et en la caractérisant comme il suit. 

IsocanpnA. Réceptacle conique, muni de paillettes distinctes, 
semblables, dont les extérieures forment l’involucre. Fleurons 
tubuleux, uniformes, hermaphrodites. Anihères mutiques à la 
base. Stigmates surmontés d'un appendice allongé, hispidule , 
aigu. Achène prismatique, sans aigrette, — Herbes de RE 
équinoxiale. Feuilles opposées, ou alternes, Imdivises. Capilules 
ovales, terminaux, ternés ou solitaires, Paiïllettes lancéolées. 
Corolles blanches. Anthères tronquées à la base. 

J'ai tracé ainsi le caractère générique de l’/socarpha, afin d'y 
comprendre le Spilanthus atriplicifolius de Linné , qui, pourtant, 
diffère très-notablement du Calea oppositifolia par ses feuilles 
alternes et ses capitules solitaires, aussi bien que par la contex- 
ture et la forme de ses paillettes. 

Je n’ai pu trouver, dans aucun des échantillons du Calea op- 
positifolia que j'ai examinés, l’aigrette décrite par Swartz (Obs. 


& JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIÆ 


Bot., pag. 302), et composée, selon lui, de trois ou quatre 
arêtes lres-pelites. 
Salmea. 


La troisième espèce linnéenne de Calea, le Calea amellus ; 
est probablement la même plante que le Bidens scandens, décrit 
par Linné dans l’AÆortus chiffortianus, mais qu'il aura oublié, 
n'ayant pas l'échantillon dans sa collection. L’échantillon original 
de l'herbier de Clifford, appartenant aujourd’hui à sir Joseph 
Banks, est évidemment de la même espèce, et provient peut- 
être du même individu, qu'un autre échantillon de la collection 
de Miller, que M. Dryander a comparé avec le Calea amellus 
de l'herbier de Linné, et qu’il a trouvé semblable. Ainsi, le 
vrai synonyme du Calea amellus estle Bidens suffruticosus vi- 
zuneus, foliis oblongo-ovalis oppositis, floribus comosis de Brown 
(Jam., 517); tandis que Linné a cité l’Amellus ramosus, foliis 
remolis terminalibus, fulcris longis divaricatis du mème auteur, 
et en a même dérivé son nom spécifique. Cette dernière plante, 
au lieu d’être synonyme du Bidens scandens, doit être rapportée 
au Bidens nivea , ce que j'établis par les argumens suivans : 1°. la 
figure de l’£upatoriophalacrum scrophulariæ aquaticæ  foliis 
oppositis de Burmann (T'hesaur. Zeylanic, tab. 42, pag. 95), 
cilée par Brown pour sa plante, représente bien le Bidens Ti 
vea, quoiqu’elle appartienne au Lavenia erecta, et diffère beau- 
coup e Bidens scandens ; 2. la description de Brown s'accorde 
très-bien sur la plupart des points avec le Bidens nivea, et nul- 
Jement avec le Bidèens scandens ; 3°. le Bidens nivea se trouvoit 
sans doute dans l’herbier de Brown, pairdne cette plante est 
comprise dans la Flora Jamaicensis publiée dans le 5° volume 
des Amænilates academicæ, et dont cet herbier a fourni les prin- 
Cipaux matériaux. Cependant j'observe que, dans cette Flore, 
on a lrès-faussement rapporté à celte espèce, la première San- 
toline de Brown, qui, d’après sa description, sembleroit en effet 
pouvoir appartenir au Bidens nipea, mais qui est probablement 
le Verbesina gigantea. | 

M. Decandolle a dernièrement établi le nouveau genre Sal- 
mea, Composé des Bidens scandens et hirsuta, et d’une troisième 
espèce que je n'ai point examinée. Cet excellent botaniste a très- 
justement retiré ces plantes du Bidens, et les a bien distinguées 
de ce genre, ainsi que du Melananthera. Cependant je m’étonne 
qu'il n'ait pas cru plus nécessaire de comparer le Salmea avec 
le SR. dont, suivant sa descripüon, il ne différeroit que 


par 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 9 


par l’involucre imbriqué. Mais, comme dans le Spilanthus, les 
folioles de l'involucre ne sont pas lout-a-fait égales, et sont dis- 
posées au moins sur. deux rangs, j'ai introduit, quelques distinc- 
tions additionnelles dans le caractère du nouveau genre. 

Sarmra. (Decandolle, Cat. Hort. Monspel., pag. 140.) Tavo- 
lucre imbriqué. Réceptacie conique, pourvu de- paillettes per- 
sistantes. Fleurons tubuleux, uniformes , hermaphrodites,, quin- 
quéfides. Arthères sagittées. Achène comprimé verlicalement, 
mur de deux arêtes. persistantes ; laplères ou, ailées,,— Arbris- 
seaux de l'Amérique équinoxiale, le plus souvent décombens. 
Feuilles opposées , indivises. Inflorescence terminale, subpani- 
culée, ou corymbée. Corolles blanches. Paillettes du réceptacle 
persistant après la chute des péricarpes. a 

‘J'ai examiné, dans Fherbier de sir Joseph Banks, des échan- 
üllons de trois espèces de ce genre; qui diffèrent entre elles 
par. plusieurs caractères très-remarquables. 7 

1°. Salmea scandens. (Decand.) Arètes égales, dépourvues de 
bordure membraneuse; stigmates notablement élargis, lingai- 
formes, obtus, non hispides, obscurément papillés, dénués d’ap- 
pendice terminal; style épaissi à la base en un bulbe hémisphé- 
rique tronqué. par don AE 

2°. S. hirsuta. (Decand-) Arêtes,inégales; l’intérieure- plus 
grande, manifestement aiîlée; l’extérieure munie seulement d'un 
rebord étroit; stigmates aigus et étalés ; style. épaissi à la base 
en un bulbe ovale atténué inférieurement. 

3°. S.2 curviflora. (Nob.) Elle diffère des deux précédentes 
par le tube de sa corolle, qui est notablement courbé en de- 
bors; l’arête intérieure est remplacée par une ‘aile large ‘et ob- 
tuse, dont le bord intériéur est droit et épaissi, et dont. le bord 
extérieur se prolonge inférieurement presque jusqu’à la base du 
péricarpe ; l’arête extérieure est ailée; outre ces deux arêtes , 
on observe ordinairement un ou deux pelils processus; les slig- 
mates sont roulés en dehors (VIH). 


Baccharis. 


! 


Dans la 12° édition du Systema Naturæ, Linné a ajouté à son 


genre Calea, une quatrième espèce, sous le nom de Calea sco= 
paria; il seroit difhcile d'en trouver le motif, car cette plante 
ne ressemble ni par sa fructification, ni par son port, à aucun 
des trois genres dont le Calea fat primitivement composé ; ainsi 
que je l'ai établi. Cette quatrième espèce, qu'il avoit. d'abord 
rapportée au Chrysocoma (Amæn. acad., vol. V, pag. 404; Syse, 
Tome LXXXVII. JUILLET an 1818. B 


(10 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


-Nat., éd. 10, vol. IF, pag. 1206), est reconnue maintenant pour 
dioïque. Browne, qui , le premier, l'a décrite et figurée, et dont 
j'ai examine l’un des échantillons; Linné, et même Swartz, à 
l'époque où il a publié ses Observationes Botanicæ , n’ont connu 
que l'individu mâle, qu'ils ont tous néanmoins considéré comme 
hérmaphrodite: ‘IL n’est pas douteux que le genre Serzilus de 
Gœrtner se rapporte égalernent à l’individu mäle de cette es- 
-pèce ; quoiqu'il ait hasardé de décrire la couleur de l'embryon, 
trompé probablement paf la grandeur de l'ovaire Separ ER, et 
par la couleur de’sa’ surface interne (S#). 

. Le professeur Swartz a donné depuis, des renseignemens 
plus salisfaisans sur le Calea scoparia, et V'a rapporté au Bac- 
charis (Flor. Ind. occid., vol. UT, pag. 1339), auquel il appartient 
invontestablement | én réduisant €e genre aux espèces dioïques 
d'Amérique , commé l'ont proposé Richard (Wich. Flor. Bor. 
Amer., vol. IT, pag. 125), et Jussieu (Ann. du Mus. d'Hist! rat., 
vol. VII, pag. 385). Cette limitation du genre Baccharis est 
très-bonne à adopter; il en résalte pourtant, qu'un nom de Dios- 
coride se trouve appliqué à une genre de plantes qui n'habitent 
que le nouveau continent. Malgré l'opinion contraire manifestée 
par M. de Jussieu , il y a des différences suüflisantes entre les 
‘espèces de Baocharis, d’après lesquelles a été fait le caractère 
linnéen , ‘et le Conyza, en réduisant ce dernier genre à ses es- 
pèces primitives , les C. squarrosa et bifrons, et à un petit nombre 
d’autres ajoutées depuis; ces vrais Conyza diffèrent principale- 
ment des Znula, par l'extrême brièveté de leurs languettes (T'). 

Comme l’on n’a point encore donné jusqu'ici un caractère 
satisfaisant du Baccharis, tel qu'il est maintenant Hmité, je pro- 
pose Je suivant, qui servira à le distinguer des Graphalium 
‘dioïques. 

Baccnaris. (Richard, Mich. Amer., vol. II, pag. 125. Jussieu, 
Ann. du Mus. d'Hist. nat., vol. VH, pag. 385. Molina, Ruiz et 
Pavon, Prodr. Flor. Peruv., 3. Baccharidis species, Linn.) In- 
volucre imbriqué. Réceptacle nu. Fleurons tubuleux, dioiques. 
Les mâles ayant les anthères exsertes, mutiques à la base; les. 
stigmates terminés par un appendice aigu ,‘hispidule , et l’aigrette 
presque pénicillée. Les fenrelles filiformes , ayant l’aigrette ca- 
pillaire. — Arbrisseaux de l'Amérique équinoxiale et tempérée. 
Fenilles alternes , rarement opposées, petites ‘ou nulles dans 
quelques espèces dont les rameaux sont alors pourvus d'ailes 
foliacées. Inflorescence terminale, quelquefois latérale, corymbée, 
ou fasciculée. Involuére ovoide ou oblong, composé d'écailles 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 1 


demi-scarieuses, à bord simple. Les mâles à aigrette cendrée. 
Les femelles à limbe petit, bi-tridenté, dépourvues d'étamines 
stériles; à aigrelte allongée (IX). - 


Melananthera. 


Willdenow, dans son édiuon du Species Plantarum, à con- 
servé les quatre espèces linnéefines de Calea, et en a ajouté 
quatre autres, dont pas une ne se rapporte à aucun des genres 
formés par les espèces primitives, mais qui consutuent quatre 
autres genres également distincls. 

La première de ces espèces ajoutées au Calea est, en suivant 
l'ordre établi par Willdenow , le Calea aspera, qu'il a adopté 
d’après Jacquin, dont la description et la figure sont bonnes, 
quoiqu'il ait mal à propos rapporté cette plante au Calea. 

C'est cette espèce-ci, et non, comme M. Richard l’a supposé, 
l'espèce voisine native de l'Amérique septentrionale, que Linné 
a primilivement désignée sous le nom de Bidens nivea; cela 
est démontré par l'échantillon de son herbier, par sa citation 
du, Ceratocephalus foliis cordatis s. triangularibus flore albo de 
Vaillant (Act. Paris. 1720, pag. 527), décrit sur un échantillon 
de l’herbier de Surian, et par la réunion qu'il fit ensuite à son 
espèce des deux plantes de Caroline, figurées dans l'Æortus el- 
thamensis, comme étant des variétés. 

Le Calea aspera diffère beaucoup du Bidens, et a très-peu 
d’aflinité avec aucune des espèces originaires de Calea, surtout 
avec le C. J'amaicensis qui a fourni le caractère. Cependant, depuis 

u'il a été publié dans l'ouvrage de Willdenow, il a été laissé 
A le genre Calea par la plupart des auteurs des. catalogues 
récens de jardins, tels que Desfontaines, Decandolle ,:et Aïton 
dans la seconde édition del’ Æortus Kewwensis; enfin Lamarck, dans 
ses Zllustrationes Generum, regardant sans doute cette plante 
comme le type du genre Calea, a copié la figure que Jacquin 
en avoit donnée. 

1 n’est plus temps de revenir au nom d’Amellus, sous lequel 
Browne a le premier proposé cette plante comme genre distinct, 
ainsi que j'ai déjà entrepris de le prouver; car Linné a bientôt 
après donné ce nom générique à deux plantes très-différentes, 
dont l’une le conserve toujours; d’ailleurs la vraie plante de 
Browne a été jusqu'ici méconnue, ce qui doit en partie lui être 
imputé, parce qu'il a entièrement omis l'aigrette.qui est caduque. 

Dès 1784, le Bidens nivea fut décrit par Von Rohr, comme 
geure distinct, sous le nom de Melanthera; et il l'a publié, 


B 2 


12 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


en 1792, dans le 2° volume des Transactions de la Societe d'His- 
toire naturelle de Copenhague. Ce même genre a élé publié de 
nouveau, en 1803, par Richard, dans la Flora Boreali-Ame- 
ricana de Michaux, où ïl est appelé Melananthera, et où les 
deux espèces confondues par Linné dans son Bidens nivea, se 
trouvent distinguées pour la pgemière fois. Enfin Persoon , dans 
son Synopsis, a adopté ce genre, tel qu'il est nommé et dé- 
terminé dans l'ouvrage de Michaux. 

Von Rohr et Richard n’ont donné que le caractère naturel 
du genre, et le caractère essentiel tracé par Persoon n’est pas 
tout-à-fait satisfaisant; c’est pourquoi je propose le suivant, en 
adoptant le nom de Melananthera comme plus généralement 
recu (U”). 

MerananTuerA. (Richard, Mich. Amer., vol. I, pag. 106. Me- 
lanthera, Von Robhr, Kiobenh. Naturhist. Selskeb., pur 2 hefte x, 
pag. 215. Amellus, Brown, Jam. 317. Bidentis species, Linn. 
Caleæ species, Jacquin.) — Involucre polyphylle, sur deux rangs 
presqu'égaux. Réceptacle convexe , muni de paillettes foliacées. 
Fleurons tubuleux, uniformes, hermaphrodites. Achène turbiné, 
anguleux, déprimé au sommet. Aïgrette de deux à dix-huit 
soies scabres, distinctes, tombantes. — Herbes de F Amérique 
équinoxiale et tempérée, pubescentes, scabres. Feuilles opposées, 
indivises ou un peu lobées. Capitules terminaux, portés sur des 

édoncules uniflores, alongés, ternés ou géminés. Involucre fo- 
Éecé, Réceptacle hémisphérique garni de païllettes presque sem- 
blables aux folioles de l’involuere. Corolles blanches. Anthères 
noirätres, pourvues au sommet d’appendices blancs, mutiques 
à la base ; exsértes peu après l'épanouissement de la corolle 
puis redevenant incluses par Feffet de la contraction des filets. 
Stigmates terminés par un appendice aïgu, hispidule, exserts 
après la rétraction du tube des anthères, puis redevenant presque 
inclus (X). 

Von Rohr, dans son caractère naturel du #Welanthera, parle 
du nectaire, où corps glandulaire, engaïnant la base du style; 
c’est la plus ancienne mention qui ail été faite, à ma con- 
noissance , de cet organe dans les Composées, sauf que Batsch, 
dans son Analysis florum publié en 1790, a décrit et figuré ce 
même organe dans le Coreopsis tripteris. Néanmoins, c’est à 
M. Cassini qu'appartient le mérite d'avoir reconnu l'existence, 
presque universelle de l'organe dont il s’agit, dans les fleu- 
rettes hermaphrodites de cette grande classe. 

Von Robr et Richard, dans leurs caractères du Melanantheÿa. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 13 


ont décrit les anthères comme étant plus courtes que la corolle, 
ce qui n’a lieu certainement que dans un état particulier de la 
fleur; aussitôt après son épanouissement, elles s'élèvent consi- 
déräblement, et redeviennent incluses dans un âge plus avancé. 
Ge fait avoit été remarqué par Jacquin (Collect. , tome IE, p. 291. 
Je. Rar., HI t., 583), qui attribue l'inclusion définitive des an- 
thères à l'alongement de la corolle. Mais l'accroissement réel de 
la corolle en longueur est très-foible , et insuflisant pour produire 
un tel effet, qui, selon moi, est dû à une contraction consi- 
dérahle et graduelle des filets. Cela n’est pas rare dans les Com- 
posées, et spécialement dans la tribu des Hélianthées, à laquelle 
appartient le Melananthera. 

Dans le Mémoire de M. Cassini sur les Étamines des Com- 
posées , la rétraction des anthères n’est point expressément re- 
marquée. Pourtant cet effet peut difficilement avoir échappé à 
un aussi exact observateur; et son opinion sur la cause qui le 
produit pourroit peut-être s’induire d’une observation qu'il a faite 
sur les étamines des Hélianthées, tribu dans laquelle l'effet est 
le plus remarquable. Il dit que les filets, au-dessous de l’arti- 
culation , se flétrissent aussitôt après la fécondation (Journal de 
Physique, tome LXXVIIL, pag. 278). On peut supposer qu'il 
attribue le phénomène en question à ce flétrissement, qu’il ne 
dit point avoir lieu daus toute autre tribu (V). 

Mais il me paroïl que la contraction ou le relächement des 
filets, qui survient après leur état primitif d'extension, est un 
acte vital, et non l'effet du flétrissement, qui néanmoins le suit 
de près. Cette contraction peut souvent être prévenue par la 
chute de la fleurette, lorsqu'elle a lieu, tandis que les filets 
sont encore dans leur élat d'extension; aussi, dans plusieurs 
genres de Composées, les anthères ne se retirent point, mais 
continuent à saillir en dehors , jusqu'a ce qu’elles tombent ayec 
la corolle. « 

D'ailleurs, celte contraction est, analogue au mouvement plus 
manifeste, ou à l'irritabilité des filets, remarquée , il y a long- 
temps, dans certaines Cinarocéphales, par Borelli et Alexandre 
Camerarius ( Æphemerid. Aead. nat. Curios. Gent. IX et X, 
-pag. 194); et plus amplement décrite dans la même tribu, 
par Dal Cavolo (Discorso della irritabilüà d'alcuni fiori. Fi- 
renze, 1764); dont les observations ont été confirmées.et étendues 
à d’autres subdivisions des Composées par Koelreuter (fon Ei- 
nigen das Geschlechtder Planzen betref}enden versuchen, 3. Forisez. 
pag. 125). Une semblable contraction owirritabilité du style a 


14 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


été décrite depuis peu par M. Ker, dans certaines espèces d'Arc- 
totis (Bolanical Register, tome 1, pag. 34) (X). 


Neurolæna. 


La seconde espèce ajoutée par Willdenow au genre Calea ; 
est le C: lobata, que Linné avoit rapporté au Conyza, plutôt 
sans doute sur l’apparence extérieure, que d’après un examen 
réel de la plante dans l’herbier de Clifford; n’en ayant point 
d’échantillon dans son propre herbier, il a laissé subsister dans 
tous ses ouvrages la double erreur qu'il avoit commise, en rap- 
portant celte plante à la Polygamie superflue, et en lui attri- 
buant un réceptacle nu. 

Le professeur Swartz est le premier qui ait indiqué sa vraie 
structure, et qui , en conséquence, l’ait rapportée au genre Calea, 
dont le caractère est exactement concordant. Ce changement fut 
adopté dans la 1* édition de l’Hortus Kewensis, où le caractère 
générique du Calea est modifié de manière à ce que les espèces 
sans aigrelte puissent y être admises ; il le fut aussi par Gœrtner, 
qui réduit le genre Calea aux deux espèces lobata et Jamaicénsis, 
comme étant les seules qui s'accordent avec le caractère lin- 
néen. Mais comme j'ai démontré que le C.J'amaicensis, qui est 
l'espèce primitive du genre, a l’aigrette d’une nature très-dif- 
férente, il devient nécessaire de donner un nouveau nom au 
Calea lobata; je propose donc celui de Veurolæna, et le ca- 
ractère générique suivant, dans lequel j'ai introduit quelques 
additions nécessaires. 

NeEurocæna. (Calea, Gœrtn.) Involucre imbriqué, foliacé. Ré- 
ceptacle paléacé, planiuscule. Feurons tubuleux, uniformes, her- 
maphrodites. Anthères incluses, mutiques et échancrées à la 
base. Stigmates aigus, recourbés. Aigrette capillaire, denticulée, 
persistante. — Arbrisseau (Y) de l'Amérique équinoxiale, dressé. 
Feuilles alternes, indivises et lobées. Corymbe terminal, com- 

osé. Involucre ovoide, à folioles obtuses, nerveuses. Pail- 
ettes du réceptacle presque semblables à l’involucre. Corolles 
jaunes (XI). 
Ozothamnus. 


La troisième espèce ajoutée par Willdenow au genre Calea, 
est le Calea pinifolia, adoptée d’après le Florulæ Insularum Aus 
tralium cn EL de Forster. 

L’échantillon de cette plante, dans l’herbier de Georges Forster, 
maintenant réuni à la grande collection de M. Lambert, est très= 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. W 15 
imparfait; il est évident , néanmoins, qu'il appartient à la même 
espèce qu'un autre échantillon plus complet, mais innommé, recu 
de Forster par sir Joseph Banks, dans l'herbier duquel je l'ai 
examiné, et me suis assuré qu'il a le réceptacle nu, Ce ne peut 
donc pas être une espèce de Calea, et sans doute Forster ne 
Y'a rapportée à ce genre qu'à raison d'un certain degré de res- 
semblance avec son Calea leptophylla: D'après Ja structure de 
ses sligmates, de ses anthères el de son involucre, le Calea pi- 
nifolia appartient certainement à une tribu très-différente, et 
méme on auroit pu le rapporter au genre Gnraphalium, tel qu'il 
est maintenant établi. Mais ce grand genre mal défini, exige 
évidemment une réforme; et si l’on convient de là nécessité 
de le subdiviser, on admettra aussi, je pense, qu'il faut res- 
treindre le nom de Graphalium à la section qui comprend les 
G. luteo-album, sylvaticunr et uliginosum, et qui a pour carac- 
tères un réceptacle nu, un involucre connivent au sommet et 
de même hauteur que le capitule qui est tronqué, et composé 
de nombreuses fleurettes femelles filiformes à la circonférence, 
avec un plus petit nombre de fleurettes hermaphrodites dans 
le disque ; les unes et les autres produisant des graines fertiles, 
et ayant une aigrette sessile, capillaire, tombante. : 

Le Gnaphalium étant ainsi limité, on ne: peut y, rapporter le 
Calea pimifolia, arbrisseau à feuilles presque acéreuses, dont 
tous les fleurons , ou au moins la plupart, sont hermaphrodites, 
et dont l’aigrette persistante a ses rayons un peu épaissis dans 
le haut. 

Il semble pourtant se rapprocher davantage de lAntennaria , 
genre séparé du Gnaphalium par Gœærtner , mais qui, tel qu'il 
l'a proposé, comprend trois tribus assez différentes par le port 
et la structure, pour autoriser à les séparer, et, ce qui est re- 
marquable , dont aucune ne s'accorde entièrement avec le ca- 
ractère générique tracé par Geærtner. 

La première tribu est composée de plantes herbacées de l'Eu- 
rope et de l'Amérique septentrionale , à fleurons mäles et femelles 
séparés dans des involucres distincts et sur différens individus. 
On peut conserver à ce Ten le nom d’Antennaria (XI), quoi- 
qu'il n’exprime que la forme de l’aigrette des fleurs males. Ses 
espèces sont les Gnraphalium dioicum L., alpinum L., carpati- 
cum WValhenberg, plantagineum 1,:, et margaritaceum L: 

La seconde tribu, composée des Graphalium leontopodium 
et leontopodioides, péèut être appelée Leontopodium; elle tient 
lé milieu entre l'Æntennariaietle Gnaphalium , te qu’il vient d’être 


16 SOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
limité, mais elle se distingue de l’un et de l’autre par des ca= 
ractères suflisans. 

La troisième tribu, qui n'a été trouvée que dans l'Afrique 
méridionale, est composée d’arbrisseaux à feuilles petites, roides , 
analogues à celles des Bruyères, ayant les bords courbés en 
dessus , la face süpérieure tomenteuse, l'inférieure convexe et 
presque glabre. Ces feuilles sont, dans la plupart des espèces, 
retournées sens dessus dessous, par l'effet d'une torsion remar- 
quable; caractère qui semble avoir été négligé dans toutes celles 
qu'on a décrites, savoir, les Gnaphalium muricatum, mucronatum 
et seriphioides (AA). Daus cette tribu, ou ce genre, qu’on peut 
nommer Metalasia, l'involucre est généralement cylindrique, et 
dans la plupart des espèces, pourvu d'un rayon court formé par 
les lames. colorées et étalées des écailles intérieures; les fleurons 
sont en petit nombre, et tous hérmaphrodites; les rayons de 
l’aigeette tombent séparément, et sont ou épaissis où plus for- 
tement dentés au sommet. 

Le Calea: pinifolia n'appartient pas même à ce genre;.quoi- 
qu'il ait un port presque semblable ; mais avec des feuilles dont 
les bords sont roulés en dessous, et dont la pubescence tomen- 
teuse occupe principalement la surface inférieure. Il s'accorde 
en ce point, comme dans les principaux caractères de la fruc- 
tification ; avec plusieurs arbrisseaux de la Nouvelle-Hollande 
et de l’île de Van Diemen, au nombre desquels sont les Æupa- 
torium ferrugineum et rosmarinifolium, et le Chrysocoma cinerea 
de M. Labillardière. Dans les uns, les écailles intérieures de 
l'involucre sont simples, ce qui paroit avoir lieu dans le Calea 
pinifolia ; dans les:autres, elles forment un court rayon, comme 
dans les deux espèces rapportées à l'Eupatoire par M. Labillar- 
dière. Je suis porté à croire que loules ces espèces ne forment 
que deux sections d’un seul et même genre, que je nomme Ozo- 
thamnus, et que je distingue par le caractère suivant (BB). 

Ozornamnus. Involucre imbriqué, scarieux, coloré. Récep- 
tacle sans paillettes, glabre. Fleurons au-dessous de vingt, tu- 
buleux, tous hermaphrodites, ou accompagnés à la circonfé- 
rence d’un très-petit nombre de fleurons femelles plus étroits. 
Anthères incluses, munies de deux soies à la base. Stigmates à 
sommet obtus, presque tronqué, hispidule. Aigrette sessile, pi- 
leuse, quelquefois. pénicillée, persistante. — Arbrisseaux de la 
Nouvelle-Hollande, de la Nouvelle-Zélande et de l'Afrique aus- 
trale ;lomenteux, ayant une odeur forte et désagréable. Feuilles 
éparsses, trés-entières, à! bords. le plus souvent recourbés, In- 

florescence 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 17 


florescence terminale, corymbée ou ramassée. Involucres blancs 
ou cendrés; à écailles intérieures tanidt conformes aux exle- 
rieures et conniventes , tantôt en lames étalées, blanches, for 
mant un rayon court, obtus. Corolles jaunes. Aigrette blanche. 


Cussinia. 


La quatrième espèce ajoutée au genre Calea par Willdenow, 
est le Calea leptophylla de Forster, dont j'ai examiné les échantil- 
lons dans l’herbier de MM. Lambert. Parmi les dessins de Forster, 
se trouve une figure coloriée de cette plante, qui nous apprend 
qu'il l'avoit dabord considérée comme appartenant au Gyapha- 
lium. Va ensuile retirée de ce geure, probablement après 
l'avoir vue rapportée au Culea, dans la collection de sir Joseph 
Banks, par qui cette plante avoit été découverte à la Nouvelle- 
Zélande, dans un meilleur ou au moins un plus bel état. 

Quoique cette plante soit co#forme au genre Calea dans tous 
les points du caractère essentiel linnéen, elle en diffère notable- 
ment sous d’autres rapports presque aussi importans, aussi, bien 
que par le port; tandis que réunie à la Calea aculeata de M. La- 
billardière, et à plusieurs autres-espècés également indigènes 
de la Nouvelle-Hollande et de l'ile de Van Diemen, elle con- 
stitue avec elles un genre très-voisin de l'Ozsothamnus, et qui 
s'en distingue principalement par les paillettes de son récep- 
tacle (CC). 

Je propose de nommer ce genre Cassinia, en l'honneur de 
M. Henri Cassini, dont les recherches bien dirigées sur les 
Composées ont déja jeté beaucoup de lumière sur la struc- 
ture et l'économie des parties les plus importantes de la fruc- 
tification de cette classe difficile, et spécialement des orgaues 
qui m'ont fourni les caractères distincufs du Cassinta. 

J'ajouterai à la suite des caractères du genre, ceux des espèces 
qu'il comprend , et qui se distribuent en deux sections, comme 
dans POzothamnus; j'y ai réuni le Calea spectabilis de Labil- 
lardière, qui en effet s'accorde avec le caractère du genre, mais 
dont le port s'éloigne beaucoup de celui de toutes les autres 
espèces. 

CassrwrA. (Caleæ species, Labillardière.) Involucre imbrique, 
scarieux , pauciflore. Réceptacle garni de paillettes distinctes , 
presque semblables aux écailles intérieures de l’involucre. Fleu- 
rons tubuleux, tous hermaphrodites, ou accompagnés à la cir- 
conférence de quelques femelles très-peu nombreux et plus étroits. 
Anthères incluses, munies de deux soies à la base. Stigmates 


Tome LXXX VII. JUILLET an 1818. C 


18 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


à sommet obtus, presque tronqué, hispidule. Aigrette pileuse 
ou pénicillée, persistante. — Arbrisseaux. Feuilles éparses, le 
“plus souvent étrécies, à bords recourhés. Inflorescence termi- 
nale, corymbée ‘ou plus rarement paniculée. Involucres blancs 
ou cendrés , rarement dorés, à écailles intérieures le plus sou- 
vent conniventes au sommet, quelquefois étalées et formant un 
-rayon court, obtus. 


S L /nvolucre radié, les écailles intérieures étant étalées au 
sommet. 


1°. Cassinia leptophy lla. Feuilleslinéaires-linguiformes, blanches 
en dessous, ainsi que les rameaux ; corymbes terminaux; In- 
volucres turbinés. (Calea leptophylla, Forst.; Prodr:, n° 287. 
Willd., Sp. PL, t. HI, p. 1706. Persoon, Sy2., t. IH, p- 406. 
Poiret, Encycl. Suppl, t I, p. 28.) Habite les champs sablon- 
neux de la Nouvelle-Zélande, près Tolaga, etc. (Banks); pres 
le détroit de la Reine Charlotte (J. R. ét G. Forster). Vue Sèche, 
dans les herbiers de Banks et de G. Forster. 


S Il: /nvoluère connivent. 


Espèces ligneuses. 


2°. Cassinia denticulata. Feuilles ovales ou oblongues , aiguës, 
à petites dents spinuliformes , tomenteuses en dessous ; corymbes 
composés ; involucres hémisphériques. Habite la côte orientale 
de la Nouvelle-Hollande, pres le port Jackson (David Burton). 
“Vue sèché dans l'herbier de Banks. 

3°. Cassinia longifolia. Feuilles Jinéaires-lancéolées, alongées, 
lisses, lomenteuses en dessous; corymbes décomposés ; invo- 
lucres tuürbinés. Habite la côte orientale de la Nouvelle-Hollande, 
près le port Jackson, dans les buissons. Vue vivante. 

°, Cassinia aurea. Feuilles linéaires -lancéo!ees,' alongées, 

lisses, glanduleuses en dessous; corymbes décomposes; invo- 
lucres ovales, à écailles dorées au sommet. Habite la côte orien- 
tale de la Nouvelle-Hollande, près le port Jackson, dans les bois 
et les buissons. Vue vivante. 

5°. Cassinia aculeata. Feuilles étroitement linéaires, à bords 
roulés, hispidules en dessus, blanches en dessous, ainsi que les 
rameaux ; Corymbes composés ou décomposés, entassés; invo- 
lucres turbinés. (Calea aculeata , Labill., Nov.-Holl., t. HE, p.41, 
t. 185. Persoon, Syn., t. Il, p. 406. Poiret, Encycl. Suppl., 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 19 


t. Il, p. 28). Habite l'Ile de Van-Diemen, dans les buissons 
et sur le bord des rivières. Vue vivante. 

6°. Cassinia aflinis. Feuilles linéaires-étrécies, à bords roulés, 
à face supérieure hispidule, à face inférieure de la même cou- 
leur que la supérieure; corymbes décomposés , entassés, invo- 
lucres turbinés. Habite la côte orientale de la Nouvelle-Hol- 
lande, près le port Jackson, dans les buissons (D. G. Caley). 
Vue sèche. À peiné distincte du C. aculeata. 

7°. Cassinia lœvis. Feuilles très-étroitement linéaires , à bords 
roulés, lisses en dessus, blanches et tomenteuses en dessous, 
ainsi que les rameaux; corymbes composés ; involucrés entassés, 
cylindracés. Habite la côte méridionale de la Nouvelle-Hollande, 
dans les champs, vers la base des montagnes , près l'origine de 
la baie de Spencer. Vue vivante. 

8. Cassinia arcuata. Feuilles très-étroitement linéaires , à bords 
roulés, lisses en dessus, blanches et tomenteuses en dessous, 
ainsi que les rameaux; panicule pyramidale; inyolueres cylin- 
dracés , arqués, disposés en épis. Habite la côte méridionale de 
la Nouvelle-Hollande, dans les champs élevés, près l'origine de 
la baie de Spencer. Vue vivante. 

o°. Cassinia quinquefaria. Feuilles très: étroitement linéaires, 
glabres en dessus, ainsi que les rameaux ; panicule décomposée ; 
imvolucres turbinés, à écailles disposées sur cinq rangs longi- 
tudinaux. Habite la côte orientale de la Nouvelle- Hollande, 
près le port Jackson, dans les lieux montueux (D. G. Caley). 
Vue sèche. 

Espèce herbacee. 


10°. Cassinia spectabilis. Panicule décomposée, feuilles lan- 
céolées, décurrentés , laineuses en dessous, ainsi que les ra- 
meaux. (Calea spectabilis. Labill., Noy:-Holl.pt. IL, p: 42, t 180. 
Persoon, Syn., t. II, p.406. Poiret, Æncyel. Suppl, t. I; p. 28). 
Habite la côte méridionale de la Nouvelle-Hollande; je l'ai re- 
cueillie dans les bois et les buissons, près Mémory-Cove, le 
port Lincoln, etc. Découverte par M. Labillardière!dans l'ile de 
Van Diemen. Vue vivante. -I0nc 

Depuis la publication du Species Plantarum de Willdenow ;, 
très-peu de changemens ont été faits dans le genre Oalea. 

Persoon, dans son Synopsis, a exclu deux espèces : le Calea 
scoparia, que, d'après Swartz, il a renvoyé au Baccharis; ‘et 
le Calea aspera, dont il a fait, d'après Richard, une espèce de 
Melananthera. Lies ‘espèces ajoutées , dans’ ce même ouvrage, 


C 2 


20 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


au genre Calea, sont le C. cordifolia de Swartz, qui est un 
vrai Calea, comme je l'ai déjà remarqué ; les C, aculeata et spec- 
tabilis de Labillardière, qui appartiennent au genre Cassinia; 
enfin le C. cordata, adopté d'après Loureiro, et dont on ne 
connoîit rien que par la courte description qui se trouve dans 
la Flora Cochinchinensis; description qui est seulement suflisante 
pour rendre probable que cette plante n'appartient ni au Calex, 
tel que j'ai proposé de le circonscrire, ni à aucun des genres 
confondus avec lui jusqu’à présent. 

Dans le supplément du Dictionnaire de Botanique de l'Ency- 
clopédie méthodique, MM. Poiret a conservé, lle Calea, 
toutes les espèces attribuées à ce genre dans le Synopsis de Persoon, 
et de plus le Caleaaspera, que, néanmoins , il a, dans un article 
subséquent, rapporté avec raison au Melananthera. 


(La suite au Cahier prochain.) 


NOTES DE L'AUTEUR. 


(VIIL) Cette espèce de Salmea ressemble, par le caractère 
remarquable de ses fleureltes recourbées, aussi bien que par 
quelques autres, au Spt/anthus arboreus de Georges Forster (Com- 
ment. Gotting., tome IX, pag. 66), dont il forma d’abord son 
genre Laxmannia, en prenant le nectaire ou la glande épigyne 
pour un ovaire supère; l'ovaire véritable, quoiqu'imparfait, muni 
de ses deux arêtes, pour un périanthe bidenté , et rapportant 
ce genre ainsi faussement caractérisé à la Polygamie séparée. 

Lorsqu'il corrigea ces erreurs , et qu’il rapporta son Laxæmannia 
au Spilanthus , ne s’apercut pas qu’il n’avoit sous les yeux qu'une 
plante hermaphrodite imparfaite, ou màle. 

Je me suis assuré que le Spilanthus arboreus est vraiment 
dioïque, par l'examen des nombreux échantillons que sir Joseph 
Banks à recueillis dans l’île de Sainte-Hélène, oucette espèce forme 
un petit arbre appelé dans le pays White-wood. C'est le Bidens 
arborea, et peul-être aussi le Spilanthus tetrandrus de Ja liste 

. des plantes de Sainte-Hélène, rédigée par Roxburg, et jointe 
au Traité du général Bealson sur cette ile; le premier nom se 
rapportant probablement à l'individu femelle, et le second à une 
variété de l'individu mâle. 

En rétablissant le Spilanthus arboreus comme un genre sufi- 
samment distinct du Bidens, du Spilanthus et du Salmea , je ne 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 21 


pense pas qu'il soit à propos de lui rendre le nom de Zax- 
mannia, que Forster ne lui avoit donné que par suite d’une erreur, 
qu'il a ensuite abandonné , et qu'on a depuis appliqué à un autre 
genre généralement adopté aujourd'hui. Je le nomme donc Pe- 
trobium, et je lui attribue le caractère suivant : 


Perromium. Involucre polyphylle, à peu près sur deux rangs; 
l'extérieur plus court, et composé d’un moindre nombre de 
folioles. Réceptacle paléacé , planiuscule. Fleurons dioïques, tu- 
buleux, quadrifides; les mäles pourvus d’anthères exsertes, et 

. de stigmates aigus, hispidules; les femelles pourvues d'étamines 
stériles , et de stigmates aigus , recourbés. Achène ou comprimée 
parallèlement, ou anguleuse; ses angles munis de deux ou trois 
arêles persistantes, denticulées. — Arbre de l'ile Sainte-Hélène. 
Feuilles opposées, indivises. Panicule terminale, fourchue et 
divergente. Involucre oblong. Paillettes du réceptacle presque 
semblables aux écailles de l'involucre. Corolles jaunâtres, à tube 
arqué en dehors, ce qui fait paroitre le capitule radié. Anthères 
des mäles noirätres, échancrées à la base, munies au sommet 
d'un appendice très-court, aigu; leurs loges offrant Île vestige 
d’une cloison longitudinale. Etamines des femelles stériles, dis- 
tinctes, à anthères sagittées avortées (S). 

(IX) J'ai observé un autre genre dioïque, à réceptacle nu, 
à aigrette capillaire, et dont le port est à peu près semblable 
à celui du Baccharis. Ce genre, que je nomme Brachylæna, 
ne comprend qu’une seule espèce publiée, qui est le Zaccharis 
nereifolia Linn. (U). 

. BracuyLænA. Involucre imbriqué, à écailles coriaces. Récep- 
tacle nu. Fleurons dioïques. Mäles à anthères exserles, munies 
de deux soies à la base. Femelles plus étroites, à limbe quin- 
quéfide , à filamens stériles, à stigmates linguiformes imberbes. 
Aigrette pileuse et scabre dans les deux sexes. — Arbrisseaux 
de l'Afrique australe, subtomenteux. Feuilles alternes, très-en- 
tiéres ou dentées. Inflorescence terminale, presque en grappe. 


Involucres ovoides, courts, à écailles ovales, d’une contexture 
uniforme. 


(X) Dans la nombreuse collection de plantes faite par mon 
regrettable ami, le Dr Smith, sur les côtes du Congo, se trouve 
un genre Syngénèse, qui, bien qu'appartenant à la Polygamie 
superflue, et ayant les fleurs jaunes, est sous d'autres rapports 
- si analogue au Melananthera , qu’on l’auroit indubitablement rap- 
porté à ce genre, si on ne l’eût trouvé qu'avec des graines müres. 


22 JOURNAL DE PHYSIQUE, DÉ CHIMIE 
Cependant, les caractères suivans prouvent qu'il en est suffisam= 
ment dislinct. 

Lirorricue. Involucre imbriqué, sur deu* rangs presqu'égaux. 
Réceptacle convexe, garni de paillettes foliacées , distinctes. Ca- 
pitule radié. Languettes femelles disposées sur un seul rang. 
Fleurons hermaphrodites , à stigmates terminés par un appen- 
dice aigu, hispidule. Achènes presque uniformes, turbinés, à 
aigretté sétacée, caduque. — Herbes de l'Afrique équinoxiale. 
Feuilles opposées, indivises. Pédoncules terminaux, ternés. In- 
volucres courts , foliacés. Paillettes du réceptacle carénées, ner- 
veuses, aiguës. Corolles jaunes. Languettes alongées, tridentées. 
Anthères noiratres , presque incluses, mutiques à la base. Achène 
obtusément tétragone. Aïgrette située sur le disque du sommet 
déprimé de l’achène ; courte, composée de huit à dix petites 
soies disposées sur un seul rang, distinctes, denticulées, ca- 
duques ou tombantes. — Ce genre, très-voisin du Melananthera, 
a aussi de l’aflinité avec l’£clipta, Linn., le Wedelia, Jacq., et 
le Diomedea, Cassini (Journ. de Phys., tome LXXXII, pag. 145); 
mais il paroît suffisamment distinct de tous. 

(XI) I y a deux autres genres qui, sous plusieurs rapports, 
s'accordent avec le caractère que je viens de donner du Veu- 
rolæna ; 1 est nécessaire de les indiquer. Le premier est le 
Carphephorus de M. Cassini (Bulletin des Sciences, 1816, p. 198), 
qui se distingue suffisamment en ce qu'il a les stigmates de l’Eu- 
patoire ou du Liatris, avec le port de ce dernier genre, de 
quelques espèces duquel il ne diffère que par son réceptacle 
garni de paillettes. Le second, non encore décrit, peut étre 
nommé Piptocarpha, et caractérisé comme il suit. 

Prprocarpua. Involucre imbriqué, turbiné, scarieux. Récep- 
tacle garni de paillettes distinctes. Fleurons tubuleux , uniformes, 
a limbe roulé en dehors. Anthères exsertes, munies de deux 
soies à la base. Stigmates filiformes, aigus, hispidules. Aigrette 
pileuse.— Arbrisseau du Brésil, très-rameux, décombent? Feuilles 

-alternes,, très-entières, blanches en dessous. Involucres axillaires 
et terminaux, fasciculés, glabres, composés d'écailles sessiles, 
obtusiuscules, sans nervures, et d’une contexture uniforme. 
Paillettes du réceptacle presque semblables aux écailles inté- 
rieures de l’involucre, et tombant en même temps qu'elles. 
Corolles glabres. Soies des anthères très-entières. Aigrette blanche, 
àrayons sur un seul rang. , 

Je n'ai point vu de graines parfaites; et comme elles tombent 
sans être mures , avec les écailles intérieures de l’involucre, et 


£T D'HISTOIRE NATURELLE. 25 


que les anthères sont très-saillantes en dehors, il se peut que 
la plante ici décrite ne soit que l'individu mäle d'une espece 
‘dioïque; en tout cas, elle w'apparlient à aucun genre publié 
jusqu'ici. 
- (XI) AnTennariA.(Antennariæ species , Gœrtner. Gnaphalii 
species, Linn., Juss.) Involacre imbriqué, scarieux, colore. Ré- 
ceptacle sans paillettes, scrobiculé. Fleurons dioiques. Miles à 
anthères munies de deux soies à la base, à stigmates lronqués, 
à aigrette pénicillée, ou épaissie au sommet. Femelles filiformes, 
à limbe petit, sans rudimens d’étamines, à aigretle capillaire. 
— Herbes vivaces, tomenteuses, blanchätres. Feuilles planes ; 
les adultes souvent glabriuscules en dessus; les radicales ordi- 
nairement plus larges. Inflorescence corymbée , rarement soli- 
taire. Involucre turbiné, ou quelquefois hémisphérique, com- 
posé d'écailles à base calycinale, et à partie supérieure colorée, 
blanche ou purpurescente. Corolles jaunes. Anthères demi-ex- 
sertes. Aïgrette des mäles blanche, opaque. 

Le Gnaphalium margaritaceum , que j'ai attribué à ce genre, 
a élé décrit pour la première fois par Clusius; selon lui, cette 
plante auroit été apportée d'Amérique, et inroduile dans les 
jardins d'Angleterre, vers la fin du XVI: siècle. 

Depuis, elle a toujours été très-généralement cultivée, comme 
plante d'ornement, dans ce pays et sur le continent de l'Europe ; 
et on la trouve mentionnée dans plusieurs Flores européennes, 
aussi bien que dans celles de l'Amérique septentrionale. Il est 
donc surprenant que jnsqu’ici l'on n’ait observé que l'individu 
mäle, qui cependant a été considéré comme hermaphrodite par 
tous les botauistes , excepté M. Cassini, qui, dans son premier 
Mémoire sur les Synanthérées (Journal de Physique, 1. LXXVI, 
pag. 200), soupconne que c'est une plante male, d'après l'état 
d’imperfection de l'ovaire. 

ya plusieurs années que j'ai connu quecette espèce de Grapha- 
lium étoit vraiment dioïque, ayant vu un échantillon de l'indi- 
vidu femelle dans l'herbier de sir Joseph Banks, qui l’avoit trouvé 
sur les bords du Rymney dans le Glamorganshire , où celte 
plante fut originairement observée par Lhwyd. J'ai recu depuis, 
plusieurs échantillons des deux sexes , de M. Bicheno, à qui j'avois 
fait part de ma remarque , et qui se chargea obligeamment d'ob- 
server les différens états de la plante, dans le même lieu, où 
elle paroït être réellement indigène. Je n’ai jamais pu découvrir au- 
cune fleurette femelle à la circonférence destapitules des individus 
mäles ; mais , au centre des capitules femelles, j'ai toujours trouvé 


24 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


deux ou trois fleurettes mäles imparfaites, dont les anthères; 
quoique cohérentes et de la forme ordinaire, paroissoient être 
privées de pollen. 

On a également négligé de remarquer la séparation des sexes 
dans une plante encore plus commune de cette classe, le Ser- 
ratula tinctoria (Z). 

Tous les auteurs qui ont parlé de cette espèce, laquelle est 
mentionnée dans presque toutes les Flores européennes, aussi 
bien que dans plus d’une récente Monographie du genre, l'ont 
considérée comme hermaphrodite , tandis qu'elle appartient réel- 
lement à la Polygamie diœcie ayant ses organes sexuels par- 
faits séparés sur différentes plantes. L'individu hermapbrodite , 
parfail en apparence , mais qui, je le crois, porte très-rarement 
des graines fertiles , a été bien figuré par Schkubr (Botanisches 
Handbuch , ab. 254); et l'individu ele: dont les stigmates sont 
développés et ondulés d’une manière remarquable, tandis que les 
anthères sont évidemment imparfaites , et qui porte généralement 
des graines fertiles, est représenté dans PEnglish Botany (tab. 58), 
dans la Flora Danica (281), et probablement aussi dans le Svensk 
Botanik (170). Je suis redevable de la connoissance de ce fait, 
concernant le Serratula tinctoria, au Rév. Robert Bree de Cam- 
berwell, qui m'a indiqué les deux états de la plante, et qui 
élit alors disposé à les considérer comme deux espèces distinctes. 


TN RME EU RRE TES (AN LE ID) Satrtreié bone" arr lént À EU Late de 
NOTES DU TRADUCTEUR. 


(S) Dans les Bulletins de la Société Philomathique de fé- 
vrier 1817 et d'avril 1818, j'ai décrit, sous le nom de Ditrichum, 
un nouveau genre de Synanthérées immédiatement voisin du 
Salmea et du Petrobium, avec lesquels il doit être rangé entre 
le Spilanthus et le V’erbesina, dans la tribu des Hélianthées , 
section des Prototypes. 11 diffère du Salmea qui a le clinanthe 
conique, et du Petrobium dont les calathides sont unisexuelles ; 
son clinanthe plane le distingue du Spilanthus, et sa calathide 
incouronnée le distingue du f’erbesina. Voici ses caractères gé- 
nériques. 

Dirricuum. Calathide incouronnée, équaliflore, pluriflore, 
régulariflore, androgyniflore. Péricline supérieur aux fleurs, cy- 
lindracé , irrégulier, formé de squames peu nombreuses, bi- 
sériées, diffuses; les extérieures très - courtes , inégales, in- 
appliquées , les intérieures très-longues , inégales, appliquées, 
squamelliformes , oblongues , coriaces , à sommet foliacé, 

acuminé. 


ET D HISTOIRE NATURELLE. 25 


acuminé. Clinanthe plane, garni de squamelles supérieures aux 
fleurs , squamiformes, terminées par un appendice subalé, mem 
braneux.Cypsèles comprimées bilatéraiement, obovales, glabres, 
muuies d'une aigrelte composée de deux longnes sqnamelluies 
opposees, l’une antérieure, l'autrepostérieure, filiformes , épaisses, 
à peine barbellulées. Corolles à tube herissé de longs poils mem- 
braneux. 

L'errear de Forster, qui a pris pour un ovaire supère, le nec- 
taire de ia fleur mâle du Perrobium , a été commise par Bergius, 
par Linué, par M. Decandolle, et par beaucoup d'autres bota- 
uistes, à l'égard du T'archonanthus camphoratus. C'est ce que j'ai 
démontre dans un Mémoire sur cet arbrisseau, lu à la Societé 
Philomathique, le 13 juillet 18:16, et publié dans le Balietin 
de cette Société, le mois suivant, ainsi que dans le Journal 
de Physique de mars 1817. 


L'observation de MN. Brown sur les anthères du Petrobium , 
confirme ce que j'avois avancé long-temps auparavant, dans 
mon secoud Mémoire. Je n’avois pu m'assurer par des obser- 
vations directes, que chaque loge de l’etamine des Synanthérées 
fut divisée en deux logettes par une cloison ; mais ayant observé 
cette cloison chez les Campanulacées, Lobéliacées, Dipsacées, 
Valérianées, Rubiacées , j’avois conciu par analogie qu’elle devoit 
exister chez les Synanthérées. (Journal de Physique, t. LXXVHE, 
pag. 275 et 283.) ! 


(S”) Il peut étre utile de rapporter à cette occasion une ob- 
servation que j'ai faite, dans l'herbier de M. de Jussieu, sur 
un échantillon de l’Eupatorium spicatum de Liamarck. J'ai re- 
connu que cet échantillon appartenoit à l'individu mäle d’une 
espèce dioïque, et que ses caractères génériques éloient abso- 
lument conformes à ceux du Baccharis. Ge prétendu Eupatoire 
est donc un vrai Baccharis. 


J'ai analysé aussi, dans le même herbier, une calathide du 
Sergilus scoparius de Gæœrtner, et je convieus qne ses caractères 
génériques ne diffèrent point ou presque point de ceux du Bac- 
charis. Cependant, autant que j'ai pu juger sur ceite calathide 
en mauvais état, il m'a paru qu’elle étoit composée de fleurs 
mäles centrales et de fleurs femelles marginales, ces dernières 
ayant la corolle ambiguëé et de fausses étamines. 

(£) M. Brown devoit peut-être ajouter que j'avois démontré 
depuis long-temps que la réunion du Baccharis et du Conyza 
en un seul genre éloit intolérable et monstrueuse, puisqu'ils 


Tome LXXXVIT, JUILLET an 1818, D 


26 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


n’apparliennent pas à la même tribu naturelle, le Baccharis 
étant une Astérée, tandis que le Conyza est une Inulée. 

Comme M. Brown n’a point donné les caractères génériques 
des vrais Conyza, je pense qu'on sera bien aise de retrouver 
ici ceux que Jai proposés dans le Dictionnaire des Sciences na- 
turelles , tome X, pag. 305. 

Calathide discoide, cylindracée; disque multiflore, régula- 
riflore, androgyniflore; couronne uni-bisériée, tubuliflore, fe- 
miniflore. Péricline à peu près égal aux fleurs, cylindracé; de 
squames imbriquées , extradilatées, linéaires, appliquées, nul- 
lement scarieuses ; les extérieures surmontées d'un petit appen- 
dice foliacé , inappliqué. Clinanthe plane, inappendiculé. Ovaires 
cylindracés, stries, hispidules, munis d’un bourrelet basilaire , 
et d'une longue aigrette de squamellules unisériées, entre-greffées 
à la base, tri-droites, filiformes, subtriquètres, régulierement 
barbellulées. Corolles de la couronne à limbe étréci en tube, et 
irrégulièrement très-quadrilobé. Anthères munies de longs ap- 
pendices basilaires filiformes , barbus. 

(U) L'Opuscule de M. Brown, imprimé à Londres vers le 
milieu de 1817, ne m'est parvenu que le 5 septembre ; et comme 
je ne savois pas un mol d’anglois , et que je n’avois d'autre secours 
qu'un Dictionnaire, j'ai mis un temps prodigieux à le traduire. 
Je rappelle ces faits, parce que, dans le Bulletin de la Socieié 

Philomathique de septembre 1817, j'ai proposé, sous le nom 
d'Oligocarpha, le mème genre que M. Brown propose sous le 
nom de Brachylæna. Ma description ne se trouvant pas d'accord 
avec la sienne, je crois utile de reproduire ici les caractères 

ue j'attribue à ce genre, et que j'ai complétés par lobservation 
de l'individu mâle, depuis la publication du Bulletin de sep- 
tembre 18197. 

OucocarpirA. (Tribu des Vernoniées.) Dioïque. Calathide fe- 
melle équaliflore, pluriflore, ambiguiflore. Péricline inférieur 
aux fleurs, cylindracé ; de squames imbriquées, un peu làches, 
subfoliacées , striées, obtusiuscules; les extérieures subcordi- 
formes , les intérieures ovales. Clinanthe petit, muni d'une, deux 
ou trois squamelles égales aux fleurs, foliacées , linéaires-lan- 
céolées. Ovaire couvert de glandes et de poils, et muni d’un 
bourrelet basilaire; aigretle roussätre, de squamellules pluri- 
sériées , très-inégales, filiformes, épaisses, irrégulièrement bar- 
bellulées. Corolle imitant parfaitement une corolle masculine, 
régulière, à lobes longs, linéaires, el contenant des rudimens 
d'étamines avortées.—Calathide mâle équaliflore , pluriflore , sub- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 27 


régulariflore ou palmatiflore. Péricline très-inférieur aux fleurs, 
subhémisphérique ; de squames imbriquées, paucisériées, peu 
appliquées, subcordiformes, coriaces, striées. Clinanthe petit, 
plane, presque toujours muni de quelques squamelles ou ru- 
dimens de squamelles. Faux-ovaire subcylindracé, hispide; aï- 
grette irrégulière, de squamellules inégales, filiformes, épaisses, 
barbellulées. Corolle arquée en debors, ordinairement palmée, 
toujours inégalement et profondément divisée en cinq lobes 
oblongs ou linéaires. Anthères munies d'appendices basilaires 
subulés. : ; ï 

(U*) M. Brown paroît ignorer que le genre dont il s’agit, 
ayant pour type le Bidens niveade Linné, avoit été déjà propose, 
avant Von Robr et Richard, par Adanson, qui le nomme Uca- 
cou. Il est vrai que sa description présente de faux caracteres, 
ce qui, d'après mes principes, ne permet pas de lui attribuer 
la découverte du genre; mais, d'après les principes contraires 
généralement adoptés, et professéssurtout par M. Brown, comme 
on l’a vu aux articles Craspedia et Tridax, on devroit préférer 
au nom de Melananthera, suivant l'ordre chronologique, 1°. celui 
d’Amellus, 2°. celui d'Ucacou, 5°. celui de Melanthera. 

Je dois faire observer que les caractères attribués par Adanson 
à son Ucacou, et qui s'appliquent fort mal au Welananthera , 
s’appliquent au contraire assez bien au Lipotriche de M. Brown, 
décrit dans sa note X. J'ai examiné, dans l’herbier de Surian, 
la plante qui y est nommée Chatiakelle, ei dont Adanson a fait 
son genre Ucacou, et je me suis assuré que la calathide de cette 
plante éloit radice. 

(V) Mon premier Mémoire sur les Synanthérées fut critiqué 
principalement comme beaucoup trop long, et comme offrant 
des considérations favorables à un système proscrit, celui des 
causes finales. C’est ce qui me détermina, l’année suivante, à 
ne donner qu’un précis du second Mémoire, et à en élaguer 
ce qui effarouche la Philosophie moderne. | 

Dans ce second Mémoire, qui est resté inédit, j'avois parlé 
de la rétraction des anthères; mais je considérois ce fait tout 
autrement que M. Brown. 

Je remarquois qu’en général, chez les Synanthérées, et sur- 
tout chez les Carduinées, la partie libre du filet de l’étamine 
avoit une tendance manifeste à s’arquer en dedans; que cette 
tendance étoit contrariée, durant la préfleuraison, par la pres- 
sion du limbe de la corolle, dont l'accroissement en largeur ne 
s'opère que très-peu avant la fleuraison; mais que l’arqüre avoit 


D2 


28 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
lieu à cette dernière époque par l'effet d’une sorte de mouve- 
ment d’élasticité, et non point du tout par irritabilité. 

Appliquant ensuile ces remarques à mon système favori des 
causes finales, je trouvois que la courbure des filets des éta- 
mines faisant descendre les authères, tandis que l'accroissement 
du style fait monter celui-ci, ces mouvemens des deux organes 
sexuels en sens contraires , favorisoient merveilleusement la dé- 
biscence des anthères et le dépôt du pollen sur les collecteurs 
dont le style est muni. 

En approfondissant davantage ce genre de considérations, 
j'étois conduit à voir une liaison entre l’arqüre des filets des 
étamines et la forme de la corolle. Chez la plupart des Synan- 
thérées, la partie inférieure et indivise du limbe de la corolle 
devient notablement plus large que le tube, à l'époque de la 
fleuraison, ce qui facilite l'arqüre des filets ; cela est surtout sen- 
sible chez les Carduinées, où cette arqüre est très-manifeste. 
Mais chez les Lactucées , le limbe demeure toujours presque 
aussi étroit que le tube ; et c’est en partie pour lever l'obstacle 
opposé à l'arqüre des filets par cette étroite dimension, que le 
limbe des Lactucées est fendu jusqu’à sa base. Les corolles labiées 
des Mutisiées et des Nassauviées peuvent donner lieu à la même 
remarque. 

Tels sont les détails auxquels je m'étois livré sur la rétrac- 
tion des anthères, en rédigeant mon second Mémoire. Mais, 
dans le Précis de ce Mémoire, lu à l'Institut et publié depuis, 
j'ai eu grand soin de les retrancher, et je me suis borné à dire, 
en décrivant les étamines des Carduinées, que la partie libre 
des filets étoit arquée en dedans. (Journ. de Physig., 1. LXXVIE, 
pag. 276.) Sub nt hs 

X)-Dans mon cinquième Mémoire, publié dans le Journal 
de Physique de février 1818, mais complètement terminé dès 
le mois de juin 1817, j'ai parlé (pag. 129) de l'irritabilité du 
style des Arctotidées, comme d’une observation nouvelle et faite 
par moi. J'ai pu m'exprimer ainsi à l’époque de la rédaction 
de ce Mémoire, puisque je n’ai connu l'observation de M. Ker 
qu’en la lisant dans l'Opuscule de M. Brown où elle est men- 
tionnée. 

(Y) M. Brown paroît croire que son genre JVeurolæna ne 
comprendequ’une seule espèce, qui est le Calea lobata de Swartz. 
J'en ai décrit une seconde, sous le nom de Calea suriani, dans 
le supplément du 6° volume du Dictionn. des Sciences naturelles , 
pag. 33. Cette espèce nouvelle, que je crois bien distincte, devra 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 29 


prendre le nom de Neurolæna suriant, si, comme il paroit juste, 
le nom de Calea est désormais consacré au genre ayant pour 
type le Calea Jamaicensis. é 

(Z) En général, les botanistes ont confondu jusqu'a présent, 
chez les Synanthérées, les fleurs mâles avec les fleurs herma- 
phrodites; désignant les fleurs mâles souvent par le nom de 
fleurs hermaphrodites , qui est faux, quelquefois par le nom 
d’hermaphrodites stériles, qui est absurde, rarement par le nom 
de fleurs mäles, le seul qui soit exact. 

De toutes les erreurs nées de celte confusion, la plus notable 
est sans doute celle que j'ai démontrée dans mon Mémoire sur 
le Tarchonanthus camphoratus déja cité dans la note S. MM. De- 
candolle et Desfontaines ont cru que cet arbrisseau devoit être 
rapporté à la famille des Thymélees, parce qu'ils ont pris le 
nectaire pour un oyaire supère; et celle singulière méprise a été 
causée par la fausse opinion qu'ils partageoient avec tous les 
autres botanistes , que les fleurs du T'archonanthus éloient her- 
maphrodites. 

Dans mon Mémoire sur cet arbrisseau , je remarquois que 
Gœrtner avoit décrit les fleurs comme hermaphrodites, à ovaire 
fertile ; et j'en concluois que l'espèce qu'il avoit observée, n'étoit 
peut-être pas la même que la mienne, qui est dioïique. Mais, 
depuis que j'ai observé les caractères de l'Oligocarpha ou Bra- 
chylæna, nouveau genre qui appartient à la mème tribu uatu- 
relle que le Tarchonanthus, et qui en est, selon moi, immé- 
diatement voisin, je ne doute plus que la plante de GϾrtner ne 
soit l'individu femelle du Tarchonanthus camphoratus. En effet, 
l'analogie est frappante entre les fleurs femelles de l'Oligocarpha et 
les fleurs de T'archonanthus figurées dans l'ouvrage de Gœrtner, 
tab. 166, fig. 12. 

(A) Les Metalasia de M. Brown ne sont pas les seules Sy- 
nanthérées dont les feuilles soient concaves et tomenteuses en 
dessus, convexes et glabres en dessous, et retournées sens dessus 
dessous par l'effet d’une torsion. J'ai observé ces singuliers ca- 
ractères dans quelques autres genres voisins de celui-ci, et surtout 
dans un nouveau genre que jai décrit sous le nom de Perotriche, 
dans le Bulletin de la Société Philomathique de mai 1818. 

(BB) Dans le Bulletin de la Société Philomathique de sep- 
tembre 1817, j'ai proposé, sous le nom de Petalolepis, un genre 
voisin du Cassinia, comprenant les Æupatoriun rosmarinifolium 
et ferrugineum de M. Labillardière, et caracterisé de la manière 
suivaute. . 


30 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIX 


Psrarorerts. (Tribu des Inulées.) Calathide incouronnée, équa- 
liflore, pauciflore, régularifiore , androgyniflore. Péricline su- 
périeur aux fleurs, radié, subcampanulé; de squames imbri- 
quées , les extérieures appliquées , ovales , scarieuses , à base 
coriace; les intérieures radiantes, longues, largement linéaires, 
surmontées d'un appendice pétaloïde. Clinanthe petit, plane , in- 
appendiculé, Ovaire court, muni d’un bourrelet basilaire, et 
d'une longue aigrette de squamellules égales, unisériées, entre- 
greflées à la base, filiformes , barbellulées. Anthères pourvues 
de longs appendices basilaires. 

Je ne répéterai pas ici ce que j'ai dit à la note U, pour prouver 
qu'a l'époque où j'ai publié mon Petalolepis, je ne pouvois 
pas connoitre l'Ozothamnus de M. Brown, qui venoil d’être pu- 
blié tout récemment. Mais je ferai remarquer que l’'Ozothamnus 
et le Petalolepis peuvent très-bien être considérés comme deux 
genres suflisamment distincls, et que rien n’empèche de les 
conserver l’un et l’autre, ou tout au moins d'admettre le Pe- 
talolepis comme sous-genre de l'Ozothamnus. 

(CC) Je doïs me féliciter d’avoir eu , en même temps que 
M. Brown, des idées analogues aux siennes sur l’ancien genre 
Calea. Voici comment je: me suis exprimé sur ce sujet dans le 
Supplément du sixième volume du Dictionnaire des Sciences na- 
turelles, pag. 32, lequel a été publié en avril ou mai 1817. 

« Je crois que le genre Caleaestencore (après enavoir éliminé 
» le Melananthera et le Sergilus) composé d'espèces hétérogènes ; 
» et qu'il faudroit les examiner toutes avec soin pour le ren- 
» fermer dans ses véritables limites, et le diviser peut-être en 
» deux genres, ou plutôt en deux sous-genres, bien différens 
» au moins par le port, dont l’un auroît pour type le Calea 
» lobata (Swartz), et l’autre le Calea aculeata (Labillardière). Mais 
» pour opérer avec succès une pareille réforme, il faudroit avoir 
» loutes les espèces en nature sous les yeux. » 

De toutes les espèces admises par les botanistes dans le genre 
Calea, quelques-unes qui se rapportent au Melananthera, au 
Sergilus où Baccharis , au Neurolæna, etau Cassinia, sont les 
seules que j'aie pu observer. C’est pourquoi je me bornois à in- 
diquer la formation de deux nouveaux genres, ou sous-genres, 
ayant pour types le Calea lobata et le Calea aculeata, au même 


instant où M. Brown proposoit ces deux genres, sous les noms 
de Neurolæna et de Cassinia. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 31 


MÉMOIRE 
SUR LES TERRAINS D'EAU DOUCE, 


Ainsi que sur les Animaux et les Plantes qui vivent 
alternativement dans les eaux douces et dans les eaux 


salées ; 
Par M. MARCEL pe SERRES. 


Les terrains formés dans l’eau douce, reconnus pour la pre- 
miere fois par Lamanon, ont pris une toute autre importance, 
depuis que MM. Cuvier et Bronguiart (1) ont montré que ces 
terrains avoient uue grande extension, et qu'ils meritoient au- 
tant d’être distingués par les êtres particuliers qu'ils renferment, 
que par la manière dont ils paroissent avoir été déposés. Ce- 
pendant , malgré les caractères qui distinguent ces sortes de 
terrains de ceux réellement formés sous les eaux marines, plu- 
sieurs observateurs ont révoqué en doute l'existence des pre- 
miers, en tant qu'ils ont été déposés dans un fluide particulier, 
et diffèrent du fluide unique général , dans lequel toutés les 
couches pierreuses ont été précipitées. Les naturalistes qui ont 
soutenu cette dernière opinion (MM. Faujas de Saint-Fond et 
Brard), l'ont fondée sur plusieurs faits, dont les conséquences 
ne paroissent contraires à l'existence des terrains formés d’une 
manière particulière dans l’eau douce, que parce qu'ils n'ont 
pas été rapporlés avec une grande exactitude (2). Examinons 
d'abord ces faits, voyons s'ils sont concluans dans l'hypothèse 
de MM. Faujas de Saint-Fond et Brard, ou s'ils ne seroient pas 
plutôt contraire à cette hypothèse. 

Les remarques qu'ont faites les deux observateurs que nous 
venons de citer, sont, les unes générales, les autres particu- 
Jières. Les premières tendent à prouver qu’il existe des coquilles 
marines au milieu des formations d’eau douce, tout comme des 


(1) Essai sur la Géographie minéralogique des environs de Paris. 
€) Annales du Muséum d'Histoire naturelle, tome XIV et XV, et Journal 
de Physique , tome LAXXII. 


52 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


fossiles des terrains non salés au milieu des formations les plus 
décidément marines. Mais si lon y avoit fait bien attention, 
on se seroit aisément aperçu qu'il n'existe jamais de coquilles 
marines confondues el mélées avec les produits de l’eau douce, 
et que ce n’étoit que faute d'avoir déterminé rigoureusement ces 
coquilles, qu'on s’étoit mépris sur le genre de leur habitation 
primitive. Eu effet, ces Cérites des terrains d'eau douce, an- 
noncées comme des coquilles marines par excellence, ne sont 
que des Potamides ou des espèces de Cérites, dont l'habitation 
constante est dans les fleuves, ou dans des eaux qui, quelque- 
fois plus salées que la mer, deviennent aussi, dans d’autres cir- 
conslances, tout-à-fait douces, ou du moins sans une salure sen- 
sible au goût et à l’aréomèetre. C'est donc parce qu'il est des 
espèces qui peuvent exister dans des liquides dont les propriétés 
sont si différentes, que faute de les connoitre, et de s'être 
douté qu’il y avoit de ces êtres intermédiaires, qu'on a cru mal 
à propos rencontrer des restes d'animaux décidément marins 
avec des habitans des terrains non salés. Il n’est donc pas éton- 
nant de voir les prétendus Cérites marines mélées avec les 
Bulimes, les Planorbes et les Lymnées, parce que toutes ces es- 
pèces peuvent avoir vécu dans le seul et même fluide. En effet, 
le genre Ceérite, tel du moins que Bruguière l'avoit établi, 
se compose d'espèces marines et d’eau douce. On a distingué 
ces dernieres sous le nom de Potamide, et les deux genres sont 
encore bien plus tranchés par l’habitude des animaux qui en 
font partie, que par l'importance extérieure des coquilles. Ainsi 
les principaux caractères des Cérites marines, sont d’avoir la 
bouche contournée et comme plissée , tandis que toutes celles 
reconnues comme fluviatiles, ont une bouche entière. Ce der- 
nier Caractère se retrouve dans la seule Cérite citée par M. Brard, 
au milieu des formations d’eau douce, et pourroit être déja assez 
concluant, Mais il y a bien plus ; cette espèce n’a d’analogie qu'avec 
le Ceritium radula figuré par Lister , et rangé par lui au nombre 
des coquilles fluviatiles. La conclusion la plus naturelle que l’on 
puisse tirer de ces faits, est certainement de regarder comme 
fluviatiles , les Cérites trouvées avec les Lymnées et les Pla- 
norbes , d'autant que ce genre d'habitation leur est commun 
avec d’autres espèces encore vivantes, et connues depuis long- 
temps. Du reste, quoique toutes les Potamides connues jusqu'a 
présent vivent près de l'embouchure des fleuves, il se pourroit 
aussi que certaines espèces, comme quelques Paludines, vé- 
cussent dans les eaux saumâtres et même plus salées que le 


bassin 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 55 


bassin des mers. Ces espèces seroient ainsi comme nos Paludines, 
intermédiaires entre les espèces d’eau douce et les marines. 
Quant à l'observation faite par les physiciens que nous avons 
déjà cités, de l'existence des fossiles d'eau douce parmi les for- 
malions les plus décidément marines, elle est plus fondée. Eu 
effet, les petites coquilles ou Paludines que l’on voit dans le cal- 
caire de Mayence, mélées confusément avec des Moules, peuvent 
fort bien être considérées comme provenant des eaux douces, 
mais avec cette particularité, que ces Paludines sont analogues 
à celles qui vivent aujourd'hui, tantôt dans des étangs commu 
niquant avec la mer, et tantôt dans des eaux lout-à-fait douces. 
En effet, des deux Paludines que l’on trouve fossiles à Mayence, 
l’une se rapproche du Ciclostoma simile de Draparnaud , l’autre 
du Ciclostoma acutum du même auteur, et ces deux coquilles 
ont un genre d'habitation intermédiaire entre les espèces marines 
et celles d'eau douce. Ce qui complète l’analogie, c’est que 
ces deux espèces fossiles se trouvent en très-grande abondance 
et forment, à Weissenau, des couches extrêmement étendues. 
Ainsi la grande quantité de ces Paludines fossiles que l'on voit 
dans des couches pierreuses, est une forte présomption pour 
croire qu'elles ont eu le même genre d'habitation que nos petites 
Paludines aujourd'hui vivantes, et qu’on trouve également en 
nombre immense dans les étangs où elles vivent. On a peu de 
doutes à cet égard , lorsqu'on compare la disposition que pré- 
sentent ces lies dans les lieux où les eaux se Heure 
en se retirant , avec celle que l’on voit aux Paludines fossiles. 
Les Paludines aujourd'hui existantes élant analogues aux es= 
pèces que l’on trouve fossiles, et vivant indifféremment dans 
des étangs salés qui communiquent directement avec la mer, 
ou dans des eaux tout-à-fait douces, il est tout simple de ren- 
contrer celles qui ont passé à l’état fossile au milieu des Moules 
et d’autres coquilles marines. Si ces Paludines s’y rencontrent, 
c'est parce que les espèces auxquelles elles appartiennent sont, 
ar leur manière de vivre, intermédiaires entre les espèces tout- 
a-fait d'eaux douces, et celles qui ne quittent jamais le bassin 
des mers. C’est donc faute d’avoir connu ces êtres intermédiaires, 
ou, pour mieux dire, d’avoir constaté ce point de fait, qu'on 
s’est mépris à cet égard. Mais un fait qui a paru bien plus con+ 
cluant encore contre l'hypothèse d'une formation particulière 
opérée dans l’eau douce, c’est la présence d’un certain nombre 
d'Hélices fossiles, au milieu de la formation bien marine de 
Weissenau. Pour se rendre raison de ce mélange de coquilles 


Tome LXXXVII. JUILLET an 1818. E 


\ 


34 JOURNAL DE PHYSIQUE, DÉ CHIMIE 


d’eau douce au milieu des espèces marines, on n’a au’à observer 
ce quise passe sur nos côtes. On y verra à côté des Moules et 
d'autres coquilles de mer, des Hélices, des Bulimes, des Maillots, 
et une infinité d’autres espèces d’eau douce qui y ont été trans- 
ortées. Pourquoi n’en auroit-il pas été de même à l’époque où 

jé Moules, les Paludines et les Hélices ont passé à l'état solide 
avec les couches où nous les observons maintenant? On doit 
d'autänt plus l’admettre, qu'il n’est pas très-rare de trouver des 
coquilles d’eau douce au milieu des formations bien réellement 
marines. Mais l'inverse n’est pas également vrai; en effet, on. 
n'a point encore observé de véritables coquilles marines, ou 
de restes d'animaux de mer au milieu des couches qui appar- 
tiennent à une formation d'eau douce. Lorsqu'on en rencontre, 
ce n’est jamais que dans les points de contact des deux sortes 
de terrain, ou lorsque ces fossiles y ont été charriés par des 
causes purement locales ou accidentelles. I est done vrai de 
dire que si l’on a cru pouvoir opposer quelques faits à cette loi 
qui paroit générale, c'est parce quel’ou à pris des coquilles 
réellement fluviatiles pour des espèces marines, comme des es— 
pèces marines pour des coquilles d’eau douce. 

Ce que nous venons de dire ne doit pas non plus faire 
supposer que tous les fossiles que nous découvrons dans nos 
continens, aient vécu dans un seul et même fluide, soit doux, 
soit salé. Cette hypothèse, avancée par M. Brard, est trop con- 
traire à tout ce que nous connoïissons d’une manière certaine, 
pour pouvoir être admise. On ne peut en eflet supposer que 
les Hélix, les Lymnées et les Planorbes aient jamais vécu dans 
le même liquide que les Vénus , les Huitres et les Moules, 
quoique certains mollusques aient un genre de vie en quelque 
sorte intermédiaire entre ces deux points extrèmes. Chaque 
genre, ou, pour mieux dire, chaque espèce, a des habitudes 
constantes qui tiennent à son organisation , et dont il ne s’écarte 
jamais que peu à peu, et encore lorsqu'il ÿ est contraint. 
Aussi voit-on tous les animaux en général revenir à leurs habi- 
tudes primitives, du moment que rien ne s y oppose. On peut 
même faire cette remarque, que plus les animaux sont simples 
en organisation, et moins les agens extérieurs ont d'influence 
sur eux. Les mollusques gastéropodes en particulier l'éprouvent 
d'autant moins, que leur test semble les en garantir ; aussi l’ob- 
servation directe nous apprend-elle que généralement ces ani- 
maux ont des habitudes constantes etqui ne paroïssent point varier. 
Les remarques que l’on a faites sur certaines Hélices d'Afrique 


ET, D'HISTOIRE NATURELLE, 35 


et du nord de l'Europe, annoncent du moins combien peu 
les agens extérieurs les plus opposés ont d'influence sur ces 
anlmaux. 

On a également beaucoup insisté sur ce fait singulier, que 
parmi les fossiles d’eau douce trouvés jusqu’à présent, on n’avoit 
Jamais vu des bivalves, ou des genres analogues aux Acéphales 
qui vivent aujourd'hui dans nos rivières et nos étangs. Celte 
objection étoit fondée à l’époque où on l’a présentée , parce qu'on 
avoit à peine observé les terrains qui appartiennent aux forma- 
tious d’eau douce. Mais lorsqu'on les a mieux étudiés , on a trouvé 
de ces bivalves, et M. Desmarest (1) a fait connoitre un petit 
Entomostracé qu'il a nommé Cypris faba, et qui est dans un 
nombre immense dans le calcaire friable d'eau douce des en- 
virons de Cusset, département de l'Allier. Nous-mêmes avons 
enfin reconnu des Cyclades fossiles du milieu des formations 
d’eau douce, et probablement trouvera-t-on d'autres genres à 
mesure que les observations se multiplieront. Peut-être aussi 
les coquilles bivalves fossiles d’eau douce, sont-elles plus rares 
que les univalves par plusieurs raisons. La première dépend de 
leur genre d'habitation , qui est presque toujours dans les rivières 
et rarement dans les mares, si ce n’est les Cyclades qui peuvent 
passer diflicilement à l’état fossile, à cause de la facilité avec 
laquelle ces coquilles se décomposent à l'air. C'est également 
une chose remarquable, de voir les Unio et les Anodontes, 
quoique plus solides que les Cyclades , se décomposer et s'altérer 
à l'air, avec la plus grande promptitude. Peut-être cette facile 
décomposition a-t-elle contribué pour beaucoup à rendre ces 
coquilles fossiles encore plus rares. On sait en outre que les mol- 
lusques gastéropodes voyagent davantage que les Acéphales, 
Presque lous stationnaires ou à peu près. Cette différence dans les 
habitudes , peut aussi avoir eu de l'influence sur la position qu'ont 
Prise les coquilles bivalves et univalves dans l'intérieur de nos 
Couches pierreuses. 

Ainsi les faits que l’on avoit cru si concluans contre l'exi- 
stence de terrains réellement formés dans l’eau douce, ne sont 
donc nullement contraires à ce genre de formation ;\ils s'accordent 
parfaitement avec lesidées générales quenousavonssur ces terrains, 
On peut même avancer pour aller au devant de toutes les ob- 
jections , que lorsque même on trouveroit des coquilles vraiment 


(2) Bulletin de la Société Philomathique, tome II, pag. 258, pl. 4, fig. & 
E 2 


36 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


marines, et des coquilles d’eau douce mêléesconfusémentensemble, 
on ne pourroit pas en conclure pour cela contre l'existence 
d’une formation particulière de couches pierreuses opérées dans 
l’eau douce. Enfin , on n’a pas voulu admettre avec MM. Cuvier 
et Brongniart, que dans les lieux où l’on trouve les coquilles 
marines et d’eau douce mélées confusément, existoit l'embou- 
chure des fleuves, ou bien que ces lieux n’étoient que les points 
de contact des deux sortes de terrains. Mais dans une question 
de ce genre , il auroit été essentiel avant de la croire résolue , de 
s’assurer par l'observation directe, si l'explication d’un fait bien 
reconnu, donnée d’ailleurs avec doute, étoit d'accord ou non 
avec ce que nos côtes nous présentent. C’est aussi pour parvenir 
à la solution de cette question importante, que nous avons exa- 
miné avec soin ce qui se passoit à l'embouchure des fleuves, 
et éludié l’état des côtes à différentes époques, quelquefois même 
après des orages. Nous avons surtout porté une altention parli- 
culière , à déterminer exactement les espèces de coquilles et de 
plantes qui vivent sur les côtes de la Méditerranée et à l’em- 
bouchure des fleuves , ainsi que dans les élangs saumätres et 
les rivières qui communiquent avec cette mer. I] nous parut éga- 
lement important de reconnoîlre jusqu'à quelle hauteur les 
coquilles regardées généralement comme marines, telles que les 
Cérites et les Moules, peuvent remonter dans les rivières, et 
enfin quel est le degré de salure que les Mollusques des eaux 
douces peuvent supporter sans périr. 

Quoique nous ayons rassemblé un grand nombre d’observa- 
tions à cet égard, nous ne les croyons pas encore aussi étendues 
que l’exigeroit une question de cette importance ; il nous paroît 
cependant qu’elles présentent un certain degré d'intérêt, et 
même d'utilité, en faisant envisager celte queslion sous son vé- 
rilable point de vue. 

Remarquons d’abord qu’un assez grand nombre de causes 
peuvent rendre telle ou telle espèce d'êtres habitans des terrains 
ou des eaux salées, et lui permettre, dans d’autres circonstances, 
de vivre dans des terrains ou des eaux exemptes de salure. Ainst 
les unes se plaisent dans les terrains salés, à cause du sable 
qui les couvre ordinairement; alors, c’est plutôt la nature du 
sol qui les y attire que toute autre circonstance , tandis que les 
autres ne s’y trouvent qu’à raison du sel dont le sol ou les eaux 
sont imprégnés. Mais lorsque le degre de salure augmente trop 
considérablement , les plantes ou les animaux finissent par périr 
à un degré déterminé pour chacun d'eux. Ce terme n’est pas 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 87 
même lrès-éloigné; car il n’est aucun animal, ni peut-êlre aûcune 
plante, qui résiste à une salure de &. 

Pour rendre cette question moins compliquée ; examinons 
d'abord l'influence des terrains salés sur les plantes, et voyons 
jusqu’à quel point celles reconnues comme maritimes ou comme 
marines, peuvent s'éloigner de ces sortes de terrains. Nous 
devons d'autant plus commencer notre examen par ces plantes 
maritimes et marines, que déjà M. Decandolle nous a fait part 
de ses propres observations, dans un Rapport très-intéressant 
sur un voyage botanique qu'il a exécuté dans les départemens de 
FOuest (1). 

Considérées par rapport à la nature du sol sur lequel elles 
vivent, les plantes peuvent être distinguées en maritimes et en 
marines. Les premières vivent aux bords de l’eau salée, tandis 
que les secondes ne peuvent croitre que dans l'eau salée elle- 
même. 

Les plantes maritimes vivent aux bords de l’eau salée par 
plusieurs causes , ou seulement en raison d’une de celles que 
nous allons désigner. Les unes y végètent à cause du sable qui 
s’y trouve, les autres, parce qu'elles ont leurs racines dans le 
terrain salé; enfin , les dernières peuvent se contenter de la 
petite quantité de sel qui leur arrive par l'atmosphère. Un certain 
nombre de plantes qui ne prospèrent que lorsqu'elles ont leurs 
racines dans le terrain salé , peuvent cependant continuer’ à vé- 
géter avec vigueur, en ne recevant d'autre sel que celui qui est 
fourni par l’atmosphère. De ce nombre est principalement le 
Polypodium marinum et certaines espèces de Lichens (2). 

D'après cette différence que l’on observe dans les plantes qui 
vivent aux bords de la mer, on voit que surtont pour celles 
qui ne s’y trouvent que par rapport au sable, il est fort dif- 
ficile de déterminer quelles sont vraiment les plantes maritimes. 
Cette distinction présente d’autant plus de difhcultés, qu'il en 
est une foule qui vivent également aux bords de la mer, et 
dans l’intérieur des terres. On ne peut pas en citer d’exemple 
plus frappant , que le Chiendent (Panicum dactylon) et V'Eryn- 
gtum campestre. Ces deux plantes se trouvent presque partout 
en France, et sont extrêmement abondantes sur les bords de 
la mer, Celles-ci rentrent évidemment dans la division de celles 


(1) Mémoires de la Société d'Agriculture du département de la Seine, t. X. 
(2) Le Physcia fastigiata et l Endocarpum complicatum de M. Decandolle 
(Flore françoise) croissent habituellement sur les rochers des bords de la mer. 


38 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


que nous avons dit n’exister au bord de la mer qu'a cause du 
sable qui s’y trouve. 

Ge qui prouve que plusieurs: causes peuvent permettre aux 
plantes maritimes de s’écarter des terrains salés, c’est qu'on voit 
les plantes essentiellement maritimes, s'éloigner de la mer à de 
fort grandes distances ; à lavérité, ce cas est beaucoup plus 
rare. On;peut cependant en citer des exemples nombreux. Ainsi, 
le Lagurus ovalus, ét le Salsola tragus se trouvent jusqu’à Lyon. 
Cette dernière s’est d'abordrencontrée à Lyon même près d'Enée, 
et des différens magasins de sel qui y sont en grand nombre. Ce 
qui est assez singulier, c’est qu'il ne croit plus guère mainte- 
nant que dans la verrerie de Pierre-Bénite. On pourroit se de- 
mander, si c'est réellement la présence de la potasse et de la 
soude qui y favoriseroit la végétation de cette plante. Il seroit 
fort curieux, pour $’en assurer, de lessiver les terrains où le 
Salsola tragus croît aujourd'hui, et de voir si lorsque ces deux 
alcalis y seroient épuisés, cette plante y prospéreroit encore. 
Du reste, nous m’avons pas une ‘grande confiance dans cette 
manière d'expliquer ce fait, quoique nous ayons vu cette opinion 
très-répandue dans Lyon; d'abord, parce que le Salsola tragus 
remonte également très-haut sur les bords de la Durance, où 
il n'y a point de magasin de sel; et en second lieu, parce que 
l'on peut faire croitre toutes les plantes maritimes dans des ter- 
rains où il n’exisle qu’une fort petite quantité de potasse et de 
soude. 

Le Scirpus holoschænus s'est.également montré à Vevay en 
Suisse, tout comme le Pin marilime entre Bergerac et Péri- 
gueux, et l’'Æphedra distachia à Cavaillon près d'Avignon. Le 
T'amarix gallica se trouve à une bien grande distance de la mer, 
puisqu'on le voit à Trèbes, près de Carcassonne; et enfin le 
Cochlearia officinalis croît et prospère sur la montagne de Neou- 
vielle dans les Hautes-Pyrénées, à vingt myriamètres directs de 
la mer, et à environ seize cents mètres au-dessus de son ni- 
Veau, ainsi que l'observe M. Decandoile dans le Mémoire que 
NOus avons déjà cité. Il nous seroit facile de rapporter d'autres 
Observations de ce genre, et par exemple, de faire mention du 

lantago gramines et de l'Atriplex rosea qu'on trouve près de 
Clermont en Auvergne, ainsi que de l’Euphorbia gramines et 
Chamæsice qui viennent aux portes de Lyon. On pourroit peut- 
être remarquer au sujet du premier fait, que la plupart des 
laves de l'Auvergne contiennent de l'acide muriatique. Pour fa- 
ciliter l'explication du second, quelques botanistes de Lyon ont 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 59 


pense que les graines des plantes maritimes qui se trouvent près 
de cette ville, y ont été apportées par les trains de sel. ‘Mai 


comme ces sortes de plantes se rencontrent , non pas seulement 


à Lyon, mais dans une infinité de lieux où jamais il n’est venu 
de train de sel, comme à Neouville dans les Pyrénées où croît 
le Cochlearia officinalis, cette opinion me paroïit peu -admis- 
sible, d'autant qu’elle n’explique nullement comment ces plantes 
ont pu prospérer dans les lieux où on les trouve maintenant. 
Il est au contraire tout naturel de rencontrer dans les terrains 
salés, ou dans les lieux où il y a une grande masse d’eau salée 
en évaporation ; les plantes qui croissent aux bords de la mer, 
puisqu'il y existe les élémens nécessaires à la végétation de ces 
plantes. C’est ainsi qu’on trouve le Poa salina dans presque toutes 
les salines de la France, et que le Salicornia herbacea et V'Aster 
trifolium croïissent avec vigueur dans les marais salés qui existent 
entre Yeuse et Moyenvic. De même, il n’est pas étonnant de 
voir des plantes maritimes dans des terrains peu salés, mais 
qui autrefois l’ont probablement été davantage, ces plantes ayant 
pu s’accoutumer par degré au changement de la nature du sol; 
c’est ainsi que dans le lieu dit les Salins aupres de Clermont, 
on trouve le Poa salina, V Atiplex hastata ei le Glaux maritima, 
ayec quelques autres plantes maritimes. à 
Quant aux plantes marines proprement dites, nous remar- 
querons que nous n'avons fait d'observations que sur celles de 
la Méditerranée, car il faut bien remarquer que toutes celles 
qui vivent dans l'Océan, où il y a flux et reflux, sont tout-à-fait 
différentes des nôtres. Ainsi, les Fudus vesiculosus, serratus que 
l'on avoit cru communs aux deux mers, n'existent que dans l'Océan 
et point dans la Méditerranée, ainsi que l’a fait remarquer M. De- 
candolle. De même, on a indiqué certaines plantes comme ma- 
rines , et qui,ne le sont nullement, telle est, par exemple, le 
Nayas marina. Enfin, il est un certain nombre de plantes ma- 
rines qui vivent dans des étangs moins salés que la mer, et 
qui, par conséquent, prospèrent dans des éaux dont la salure 
peut souvent être très-foible. Le Rüpia maritima , Ve Zanichellià 
palustris, certaines espèces de Chara et de Ceramium sont de 
ce nombre. Lorsque par une suite de l’évaporation qui a lieu 
dans l'été, ces étangs deviennent plus salés, alors ces plantes 
finissent par périr à un degré déterminé pour chacune d'elles, 
tout comme les animaux. Nous remarqueréns enfin, que les Algues 
se trouvent uuiquement dans le bassin des mers près dés côtes, 
et que lorsqu'on s'éloigne des côtes, elles disparoissent pèu’à 


äo JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


peu et sont remplacées par diverses espèces de Litophytes et 
de Cératophytes, qui, outre le besoin de l’eau salée, exigent 

paÿytes, qui, e LE 16€, EXIS 
encore une grande profondeur dans le liquide salé. 


Ce que l’on observe pour les plantes et les Zoophytes, a 
lieu également pour les animaux, surtout pour les poissons, dont 
certaines É oe exigent , non-seulement dans les eaux un cer- 
tain degré de salure, mais encore une grande masse de liquide, 
quittant peu les profondeurs des mers. Quant aux plantes ma- 


rines, elles cessent dans toutes les profondeurs qui dépassent 
trente ou quarante brasses. 


D'après ce que nous venons d'observer, il s’ensuit que cer- 
taines plantes marines peuvent, dans de certaines circonstances, 
s'éloigner des lieux et des eaux salées; quant aux plantes pro- 
prement marines, elles ne s’écartent guère des bords de la mer. 
Leur éloignement , quelque peu considérable qu'il soit, tient 
toujours à ce que les courans salent plutôt le lieu où on les 
voit que ceux qui les avoisinent. Du reste, les plantes marines 
propres à la Méditerranée, ne s'étendent jamais au-delà d'un 
quart de lieue dans d’autres eaux que celles de la mer; ces 
eaux sont toujours assez salées pour ne pas être potables, et 
l'aréomètre n'y marque guère moins de 1,50 à 2. Cependant 
lorsque par diverses circonstances leur salure s’afloiblit trop, 
toutes ces plantes finissent peu à peu par périr. 


Nous terminerons ces remarques par une observation qui n’a 
rapport qu'aux plantes marines propres à la Méditerranée. Les 
côtes qui avoisinent celte mer sont peut-être plus difficiles à 
observer que toutes les autres, à raison des étangs saumâtres 
qui s’y trouvent en si grand nombre. Ces étangs communiquant 
souvent avec l’intérieur des terres par des bas-fonds, salent des 
espaces de terrain plus ou moins étendus, au point qu’on voit 
quelquefois assez loin des côtes, un certain nombre de plantes 
marines. Ces plantes pourroient fort bien tromper un obser- 
valeur inattentif, si l’aréomètre et le goùt de ces terrains et 
des eaux qui les recouvrent, ne l’averüssoient de leur nature. 
Le fond vaseux des étangs a toujours une grande influence sur 
la vigueur des plantes marines qui y croissent, en leur four- 
nissant un appui plus solide que le fond sablonneux des mers; 
il ne contribue pas peu à prolonger leur existence à mesure 
que la salure des eaux diminue. I] nous paroïit même que ce 
sol exerce une certaine influence sur les animaux marins; c’est 
ce que nous ferons bientôt remarquer. 


Les 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 4 


Les observations que nous avons faites jusqu’à présent, sur 
les plantes marines et maritimes, peuvent s'appliquer également 
aux animaux marins, et principalement aux Mollusques. D'abord 
en observant avec soin les Mollusques qui habitent les terrains 
salés, ou pour être plus exact, les côtes de la Méditerranée, 
on voit, 1°. que les uns vivent indifféremment et sur les côtes 
et dans l’intérieur des terres; 2°. que les autres n’abandonnent 
presque jamais, ou du moins s’écartent fort peu des terrains 
salés; 3°. que certains vivent indifféremment dans les eaux de 
la Méditerranée et dans les eaux saumätres; 4°. enfin qu'il en est 
un certain nombre qui paroissent ne jamais abandonner le bassin 
des mers, ou du moins remontent à si peu de distance dans 
les rivières qui y affluent, que l’on voit qu'ils ne s'y trouvent 
que parce que les courans marins arrivent plutôt dans cette partie 
qu'ailleurs. 

Examinons maintenant en particulier, chacune des espèces 
qui appartiennent à ces quatre genres d'habitation dont nous 
venons de parler. Un grand nombre de Mollusques bien évi- 
demment propres aux terrains non salés, se trouvent cependant 
dans les terrains salés; de ce nombre sont les Æelix aspersa, 
cespitum , vermiculata, rhodostoma, variabilis, striata, ainsi que 
les Bulimus acutus et ventricosus. I ne faut pas croire que ces 
espèces y vivent accidentellement, car plusieurs d'entre elles y 
existent dans un nombre immense, surtout l’Æelix variabilis, 
rhodostoma et aspersa; aussi trouve-t-on les dépouilles de ces 
espèces mélées confusément avec les coquilles les plus évidem- 
ment marines, comme les J’énus , les Solen et les Mactra, etc. 

Ces faits pourront peut-être servir à expliquer la formation 
de ces brèches d’eau douce, qui existent dans différentes parties 
du globe sur le bord même de la mer, et dans lesquelles on 
trouve des coquilles terrestres souvent en très-grande abondance. 
Les brèches de Nice paroissent celles qui en contiennent le plus; 
du moins dans cette localité observe-t-on un grand nombre 
d'espèces différentes. Ces coquilles y sont pour la plupart ag- 
glomérées avec divers ossemens, et ont conservé presque toutes 
la nature intacte de leur test; elles sont même si peu altérées, 
qu’elles offrent encore toute la partie animale. Il n’en est pas 
de même de celles que l’on observe fossiles dans les brèches 
osseuses de Sète, de Gibraltar, de Corse et de Dalmatie, et 
presque toujours ces coquilles y sont à l’état pierreux. 

Ce qui prouve que le mélange intime des fossiles d’eau douce 
et de la mer P'radque pas que les êtres auxquels ces dépouilles 


Tome LXXXVII. JUILLET an 1818. F 


42 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


ont appartenu, ont vécu dans un seul et même liquide, c’est ce 
qui se passe encore sous nos yeux sur les côtes de la Médi- 
terranée, et principalement dans les environs de Nice (1). La 
mer y agissant sans cesse sur un calcaire marneux à Gryphytes 
et à Nautilites, qui lui sert de barrière, détache continuelle- 
ment du rocher ces pétrifications. Une fois qu’elle les a détachées 
elle les arrondit et les méle avec les coquilles marines actuel- 
lement vivantes , et les mollusques terrestres qui y sont entraînés 
par les eaux pluviales et le courant des fleuves. Ce mélange 
d'une nature si particulière, se dépose avec le sable, les galets 
et l'argile du rivage dans les creux que présentent les couches 
anciennes, et forme de nouveaux dépôts qui seront peut-être, 
pour les races futures, des sujets énigmatiques de méditation. 
Je le demande à ceux qui prétendent que les Planorbes et les 
Lymnées ont vécu autrefois dans le méme liquide que les Huiîtres 
et les Moules, s'ils ont jamais rien observé de plus concluant 
en faveur de leur opinion, que le seroit ce mélange , si on 
ne le voyoit s'opérer sous nos yeux, et qu'on püt avoir le moindre 
doute sur la manière dont il se forme. Nous verrons encore 
combien de faits s'opposent à ce qu’il en ait été ainsi; et pour 
admettre celte hypothèse, il faudroit supposer que les lois de 
la nature vivante éloient jadis totalement opposées à celles 
qu'on leur reconnoit maintenant. 

Quant aux Mollusques à coquilles qui n’abandonnent presque 
jamais les bords des côtes, ou les terrains maritimes, nous 
n’en Connoissons pas un grand nombre ; l'Jelix albella est 
peut-être la seule espèce que nous puissions en citer. Il n’en 
est pas de même des Mollusques qui vivent dans les eaux sau- 
mâlres. Les uns, ne paroissant jamais dans la mer, ont été crus 
totalement propres aux eaux douces. Les autres, vivant éga- 
lement dans les eaux saumätres, quelquefois d’un degré de sa- 
lure extrêmement foible et dans la mer, ont été au contraire 
regardés comme entièrement marins. Parmi les premiers, on 
peut comprendre les Paludines de Maguelonne , que Draparnaud 
a décrites sous le nom de Cyclostoma acutum et V Auricula myo- 
sotis (2). Le Cyclostoma truncatulum pourrait fort bien être dans 
ce cas, Car je ne suis pas éloigné de penser qu'il vit également 
dans la mer. On ne peut pas eependant regarder lout-à-fait 


(1) Journal de Physique, tome LXXVIT, septembre 1813. 
(2) Histoire des Mollusques de la France, pag. 40, pk 1 fig. 25. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 45 


comme une preuve de ce fait, la présence de celte coquille 
au milieu des Corallines de Corse, présence observée par MM. Syon- 
net et Faure Biguet (1), puisqu'il est si ordinaire de trouver des 
coquilles d’eau douce mélées confusément avec les Corallines, 
les Ulves et les Fucus. Ainsi ce genre de preuve ne peut avoir 
aucune sorle de certitude. 

Les Mollusques qui vivent également dans la mer et les eaux 
saumâtres quelquefois peu salées, sont en grand nombre. L’es- 
pèce la plus commune et celle qui périt le plus tard à mesure 
que la salwre des eaux diminue, est le Cardium glaucum. Les 
Tellina planata et solida peuvent encore être comprises avec 
celle-ci; mais ce qui est bien plus remarquable, c’est de voir 
à une certaine distance de la mer, plus de 3 kilomètres et dans 
des étangs dont le degré de salure étoit à moins de 2°, des 
Vénus, par exemple le decussata de Linné, ainsi qu’une espèce 
voisine du Vénus gatan d'Adanson et l'Ostrea edulis de la Mé- 
diterranée. Ces coquilles se trouvent dans le lieu dont nous 
parlons, dans une telle abondance , qu’on les ramasse pour les 
manger. Tous ces mollusques y sont mélangés avec des Tellines, 
et au milieu de toutes ces espèces, vivoient des Oscabrions, des 
Aclinies et des Astéries. Les premiers de ces animaux, bien 
cerlainement marins, comme tous les Radiaires, pourroient-ils 
s’accoutumer peu à peu à vivre dans des eaux légèrement sau- 
mätres ? c'est ce que je n’oserai assurer. Du reste, ces différentes 
espèces n’ont point péri l'hiver dans les lieux où je les ai ob- 
servées , quoique d’un autre côté la salure des eaux où ils vi- 
voient füt beaucoup diminuée à cette époque. Il faut cependant 
observer qu'il est probable que si l’on voit certains Mollusques 
marins ne jamais abandonner le sein des mers, cela peut tenir 
à deux causes indépendantes de la salure des eaux, c'est-à-dire 
a une grande masse d'eau qui leur est nécessaire , ou bien au 
fond sablonneux qui convient à leurs habitudes. Ceux, au con- 
traire, qui n'ont pàs besoin pour exister d'une grande masse 
d’eau, ni d’un sol sablonneux , mais qui préfèrent un fond va 
seux, s'éloignent plus facilement du bassin des mers pour re- 
monter dans les rivières, ou plutôt pour vivre dans des mares 
plus ou moins saumätres. Probablement aussi ces diverses es- 
pèces de Mollusques périssent toutes à des degrés différens dans 
Ja diminution de la salure des eaux; mais pour décider ce point 


{1) Journal de Physique, tome LXXII, pag. 42. 


44 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


important, mais délicat, nous avons besoin encore d'un plus 
grand nombre d'observations. 

Nous avons déjà fait remarquer qu’il existoit un certain nombre 
de Mollusques à coquilles , qui paroïssoient ne jamais abandonner 
le bassin des mers; de ce nombre sont certainement ceux qui 
ont besoin d’un grand volume d’eau pour vivre, et toutes les 
coquilles pélasgiennes sont dans celte cathégorie. Mais il en est 
une foule d’autres qui, quoique vivant aux bords des côtes, 
et se tenant constamment près du rivage, s’éloigient cependant 
fort peu du bassin des mers; tels sont pamexemplefdans la Mé- 
diterranée, les Solens comme V’agina, Ensis,.Gladius, Siliqua, 
Strigilatus, le Cerithium asperum de Bruguières, Mactra stul- 
torum, avec diverses espèces d’Arca. Certaines espèces qui s’é- 
loignent peu des mers, et qui périssent même dès que la salure 
des eaux diminue d’une manière sensible, s’en trouvent quel- 
quefois écartées, mais ceci n’est qu’accidentel. Les Moules sont 
dans ce cas avec les Lepas, et l’on peut ètre presqu’assuré de 
trouver toujours ces Mollusques sur les rochers mouillés par 
des eaux salées en communication directe avec la mer. Cet éloi- 
gnement de la mer est toujours fort peu considérable. Les Moules 
m'ont paru en effet n'être jamais à plus d’un quart de lieue 
de la mer , et celles que j'en aï vues les plus écartées , sont celles 
que l’on voit sur la jetée pratiquée à l'embouchure de l'Hérault 
auprès de la ville d'Agde. Du reste, ainsi que nous l’avons déjà 
observé , il n’est pas rare de trouver à côté de ces Moules, 
des coquilles d'eau douce, soit qu’elles aient été transportées 
dans le bassin des mers par les fleuves, soit qu’elles aient été 
amenées de la côte même dans un moment de grand afflux de 
mer qui les rejette ensuite sur le rivage. 

Les faits que nous venons de rapporter semblent prouver 
qu'il est une foule de degrés ou, si l'on veut, de circonstances 
qui modifient le besoin d'eau salée qu'exigent certains Mollus- 
ques aujourd'hui existans et regardés comme marins. Ces faits 
prouvent encore que la question de savoir si telle ou telle 
espèce est marine Ou d'eau douce, n'est pas aussi simple qu’on 
le croit généralement , et que mème par l'observation directe , 
il est des cas où il est bien difficile de prononcer avec une 
complète certitude. S'il est des espèces que l’on doit regarder 
comme marines, et qui s’éloignent cependant des eaux ou des 
terrains salés, celles reconnues comme d’eau douce peuvent- 
elles également se rapprocher des lieux ou des eaux salés? 

Nous avons vu qu’on rencontroit cerlains Mollusques ter- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 45 


restres dans les terrains salés; mais je ne connois aucun exemple 
de Mollusque vivant ordinairement dans l’eau douce , et qui se 
trouve également dans une eau salée à un certain degré. A la 
vérité, ceux qui vivent dans des eaux saumätres, peuvent être 
regardés comme intermédiaires entre les Mollusques vraiment 
marins et les Mollusques d’eau douce. D’après ces faits, on 
Pourroit se demander comment il est possible de trouver. dans 
des couches pierreuses, des coquilles marines et d’eau douce 
mélangées confusément ensemble , en n’admetlant pas qu’elles 
s’y rencontrent parce que les lieux où on les voit étoient l'em- 
bouchure des fleuves; ou le point de contact des deux sortes 
de terrain. A cela, on peutrrépondre que les côtes de la Mé- 
diterranée (je ne sais s’il en est de même de celles de l'Océan) 
rendent assez bien raison de ce fait. Si les côtes de la. Médi- 
terranée qui sont au-dessus du Rhône (il en est probablement 
ainsi sur les côtes qui recoivent d’autres fleuves), venoient à se 
consolider et passer à l’état de couches pierreuses, on y trou- 
veroit, jointes et mélangées en bancs réguliers, qui n’indique- 
roient nullement des alluvions , un grand nombre de coquilles 
tout-à-fait marines avec d’autres d’eau douce ou terrestres. Il 
se pourroit que les coquilles que l’on trouve dans les brèches 
osseuses des côtes de la Méditerranée, eussent été refoulées dans 
les lieux où on les observe aujourd'hui, par une élévation mo- 
mentanée du niveau de cette mer. M. Rüllot , qui a observé avec 
beaucoup de soin la formation des brèches osseuses des environs 
de Nice, semble assez porté à adopter cette hypothèse. Mais ce 

ui pourroit paroilre encore plus singulier, ce seroit de trouver 
die côté des coquilles marines analogues à celles qui vivoient 
dans la mer voisine, tandis que certaines espèces. d’eau douce 
ne paroitroient point avoir leurs représentans dans les lieux où 
on les verroit à l'état fossile , mais seulement à une assez grande 
distance. C’est ainsi que dans un espace de plus de trente lieues, 
nous avons observé sur les côtes de la Méditerranée, les Pupa 
secale , bords ventricosa , dolium , doliolum, avec les Helix 
nemoralis, strigella, rolundata el fruticum, espèces qui vivent 
toutes dans des régions plus froides, et quelques-unes même 
seulement dans les Alpes. Ces coquilles entraînées de la Durance 
dans le Rhône, sont charriées jusque dans la mer, qui les re- 
jette ensuite sur le rivage. Elles y arrivent souvent très-intactes 
et sans avoir perdu leur couleur. 

En les rejetant sur le rivage, les ondes les mélent confu- 
sément avec les Solens, les Cérites, les Moules et les Cardium , 
ainsi qu'avec divers Mollusques d’eau douce qu'on trouve à peu 


46 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


de distance de nos côtes , tels, par exemple, que les Pupa po- 
lyodon , tridens , Succinea amphibia , Lymneus palustris et Pla- 
norbis comeus. Je ne sais si je me trompe, mais il me semble 
que ce fait indique fort bien, comment il est possible que les 
Ambrettes et les Zymnees se voient quelquefois réunis à - l’état 
fossile, dans la même couche pierreuse , avec les Moules, les 
Gérites et les Vénus. Aussi MM. Cuvier et Brongniart n’ont-ils 
pas caractérisé les terrains d’eau douce uniquement par la pré- 
sence de quelques coquilles d’eau douce , mais bien par la grande 
prépondérance de ces productions. Nous le répétons encore, 
on n’a jamais observé au milieu de la formation d’eau douce, 
des coquilles marines, mais seulemént des coquilles d’eau douce 
au milieu des formations marines, ce qui s'accorde parfaitement 
avec les’ faits que nous venons de rapporter. 

Ce que nous avons dit des Mollusques, peut également s’ap- 
pliquer aux poissons, avec cette différence cependant, que cer- 
taines espèces marines remontent très-loin dans les rivières et 
même quelques-unes à des époques réglées. L'exemple que nous 
fournissent les Saumons, les Esturgeons, les Muges et les 
Harengs, sont trop fameux et trop connus, pour qu'il soit né- 
céssaire de faire autre chose que de les rappeler ici. M. de Hum- 
boldt en a également observé un grand nombre remonter très- 
avant dans les fleuves d'Amérique. Il ne paroït pas cependant 
que les poissons d’eau douce s’avancent beaucoup dans les ri- 
vières exposées aux Courans des mers ; en eflet, la plupart pé- 
rissent lorsqu'on les met dans des eaux saumätres. Ceux qui 
vivent alternativement dans l’eau douce et l’eau salée sont, pour 
ainsi dire, intermédiaires entre les poissons marins et ceux d’eau 
douce. Les mêmes accidens pourroient donc faire rencontrer 
dans les mêmes formations, des poissons appartenant à ces deux 
genres d'habitation ; mais ceci ne peut-être que beaucoup 
plus rare; on en a une preuve dans les diverses formations 
où l’on a trouvé des poissons fossiles. Il faut pourtant l'avouer, 
il est très-difficile de s'assurer de ce dernier fait, d’abord parce 
qu'il est peu de genres de poissons où il n’y ait des espèces 
marines et des espèces d’eau douce, et enfin parce tous les 
poissons fossiles trouvés jusqu'ici, paroissent généralement dif- 
férer par leurs caractères spécifiques , de ceux qui vivent encore 
aujourd’hui. 

Mais pour ne pas toujours généraliser dans une question du 
genre de celle qui nous occupe, citons quelques faits parti- 
culiers à l'appui de tout ce que nous avons déjà dit. 


(La suite au Cahier prochain.) 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 47 


NOTE ADDITIONNELLE 
AU MÉMOIRE SUR LE POULPE DE L'ARGONAUE ; 
Par H. DE BLAINVILLE. 


Dgpuis la rédaction de mon Mémoire sur le Poulpe de l’Ar- 
gonaute, dans lequel, comme on a pu le voir, j'ai cherché à 
démontrer que cet animal est véritablement parasite dans la co- 
quille où on le trouve, M. John Cranch, zoologiste de la mal- 
heureuse expédition anglaise du Congo , a levé tous les doutes 
qui pouvaient resler à ce sujet, par la découverte d’une nou- 
velle espèce de Poulpe parasite, dans une coquille du même 
genre. Mon ami, M. le Dr Leach, s’étayant , avec jusle raison, 
de l'opinion de l'honorable sir Jos. Banks, noble patron des 
sciences naturelles en Angleterre, a publié un. Mémoire sur le 
même sujet, dans les Z'ransactions Plulosophiques pour 1817, 
dans lequel il adopte la même manière de voir que moi et telle 
que je la lui avois communiquée dans une de mes Leltres ; 
dans son dernier voyage à Paris, il a eu la complaisance de 
confier à mes observations un individu recueilli par M. Cranch. 
Pour compléter mon Mémoire, je vais d’abord rapporter ce 
que nous devons à ce zélé voyageur, ensuite je donnerai une 
description détaillée de lindividu que j'ai dessiné et décrit 
avec soin. Voyez Cah. de juin, fig. 2A et B. 

Dans le golfe de Guinée on prit, au moyen d'un petit filet 
qui étoit toujours suspendu aux côtés du vaisseau , plusieurs 
individus d’une espèce de Poulpe qui nageoiïent dans une petite 
coquille d’Argonaulte à la surface de la mer. Le 13 juin, M, Cranch 
en placa deux individus bien vivans dans un vase rempli d’eau 
de mer; les animaux sortirent très-promptlement leurs bras, et 
se mirent à nager au-dessus etau-dessous de lasumface , absolument 
avec tous les mouvemens des Poulpes communs dans nos mers; 
par le moyen de leurs suçoirs ils s’attachoïent fortement à tout 
corps avec lequel ils pouvoient se trouver en contact; et lors- 
qu’ils adhéroient aux parois du vase, la coquille pouvoit être 
très-aisément abandonnée par les animaux. Ils avoient la faculté 
de se retirer entièrement dans leur coquille j'ainsi que de l’aban- 
donner entièrement. Un des individus mis en expérience quitta 
sa coquille et vécut ainsi plusieurs heures nageant autour el sans 


48 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


montrer la moindre inclinatiôn pour y rentrer; d’autres l'avoient 
abandonnée dans le moment où ils furent pris dans le filet. 
Du reste, ces animaux changeoïent de couleur, comme les autres 
espèces de Brachioceéphalés, c'est-à-dire de Sèches et de 
Poulpes (1). 

M. le Dr Leach ajoute ensuite à celte note extraile des manus- 
crits de M. Cranch, quelques observations sur cetteespèce de Poulpe 
qu'il regarde avec raison comme parfaitement distincte de toutes 
celles jusqu'ici connues; il la place dans le genre Ocythoë établi 
par M. Rafinesque, pour une espèce de Poulpe nu; mais ce 
zoologiste n’a eu aucunement l’idée de rapprocher du Poulpe, 
habitant de l’Argonaute, son Ocythoë, comme on pourroit le 
croire, d’après plusieurs passages du Mémoire de M. le D: Leach, 
et entre autres , de celui où il dit : « Sir Joseph Banks et quel- 
ques autres naturalistes ont toujours pensé que le Poulpe que 
l'on trouve dans la coquille de l’Argonaute , en est un habitant 
parasite ; et M. Rafinesque , que sa situation sur les bords de la 
Méditerranée a mis dans la plus favorable position pour étudier 
cet animal et pour observer ses habitudes , l’a regardé comme 
devant former un genre nouveau, voisin des véritables Poulpes 
d’Aristote#et demeurant parasitement dans une coquille. » Le 
fait est que M. Rafinesque, en établissant son genre Ocythoë, 
dans son petit ouvrage intitulé : Précis des Découvertes et des 
travaux somiologiques ou zoologiques et botaniques de CG. S. Ra- 
finesque, Palerme, 1814, ne parle en aucune manière de l’Ar- 
gonaute (2); mais en consultant cet ouvrage , mon Mémoire 


(:) C'est réellement une chose fort remarquable, et dont jusqu'ici l’on n’a 
pas encore essayé d'explication, que ce changement, sinon de couleur de ces 
espèces d'animaux, du moins de la variation continuelle dans la grandeur, la 
forme et l'intensité des taches de couleur purpurine, qui ornent la peau et 
surtout celle du dos de ces animaux ; ces taches sont continuellement en mou- 
vement, décroissant peu à peu jusqu'à disparoître presque entièrement, et re- 
naissant ensuite jusqu'à cesqu'elles aient atteint leur plus grand diamètre. On 
voit évidemment, à ce qu'il m'a semblé, que cela tient à un fluide coloré 
répandu dans des aréoles; maïs est-il en rapport avec celui qui circule dans 
les vaisseaux de l'animal? Cela n'est pas probable, puisque celui-ci n’est pas 
coloré en rouge. (R.) 

(2) Voici ce qu'il dit: G. Oythoë, huit anténopes (tentacules ); les deux 
supérieurs ailés intérieurement, à suçoirs intérieurs pédonculés, réunis par 
l'aile latérale, aucune membrane à la base des anténopes. 

O. tuberculata : ventre tuberculeux, dos lisse, anténopes de la longueur du 
corps, carénés extérieurement, à deux rangs de suçoirs, hwt suçoirs autour 
de ia bouche, 

, 
etant 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 49 


étant déjà presque terminé, je crus reconnoitre que l'animal dont 
parle M. Rafinesque, formoit son genre Ocythoë, avoit beau- 
coup de rapports avec le Poulpe trouvé communément dans 
l’'Argonaute, et j'en conclus, comme on a pu le voir dans mon 
Mémoire, que puisque M. Rafinesque ne parloit en aucune ma- 
nière de coquille, il falloit que ce Poulpe, ou du moins une 
espèce fort voisine, n’en füùt pas toujours pourvu; ce qui me 
fournit un des argumens les plus forts que j'aie employés pour 
le soutien de mou opinion. Et comme en réponse à ma demande 
de renseignemens que m'avoit faite le D" Leach à ce sujet, je 
lui _exposai les raisons ‘qui me ramenoient à l'opinion que jai 
émise, et par conséquent la découverte d’un Poulpe nu à ten- 
tacules supérieurs palmés, faite par M. Rafinesque , el établie 
en un genre particulier, mon ami aura pu être induit en er- 
reur, et croire que c’étoit M. Rafinesque qui avoit eu le pre- 
mier l'idée de rapprocher son Ocythoë du Poulpe de l'Argonaute. 

Mais passons à la description de cette nouvelle espèce de 
Poulpe ou d'Ocythoë, que M. Leach a dédiée à M. Cranch sous 
le nom d’Ocythoë de Cranch; elle est représentée dans la planche 
du mois de juin, fig. 2, À et B, au double de sa grandeur 
uaturelle. Son corps a en effet à peu près un pouce de long, 
et deux environ en mesurant de l'extrémité du sac jusqu'à 
celle des tentacules les plus longs. La forme générale est évi- 
demment celle du Poulpe ordinaire, avec cette différence prin- 
cipale, et qui paroit se trouver dans toutes les espèces d'Ocy- 
thoë, que le corps est proportionnellement plus long que dans 
les Poulpes véritables, chez lesquels en effet, les tentacules 
sont cinq ou six fois plus longs que lui, au lieu qu'ici ils le 
sont à peine deux fois. Le corps proprement dit est presque 
globuleux, comme gibbeux , très-oblus ou arrondi à son extré- 
milé postérieure, et enveloppé par un sac épais , très-musculeux 
évidemment parsemé en dessus de très-petites taches de couleur 
pourpre et changeante. Ce sac est parfaitement symétrique, ainsi 
que toutes les autres parties du corps, les membranes des ten- 
tacules supérieurs exceptées, largement ouvert latéralement et en 
dessous ; il n’est adhérent qu’à la partie supérieure du cou. De 
chaque côté et un peu en dedans, on voit, comme dans tous 
les autres Brachiocéphalés, une petite excavation qui recoit un 
tubercule correspondant des parties latérales du corps. La ca- 
vilé branchiale est extrémement grande comme dans tous les 
Poulpes, et les branchies sont comme dans ces animaux. Le 
tube excrémentitiel, ou canal commun communiquant avec la 


Tome LXXXVII, JUILLET an 1818. G 


50 JOURNAL DÉ PHYSIQUE, DE CHIMIE 


cavité respiraloire, est très-considérable et dépasse beaucoup les 
yeux, de manière à s'étendre jusqu’au-dessous de la bouche, 
ce qui existe à peu près de même dans le Poulpe de l'Argo- 
naule conservé au Jardin du Roi; il est entièrement adhérent 
au-dessous de la tête également comme dans celte espèce; mais 
une observation faite par*M. Leach, et que je n’ai pas eu l'oc- 
casion de vérifier, c’est que dans le fond de ce tube, sont quatre 
taches oblongues, deux inférieures et latérales, et deux supé- 
rieures plus grandes, assez semblables à des organes propres 
à une sécrétion de mucus. La tète moins distincte peut-être que 
dans les véritables Poulpes, est pourvue latéralement d’yeux extrè- 
mement grands. Les tentacules dont elle est armée antérieu- 
rement, sont lrès-épais, la paire supérieure un peu plus que 
les autres, qui diminuent un peu de É supérieure à l'inferieure ; 
ils sont eu général assez courts, encore plus que dans le Poulpe 
de lArgonaute du Jardin du Roi, puisqu'ils sont assez loin 
d'égaler deux fois la longueur du corps, et parfaitement séparés jus- 
qu'à leur origine; tous sont armés dans toute la longueur de leur 
face interne, qui est presque tout-à-fait plate, de suçoirs nom- 
breux, serrés , alternés, peut-être un peu pédonculés, mais évi- 
demment moins que dans l'espèce du Muséum; ils sont éga- 
lement serrés jusqu’à la circonférence de la bouche; mais peut-être 
dans l’état frais, le premier de chaque rangée est-il un peu 
séparé comme dans l'espèce que je viens de citer. Les teuta- 
cules supérieurs un peu plus longs et plus forts que les autres, 
comme il a été dit plus haut, sont retenus dans une sorte de 
flexion forcée au moyen d'une membrane évidemment chargée 
d'un très-crand nombre de très-petits plis à la face inférieure, 
ce qui la rend assez épaisse et comme spongieuse, el ce qui 
très-probablement est dù à la force de la liqueur conservatrice. 
Dans l'individu qui sert à ma description, la disposition de 
celte membrane n’est pas tout-à-fait semblable à droite et à gauche; 
en effet, à l’un des tentacules supérieurs, elle ne lui est adhé- 
rente que par sa parlie inférieure, comme l'a très-justement 
fait observer M. le D' Leach; il paroït même, d'apr s ce qu'il 
en dit, qu'elle est sujette à beaucoup de variations dans sa po- 
silion comme dans sa forme, el que souvent elle diffère même 
sur les deux côtés du même individu. Les ventouses qui ar- 
ment les deux tentacules ont absolument la même forme et la 
même disposilion que pour les autres, tandis que dans l’espèce 
dont j'ai donné la description dans mon Mémoire, ils m'ont 
semblé beaucoup moins nombreux et par conséquent plus espacés. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 55 


La couleur de cette petite espèce de Poulpe paroil avoir été 
assez vive, non-seulement sur le corps proprement dit, qui est 
orné d'un grand nombre de petites taches pourpres, mais en- 
core sur la tête, l’entonnoir, la face interne des tentacules , et 
même la membrane des supérieurs. 

Quant à son organisalion intérieure, je n'ai pu, non plus que 
M. le Dr Leach, trouver de différences notables avec ce qui 
a lieu dans les Poulpes ordinaires. La différence des sexes est 
la même. De tous les individus observés, dit M. Leach, il 
ne s'en est trouvé qu'un seul mäle, tous les autres étoient fe- 
melles, et avoient un paquet d'œufs qui occupoit le fond de la 
coquille qu’elles habitoïent. L'une d'elles qui , d’après le même 
observateur, avoit déposé tous ses œufs, éloil entièrement re- 
tirée dans sa coquille, el son corps offroit d’un côté toutes les 
impressions de la surface interne de celle-ci, et les suçoirs de 
tous les tentacules étoient diminués de grandeur, comme si 
cela provenoit de cette pression. L'individu que j'ai observé, 
n'offroit certainement aucune trace d’avoir été contenu dans une 
coquille. Quant à celle-ci, je ne l'ai pas vue, mais il paroït que 
tous les individus ont été trouvés dans la même espèce, etque c’est 
celle que M. Denys de Monfort a nommée l’Argonaute évasé 
Argonaute patula; j'ignore au juste de quelle manière l'animal 
étoit disposé dans cette coquille; M. Leach n’en dit rien, et la 
figure qu'on en a donnée dans la relation de l'expédition à la 
recherche de la source du Congo, sont si peu claires, qu'il est 
presque impossible de s’en servir pour rien déterminer à ce 
sujet; c’eùt cependant été un point important à éclaircir, ainsi 
que de savoir au juste si celte position est constamment la même. 
C’est ce que les Ébéervateurs subséquens devront étudier en même 
temps que le mode de natation de ces animaux, ainsi contenus 
dans une coquille qui ne leur appartient certainement pas, et 
qui me paroit toujours assez difficile à concevoir. 

Quant à la nature des œufs qu'il est assez singulier que l’on 
trouve dans un grand nombre de ces coquilles, contenant un 
Poulpe à tentaculessupérieurspalmés, nous avons vu que M. Denys 
de Monfort et quelques autres zoologistes, d’après lui, ont dit 
avoir reconnu que le petit animal qu'ils contenoient avoil déjà 
sa coquille, assertion que nous n’avons pu confirmer, et que 
l’analogie ne nous permettoit pas d'adopter. Tout doute à ce 
sujet nous paroît levé par les observations de sir Everard Home 
sur cette matière , publiées dans les Transactions Philosophiques 
Pour 1817, et qui sout faites sur des individus de la mème espèce 


G 2 


52 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


de Poulpe, recueillis par Cranch. Ces œufs sont, dit-il, unis 
entre eux par des pédoncules, absolument comme ceux du 
Poulpe commun, Sepja octopus ,: Linn., et leur sont entière- 
ment semblables sous tous les rapports (1); ils diffèrent de ceux 
de la Janthine, Æelix Jantina, Linn., et des autres vers testacés 
qui vivent dans l’eau, parce qu'ils ne sont pas contenus dans 
des espèces de nids chambrés, et parce qu'ils ont au contraire un 
jaune considérable pour servir à la nourriture du jeune animal , 
lorsque l’œuf est éclos. Ainsi, suivant sir Everard Home, c'est 
encore un caractère qui sert à prouver que cet animal ne doit 
réellement pas avoir de coquille; et que si on le trouve dans 
celle de l’Argonaute, ce ne peut être qu’accidentellement; et, 
ajoute-t-il, si quelques personnes ignorantes en Anatomie com- 
parée, ont assuré avoir vu dans des œufs trouvés dans une co- 
quille d'Argonaute , une coquille semblable à celle-ci, elles auront 
pris le jaune de l’œuf pour une coquille. : 


T 


De la mesure de Peffort journalier d’un moteur animé; 
Par M. HACHETTE. 


Euger a donné, dans les Mémoires de l'Académie de S'aint- 
Pétersbourg, années 1760 et 1761 (pag. 245), une formule pour 
exprimer l'effort de l’eau sur l’aile d'une roue à aubes. Nom- 
mant » et w les vitesses de l’eau et de l'aile, L la hauteur gé= 
nératrice de la vitesse », a° la surface de l'aile, et faisant pour 
abréger a*h— A, on suppose que l’effort A’ de l’eau contre l'aile 


CE. 90 u\? . : 
est exprimée par ( — !) . Comparant ces vitesses # et x à celles 


d’un moteur animé qui marche librement, ou qui marche en 
faisant un effort capable de mettre une machine en mouvement, 
Euler considéra la quantité À comme l'effort maximum d’un mo- 


QG) Sans entrer ici dans des détails nécessairement déplacés sur la structure 
vraiment remarquable des œufs des Sèches, je dois rapporter une observation 
que j'ai eu l’occasion de faire plusieurs fois sur des groupes de ces œufs nommés 
raisin de mer sur les côtes de la Normandie, et qui donne un nouvel exemple 
d'animaux exécutant toutes leurs fonctions au sortir de l’œuf, c'est que si l’on 
en ouvre un au moment de sa maturité et dans l’eau, la jeune Sèche en sort 
en jetant son encre et en cherchant à s’échapper en tous sens, ayec autant 
de vitesse et de facilité que les plus grands individus. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 53 


teur animé, ou comme le plus grand effort de ce moteur dans 
l'état de repos, c’est-à-dire quand 4 — 0, auquel cas la formule 


A'— A (: —*) donne A’— À. Elle donne encore A'— 0, 


quand u = v; ainsi elle est vérifiée pour les deux limites o et 
de la vitesse u. 

M. Schulze, dans un Mémoire de l'Académie de Berlin, 
année 1783, a fait voir que cette formule se vérifioit par rap- 
port à l'homme, pour des valeurs de 4 comprises entre les limites 
précédentes. J'ai recherché si elle se vérifieroit de même par 
rapport au cheval. 

Les expériences faites avec le dynamomètre , ont appris que 
l'effort maximum d’un cheval attelé, est moyennement de 400 
kilogrammes. Sa vitesse par seconde, lorsqu'il marche libre- 
ment au pas, est de 1,66 mètre par seconde, de 3",3 au trot, 
et 5,3 au galop. 

Ainsi l’on a A— 400; v—1",66. 


Ayant recueilli plusieurs observations sur la vitesse du cheval 
attelé à un manége, je choisirai de préférence celle que j'ai 
faite rue Mouffetard, n° 80, à la brasserie dite du bon Pasteur. 
Là, trois chevaux sont attelés au même manége, et font mou- 
voir des pompes qui élèvent 155 muids d’eau à la hauteur de 
132 pieds. La durée du travail journalier est de 4 à 5 heures, 
selon que les pistons sont en bon ou mauvais état, Cette action 
des trois chevaux équivaut à 1784 grandes unités dynamiques 
(un mètre cube d'eau élevé à un mètre); ce qui donne pour 
chaque cheval 595 unités. 

Le diamètre du manége est de 6 mètres, et ils font 13 lours 
en 5'; la vitesse par seconde est 0”,8. 

Ainsi l’on a 4— 0",8, ou 8 décimètres. Substituant ces va- 
leurs de A, » et w dans la formule, on trouve 

; A'— 100", 
ce qui est le lirage ordinaire des chevaux. Je ne l'ai pas me- 
suré directement ; mais connoissant la vitesse, le tirage et le temps 
du travail journalier, 4 heures, par exemple, il est facile de 
voir que l'effet dynamique journalier, est environ 1185 unilés, 
qui est réduit à l'effet utile de 595. Cette nouvelle application 
de la formule d'Euler, semble prouver qu’elle peut servir à cal- 
culer l'effort journalier d’un moteur animé, quel qu'il soit, et 
que le résultat se rapprochera davantage de l'expérience que 
pour le mouvement de l’eau qui vient frapper les ailes d’une 


54 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
rouc à aubes, quoique la formule ail été faite pour celle espèce 
de mouvement. 

En effet, prenant A’ pour la pression de l’eau sur l'aile, 
l'effet dynamique seroit cette pression multipliée par la vitesse u, 


* °’ ee "7 » x , 7 
ou Au( — 5) - Différenciant cette quantité et égalant à zéro ladif- 


’ . . v Q Des 

férentielle, on auroit u=— 3: Or, on sait par expérience , que la 

vitesse correspondante au maximum d'effet a une valeur plus voi- 
. v FN ; 5 » . 

sine de ; que de 35 C'estpourquoi Borda avoit supposé que lapres 


sionsur l'aile de Jasurface 4°, étoit a?v(v—u); ce qui donne pour l'effet 
av (u9 — w); égalant à zéro la différentielle de cette quantité, 


y 0 . . 
On a u — =. Suivant Smeaton, la vitesse du maximum d'effet est 


à très-peu près les + de la vitesse de l’eau. Que cette vitesse soit 
la moitié ou les 2 de celle de l’eau, la vitesse que l’eau conserve 
après avoir frappé les ailes de la roue, est totalement perdue pour 
l'effet dynamique. 11 est donc bien important, si l’on veut écono- 
miser la force motrice, d’assimiler les roues à aubes aux roues à 
augets, par le procédé nouvellement introduit en France par 
M. Atkins. Ce procédé consiste à faire tourner les ailes dans une 
portion cylindrique d'un rayon très-peu différent de celui de la 
roue. Ce cylindre placé à la naissance du coursier, a pour arêtes, 
des droites parallèles à l'axe de la roue; il se termine au plan 
vertical passant par cet axe, et son arète supérieure est à la hau- 
teur du niveau de la source. 

Cet exemple, joint à beaucoup d'autres que nous avons sous 
les yeux, fait voir que dans l’état actuel de la science des Ma- 
chines, l'étude et l'invention des formes qu'il convient de donner 
aux diverses parties d’une Machine, contribuent essentiellement 
aux progrès de cette science. 


MEMOIRE 
Sur la propriété que le Fer acquiert dans certaines cir- 
constances, de colorer le verre en bleu et deremplacer 
ainsi le Cobalt; | 
Par M. C. PAJOT DESCHARMES , 


Jusqu’A présent on ne connoît que le Cobalt et ses diverses 
préparalions , comme propres à colorer en bleu sous diverses 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 55 


nuances inaltérables , les verres, les émaux, les porcelaines, 
faïences, poteries et aussi les empois qui servent aux äppréts des 
batistes, linons ou autres liuges fins. 

On n'’exploite pas en France des mines de Cobalt. M. le cointe 
de Beust, avant 1989, avoit commencé l'exploitation de ce métal, 
près Baguères de Luchon; mais différens motifs lui firent bientôt 
abandonner cette entreprise. 

Tout le Cobalt qui se trouve dans lé commerce, soit en 
métal, soit en safre, smalt et azur, se lire de l'étranger, et 
principalement de la Suède, de l'Autriche, de la Saxe et aussi 
de la Hollande (x); ces diverses substances sont chères; il seroit 
infiniment utile à ceux de nos arts auxquels elles sont indis- 
pensables, que l’on püt se procurer une matière propre à les 
suppléer à un prix modéré. 

Depuis long-temps c’est une chose connue, que le Fer est 
susceptible de recevoir la couleur bleue, et de la communiquer 
en outre à certaines substances ; mais les modifications que ce 
métal doit subir, influent beaucoup sur le résultat qui s'obtient 
par la voie sèche ou par celle humide. Je ne parlerai ici prin- 
cipalement que du premier moyen, comme Je seul qui im- 
porte et soit relatif à l’objet de mes recherches. 

J’avois, en maintes occasions, été à même de remarquer 
par suile de mes travaux concernant l’art de la verrerie, 
que le Fer pouvoit procurer aux divers corps avec lesquels il 
se trouvoit allié, tantôt la couleur rouge sanguine et tantôt 
celle bleue qui m'intéresse. Je savois que celle-ci étoit plus 
fréquente qu'on ne pourroit d’abord le croire, mais il étoit 
difiicile de reconnoitre dans quelles circonstances particulières 
cette dernière couleur étoit produite. Je voyois des morceaux 
de picadil (2) sortir de la fosse des fours de verrerie, alimentés 
en bois ,avec une couleur bleue plus ou moins intense, les 
laitiers des fourneaux de forges (3) recevoir aussi la même teinte, 


(1) La Hollande tire de la Saxe tout le smal£ qu'elle met dans le com- 
merce après lavoir raffiné; elle en prépare annuellement pour une valeur 
de plusieurs millions de francs. 

(2) Dans les verreries alimentées avec le bois, on donne le nom depicadil 
à du verre tombé des pots, des cannes et des autres instrumens dans le four , où 
il ne tarde pas à prendre une couleur plus ou moins olive ou noire à raison 
des cendres, des charbons et dufer des outils dont il se trouve entaché par 
suite de son mélange avec ces substances. 

. (6) Le laitier des hauts-fournaux est une espèce de verre terreux composé 
d'argile et de chaux, et coloré par le fer de la mine et le charbon. 


56 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

le verre des bouteilles à vin (1) se revêtir de la mème couleur, 
lorsqu'elles étloient exposées long-temps au feu; le même 
verre se colorer tantôt en rouge, tantôt en bleu, lorsque pour 
le convertir en porcelaine, dite de Réaumur, je V'enveloppois 
d’un cément particulier, c’est-à-dire de sulfate de chaux, 
quand je desirois obtenir la couleur bleue (2). J'observois que 
les glaces vues en pile, et du côté de leur tranche, présentoient 
des couleurs plus ou moins bleues ou d’un vert bleuätre; je 
trouvois parfois la surface de quelques-unes tachées tantôt de 
veines bleues , tantôt de veines vertes tirant sur le bleu. Je les 
voyois même entièrement teintes d’une nuance fortement azurée, 
lorsque dans certains essais je ne me servois pour fondant que 
de sulfate de soude (3); celles opales ayant pour fondant le sel 
de soude des îles Canaries, réfletoient aussi principalement la 
couleur bleue; les verres à vitre et ceux en table, lorsque le sel 


EE A PO CE mere 


(1) Le verre du fond des pots des verreries à bouteilles est aussi suscep- 
tible de se coloreren bleu, surtout quand les pots sont chambrés, c'est-à-dire 
quand la fente du pot par où le verre s’écouloit, a été bouchée ayec une masse 
ou pelotte d’argile composée et fraiche que l'on a appliquée contre. C’est 
dans le fond des pots que se précipitent les parties du fer non incorporées 
suffisamment avec la masse vitreuse dans laquelle elle se trouve quelque temps * 
suspendue. En général, le verre du fond des pots des verreries est plus bleu 
que celui du dessus. Cette différence est remarquable, surtout dans les gla- 
ceries et les verreries à vitre. 

(2) Le sable argileux ou l'argile seule, produit aussi les mêmes veines bleues 
qui, pour l'ordinaire , traversent toute l'épaisseur du vase, vis-à-vis le cément, 
lorsque ce verre n’a que quelques lignes d'épaisseur; ces accidens sont en outre 
subordonnés à l'intensité et à la durée de la chaleur. 

(5) Une de ces glaces bleues a été soumise à l'exposition publique de l'an VI 
(1796) ; elle étoit accompagnée d’une autre glace de couleur olive. Ces deux 
glaces colorées diversement par le fer, ont été transformées en deux plateaux 
electriques d'environ trois pieds et demi de diamètre. J'en fis don dans le 
temps à M. Gautherot, qui s’est beaucoup occupé d'en comparer la vertu avec 
celle d’un plateau de même dimension en verre de glace ordinaire, c'est-à- 
dire de couleur blanche et aérienne. Ces deux plateaux furent, par la suite, 
soumis au four de M. Billaux, à l'effet d'ajouter encore à l'énergie de leur 
électricité; il seroit important de savoir dans quelles mains ils ont passé depuis 
le décès du physicien qui les a eues le premier en possession. Ilssont curieux , 
et par la différence de leur propriété électrique, et par leur composition ; 
celle bleue est le résultat du sulfate de soude employé comme principal fon 
dant, et celle couleur olive provient du muriate de soude gris, ou autrement 
sel de gabelle, employé commeprincipal flux. 

La couleur opale obtenue dans les glaces ordinaires avec le sel de la soude 
des iles Canaries, tient à la méthode particulière usitée dans ces îles pour la 
préparation de cette marchandise. 


de 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 5y 


de soude formoit une des parties fondantes , retenoient une teinte 
bleue proportionnelle à la mixtion. Les lagres (1) qui servoient 

our étendre ces sortes de verre, devenoient aussi d’un bleu 

ien prononcé aux endroits couverts, soit par le muriate de 
fer brun et brillant dont il sera parlé plus bas, lorsque cette 
substance remplacoit le crocus ou safran doré d’antimoine , soit 
par celui-ci que l’on a coutume de saupoudrer dessus les mêmes 
lagres. 

D'autre part, dans mes expériences de laboratoire, la soude 
d’Alicante prenoit la couleur bleue à l'endroit où elle étoit 
touchée par l'acide sulfurique. Le sulfate de fer employé à la 
marbrure du savon présentoit cette même couleur (fugace toute- 
fois) par le contact de l'acide sulfureux, la même pâte en dis- 
solution produisoit une semblable teinte (mais plus tenace), par 
l'action de l'acide sulfurique (2). La potasse du nord et le scl 
de soude d’Alicante non purifiés, mais fortement calcinés, re- 
cevoient la même nuance (3). Les dernières portions des eaux- 
mères du sulfate de soude traitées dans des vases de fer, ac- 
quéroient la même couleur, le fer lui-même devenoit d’un gros 
bleu , étant traité à une température d’environ cinq degrés du py- 
romètre de Woodgood, couleur toutefois qu’une plus forte cha- 
leur lui enlevoit, tandis que celle qu’il obtient, comme on le 
verra plus bas, dans le four à décomposition, se communique 
au verre éprouvant une chaleur de 160 degrés du mème 
pyromètre, sans paroître en être altéré. 

Tous ces indices me portoient à regarder l’oxigène comme jouant 
ici un rôle important, je le voyois dès-lors se développer dans les 
acides des muriates et sulfates de soude, considérés comme des 
agens intermédiaires propres àproduire cette couleurbleue, lorsque 
ces sels, dans certaines circonstances, se trouvoient en contact 
avec le fer, se présentant lui-mème dans une oxidation conve- 
nable; j'étois d'autant plus disposé à me pénétrer de cette idée, 
qe j'avois par devers moi la cerlitude que ce métal employé 

ans son état naturel, même dans l’état qui le constitue prussiate 


(1) Lagre est le nom que les verriers allemands souffleurs de verre à vitre 
façon d'Alsace et de Bohême, donnent à un manchon ordinairement plus 
épais et plus grand que ceux qu’il est destiné à recevoir pour être étendus 
dessus sa surface. 

(2) Jayez mon Traité du Blanchîment des fils ettoiles, pag. 119. 

(3) On sait que la plupart des potasses du nord contiennent plusieurs sels 
neutres, de même que toutes les masses salines extraites des cendres des vé- 
gétaux. Les soudes d'Espagne sont dans la même catégorie. 


Tome LXXXVII. JUILLET an 1818. H 


58 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


de fer ou bleu de Prusse, soit en forte, soit en petite dose 
avec l’alcali et la silice seuls, sans mélange d'aucun des sels 
neutres ci-dessus indiqués, ne produisoit que du verre plus ou 
moins olive ou noirtre. 

D'après ces diverses considérations, je me décidai à tenter 
des deux essais Isuivans : 1°. je saisis le. moment où un pot du 
four de fusion de la manufacture des glaces de Saint-Gobain, 
que je dirigeois alors, avoit recu tous ses enfournemens de ma- 
tüière ordinaire, et où les muriate et sulfate de soude, seuls sels 
neutres que Ja soude employée contenoit, étoient sur le point de 
cesser de s’évaporer (1) pour faire oxider un instant par la flamme 
et au-dessus de la surface du verre, un crochet servant à tirer 
des larmes d'essai; il le fut en effet à tel point, que la partie 
fortement chauffée tomba sur les flots du verre avec lequel, sans 
cel accident, je voulois seulement le mettre en contact. Ce cro- 
chet, comme on s'en doute bien, ne tarda pas à être dévoré 
ou dissous par les sels en ébullition. Ce fut l'affaire de quelques 
secondes. J’eus soin aussitôt de faire tréjeter (2) dans une des 
cuvelles placées au bas du pot, le verre qui venoit d’être gâté, 
afin de préserver le reste de la polée. On eut l'attention, en 
conséquence, d’enlever, autant que possible, le verre de la place 
où étoit tombé le crochet. Lorsque l'instant de couler la cuvette 
fut arrivé, ce ne fut pas sans une agréable surprise que je vis 
la glace qui provenoit de cette coulée, sortir toute bariolée de 
bandes bleues bien prononcées, mais sous diverses nuances. Deux 
morceaux de 24 pouces sur 17 de cette glace unique dans sôn . 
genre , infiniment précieux sous le rapport de l’art nouveau 
qu'ils laissent pressentir, et dont un jour elles pourront attester 


(1) Il paroît que dans le moment de l'apparition des fumées des matières, 
les muriates et sulfates de soude sont en partie décomposés , si l'on en juge par 
lesdiverses couleurs bleues, rouges, et autres nuances que prend alors la flanme 
qui sort du four , et aussi par l'odeur particulière à l'acide marin qui, dans ce 
moment , se faitremarquer, eten outre par la rouille dont se couvrent de suite 
tous les outils en fer et en ‘cuivre, le plus à portée des ouvreaux. Ces der- 
niers effets sont plus sensibles dans les temps bas et pluvieux ; d’un autre côté, 
les ardoises dont sont couvertes les halles des fours de fusion, sont aussi promp- 
tement dégradées, et en quelque sorte dissoutes par les fumées des sels qui s'é— 
chappent des pots, lors de la fonte des matières. 

(2) C'est ainsi qu'est nommée l’action de puiser trois fois de suite avec 
la même cuillier de cuivre rouge le verre d'un pot pour le verser dans les 
cuvettes qui l’approchent. On a l'expérience que si cet instrument faisoit plus 
de trois fois de suite ce service, sans être rafraichi, il courroit risque de 
rougir, de fondre et de donner au verre une couleur plus oumoins pourpre. 


ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 59 


l'origine , sont déposés, l'un au Conservatoire des Arts et 
Métiers, et l’autre dans l’une des salles de la Société d'Encou- 
ragement. re 

2°, Le succès d'une épreuve aussi directe me conduisoit na- 
turellement à essayer des compositions propres à produire une 
masse vitreuse toute colorée en bleu, et dans une nuance égale 
plus ou moins vive à volonté. Voici comment je suis parvenu 
à atteindre cet objet de mes desirs: A un mélange de carbouate 
de soude, sous forme conerète et de silice, j'ai joint une quantité 
de sulfate de soude moindre que celle de carbonate ; de plus, 
une quaulilé de muriate de soude beaucoup moindre que celle 
du sulfate. Enfin, j'ai ajouté une quantité infiniment petite de 
muriale de fer sous couleur jaune mat (1). Au bout d'une heure 
d'exposition du creuset sur l’ouvreau du milieu du four, expo- 
sition faite après la cessation totale des dernières fumées des ma- 
üères vitrifiables enfournées dans les pots, j'ai obtenu pour re- 
sultat une masse de verre totalement bleue, mais vergelée de 
diverses teintes (2). J'ai répété plusieurs fois cette experience, 
et à chacune j'ai recueilli un verre semblable et entaché des 
mêmes accidens de couleurs, accidens que j'attribue au peu de 
mouvement que la matière subit dans-un vase qui ne contient 

ue quelques onces (3), et qui d'ailleurs , pourla fonte, n'éloit 
pas placé le plus avantageusement possible. Pour éloigner toute 
incertitude sur une opération de cette importance, il auroit fallu 
lui consacrer un pot tout entier, ou au moins une cuvette, mais 
je ne pouvois ainsi compromettre le cours d'une fabrication ré- 
gulière , beaucoup plus intéressante pour les propriétaires et ad+ 
ministrateurs d'un établissement dont les travaux m'étoient con: 
fiés, sans auparavant avoir recu leur consentemeñt à une expérience 
de ce genre. 


C’est en l'an VI (1796)(4), que j'ai commencé, à la glacerie 


(1) C'est la couleur que prend le fer du sulfate, de 0e nom, lorsque par 
J'intermède de ce derñier on décompose le muriate de soude à froid, et'par 
la voie humide. 

(2) J'en ai remis dans le temps un échantillon à plusieurs personnes, entre 
autres à M. Guyton de Morveau et à M. Darcet Gls. 

G) Ces creusets qui résistoient parfaitement à l’alternative du passage: brusque 
du chaud au froid, sans les y disposer à l'avance, étoient composés de parties 
égales de terre de fossé près Forges, bien épluchée, et de ciment ou de cette 
même terre cuite à grand feu. Ils pouvoient servir plusieurs fois même succes 
sivement à une quantité quelconque d'expériences semblables. 

(4) Dans le mois de septembre de l’année suivante, ayant reçu la visite de 


EH 2 


60 JOURNAL DE PHYSIQUE, DÉ CHIMIE 


de Tour-la-Ville, près Cherbourg, dont je dirigeoiïs alors les 
lravaux, mes expériences sur cette couleur bleue obtenue du 
fer; Je me suis livré à leur continuation à Saint-Gobain en 1805, 
d'une manière en quelque sorte concluante, d'après ce que je 
Viens de rapporter. Depuis, j'ai eu la satisfacuon de voir se 
confirmer très-favorablement l'emploi des moyens que j'avois 
mis en œuvre pour colorer le verre en bleu par le muriate de 
fer, J'avois établi à Soissons en 1808, une fabrique de soude 
arüficielle; parmi les différens procédés que je pratiquois pour 
la décomposition du sel marin, je comptois ceux par le sulfate 
de fer et les pyrites, l'une et l'autre substances traitées à ma 
manière; je ferai observer ici, 1°. que les dernières portions 
de sulfate, mélées d’un peu de muriate desséché dans des chau- 
dières de fonte appropriée à la réduction des eaux sulfatées , 
prenoïent sur la fin de chaque cuite, une couleur bleue très- 
foncée; 2°. que le muriate de fer que j’obtenois après la décom- 
posilion du muriate de soude, étoit sous la forme d’une espèce 
de fécule d'un brun foncé et à facettes extrêmement brillantes ; 
3. que mon four de décomposition étoit construit en briques 
et pavé de même; cependant le pavé étoit recouvert de plu 
sicurs rangées de briques l’une sur l’autre pour en couper les 
Joints; chaque fois qu’il falloit renouveler celui-ci, ainsi que le 
pourtour du bas de la voûte, je trouvois surtout sous ce der- 
nier des masses plus ou moins fortes de muriate de fer (1) at- 
laché aux briques, mais teintes, ainsi que celles-ci, en belles 
nuances bleues, avec la différence que “ couleur du muriate 
étoit infiniment brillante, à raison du poli naturel de ses 
paillettes semblables à celles du mica, mais infiniment plus 
petites, dont noûs avons déjà dit que se composoit cet oxide 
particulier sous sa couleur brune-noirâtre (2). En ee der- 


M. Vauquelin, qu'accompagnoit M. Descotils père, j’eus le plaisir de montrer 
à ces messieurs tous les résultats des diverses expériences dont je m'occupois: 
alors, et qui font en partie l'objet de ce Mémoire. 

(1) Il m'a semblé que je pouvois conserver le nom de muriate de fer à cet 
oxide bleu, attendu qu’en recevant cette couleur, il a non-seulement conservé 
la forme extérieure sous le rapport de ses facettes, mais aussi le poli vif et 
brillant qui les distingue au sortir du four de décomposition du muriate de soude. 

(2) Lorsque le muriate prend cette couleur, il contient en ce moment 
très-peu d'acide, et sa décomposition tire à sa fin; c’est alors que cet oxide ap- 
paroït comme une espèce de fécule plns ou moins agglomérée , et à face en 
quelque sorte micacée, extrêmement brillante. Sous cette forme, le fer mélé 
aux matières salines indiquées, ne m'a donné que du verre olive ou noirâtre 
plus ou moins foncé. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 6: 


nier etat, il est susceptible de recevoir plusieurs applications 
utiles et agréables. Je me propose de faire connoître plus tard 
toutes celles dont je me suis occupé; pour l'instant, je ne ferai 
mention que de l’oxide qui nous occupe sous le rapport de sa 
propriété colorante, 

Satisfait, comme on peut le croire, de trouver un oxide de 
celte couleur parfaitement égale et équivalente pour la nuance 
à celle du bleu de ciel, je n’eus rien de plus pressé que de vé- 
rifier si elle pouvoit se communiquer à une masse vitrifiable, 
composée seulement d’alcali minéral et de silice; mes desirs à 
cet égard furent réalisés, et j'eus le plaisir de sortir du creuset 
un tube de verre totalement et également coloré, dans une 
nuance toutefois un peu foible et proportionnée à la quantité 
d'oxide employé. J'ai remis depuis à des émailleurs des échan- 
tillons de ce tube (1), dont je conserve encore quelques restes. 
J'avois à cœur qu'ils en éprouvassent l’inaltérabilité au feu; cette 
Fra précieuse est très-recherchée dans l'emploi de ces sortes 

e verres pour émaux; mes émailleurs n’ont point eu du tout 
à se plaindre des échantillons que je leur ai remis. 

Ces diverses expériences que je viens de transcrire, semble- 
roient, ainsi qu’on peut en juger par leur résultat, mettre sur 
la voie de donner au verre la couleur bleue, pour ainsi dire 
à volonté, par le moyen du fer oxidé à un certain degré, et 
par conséquent sans faire usage du cobalt ni de ses prépara- 
tions. Tout donne même lieu de croire que si l’on se trouvoit 
à même de continuer des essais avec les facilités desirables 
pour leur exécution en grand, on ne tarderoit pas à voir réa- 
liser une fabrication qui intéresse essentiellement les arts qui 
en réclament des produits estimés, année commune, d’après les 
tableaux d'importation, à une valeur numéraire de douze à 
quinze cents mille francs , dont la France est tributaire de l’étran- 
ger. Si j'ai un regret, c'est de n’être pas à portée de mettre à 
ce travail la dernière main. Je terminerai par l’observation sui- 
vante : si l’on combine, soit séparément, soit conjointement les 
deux expériences par l’oxide jaune et par l'oxide bleu, il n’est 
pas douteux qu'on obtiendra un résultat qui contribuera beau- 
coup au perfectionnement de la méthode propre à donner au 


(1) Je crus devoir donner à ce verre la forme d’un tube, jpréférablement 
à toute autre, parce qu’en cet état il étoit plus susceptible d’être divise sans 
perte sensible, et qu'il se prêtoit en outre plus aisément à l’action de la flamme 
de la lampe d’émailleur. 


G2 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


bleu produit par le fer, l'intensité nécessaire: pour remplacer 
le cobalt : dans le cas du succès, il ne s’agiroit plus alors que 
de trouver les moyens d'obtenir l’un et l’autre oxide à volonté, 
et au prix le plus bas possible. Je compte les faire connoitre dans 
un Mémoire particulier. 


EEE 


OBSERVATIONS 
SUR LES CARACTÈRES DU GENRE ATRIPLEX ; 
Par M DUPONT. 


LE genre Æiriplex, qui fait partie de la famille naturelle des 
Chénopodées, a été placé par Linné dans la Polygamie mo- 
nœcie, formant le premier ordre de la 25° classe de son Sys- 
tème sexuel des Plantes. Ce grand botaniste attribue aux espèces 
de ce genre, des fleurs de deux sortes, réunies sur le même 
individu ; les unes hermaphrodites, pentandres, à calice 5-phylle, 
à fruit déprimé ; les autres femelles, à calice 2-phylle, à fruit 
comprimé. 

Tous les auteurs qui sont venus depuis Linné;.ont reproduit 
le caractère essentiel de ce genre, tel qu'il l’avoit établi. Il paroît 
que ce caractère a été adopté et répété de confiance. En eflet, 
le plus léger examen auroit pu faire reconnoitre qu'il est évi- 
demment erroné dans la plupart des espèces qui constituent ce 
genre; et un examen plus altentif auroit pu ensuite faire dé 
Couvrir qu'il n’est pas non plus applicable aux autres espèces, 
en plus petit nombre, auxquelles il semble convenir au premier 
coup-d'œil. Nous croyons pouvoir rectifier ce caractère, d’après 
les observations souvent répétées que nous avons faites sur plu= 
sieurs espèces , en les examinant avec soin aux diverses époques 
successives de leur fructification. 

Si, lorsqu'une des espèces d’Atriplex qui croissent spontané 
ment dans nos champs, telle que l'A. hastata, l'A. angustifo= 
lia, etc., est en pleine floraison, on examine les différentes 
fleurs dont les grappes ou épis sont composés, on en trouve 
de deux sortes, entre-mélées ensemble en petits fascicules. Les 
unes présentent un périgone 5—parti, avec cinq étamines in- 
serées à sa base et opposées à ses divisions, el un rudiment 
imparfait de pistil au centre du réceptacle; les autres offrent 
un périgone 2—parti, à divisions connivenles, sans étamines, 


ET D'HISTOIRE NÂTURELLE. 63 


avec un ovaire libre, surmonté de deux styles ou de deux stig- 
males subulés. Quelque temps après , et lorsque la fécondation 
est opérée, les fleurs de la première sorte, qui n’ont pas recu 
d’accroissement sensible depuis leur épanouissement, se flétrissent 
et lombent ou restent desséchées sur la plante. Les secondes, 
au contraire, prennent un grand développement; leur périgone 
s'étend dans tous les sens; il renferme, entre ses deux divisions 
rhomboïdales ou sub-triangulaires étroilement conniventes, l’o- 
vaire accru et transformé en un fruit orbiculaire comprimé, ver- 
ticalement attaché au fond du réceptacle par un point de sa 
circonférence. Ce fruit (Cariopse Rich., Carcerule Mirb.) est 
formé d’un péricarpe membraneux très-mince, indéhiscent , ren- 
fermant une seule graine , attachée à un cordon ombilical linéaire 
qui nait du fond du récepiacle , et va s’insérer, en passant obli- 
quement entre la membrane péricarpienne et l’une des faces de 
la graine , à un ombilic situé latéralement sur la circonférence de 
celle-ci. La graine est recouverte d’un tégument propre testacé 
ou rarement membraneux; elle contient un embryon dicoty- 
lédoné , cylindracé-filiforme, correspondant à sa circonférence, 
courbé en anneau autour d'un périsperme farineux, et aboulis- 
sant à l'ombilic par ses deux extrémités. 

Il résulte de cette description, que les espèces auxquelles elle 
s'applique ont des fleurs mäles et des fleurs femelles sur le même 
pied, c’est-à-dire qu’elles sont monoïques, au lieu d’être poly- 
games, comme-on l'a dit jusqu'à présent. Celles sur lesquelles 
j'ai eu occasion de constater ces caractères, sont les Ætripleæ 
hastata, patula, littoralis, portulacoïdes , rosea, Lion., angus- 
üfolia, Smith, et multifida, Cat. H. Par. 

Si maintenant on suit la floraison et la fructification de l4. 
hortensis, on remarque d’abord des fleurs de deux sortes, res- 
pectivement semblables à celles des espèces précédentes. L’ac- 
croissement des fleurs femelles a lieu de la même manière que 
dans celles-ci, et elles présentent la même organisation dans 
toutes leurs parties ; seulement la forme du périgone fructifere 
est ovale au heu d’être rhomboïdale ou triangulaire. Mais bientôt 
après, parmi ces fleurs qui se sont rapidement accrues, on en 
voit paroitre d’autres aussi fruclifères, d’une forme différente 
et beaucoup plus petites; celles-ci sont composées d'un péri- 
gone 5—parti qui recouvre en partie un carlopse PP cpl 
déprimé, situé horizontalement, dont la graine est d’ailleurs en- 
üérement organisée comme dans les premières, sauf que son 
tégument propre est lestacé et bien distinct, tandis qu'il est 


64 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


membraneux dans les autres et très-adhérent à la membrane pé- 
ricarpienne , avec laquelle il semble se confondre. 

Comme à l’époque de la floraison on a observé des fleurs à 
étamines dont le périgone éloit également à cinq divisions, il 
paroit naturel d'attribuer à celles-ci les fruits de la seconde sorte 
qu'on voit se développer plus tard. Mais en y regardant de plus 
prés, on voit qu'il en est autrement. Les premieres fleurs sta- 
minifères qui paroissent sont toutes mäles: elles se montrent 
en même temps que les fleurs femelles à périgone 2—parti, et 
après l'émission du pollen elles se flétrissent ou tombent , comme 
nous l'avons vu pour les espèces précédentes. Alors commencent 
a se montrer d’autres fleurs, auparavant imperceptibles, à pé- 
rigone semblable à celui des fleurs mâles, munies d’un pistil 
bien conformé, composé d’un ovaire surmonté de deux stigmates 
styliformes , et dépourvues d'’étamines. Ce sont ces dernières 
fleurs femelles qui produisent les fruits de la seconde sorte, 
et non pas celles qui portent des étamines. A défaut d’un exa- 
men attentif, on a confondu ces deux espèces de fleurs, et de 
leur réunion on a composé des fleurs hermaphrodites. Il étoit 
facile, à la vérité, de s'y tromper. Ces fleurs ne se développent 
pas en même temps, et les femelles ne paroïissent qu’apres les 
mäles; leur périgone étant tout-à-fait semblable , et les dernières 
étant munies d’un rudiment de pistil, on a pu prendre suc- 
cessivement les unes et les autres pour des fleurs hermaphro- 
dites, dont l'ovaire n’étoit pas encore fécondé dans celles-ci, 
et dont les étamines étoient tombées dans celles-la après la fé- 
condation. C’est-là, sans doute, ce qui aura induit en erreur 
Lioné et les observateurs qui l'ont suivi. Ce grand botaniste 
aura ensuite établi son caractère du genre Atriplex sur cette 
observation inexacte del. Aortensis, étendue par analogie aux 
autres espèces; car sil eùt observé directement celles - ci, 
il auroit vu qu’elles sont évidemment monoïques. C’est en exa- 
minant moi-même une de ces dernières espèces, que j'ai d’abord 
reconnu cette seconde erreur, fondée sur une fausse analogie. 
Cette découverte, bien facile à faire, m'a porté à observer avee 
attention l'espèce qui avoit servi de type pour le caractère du 
genre; et je me suis assuré de la véritable nature de son sys- 
tème de fructification , tel que je viens de l’exposer; l’4. Aor- 
tensis L., V4. microsperma et V'A. nitens Willd., sont les trois 
seules espèces qui m’aient présenté cette disposition. 

D’après les observations qui précèdent, le caractère du genre 
Atriplex doit être rectifié de la manière suivante. 

ATRIPLEX. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 65 


Arrrprex. Monoïque. F1. males. Périgone 5—parti; 5 étamines 
insérées à la base du périgone et opposées à ses divisions; 
rudiment de pistil au centre. F1. femelles; uniformes ou de 
deux sortes. Dans les unes (conimunes à toutes les espèces): 
périgone 2—parii, prenant un accroissement considérable après 
la fecondation; ovaire libre, surmonté de deux stigmates sty- 
liformes; cariopse vertical comprimé, renferme entre Îles 
deux divisions conniventes du périgone. Dans les autres (propres 
à quelques espèces seulement) : périgone 5—parli; ovaire 
comme dans les précédentes; cariopse horizontal déprimé, 
en partie recouvert par le périgone persistant. 

Peut-être la réunion sur une même plante de deux sortes si 
différentes de fleurs d’un même sexe, réunion dont la Botanique 
n'offre pas, je crois, d'autre exemple aussi caractérisé, pourroit- 
elle sufire pour former un genre particulier des espèces d’Ætri- 
plex qui en sont pourvues; c'est aux botanistes à juger du plus 
ou moins de convenance et d'utilité de cette séparation. Quoi 
qu’il en soit, le caractère ainsi rectifié de l’Atriplex, en même 
temps qu’il fait mieux connoitre ce genre, peut encore servir 
à le distinguer davantage du genre Chenopodium, dont toutes 
les espèces que j'ai eu occasion d'examiner, au nombre d'une 
vingtaine , m'ont offert constamment , avec des fleurs hermaphro- 
dites, des fleurs femelles entre-mêlées, ordinairement plus petites 
et souvent 3-4—partites; ce qui tendoit à confondre ces deux 
genres, lorsqu'on attribuoit des fleurs polygames à l'Ætriplex, 
au lieu des fleurs monoïques qui le caractérisent. 


Tome LXXXVII, JUILLET an 1818, fl 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES 


A compter du 1° janvier 1818, les hauteurs du Baromètre 


_ | THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR : 1 = 
= AN CD BAROMÈTRE MÉTRIQUE. |>5 
= EE 
5 - : ETS : £ 
“à MINIMUM. MAXIMUM. A MIDI. MAXIMUM. MINIMUM. A MIDI.|  % 
= 
heures« heures heures* mille heures mill= mills 
1[à3s +oo5o!à 4m. + 740] 18,50) àg,;s....757,63| a 6... 756,69] 757,21! 17°4 
2 | à3s. —<+oo,go| à4m. —<+12,25| +22,2b] à 9 m....758,50| à 5s..... 757,40| 758,50] 18,8 
8 | à5s +o/95l à 4m. 14,25] +2,50] a gs... 729,38] à 4 m....758,68| 759,07| 19,4 
4 |a5s. —o4,95] à4m. “+1,00 +923,90| à 105....761,04| à 4 m....759,85! 760,75] 20,6 
5 là4s. —+ob,6o| à 4m. “+15,25| +-25,00! à 9 m....769,5b| à 4 s.....761,o1| 761,q1| o1,1 
6 |[à3s. <+95,6o| à 4m. —+15,00| +24,50| à 71m. ...762,30| àg s..... 760,14| 761,55] 21,6 
7 là3s. —ob,7b] à 4m. +14,75] +0,19] à ga... ,759,96| à, 5 s.....758,50| 759,21) 01,7 
8 |[à3s. +o4bol à 4m. +H16,00! +24,00! à 9 m..,.760,72| à 6 s...1.. 759:27| 761,50! 22,0 
9 |à3s. +940 à 4m. <+H15,25| +H05,65| à 9 m....760,86| a 51s....759,67!. 760,42| 22,1 
10 | à5s. o5,{o] à 4m +15,00| +925,50| à 7 m....761,17f à bs..... 759,31| 760,67] 29,1 
11 là5s. 97,95) à fm. H16,25| +#+96,95| à 7 m....759,56| à 9%s....756,63| 758,25] 25,0 
19 ais. Hog,4ol à 4m +H16,25|,+928,65| à 9 m....756,65) à 4s..... 755,40! 756,56] 23,8 
15 à2is. —og75| à fm. +H17,50|,+928,1c) à 10 + m..705,85| à 4 Es... .794,08| 750,65] 24,0 
14 | as. +o45cl à 4m. <H16,75| H22,5c] à 10 Às...758,84| à 4m. ...75h,95|707,50| 23,6 
15 | amidi. 24,60! à 4m. +#16,00| +24,6c| à 9 m....729,41|.à 4 Es, ..708,16| 750,10] 23,5 
16 labs. 260! à 4m. 14,10] +2,82) à 9 m. ...758,60| à g s..... 726,67| 758,28| 22,5 
17 l'ämidi. +oyac| à 4m. +16,00| +o7,1c| à 4m. ...765,59l à 65... 751,59] 753,93] 25,6 
18 las. +o2,85| à 4nx +H16,75|:+#o1,6c| à 4m. .:.761,70l1à 851: 4 749,81| 751,25] 23,0 
19 Jamidi. +ooucl à 4m. +14,50|. +2,10] à midi. ..755,88| à 4m... ..758,18| 755,88] 22,9 
20 | à midi. Hoc,bol àgs. “<+14,25] 20,50) à gs... 795,56]. à 4 m....752,oc| 759,65] 22,0 
91 | à5s. —Hoi,95| à fm. <+ 9,9c| +20,oc| à.95......759,63| à 4 m....7b7,39| 750,58] 21,8 
22 | à midi. 01,50] à4m “<+18,00| Æa1,50| à 7 m....759,77| à 9s..... 755,10] 756,08| 21,4 
25 | à5s. +eojoo! à 4m. H10,75| H19,00|! à gs..... 758,40] à 4 m....755,89| 758,25] 20,7 
24 V'à midi. +09,75| à 4m. 14-16,00| -+22,76| à g Ls:...761,48| à #m....7b5,76| 757,66! 21,9 


25 | à3s. “+Ho9,10| à 4m. +13,25| 00,60] à 10! m..763,58| àg1s....761,84| 763,14] 21,1 
26 | à midi. 923,65] à 4 m. +14,50| +95,65| à g m....761,81| à 10 s....759,08| 761,59l 22,0 
27 | à3s. —og,25| à 4m. <14,00| +08,65| à 4 m....758,45) à 105... .7D1,73| 755,70] 23,2 
28 | à midi. +2,95] à 4m. +16,b0| +2,25] à gs... 760,24] à 4 m....753,20| 757,01| 22,7 
29 | àmidi. 04,25] à 4m. <+12,75| 04,25] à 9 1s....765,81| à 4m. ...761,08| 769,62] 22,6 
30 | à2s. +95,00| à 4m. +12,40| +24,95] à 7 m....764,81| à gts. ...762,32| 763,69| 22,6 


Moyennes. 24,19 +14,59| 423,45 759,45 796,70] 758,62| 22,0 
RÉCAPITULATION. | 
Millim. 
‘Plus grande élévation du mercure..... 764°31 le 30 | 
Moindre élévation du mercure........ 749,81 le 18 | 
Plus grand degré de chaleur.......... —29°75 le 13 
Moindre degré de chaleur........... + 7,40 le 3 
Nombre de jours beaux........ 27 
de couverts, ...... TS 
Rise todos En 7 
Ga Mers asenonestee 30 
degelée....13..2..12, ‘ao 
de tonnerre. ......... 2 
de brouillard....... 36, LE 
derneires-ree "the o 
defrréle reset ccce o 


A L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. 


sont réduites à la température de zéro du T'hermomitre. 


JUIN 1818. 


S |Hyc. 
5 VENTS. 


à midi. 


1 54 [N.-E. 

2 53 Idem. 
SAINS AIN 

4 56 Idem. 
5 58 IN.E. 

6! 65 “à .N.-E. 
Gi 56 

8 | 47 FN pp 
9 60 Idem. 
10 54 Idem: 
11 52 Idem. 
12 55 Idem. 
13 | 64 |S.-O. 
14 | 65 |[O: 

15 64 Idem. 
16 65 IN.-O. 
17 | 56.(S.-S.-O.! 
18 75 S.-0. 
19 57 | Idem. 
20 | 56 Idem. 
21 57 N.-0. 
22 74 S.-S.-O. 
23 61 |O. 
24 | 73|, Idem. 
25 65 Idem. 
26 63 Idem. 
27 5q S.-E. 
28 | 55 [O. 
29 | 56 IN.-O. 
80 | 55 |N.-E. 


Moyen 59 


Eau de pluie tombée $ 


POINTS 


LUNAIRES. 


N.L.àrrhass 
Lane apogce. 


P.Q:ïrrho’s. 


P.L.à3h3s. 


Lune périgée. 


D.Q.à10h55m 


Jours dont le vent a soufflé du 


Thermomètre des caves 


VARIATIONS DE L'ATMOSPHÉRCE. 


Lips ie 
LE MATIN. A MIDI. LE SOIR. 
Légers nuages , brouil.INüageux. Très-nuageux. 
T'rès-nuageux. | dem: Beau ciel. 
Couvert, brouillard. Idem. Nuazeux 
Nuageux. Idem. Beau ciel 

Idem. Quelques nuages. Idem. 

Beau ciel Idem. Nuages à l'horizon. 
Nuageux Beau ciel. Beau ciel 
Beau ciel Ideni. Idèm | 

Idem. Quelqués nuages. Tdém 

Idem. Beau ciel. Idem 

Idem. Idem. Idem 

Idem. Nuageux. Très-nuageux. 

Ciel trouble et nuag. Idem. Idem. 
Très-nnageux, pluie. |# Idem. Idem. 
Très-nuageux. Idem. uageux. 

Couvert. Couvert. Idem. 

Quelques éclaircis:  [Nuageux. Forte av., tonn. à oh. 
Couvert. Plure fine. Fortsav. par intervall. 
Nuageux. {Très-nuageux. Nuageux 

Pluie. Idem. Idem. 

Légers nuages. Iderr. Idem 
Très-nuageux Couvert, Pluie: 

Idem. Nuageux, TFrès-nuageux. 
Petite pluie Très-nuageux, Pluie par intervalles. 
Très-nuageux Couvyert. Nuageux. 

Nuageux. [Nuageux. Beau ciel. 
Légères vapeurs. Beau ciel. Légères vapeurs. 
Pluie , tonnerres. Très-nuageux. Couvert. 
Nuageux. Iderr. Beau ciel 
Beau ciel, Nuageux. Idem 
RÉCAPITULATION. 
Net Loue 
DIN TE DE SEAT LEUSÉ 
rando eagttde 
CET HOUOO TUE 
SL. FIRE 
1 S.-0...,. use 614 
OR 
NEO Eee 
le 1°°, 12°,071 
centigrades. 
le 16, 12°,085 
dans la cour....... 2328 56 — 0 p. 10 lig. £. 
sur l’Observatoire.. 46"",00 — 0 =: 


AN PE 


68 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


NOTE 
Sur le Stylephus Stylephorus chordatus de Shaw; 
Par H. ne BLAINVILLE. 


Parmi le grand nombre d'espèces de poissons que nous con- 
noissons singulières par quelques parties de leur organisation in- 
térieure, ou par quelques formes plus ou moins bisarres, la plus 
extraordinaire, la plus anomale, seroit certainement celle de l'animal 
que le D' Shaw a décrit et figuré dans les Transactions Linnéennes 
de Londres pour l'année 1788, et par suite dans ses Miscellany, 
sous le nom de Stylephorus chordatus, s’il étoit bien confirmé 
qu'il eùt des yeux pédiculés, et que le museau relevé en dessus, 
pût, à la volonté de l'animal, aller frapper la pointe de sa 
tête proprement dite ; en un mot, s'il ressembloit à la figure 
vraiment extraordinaire que ce zoologiste superficiel en a donnée, 
et qui aensuite été copiée par tousles icthyologistes. Mais fort heu- 
reusement pour les principes de læ science, il est bien loin 
d'en être ainsi; et comme j'ai pu observer à peu près aussi com- 
plètement qu'il m'a été nécessaire , l'individu unique décrit par 
Shaw, et que possède le Collége de Chirurgie de Londres, je 
me suis assuré que fortement altéré, ou mieux, les différentes 
parties de la tête sorties hors de leurs rapports naturels, ce na- 
turaliste peu habitué à considérer les animaux autrement que 
d’une manière extrèmement artificielle, n’ayant point reconnu la 
disposition naturelle de la tête de l'animal qu'il décrivoit, n’avoit 
pu en donner qu’une description très-erronée, ainsi qu’une figure 
encore plus monstrueuse. 

C’est à ces deux causes , et surtout à cette dernière d’une figure 
extrémementincomplète, qu’on doit attribuer qu'aucun auteur jus- 
qu’à présent, ne s'est permis aucun doute sur une conformation 
aussi anomale. Ainsi Bloch dans son Système icthyologique, M. de 
Lacépède dans sa grande Histoire des Poissons, ont admis ce 
genre d'après Shaw, sans faire aucune réflexion critique. M. Du- 
méril, dans ses cours, a souvent émis quelques doutes, qu'il eût 
été difficile de confirmer sans avoir vu lanimal, et si M. Cuvier 
ne se trouve pas tout-à-fait dans le même cas, c’est qu'a mon 
relour d'Angleterre, je lui fis part des résullats principaux de 


mon examen. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 69 

J'ai déjà dit que l’on n’a de cette espèce de poisson, que l'in- 
dividu unique que possède le Collége royal de Chirurgie de 
Londres, et qui a été pris dans la mer du Mexique. Je me 
suis attaché surtout à en faire une figure exacte, et je suis 
persuadé que sa simple inspection suffira pour mettre l'opinion 
que j'ai avancée plus haut hors de doute, du moins pour ceux 
ui ônt quelques teintes de l'ostéologie de la tète des poissons. 
m verra que d'abord toute la iète a été fléchie à angle droit 
et en dessus, au point de sa jonction avec le tronc, de manière 
à ce que le bord postérieur de l’opercule füt porté en bas, et 
son extrémité antérieure en haut; d’où il a dù nécessairement ré- 
sulter que la plus grande partie de la cavité branchiale a été 
mise à découvert, et mème une parlie du cœur saillant dans 
son péricarde; on a pu aussi apercevoir l’extrémité postérieure 
des lames branchiales qui, du reste, ont conservé leur position. 
C’est ce qu'on peut voir dans la figure IL, où y représente 
la paroi intérieure de la cavité branchiale, 4 le cœur, f les 
branchies. Outre cela, le crane proprement dit. avec l'orbite 
et l’opercule , s'est séparé de l'appareil masticaloire, de manière 
à ce que son extrémilé ce qui devroil être antérieure , est devenue 
supérieure, et alors a laissé a découvert un grand espace mem- 
raneux marqué a, compris entre la pointe À de l'os intermaxil- 
laire, et l’'apophyse à qui est probablement l'os maxillaire lui- 
même. Ce grand espace est effectivement comme l’indiquent la 
figure et la description de Shaw; il est formé par une mem- 
brane qui semble soutenue par .un rayon. Je présume que ce 
n’est autre chose que le vomer en très-grande partie membra- 
neux. C’est là ce que M. Shaw a décrit en disant que: la partie 
étroite de la tête qui est terminée par la bouche, est réunie avec 
sa partie supérieure par.une duplicature flexible de la peau , la- 
quelle permet à l'un et l'autre d’être étendus de telle sorte, que 
la bouche peut se montrer directement.en haut, ou.se renverser 
pour être reçue dans, une sorte de fourreau. Ainsi M. Shaw a: 
cru que cette disposition éloit volontaire. Quant aux mâthoires., 
il faut encore observer qu’elles ne sont, pas à leur! place ; mais 
qu’elles sont encore fléchies en dessus paf une sorte de frac- 
ture en p: Ainsi par une première courbure en /, la tèle èn 
totalité s’est relevée en dessus par une seconde.en »: , le crâne 
s'est séparé des mâchoires, et enfin par une troisième en p, 
celles-ci ont été portées en haut. Quant à l4 singulière dispo- 
sion des yeux, que Shaw décrit et figure comme pédiculés , 
il faut avouer qu'ils ont encore été plus ;altérés- que le: reste! 


70 JOURNAL D PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Ce qu'on appelle l'œil proprement dit avec Shaw, n’est autre chose 
que Je crystallin (s), qu'on a fait sortir hors de l'ouverture dé 
la pupille, et ce qu'on nommele pédicule n'est autre chose que 
la sclérotique (0) qui est même encore couverte de l’enduit ar- 
genté que l’on trouve dans beaucoup de poissons; il est vrai, 
comme on le pense bien, et comme Shzw le fait observer, qué 
la sclérotique n'offre aucune trace de réseau. On peut, pour s’as- 
surer de da vérité de ce que j'avance, considérer ma figure et 
la comparer. avec celle de ce naturaliste, et l'on verra jusqu’à 
quel point il'a forcé la nature de cadrer avec sä description. 

J’at cru devoir commencer par montrer quelle avoit été l’erreur 
de Shaw; maintenant je vais donner la description de ce poisson 
la, plus complète que jé pourrai,’ sans connoître cependant rien 
de son organisation intérieure , afin de démontrer à quel genre 
et à quelle famille il doit appartenir. 

Le gorps est fort alongé , peu comprimé; le dos carré , entiè- 
rement lisse; la peau paroît avoir été entièrement nacrée. 

La tête alongée, étroite, élargie en arrière, terminée anté- 
rieurement par un museau fort long; la bouche très-petite étant 
a son:extrémité comme dans les Syngnathes. 

Les yeux sont latéraux, fort grands. 

L'opercule est fort pétit. 

Le nombre des raÿons branchiostiques est de 5 à 6, très-grèles. 

Le tronc plus épais supérieurement qu'inférieurement, est 
comme lrapézoidal; de chaque côté de la face ventrale est une 
ligne latérale profonde , étendue de la tête à la queue. wi 

L’anus est à peu près à la moitié du tronc. AE 

Les nageoires pectorales fort petites sont placées immeédia- 
tement derrière Fopercule. : 

- Je n’aipu apercevoir aucune trace de nageoire pelvienne, et 
je pense qu'il n’en a jamais existé. 

Dans toute la longueur du dos, il règne une seule et unique 
nageoire dorsale assez base, un peu plus én avant et en arriere 
qu'au milieu: Les raÿons' qui li composent sont au nombre de 56; 
ils:sont-simples, et leur pointe dépasse la membrane qui les 
réunit. | ‘1 1: 4 Heath 

“Enfin lei corps est! terminé’par une nageoiïre caudale parois- 
sant dorsale; elle‘est composée de 6 rayons réunis par une peau 
épaisse , et dont l'inférieur, qui est dans la continuation du corps 
est, ainsi que lé‘ sixième; de nature cornée et beaucoup plus 
long que-le corps lui-même; ce rayon est un peu comprimé, 
et: um peu éxcavé latéralement: Les bords sont arrondis et 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 7 


renflés; le milieu est:corné, transparent, et les bords épais æt 
noirâtres.. +. ul i U 

D'après cette description, il est évident que ce genre. est fort 
rapproché da genre Trichiures, dont il diffère cependant par 
la forme de la bouche, l'absence de dents, l'existence d'une vé- 
rilable uageoire caudale dont le rayon inférieur est beaucoup 
plus prolongé que les autres. 


NOTICE 


Sur un Cétacé, du genre Dauphin échoué près Saint-Pol 
de-Liéon ; 


Pan M. »e FREMINVILLE. 


LE 2 janvier 1818 , à la suite d’un assez violent coup de vent 
de nord-est, quatre mammifères de Ja classe des Cétacés furent 
jetés à la côte; et. vinrent échouer dans une plage appelée la 
Grève de Mans près Saint-Pol-de-Liéon, département du Finistère. 
Des paysans qui, au point du jour, se rendoient sur cette grève 
pour y travailler du varec, apercurent les premiers ces Gétacés 
qui poussoient des gémissemens dont le bruit, à ce qu'ils ont 
dit, éloit analogue au grognement de plusieurs cochons: 

Informé de. cet évènement, je me rendis de suite: à Saint 
Pol-de-[.éon pour y observer moi-mème ces animaux, qui font 
partie d’une des classes les plus importantes elles moins connues 
de l'Histoire naturelle, et qui, d’après ce qu'on m'en avoit dit, 
devoit constituer une espèce absolument nouvelle. 

Cependant, comme les renseignemens qu'on me transmeltoit 
avoient été recueillis par des personnes quime sont pas nalu- 
ralistes, je ne donnoïs pas une entière confiänte à rleur asser- 
üon , ct avaut de l'adopter, je- voulois voir par:moï-mème. Je 
pensois même que les Cétacés en question m'eétoient'äutre chose 
que des analogues de ceux qui échouèrent , au mombre de 70, 
dans la baie de Saint-Pol, le 7 janvier 18r2,1et qui ont'été 
décrits par M. Lemaout avec juste raison, comme uneespèce 
nowlle à laquelle M; Cuvier a donné le :nom'de Delphinus 
globiceps; arrivé :sur, les/lieux , je vis cependant que ma con- 
jecture étoit! fausse. Ces :Célacés, quoiqu'apparterant véritable- 
ment au genre Dauphin, section des Marsoüinë ,' diférorent es- 


72 JOURNAL DE PIYSIQUE, DE CHIMIE 


sentiellement du Globiceps. Voici la description du plus grand 
des quatre individus échoués; j'y joins une figure dessinée d’après 
nature , et sur l’exactitude de laquelle on peut compter. 

Sa longueur totale est de 21 pieds depuis le bout du mu- 
seau jusqu'a la bifurcation de la queue. Sa plus grande circon- 
férence, qui se trouve précisément au milieu du corps, est de 
10 pieds. Sa forme générale le distingue de toutes les autres 
espèces du même genre; elle est ovale, mais beaucoup moins 
alongée et beaucoup moins amincie vers les extrémités, ce qui 
lui donne un aspect massif et lourd qui contraste avec le corps 
lancé des autres Dauphins, Sa partie postérieure, au lieu d'aller 
en diminuant insensiblement jusqu’à la queue qui la termine, 
s'atténue brusquement près de la nageoire, et présente dans cet 
endroit comme une espèce d'étranglement. 

La tête est ronde, tres-obtuse, et décline en pointe uniforme, 
mais rapide, depuis l’évent situé au sommet jusqu’au museau ; 
celui-ci n’est pas prolongé en un long bec comme dans presque 
toutes les espèces du même genre; “ n'est pas non plus comme 
dans le Globiceps surmontée d’une masse charnue et proémi- 
mente; il est obtus et présente le long de la mâchoire supérieure 
un renflement en forme de lèvre, dont la saillie est d'environ 
4 pouces. 

Il y a quarante dents à la mâchoire supérieure , trente deux 
à l'inférieure; l'œil, d’une petitesse extraordinaire, est placé 
sur la mème ligne et tout contre l'angle des mâchoires. 

La nageoire supérieure est placée presqu'au milieu du dos; 
elle est arquée antérieurement, échancrée postérieurement. 

La couleur de ce Dauphin est d'un brun foncé, presque noir 
sur le dos, plus pâle sur les flancs; le ventre est blanchätre. 
Sa peau est assez mince el est séparée des muscles par une 
couche de lard de 6 pouces d'épaisseur. Son poids total a été 
évalué à quatre milliers; il a fallu les forces réunies de vingt- 
huit hommes et de quatre chevaux pour le häler sur la grève. 

Après l'avoir observé et dessiné, mon premier soin à mon 
retour à Brest, a été de le comparer avec les espèces déja 
connues du même genre, et je n’ai pas trouvé qu'aucune des 
descriptions données jusqu'ici s’y rapportàt d'une manière sa- 
tisfaisante. 

L'espèce qui paroitroit s’en rapprocher le plus, est l'Orque 
ou Epaulard (D. orca); cependant il y a des traits de différence 
remarquables ; l'Orque figuré dans les planches de l'Encyclopédie 
méthodique, à le front er moins vertical que le nôtre; son 


corps 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 75 


corps est plus alongé, ses nageoires latérales sont plus larges. 
Selon Bonnatère, le caractère principal de cette espèce consiste 
däns la configuration de la nageoïire du dos, qui est de forme 
conique , droite et pointue au sommet ; ceci n’a pas lieu dans notre 
Dauphin, qui a cette même-nageoire lrès-arquée en arrière. Le 
nombre des dents n’est pas mon plus le même, Bonnatère ne 
donnant à l'Orque que vingt‘à trente dents à chaque mâchoire. 
Cependant j'avouerai que je ne sais pas trop si dans les Cétacés 
ce nombre des dents doit entrer pour quelque chose dans l’éta- 
blissement des caractères spécifiques ; il varie selon l’âge, et 
on n'est jamais sûr de celui des individus que le hasard met à 
portée d'observer. À 

On trouve encore dans la Cétalogie de Bonnatère, la des- 
cription d'un Dauphin qu'il nomme Dauphin ferès (D. Jferes); 
celte espèce a aussi quelques rapports avec la nôtre, particulie- 
rement dans la conformation de la tête. « La hauteur de la tête, 
» dit Bonnatère, égale à peu près sa longueur ; elle est très- 
» renflée sur le sommet (ceci se rapporteroit assez à notre Dau- 
» phin); mais, continue-t-il, elle s’amincit tout à coup vers sa 
» partie antérieure et se termine par un museau court et ar- 
» rondi comme celui d'un veau. » Ce dernier caractère ne se 
retrouve plus dans l'espèce qui nous occupe; le reste de la 
description du Ferès est si vague, qu’on n’en peut tirer aucune 
induction ; elle a été envoyée à l’auteur par un religieux de 
Fréjus, qui y avoit joint une figure, laquelle n’a point été publiée. 

Malgré les différences que je viens de faire remarquer entre 
le Dauphin dernièrement échoué près de Saint-Pol-de-Léon, 
et ceux de ses congénères qui s'en rapprochent ie plus (les 
Dauphins Orque, Globiceps et Fères), je n'oserai conclure que 
ce soit une espèce nouvelle. Les Cétacés que nous connoissons 
ont en général été peu observés par des personnes versées dans 
l'Histoire naturelle, ét les'savans auteurs qui seuls auroient pu 
les décrire avec précision, .n’élant presque jamais à portée de 
voir par eux-mêmes;: ont été-obligés, la plupart du temps, 
de baser leurs travaux sur les descriptions mal faites et les 
dessins inexacts ou incomplets de. ces observateurs superficiels ; 
il en résulle que leurs ouvrages, qui seroient d’un si grand in- 
térêt, s'ils étoient établis sur des données certaines, ont été 
sujets à une foule d'erreurs et présentent souvent beaucoup de 
confusion. Ainsi il est possible que le Dauphin que nous venons 
de décrire soit véritablement l'Orque, et que la figure donnée 
dans l'Encyclopédie (sur laquelle ont été copiées toutes les autres), 


Tome LXXXVII, JUILLET an 1818. K 


JOURNAL DE,PHYSIQUE,IDE CHIMIE 


7 
ue, celte figure, dis-je, soit inexacte. Bonnaterre l'avoit reçue 
see ainsi que la description qu'il en donne, et qui 
fut, faite sur un animal de cette espèce, pris à l'emboucliure 
de Ja Tamise en 1750. Si cette conjecture se trouve confirmée 
par les savans qui m'ont fait l'honneur de m'associer à leurs 
trayaux, j'aurai du moins la satisfaction de leur avoir procuré 
des :rénseignemens plus exacts sup un Cétacé jusqu'a présent 
mal: connu. ; 

: C'est dans cette intention que je joins à cette Notice, 
une seconde figure représentant le Dauphin Globiceps ; la So- 
ciété Philomathique en a fait graver une figure au simple trait 
dans le Bulletin des Sciences ; elle a été gravée d’après une es- 

_quisse envoyée par M. de la Fruglaye, et communiquée par 
M. Gillet Laumont; ce dessin est trop superficiel pour donner 
une idée juste de l'animal qu’il représente; j'ai pensé qu'on en 
verroit avec plaisir un autre plus fini et plus détaillé ; je l'ai 
fait d'après nalure sur un des/{reize individus de cette espèce, 
qui viennent d’échouer le 30 janvier dernier dans la baie de 
Paimpol, précisément au même lieu où se jetèrent les: soixante- 
dix qui furent pris en 18r2;:cet individu avoit 22 pieds de long. 

Dans un rapport que MM. Desmaret et de Blainville ont fait 
à la Sociélé Philomathique sur cette note de M. de Fréminville, 

ils ont, montré que l'espèce de Dauphin qui en fait le sujet, a 
été figurée dans Duhamel , Tratté des Péches , tome HE, pl. IV, 
qu’elle ne peu être rapprochée que du Globiceps, peut-être du 

Griseus, en un mot de loutes celles qui ont la lèvre formant 
une sorte de bourrélet on deomusean extrémemenit court, de 
manière qu'on-pourra en faire une petite section ‘dans le grand 
genre Dauphin; la première, ou les Marsouins ; n'ayant aucune 
trace de museau ; Ja seconde ; qui est celle à laquelle appartient 
le Dauphin de Fréminville, D. Freminvillianus, avec un rudi- 
ment de museau ; la troisième, les-Dauphins qui ont un museau 
plus alonge ; et enfin la quatrième, les Delphinorhynques , dont 
le musean extrêmement longebgréle, ressemble un peu à celui 
du Gavial, Dans un de nos Cahiers prochains , nôus publierons: 
le trayail de M.ide Blainville sur la famille:des Dauphins, dont 
M. Desmaret. a déjà donnéun extrait dans le Nouveau Dictionnaire 


d'Histoire naturelle de: M. Détenville. (R.) 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 75 
So 


NOUVELLES SCIENTIFIQUES. 
PHYSIQUE: 


Sur la Pesanteur ‘spécifique ‘des: cristaux ; par M. Danier. 


Uns nouvelle preuve que dans les sciences d'observation , la 
marche à priort conduit à des faits aussi curieux que celle à poste- 
riori, peut être tirée des résultats remarquables auxquels M. Daniell 
vient d'arriver.en cherchant une nouvelle théorie de la pesanteur 
spécifique des cristaux , d'après l’ingénieuse hypothèse de M. Wol- 
Jaston , que les atomes qui les composent sont de forme sphé- 
rique. En réfléchissant que dans les cristaux qui, pour la division 
mecanique, peuvent être divisés en tétraèdre. ou en octaèdre; 
ces deux figures sont circonscrites par des surfaces triangulaires, 
quatre pour le tétraèdre et huit pour l’octaèdre , et en consi- 
dérant maintenant les bases de ces triangles comme composées 
du même nombre de particules, comme l’un de ces solides 
est limité par quatre et l’autre par huit, il est évident, suivant 
l’auteur, que la superficie entière du dernier est exactement 
double de celle du premier. D'où il fut conduit à penser que 
des solides ainsi construits, devroient différer de pesanteur spé- 
cifique, à moins que le nombre de particules élémentaires de 
l'octaèdre ne soit pas exactement le double de celles du tétraèdre, 
ou, ce qui revient au même, à moins que le nombre des atomes 
dans un espace donné, ne soit égal dans l’une et l’autre struc- 
ture. Il est cependant très-facile de reconnoître que si l'on am- 
moncèle un certain nombre de boules sous la forme d’un té- 
traëdre et d’un octaëdre , le nombre de boules, dans le premier 
cas, n’atteindra pas la moitié de celui du second; ainsi, sup- 
posons , par exemple, que la base de chaque triangle soit formée 
de quatre boules, le tétraèdre n’en contiendroit que 20 et l'oc- 
taèdre 44; d'où l'on voit que ce dernier contient plus du double 
de particules sous une superficie double. La conclusion que 
tire M. Daniell de ce fait, et qui en effet a été l’origine de ses 
expériences, est que la pesanteur spécifique de l’octaèdre doit 
être plus grande que celle du tétraèdre. Le spath-fluor lui a 
fourni un moyen de. soumettre cette hypothèse à l'expérience. 
En effet, comme il est possible de réduire à volonté ce minéral 


K 2 


76 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


à la forme d’un tétraèdre ou d'un octaèdre, on pouvoit voir si 
la différence dans le nombre des molécules composantes, en- 
traine une différence dans la pesanteur spécifique , comme la 
théorie le vouloit. L'expérience faite avec toutes les précautions 
possibles, pour éviter toute cause d’erreur, en employant une 
balance extrémement délicate, a donné pour résultat, que la 
pesanteur spécifique d’une masse de spath-fluor divisée sous la 
forme d’octaèdre , est plus grande que celle de ce même mi- 
néral ayant la forme etats. En effet, ayant obtenu par la 
division mécanique d’une masse de spath-fluor vert, transparent 
et parfaitement libre d'adhésion à des corps étrangers , un té- 
traèdre , un rhomboïde , un octaèdre et un octaèdre alongé ou 
cunéiforme, M. Daniell a trouvé que la pesanteur spécifique de 
l'octaèdre cunéiforme étoit de 3,100, celle de l’octaèdre, 3,07; 
du tétraèdre, 2,909, et enfin celle du rhomboïde, 2,904. Dans 
le but de confirmer ce résullat extrêmement curieux, il prit un 
cube de spath-fluor décoloré, tailla quatre de ses angles solides 
et les réunit en un octaèdre régulier; en prenant la pesanteur 
spécifique de chacun de ces solides, il a trouvé 3,180 pour 
celle du cube, 3,242 pour les angles taillés, 3,261 pour l’oc- 
taèdre , 3,115 pour l’un des angles taillés, 5,111 pour le second, 
el 3,125 pour le troisième. D'où l’on voit que la pesanteur spé- 
cifique de ces différens solides , quoique pris dans un morceau 
identique et de composition parfaitement homogène, a varié 
suivant les lois déterminées par la théorie, résultat qu’on auroit 
été bien loin d'attendre, si les calculs n’avoient fait imaginer 
celte expérience pour prouver la fausselé ou la vérité de l’hy- 
pothèse. 

Les conséquences vérilablement aussi extraordinaires qu’in- 
téressantes, que M. Daniell tire de ses expériences répétées un 
grand nombre de fois sur le spath-fluor, et qui s'accordent pour 
démontrer qu'il augmente de pesanteur spécifique suivant que 
par la division mécanique on approche davantage de la forme 
parfaite de l'octaèdre, et vice versä, sont les suivantes : 1°. la 
pesanteur spécifique d’un corps varie suivant la variation de sa 
forme extérieure; 2°. les différentes parties d’une substance ho- 
mogène peuvent avoir une pesanteur spécifique différente; 3°. la 
gravité spécifique des cristaux peut varier par la seule super- 
position de l’un sur l’autre; ce qui, suivant M. J. L., qui a in- 
séré des observations critiques sur celte nouvelle théorie, dans 
les Annales de Physique de Thomson pour le mois de février, 
renverse les idée généralement admises jusqu'ici par les plus 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 97 
célèbres physiciens, sur la pesanteur spécifique des corps, et 
tend à faire admettre que la même substance peut changer de 
pesanteur spécifique presqu’à la volonté de l'opérateur. 


CHIMIE. 


Sur la condition nécessaire pour l'inflammation des gaz; par 


M. Tu. de GrorTuuss. 


Dans un Mémoire très-intéressant sur cette malière déjà si 
enrichie par les belles recherches de sir H. Davy, mais dont 
M. de Grothuss s’étoit déjà occupé antérieurement, ce chimiste 
regarde les conclusions suivantes comme pouvant être déduites 
de ses différens travaux, ainsi que de celles de son antagoniste. 

1°. La chaleur opère de deux manières bien distinctes, sur 
l'inflammabilité d'un mélange de deux espèces de gaz, c’est-à-dire 
en vertu de la libre expansion qu’elle produit elle-même (si cepen- 
dant celle-ci a lieu dans des gaz réchauffés, l’inflammabilité 
diminue), et en vertu d’une certaine action particulière, ou ac- 
tion d'accroître sa propre inflammabilité; ce qui peut arriver 
par expansion ou compression , ou par l'électricité excitée, ou 
par la réunion de toutes ces forces. 

2°. La progression de deux forces, quand les gaz sont com- 
primés par l'atmosphère , suit des lois bien différentes, l’une pré- 
sentant une proporlion arithmétique , et l’autre une géométrique, 
de telle sorte que l’accroissement ou la diminution de la chaleur 
doit avoir des momens pendant lesquels une force l'emporte 
sur l’autre. 

3°. L'inflammabilité du gaz s'accroît tant que des obstacles 
s'opposent à la dilatation en vertu de la chaleur, et vice versä. 

4. L’inflammation du gaz ne pourroit arriver par la force 
toujours croissante de la chaleur , s’il n’y avoit pas d'obstacles 
(la résistance de l’atmosphère) qui s’opposassent à la parfaite 
et libre dilatation. 

5°, L'inflammation des gaz, abstraction faite de l’aflinité chi- 
mique, doit être considérée comme le résultat de Ja somme 
de deux forces positives et d’une négative ; c’est-à-dire la force 
particulière de la chaleur pour produire l'inflammation, plus 
celle de la résistance, qui s'oppose à Ja dilatation, moins la 
dilatation elle-même. 

6°. Le mélange gazeux raréfié, qui ne peut plus s’enflammer 
par une chaleur rouge, ne pourroit vraisemblablement pas non 
plus être allumé par des étincelles électriques, parce que leur 
force est instantanée , et que toutes les particules gazeuses n’ont 
pas le temps de se dilater. 


78 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

7°. Si le poids de l'atmosphère s’accroissoit peu à peu jus- 
qu'a l'infini, tous les gaz combustibles brüleroient l’un après 
l'autre au-dessous du degré de leur combustibilité (à la même 
température). Mais en estimant aussi les températures, nonobstant 
un poids atmosphérique excessif donné , ils pourront encore 
subsister comme gaz combustibles. 

8. L'inflammabilité des gaz, toutes choses égales , ne dépend 
pas seulement de la grandeur de l’espace (diminution de den- 
site) dans lequel ils sont répandus, mais encore de la nature 
particulière de cet espace. Ainsi, par exemple, un espace rempli 
de gaz acide carbonique, peut être plus petit qu’un espace vide, 
ou qu’un plein de gaz hydrogène, quand une portion inflam- 
mable d’un 6az par sa diffusion dans un tel espace doit perdre son 
inflammabilité. (Ænn. de Phys. de Gilbert, 4° Cahier, 1818.) 


Acide purpurique. 


Un Mémoire du D' Prout sur un nouveau principe acide, 
fut lu à la Société royale de Londres, le 11 juin 1818. 

La belle substance pourpre, produite par l’action de l'acide 
nitrique et de la chaleur sur l'acide lithique, a été connue des 
chimistes depuis long-temps. Le Dr Prout a montré que cette 
substance étoit un composé d’un acide particulier et d'ammo- 
niique. 

Ce principe acide qui peut résulter aussi de l'acide lithique 
par le chlore et par l'iode, possède la propriété remarquable 
de former de beaux composés pourpres avec les alcalis et avec 
les terres alcalines; de la le nom d’acide purpurique adopté par 
le D' Prout, et qui lui fut suggéré par le D' Woilaston. 

L’acide purpurique peut, au moyen de l'acide sulfurique , ou 
au moyen de l'acide muriatique, être séparé du purpure d’am- 
moniaque, mentionné ci-dessus. Il existe ordinairement sous la 
forme d'une pourpre légèrement jaune ou couleur de crème, il 
est excessivement insoluble dans l’eau , et en conséquence il n’a 
point de saveur, et il n’agit point sur le papier de litmus, pus 
décompose promptement les carbonates alcalins, à l'aide de la 
chaleur. Il est soluble dans les acides minéraux qui sont forts 
et dans les solutions alcalines , mais non en général dans les acides 
affoiblis; dans l'alcool, il est insoluble. Exposé à l'air, il prend 
une couleur pourpre, probablement par l’action de l’'ammo- 
niaque. Soumis à la chaleur, il se décompose et il donne du 
carbonate d’ammoniaque, de l'acide prussique et un peu d’un 
liquide d'apparence huileuse. Calciné avec l’oxide de cuivre, on 
trouva qu'il contenoit: 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, #0 


FIN OBENC. ADS. 0e eee que di dénié 
CAPOTE. EEE Cle ie 27 27 
OFIBERC LU MR eee, sf + sure RO AO 
AZOTE TEEN MEL Ue. 2 ect an 1 CAEN 


Les purpurates alcalins, comme on l'a déjà observe ; forment 
tous des dissolutions d’une belle couleur pourpre. Ils sont sus- 
ceptbles de cristalliser, et leurs cristaux possèdent quelques 
propriétés remarquables. Le purpurate d'ammoniaque cristallise 
en prismes quadrangulaires, qui, vus par la lumière transmise, 
paroissent d’un rouge intense de grenat; mais s'ils sont vus par 
la lumière réfléchie, deux des faces opposées présentent un 
beau vert, tandis que les deux autres faces opposces conservent 
leur couleur naturelle. Les autres purpurates alcalins semblent 
posséder celle curieuse propriété. Les. purpurates métalliques 
sont en général remarquables par leur solubilité et la beauté 
de leurs couleurs. Le purpurate de zinc est d'un beau jaune, 
le purpurate d’étain d’un blanc de perle; les autres purpurates sont 
plus onu moins d'une couleur rouge. 

Le Dr Prout pense quil est probable que cet acide forme 
la base de plusieurs couleurs animales et végétales. La couleur 
du sédiment de l'urine dans la fièvre, semble être dù au pur- 
purate d'ammoniaque. Le D' Prout pense aussi que quelques- 
uns de ses sels peuvent être employés dans la peinture et dans 
la teinture , parce qu'ils paroissent posséder de fortes aflinités, 
spécialement pour les substances animales. (Ænnals of Philosophy, 
juillet, 1818.) 


Sur la combinaison de l'Oxigène avec quelques Acides; par 


«+ M. Tusnarn. 


M. Thenard a communiqué à l’Académie des Sciences, dans 
sa séance du 24 juillet, des observations extrémement intéres- 
santes sur la combinaison de l'Oxigène avec quelques acides. 
Il obtient ces sortes de combinaisons à l'aide du deutoxide de 
barium que l’on fait en chauflant de la baryte ou protoxide 
de barium avec de l'Oxigène, et qui contient, à peu de chose 
près, deux fois autant d'Oxigène que le protoxide. Ainsi, par 
exemple, pour obtenir lacide nitrique oxigéné, celui dont 
il paroît s’être le plus occupé jusqu'ici, il faut prendre du deu- 
toxide de barium, le deliter en y versant un peu d'eau, ce'qui 
a lieu/sans dégagement de chaleur ;! le délayer ensuite avec cinq 
ou six fois son poids du même liquide, y verser de l'acide nitrique 
foible goutte à goutte; la matière se dissout ; en agitant un peu, on 
obtient un sel neutre sans dégagement d'Oxigène. Si l'on verse 


80 JOURNAL DEF PHYSIQUE, DE CHIMIE, @lC. 


ensuile dans la liqueur une quantité convenable d'acide sulfu- 
rique, alors il se produit un précipité de sulfate de baryte, 
sans qu'il se dégage non plus d'Oxigène , et il reste un acide 
nitrique oxigéné que l'on concentre en le plaçant dans une cap- 
sule sous le récipient de la machine pneumatique, mettant de la 
chaux dans une autre capsule et faisant le vide. 

Les propriétés principales de cet acide nitrique oxigéné sont 
les suivantes : il a tout-à-fait l'aspect de l'acide nitrique ordi- 
naire; il rougit très-fortement la teinture de tournesol. Mis en 
contact avec le cuivre, l'argent, le zinc il les attaque de suite 
sans effervescence ; cependant lorsque l'acide est trop concentré, 
il y a un peu d'Oxigène dégagé, parce que le liquide s’échaufle. 
Il se combine avec toutes les bases salifiables, et sa capacité de 
saturation semble assez peu différer de celle de l'acide nitrique or- 
dinaire. Mais si l’on vient à chauffer ces combinaisons, l'Oxigène se 
dégage et l’on obtient des nitrates ordinaires. La quantité d'Oxigène 
contenue dans cet acide déduite de celle contenue dans la baryte, 
peut être évaluée à trois volumes pour un d'azote. ê 

M. Thenard a aussi obtenu des acides phosphorique, borique 
et même acélique oxigénés; mais le plus singulier est celui que 
forme l'acide hydro-chlorique : en le traitant par le deutoxide 
de barium, il ne se dégage pas de chlore, et en y meltant 
de l'acide sulfurique on obtient de l'acide hydro-chlorique ox1- 
géné. Il a quelques propriétés de l'acide nitrique oxigéné ; il est 
fort acide; quand on le met avec des bases salifiables, il s’y unit 
et l'Oxigène ne s’en dégage que par la chaleur; avec les métaux, 
il se forme des hydro-chlorates sans dégagement d'Oxigène ; avec 
l'oxide d'argent il y a une effervescence considérable , il se fait un 
chlorure d'argent, et il y a de l'Oxigène dégagé; il paroît qu'il 
dissout l'or, mais seulement au bout de quelques jours, ou du 
moins la liqueur se colore en jaune. ; 

On obtient les acides fluorique et sulfurique oxigénés en pre- 
nant de l'acide hydro-chlorique oxigéné, et en y mettant du fluate 
ou du sulfate d'argent. À 

M. Thenard pense qu'il est probable que la plupart des acides 
minéraux, et même végétaux, sont susceptibles de se combiner 
avec l’oxigène. d Ft 

On ne peut obtenir les combinaisons de ces acides oxigénés 
avec les bases salifiables à l’état solide, parce qu’il paroît qu’elles 
diminuent beaucoup l'affinité de ces acides pour l'Oxigène, et 
qu'au moment où la cristallisation se fait, l'Oxigène se dégage, 
et l’on n’a que des sels ordinaires. 


De l'Imprimerie de M=* Ve COURCIER, rue du Jardinet, 


dournel de Phisique, Fa 
ss Fig. Z: 


Fy.4. 


JOURNAL 


DE PHYSIQUE, 
DE CHIMIE 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 


AOÛT an 1818. 


FIN DE L'EXAMEN CRITIQUE 


Des Hypothèses imaginées pour expliquer l'apparence 
connue sous le nom de gueue ou chevelure des Comètes ; 


Par H. FLAUGERGUES. 
10°. Hypothèse de Jacques Bernoulli. 


Nora. Les citations sont renvoyées à la fin du Mémoire. 


Le grand géomètre Jacques Bernoulli, dans son Æssai d'un 
nouveau Système des Comètes, qui fut le premier ouvrage qu'il 
publia, et dans lequel il suppose que les comètes sont les sa- 
tellites d’une grosse planète si éloignée au-delà de Saturne, qu’on 
ne peut l’apercevoir de la terre, et dont les satellites ne de- 
viennent apparens que dans la partie inférieure de leur orbite, 
a essayé d'expliquer la formation de la queue des comèles ; sui- 
vant lui, le Soleil est placé au centre de son tourbillon, comme 
du feu dans un immense foyer; à la chaleur qui s’en exhale, 
les planètes se cuisent continuellement ; et « comme d'une mar- 
» muite pleine de viandes qui est suspendue sur un feu de cui- 
» sine, il s’exhale continuellement, ainsi que des buches em- 
» brasées qui sont au-dessous , de la fumée qui s’altache au tuyau 
» de la cheminée et aux soliveaux du plancher, et y forme de 
» Ja suie (1), » de même, les planètes en se cuisant au feu du 


Tome LXXXVII. AOÛT an 1818. L 


S » 


82 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CNIMIE 


soleil, exhalent de la fumée et des vapeurs que la force cen- 
trifuge du tourbillon solaire pousse aux confins de ce tour- 
billon ; arrivées à ces confins, elles ne peuvent pas aller plus 
avant, parce qu’elles y sont retenues par la résistance des tour- 
billons voisins ; ces exhalaisons et ces fumées restent donc fixées 
à ces limiles comme sur une vote ; lorsqu'une comète descend 
vers son périhélie, elle rencontre ces .exhalaisons, les entraîne 
avec elle, et elles forment bientôt un large disque autour de 
ce noyau; à ce disque se joignent sans cesse de nouvelles exha- 
laisons récemment formées, et beaucoup plus rares que les pré- 
cédentes, c'est ce qui fait que le bord du disque d’une comète 
est si confus. Ce disque est retenu par légale pression des glo- 
bules célestes, dans un certain état d'équilibre qui fait qu'il tourne 
toujours une de ses faces planes au soleil, et qu’il n’y a que 
cette face qui soit éclairée, lorsque ce disque est vu oblique- 
ment de la terre; la partie qui est au-delà du noyau de la co- 
mète par rapport à nous, est cachée, ce qui fait qu'on ne voit 
qu'une portion de ce disque en forme de queue du côté opposé 
au soleil, etc., êtc. a 

Qu’objecterons-nous à une pareille explication? Qu'il n’existe 
point de tourbillons ; que les planètes ne sont pas cuites par le 
soleil, comme des viandes dans une marmite; qu’elles ne fument 
pas; qu'il n’y a pas de voûte pour retenir la suie que les co- 
mètes doivent ensuite ramener. Qu'un disque vu obliquement 
paroït ovale, et que dans le cas où le corps de la comète auroit 
cette figure et seroit vu de la terre obliquement, la partie éclairée 
par le soleil représenteroit l'apparence de deux queues, l’une 
au-dessus et l’autre au-dessous du noyau de la comète.... En 
faut-il davantage? je crois que j'en ai déjà beaucoup trop dit 
sur un système depuis long-temps justement voué à l’oubli, et 
qu'on me reprochera peut-être d'en avoir liré pour quelques 
instans. 

11°. Âypothèse de M. de Mairan. 


M. Dortous de Mairan, dans son 7raité physique et histo= 
rique sur l'Aurore boréale, ouvrage, beaucoup plus recommen- 
dable par la multitude de faits et d'observations curieuses qu'il y 
a insérés, que par les idées systémaliques qu'il s’éloit formées 
sur l’origine de ce phénomène, prétend que la matière de la 
queue et de la chevelure des comètes , n’est autre chose que celle 
de l'atmosphère du soleil ou de la lumière zodiacale, que la*co- 
mèle s'approprie en passant proche de cet astre, par l'effet de 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 83 


son attraction (2), et pour expliquer la direction de la queue 
l'opposite du soleil, il suppose que « cette matière (la lumière 
» zodiacale) est poussée ou chassée des couches supérieures de 
» l'atmosphère apparente des comètes , soil par l'impulsion des 
» rayons solaires, comme le croyoit Képler de l'atmosphère 
» propre de la comète, et comme le seroit une vraie chevelure 
» exposée au vent, soit par voie d’ascension, comme M. Newton 
» l’explique des fumées et des vapeurs qu'il fait élever de Ja 
» comète à l'approche du soleil , soit par toute autre cause que ce 
» soil (3). » 

On voit par cet exposé, que le système de M. de Mairan, sur 
la formation des queues des cometes, est un système mixte, 

areil à celui de Grégory, et composé de même, de la réunion 
de explications de Képler et de Newton ; il est donc sujet aux 
mêmes diflicultés que le système de Grégory, c’est-à-dire à 
toutes celles qu’on peut objecter, et que nous avons vues contre 
les hypothèses sur la formation de la queue des comètes de Képler 
et de Newton. De plus, l'hypothèse de M. de Mairan sur la 
formation de l'atmosphère des comètes, présente des diffi- 
cultés qui lui sont propres , et qui doivent la faire rejeter; car, 
premièrement, il est de fait, et M. de Mairan en convient (4), 
que les planètes Mercure et Vénus, toujours plongées dans la 
lumière zodiacale, doivent se charger continuellement de cette 
matière, et par conséquent ces deux planètes, beaucoup plus 
proches du soleil que la plupart des comètes, devroient avoir 
constamment une atmosphère beaucoup plus grande que celle 
qu'on voil autour des comètes , et une queue à l’opposite du 
soleil, qui seroit particulièrement très-apparente lorsque ces 
planètes sont en quadrature. Or, on ne voit et on n'a jamais 
vu aucune de ces apparences. Secondement , il est pareïllement 
de fait que les comètes paroissent environnées de cette nébu- 
losité que M. de Mairan croit être un amas de matière de la 
lumière zodiacale, long-temps avant qu'elles aient atteint cette 
lumière zodiacale, qui n’occupe, comme on sait, qu’une très- 
petite partie du système solaire (5). Et plusieurs cometes même, 
ont paru avec cette nébulosité, avec des queues méme fort longues 
et fort larges, quoique à raison de la position de leurs orbites 
et de leur éloignement du soleil dans leur périhélie, elles n'aient 
jamais, pu atteindre l’atmosphère du soleil ou la lumière zodia- 
cale; telles sont, entre autres, les comètes mémorables des 


années 1664 et 1811; ce qui détruit totalement l’explication de 
M. de Mairan. 


go 


L 2 


84 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


L'idée de M. de Mairan n'est pas absolument neuve; long= 
temps auparavant, le père Scheiner avoit dit dans son grand 
ouvrage sur les taches du soleil (6), que la queue et la che- 
velure des comètes éloient produites par les rayons du soleil qui 
se joignoient (conflatur) à la comète. 


12°. Hypothèse du D' Gowin Knigt et de M. André Oliver. 


La comète de 1769 présenta un phénomène remarquable 
dans la longueur prodigieuse de sa queue, qui me paroît avoir 
été plus grande que dans aucune autre comète connue ; cette ap- 
parence si frappante attira l'attention des physiciens surle problème 
de trouver la cause de la queue des comètes, oublié depuis quelque: 
temps. Le D' Gowin Knigt, membre de la Société royale de 
Londres, qui travailloit alors à un Traité (7), dans lequel il 
tächoit d'expliquer tous les phénomènes de la nature par l’at- 
traction et la répulsion, imagina que la matière qui forme la 
queue des comètes étoit repoussée en arrière de leur noyau 
relativement au soleil, par l'effet d’un fluide répercursif, éga- 
lement distribué dans toute l'immensité de l’espace ; je ne puis 
m'élendre davantage sur ce système, n'ayant pas le livre du 
Dr Knigt; mais peu de temps après (en 1772), M. André Oliver 
publia à Salem, dans la Nouvelle-Angleterre, un petit ouvrage 
dans lequel il emploie pour l’explication de la queue des co- 
mètes, le même principe que le Dr Knigt; seulement il a tâché, 
dit-il, de l'appuyer sur des raisonnemens plus philosophiques, 
et de démontrer plus au long, l'accord de cette explication: 
de la queue des comèles tirée de ce principe, avec les phéno- 
mènes que présente celte queue ; ce pelit ouvrage a été traduit en 
francois par M. Jean Allamand, professeur de Physique à Leyde, 
et publié en 1777 sous le titre d'Æssai sur les Cometes (8). C’est 
d'après ce livre que je vais examiner et tàcher d'apprécier les: 
opinions de MM. Knigt et Oliver. 

La première supposition que fait M. Oliver, est celle que 
tous les corps célestes, le soleil, les planètes, les comètes, etc., 
sont chacun environnés d’une atmosphère proportionnée à leur 
volume (9); cette supposition ne paroit pas pouvoir être re— 
fusée ; l'existence de l'atmosphère autour de la terre est évidente. 
L'immense atmosphère du soleil est attestée par la lumière z0o— 
diacale. On a des grandes probabilités, ou plutôt la certitude , 
de l'existence d’une atmosphère autour de la planète Mars (10). 
On a également de fortes probabilités sur l’existence d’une at- 
mosphère autour des autres planètes. La nébulosité des comètes: 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 85 


ne peut être que de vastes atmosphères qui entourent leurs : 
noyaux; il est donc très-probable que tous les corps célestes 
sont chacun entourés d’une atmosphère, ainsi que le suppose 
M. Oliver. 

La seconde supposition, est celle que ces atmosphères du 
soleil, des planètes et des comètes sont absolument semblables 
à l'atmosphère terrestre , c'est-à-dire composées d'air (11) ou 
d'un fluide élastique, dont les particules pèsent sur la comète 
ou la planète, en même temps qu’elles font effort pour se di- 
later et s’écarter les unes des autres, en vertu de leur ressort, 
en sorte que le fluide atmosphérique devient toujours plus rare, 
ä mesure qu'il s'éloigne du corps céleste auquel il est attaché, 
et que sa densité est toujours proportionnelle au poids dont il 
est chargé, comme l'expérience démontre que cela a lieu; en: 
effet, dans l'air de notre atmosphère (12), cette supposition est 
Bien naturelle , et peut pareïllement être admise sans difficulté. 

L'auteur admet encore l'hypothèse de Newton sur la nature: 
des fluides élastiques (13), que ce grand homme considère comme: 
composés de molécules qui se repoussent mutuellement en tous 
sens; celte définition est, à la vérité ,‘bien hypothétique ; mais 
toutes celles qu’on peut imaginer sur la cause de l'élasticité ou 
du ressort, ont également le même défaut, et celle de Newton: 
a du moins l’avantage de rendre parfaitement raison de la loi 
de raréfaction que suivent les: fluides élastiques à mesure qu'ils: 
sont plus éloignés des corps sur lesquels ils’ pèsent. 

Appuyé sar ces supposilions, M. Oliver prétend que lorsqu'une 
comète descend dans l’atmosphère du soleil, l'atmosphère dé 
celte comète sera repoussée par l'atmosphère solaire; de manière 

ue celte atmosphère cométaire perdra sa figure sphérique, pour 

revéur celle d’un sphéroïde oblong, dont le grand axe sera le 
diamètre qui passe par le soleil; en sorte que le noyau de la 
comète ne sera plus au centre de son atmosphère, mais beau- 
coup plus près du soleil que ce centre; la partie la plus éloignée 
du soleil étant devenue plus libre, les particules dont elle est 
composée s’éloigneront les unes des autres par leur répulsion 
mutuelle, Ce qui éloignera encore du noyau, l'extrémité du 
sphéroïde opposée au soleil; de plus, ces particules s’éloigneront 
les unes des autres par leur répulsion mutuelle: en sorte que 
de loutes ces répulsions, il en résultera, suivant M. Oliver, 
l'apparence d’une queue longue et diversente, semblable enfin 
à celle qu'on observe aux comètes (14). 

Voilà une explication bien simple; mais est-elle bien fondée? 


86 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


on a bien des raisons d'en douter. Premièrement, M. Oliver 
suppose, sans en donner aucune preuve, que l’atmosphère d’une 
comèle en pénétrant l'atmosphère du soleil, ne se mélera pas 
avec cette dernière atmosphère, et que quoique l'atmosphère 
de la comète, ainsi que celle du soleil, soit composée de par- 
ticules fort éloignées les unes des autres, et qui laiséent entre 
elles de grands intervalles vides, cependant ils se comportent 
ensemble comme deux corps pleins et résistans, ce qui est une 
contradiction manifeste. On conçoit bien que deux fluides con- 
tinus, comme l’eau et l'huile, qui n’ont point d’aflinité entre 
eux, peuvent se trouver ensemble et se traverser sans se méler, 
mais on ne voit pas des gaz rester séparés les uns des autres, 
pour peu qu'ils soient agités ensemble ; ils se mélent et ne se. 
Séparent plus. Les particules de l'atmosphère de la comète , en 
entrant dans l'atmosphère du soleil, et partiellement les par- 
ticules de l'atmosphère du soleil, doivent s’insinuer , les premières 
dans les interstices que laissent entre elles les particules de 
l'atmosphère du soleil, les secondes doivent s'insinuer dans les 
interstices que laissent entre elles les particules de l'atmosphère 
de la comète, et dans cet état, les répulsions mutuelles de ces 
particules ainsi mêlées, doivent parvenir par leur combinaison, 
avec leur pesanteur vers la comète et vers le soleil, à l’état d’équi- 
libre, en sorte que finalement l'atmosphère doit conserver ou 
reprendre au bout d'un temps très-court, la figure à peu près 
sphérique qu’elle avoit avant que d’entrer dans l'atmosphère du 
soleil, ce qui détruit par le fondement l'explication hasardée par 
M. Oliver. 

2°. Quand même nous supposerions que l'atmosphère de la 
comète ne se mêle pas avec l'atmosphère du soleil, mais qu'il 
forme toujours un corps séparé, comme si cette atmosphère 
étoit renfermée dans une enveloppe parfaitement flexible; on 
trouvera, à la vérité, que dans cette hypothèse, cette atmo- 
sphère s'alongeroit un peu en entrant et en parcourant l’atmo- 
sphère du soleil, et cet alongement auroit lieu suivant la ligne 
qui joint les centres du soleil et de la comète; mais cet alon- 
Er ne pourroit être que très-peu de chose, car puisque, 

après l'hypothèse de M. Oliver, la répulsion des particules 
de l’atmosphère solaire s'exercent en toutes sortes de seus , il 
est clair que si les particules qui sont entre le soleil et l'atmo- 
sphère de la comète, repaussent les particules de l'atmosphère 
de celte comète, de manière à les éloigner du soleil, les par- 
ticules de l'atmosphère du soleil qui se trouvent au-delà de l’at- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 78 


mosphère, par rapport au soleil, repoussent les particules de 
Vatmosphère cométaire , dé maniere à les porter vers cet aslre, 
tandis que les répulsions des particules latérales de l'atmosphère 
solaire, empêchent les particules de l'atmosphère cométaire de 
s'écarler par côté, en sorle que lorsque toutes ces répulsions 
ou pressions seront parvenues à se contrebalancer mutuellement 
et à se faire équilibre, il n’en résultera d'autre différence dans 
la figure sphérique primilive de l'atmosphère cométaire , seule- 
ment que celle atmosphère sera un peu alongée dans la partie 
la plus éloignée du soleil, à raison de ce que la densité de l'at- 
mosphère du soleil étant un peu moindre dans celle partie, 
comme élant un peu plus éloignée du soleil que dans le lieu 
contigu .à la partie de l'atmosphère de la comète la plus proche 
du soleil, la pression qui tend à pousser les particules de l’at- 
mosphère cométaire vers le soleil, est un peu moindre que la 
pression qui tend à les éloigner; mais cette différence ne peut 
être que bien légère, et il est impossible que par l'effet de cette 
différence de pressions , l'atmosphère de la comète puisse prendre 
la forme alongée et divergente que prend presque toujours la 
queue des comètes. 

5°. M. Oliver n’assigne pas la loi suivant laquelle la répul- 
sion doit décroitre relativement à l'augmentation de la distance ; 
il permet de choisir entre la raison simple, la doublée, la tri- 
plee, eic.; mais quelle que soit cette loi, il est au moins très-sùr 
que la répulsion de l'atmosphère du soleil est la même, à égales 
distances de cet astre, et par conséquent la même à des in- 
tervalles de temps égaux, avant et après le passage de la co- 
mèle au périhélie. Donc si la queue des comètes éloil un effet 
de la répulsion des particules de l'atmosphère du soleil, cette 
queue, au bout d'un temps déterminé, après le passage au pé- 
rihélie, devroit avoir la même longueur qu’elle avoit à un in- 
tervalle de temps égal avant le passage au périhélie ; cependant 
il est certain que les queues des comètes mesurées à des inter- 
valles de temps égaux , avant et après le passage au périhélie, sont 
toujours plus courtes dans le premier cas que dans le second. 

&. Si la répulsion de l'atmosphère du soleil sur l'atmosphère 
d'une comète pouvoit y produire une queue, cette répulsion 
devroit de même alonger en queue à l'opposite du soleil, l’at- 
mosphère des planètes qui, d'après M. Oliver , sont aussi plongées 
dans celle atmosphère solaire. Cependant on ne voit point de queues 
aux planètes, pas même à Mercure et à Vénus , qui sont néan- 
moius beaucoup plus proches du soleil qu'un grand nombre de 


88 JOURNAL DÉ PHYSIQUE, DE CHIMIE 


comètes dans leur périhélie. M. Oliver ne s’est pas dissimulé 
celle objection, il convient même que dans son hypothèse les pla 
nèles ont une queue; mais, selon lui, celle queue est trop 
pelile pour être aperçue; on ne conçoit pas cependant, com- 
ment la queue de la terre, si elle en avoit une, pourroit se 
dérober à nos regards, surlout avant le lever du soleil, et après 
son coucher, lorsqu'elle seroit éclairée des rayons du soleil, 
et le reste de l'atmosphère dans l'ombre. Pour prouver cepen- 
dant son assertion, M. Oliver, d’après la supposition que la lon- 
gueur des queues doit être proportionnelle au volume de l'at- 
mosphère, fait un calcul duquel il résulte que la répulsion de 
l'atmosphère du soleil. sur l'atmosphère d’une planète de la gros- 
seur de la terre, et environnée d’une atmosphère semblable, y 
produiroit une queue qui , vue à la distance de la terre au soleil, 
ne paroitroil que sous un angle de 8” 18/”, « angle qu'il n’est pas 
» possible (dit-il) d'apercevoir même avec les meilleurs instru- 
» mens (15).» On pense bien que les données que M. Oliver 
a choisies pour ce calcul, sont celles qui sont les plus favo- 
rables à son opinion, et qui tendent à donner le moins d’étendue 
à la queue de la planète; mais pour ne pas chicaner la dessus, 
admelions sa supposition, quoique tout-à-fait gratuite, de la 
proportionnalité de la longueur de la queue au volume de l'at- 
mosphère et tout son calcul, et supposons qu’effectivement la 
répulsion de l'atmosphère du soleil alonge, par exemple, l’at- 
mosphère de Vénus [ planète qui est à peu près égale à la terre, 
et qui est environnée d’une grande atmosphère (16)] en une 
queue dont la longueur, vue de la terre lorsque Vénus est en 
quadrature , soutend un angle de 8” 18". Si on observoit cette pla- 
nèle avec une lunette achromatique ordinaire , qui grossit 120 
fois le diamètre apparent des objets, cette queue paroitroit sous 
un angle de 16' 36”, et observée avec les télescopes de 22 pieds 
de MM. Herschel et Schroëter, dont le grossissement ordinaire 
est de mille fois, la longueur de cette queue paroïtroit dans 
ces instrumens soutendre un angle de 2° 15/ 20". Cette queue 
seroit donc bien sensible avec la lunette, et beaucoup plus avec 
les télescopes, contre l’assertion contraire de M. Oliver. Donc 
puisqu'on n’a jamais vu celte queue de Vénus, quoique cette 
planète ait été souvent observée par les astronomes les plus at- 
tentifs, et avec les meilleurs instrumens, non plus que dans les 
autres planètes, on doit conclure que cette queue n'existe pas, 
et par conséquent que si la répulsion prétendue de l'atmosphère 
solaire, ne peut alonger en queue l’atmosphère de Vénus, ni 

l'atmosphère 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 89 


l'atmosphère d'aucune autre planète; cette répulsion ne peut 
non plus produire la queue des comètes. 

5°. Cette queue ou l'alongement du côté opposé au soleil des 
atmosphères de Vénus, de la terre et des autres planètes, qui 
doit nécessairement avoir lieu dans l'hypothèse de M. Oliver, et 
qu'il prétend être de nulle considération, attendu que cette queue, 
vue à la distance de la terre au soleil, ne soutend qu’un angle 
de 8" 18”, auroit cependant, dans cette supposition, 1390 lieues 
de longueur, puisque le demi-diamètre de la terre, qui est de 
1452 lieues, ne soutend à la même distauce qu’un angle de 8",55 
(égal à la parallaxe horizontale du soleil); d’après cela, l'at- 
mosphère de la terre, que l’on croit communément avoir 15 
lieues de hauteur, auroit 1405 lieues de hauteur dans la partie 
opposée au soleil, et beaucoup moins de 15 lieues dans la 
parlie éclairée par les rayons de cet astre. Or, quelque raréfiée 
qu'on suppose que soit la matière qui formeroit la queue de 
J'atmosphèere terrestre, une si prodigieuse différence de longueur, 
doit en apporter dans les pressions des colonnes d'air atmosphé- 
rique, et celles qui ont 1405 lieues de hauteur doivent être 
nécessairement plus pesantes que celles qui ont moins de quinze 
lieues; par conséquent, si cette queue existoit, le baromètre 
devroit se tenir beaucoup plus élevé dans les lieux du globe 
terrestre opposés au soleil, que dans ceux qui se trouvent du 
côté de cet astre; et dans un même lieu, le baromètre devroit 
être constamment plus élevé à minuit qu'à midi. Cependant la 
hauteur moyenne du baromètre, à ces deux heures opposées , 
est sensiblement la même, et il n'y a de différence, que celle 
qui résulte des causes variables qui ont lieu également à ces 
deux époques du jour civil. Cette queue est donc une chimère, 
el puisque son existence est une conséquence nécessaire de l'hy- 
pothèse de M. Oliver, on doit en conclure que celte hypothèse 
n’a de même aucune réalité. 


15. Hypothèse de M. Bénédict Prévot. 


M. Bénédict Prévot , professeur de Physique à la Faculté de 
Montauban, a imaginé qu'une cométe pourroit bien être une 
masse globuleuse fluide ou solide, environnée d’une atmosphère 
sphérique immense, d’uu diamètre au moins double de la lon- 
gueur de la queue; cette atmosphère est, selon lui, composée 
d'un air progressivement raréfié, eu allant de la comète ou du 
centre à la circonférence. 

« Maintenant, dit-il, que l'air de la comète tienne comme 


Tome LXXXVII. AOUT an 1818. M 


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JOURNAL DE PNYSIQUE, DE CHIMIE 


le nôtre, de l’eau en dissolution, c’est-à-dire une certaine 
quantité d’eau dissoute ou suspendue, qu'il en soit saluré, 
sil est également échauffé de toutes parts, et si la chaleur 
est suflisante pour que la dissolution soit parfaite, il n’y aura 
encore rien de visible; mais si, par une cause quelconque, 
cerlaine région de ce globe fluide vient à se refroidir, il s’y 
formera aussitôt des nuages. .,, Dans un globe de plusieurs 
millions de lieues de diamètre, quelque perméabilité qu’on 
lui suppose, les parties les plus éloignées du soleil ne seront 
pas pénétrées d'une aussi grande quantité de lumière, ni, 
conséquemment, à en juger par ce qui se passe sur la terre, 
aussi échauffées que les plus voisines du bord ; d’abord à cause 
de l'éloignement même, et parce que plus la lumière aura 
de fluide à traverser pour arriver des parties antérieures aux 
postérieures, moins il en demeurera pour ces dernières. La 
partie postérieure du globe, la partie opposée au soleil, est 
donc celle où il doit se former le plus de vapeurs visibles 
ou de nuages. Ces nuages réfléchissant pendant l'obscurité 
d'une belle nuit, quelques-uns des rayons qu'ils reçoivent 
du soleil, nous paroissent lumineux ou phosphorescens. » 
....-. J'appelle axe, la ligne droite qui joint le centre du 
soleil et celui du globe d'air; la plupart des rayons lui par- 
venant à peu près parallèlement à cet axe, il est clair que 
le long de celte ligne et aux environs, la lamière inter- 
ceplée par les parties antérieures, n'arrive au côté opposé 
qu'après avoir subi une diminution d'autant plus grande, que 
l'épaisseur qu'elle eût à parcourir est plus considérable, et 
qu’elle doit avoir rencontré vers le centre un air plus con- 
densé; il n’en est pas de même de la lumière qui traverse 
le globe dans le voisinage de son équateur. Son trajet est d’au- 
tant plus court, qu'elle passe plus près de la circonférence 
de cet équateur; 1l y a par conséquent dans ces régions, 
moins de lumière interceptée en avant; toute l'épaisseur y 
est réchauflée de part et d'autre, et il ne s'y forme pas de 
nuages; car de quelque manière qu'on explique la génération 
de la chaleur par la lumière, c’est (toutes choses égales d’ail- 
leurs) dans l'air où il arrive le plus de lumiere, qu'il y a le 
plus de chaleur produite, et c’est dans la partie la moins 
chaude d’un aïr saturé d'humidité, qu'il se forme le plus de 
nuages visibles; ce sera donc en général le Jong de l'axe 
postérieurement, qu'il y en aura davantage; la masse de ces 
vapeurs ou la queue de la comète aura donc une forme alon- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. ot 


gée. Une autre cause qui se joint à celle dont nous venons 
» d'apprécier les effets, c’est l'attraction du soleil ou les marées 
de cette atmosphère (cométaire), qui doivent être propor- 
tionnées en quelque sorte à son immense profondeur ; elle 
doit donc prendre une forme alongée dans le sens de la 


» vus (17). » ; 

oilà le système de M. Bénédict Prévot, sur la cause qui 
produit la queue des comètes; il ne paroît pas qu'il ait eu beau- 
coup de sectateurs , el il ne peut guère en avoir parmi les pby- 
siciens. Supposer des globes de 40, 60, 100 millions de lieues 
de diamètre pour former la queue d'une comète, qui ne peut 
occuper qu'une bien petite portion de ces globes, c’est prendre 
l'opposé de la nature, qui n’emploie que de petits moyens pour 
faire de grandes choses. Il ya plus; des globes aussi immenses $ ils 
exisloient, auroient dù souvent, lorsque les comètes descendent 
dans la région du soleil, envelopper Mercure, Vénus et même 
la terre; ombre de ces planètes auroit dû nécessairementrefroidir 
la partie de ces globes comélaires qui se trouvoient derriere 
elles par rapport au soleil ; et suivant l'hypothèse de M. Prevot, 
il a dû se former dans ces parties, ainsi refroidies , les mêmes 
nuages qu'il prétend devoir naître par le refroidissement der- 
rière le noyau de la comète, et y former la queue ; on auroit 
donc vu, dans ces circonstances, qui ont été presqu’aussi fré- 
quentes que l'apparition des comètes, des queues à Mercure 
et à Vénus, et des nuages particuliers et d'une nature insolite, 
flotter dans notre atmosphère, et même fort au-delà de la lune 
dans Ja direction de l'ombre de la terre, et rien de tout cela 
ne s’est vu et n’a jamais été observé, qu’elle qu’ait été la proxt- 
mité de la comète au soleil ou à la terre; enfin M. Prévot a 
raison de dire que les rayons du soleil qui traversent le globe 
de l'atmosphère cométaire, suivant son axe, rencontrent une 
plus grande épaisseur de cette atmosphère, puisque le diamètre 
est la plus longue de toutes les cordes ; mais la différence de 
longueur entre le diamètre et les cordes parallèles au diamètre , 
jusqu’à une assez grande distance de part et d'autre, est peu 
de chose; car si on prend un arc de 30°, et qu'on mène une 
corde parallèle au diamètre, et qui soutende par conséquent 
un angle de 120°, cette corde sera au diamètre, à peu près 
comme 87 est à 100; la diminution de la lumiere et de la cha- 
leur qui aura lieu en suivant celte corde, est donc à peu près 
la même que celle qui a lieu en suivant le diamètre, puisque 
ces deux trajels ne diffèrent que de tréize centièmes; il pourra 


M 2 


02 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


donc se former des nuages, suivant l'hypothèse de M. Prévot, 
dans tout l’espace compris entre les cordes parallèles au diamètre, 
et qui soutendent des arcs de 120°; et dans cette supposition 
bien modérée, la longueur de cet espace étant égale à deux 
fois le sinus de 30°, ou au rayon, il s’ensuivroit de là que 
la largeur de la queue d'une comète paroît toujours égale à sa 
longueur, c’est-à-dire que dans l'hypothèse de M. Prévot, la 
figure de la queue d'une comète devroil approcher ‘beaucoup 
d'un carré; or, tout le monde sait que la figure de la queue 
des comètes est bien différente, et que leur longueur surpasse 
toujours de beaucoup leur largeur. 

I y a plus; suivant l'hypothèse de M. Prévot , la chaleur aug- 
mente graduellement à mesure que l’on s'éloigne de l'axe, et 
les nuages qui se forment dans le globe cométaire , et qui ne 
sont dus qu'à la diminution de la chaleur, doivent aussi dimi- 
nuer d'intensité graduellement, par conséquent dans cette hy- 
pothèse , les bords latéraux de la queue d'une comète ne peuvent 
être brillans et tranchés, mais ces bords doivent se fondre in- 
sensiblement avec le fond du ciel, tout comme l'extrémité su- 
périeure de la queue de la comète. Mais c’est tout l'opposé dans 
la nature; les bords latéraux de la queue d’une comète sont 
presque toujours bien tranchés, et pour l'ordinaire plus bril- 
lans que la parlie intermédiaire de la queue; beaucoup d’astro- 
nomes et d'historiens l'ont remarqué dans les comètes anciennes, 
et on a pu facilement l’observer dans les belles comètes des an- 
nées 1807 et 1811. 

M. Prévot a essayé d'élayer son explication de la queue des 
comèles, de l'effet de la marée solaire; il est le premier qui 
ail employé ce moyen, mais fort inutilement; en effet, d’après 
la théorie reçue des marées, l'atmosphère ou la matière qui 
forme la queue des comètes, devroit s'élever autant vers le soleil 
qu'à l'opposite de cet astre; par conséquent, dans ce cas, les 
comèles paroïtroient avoir deux queues égales et directement 
opposées, l’une dirigée vers le soleil et l’autre du côté opposé 
à cel astre; or, comme on n’a jamais vu de comètes avoir une 
queue dirigée vers le soleil, mais qu’au contraire leur atmo- 
sphère paroit déprimée vis-à-vis de cet astre (phénomène très- 
surprenant, attendu la forte attraction que le soleil exerce sur 
les comètes à leur passage au périhélie), il est évident que la 
queue des comètes n’est pas l'effet de la marée solaire de leur 
atmosphère, qui ne paroît pas même éprouver de la part du 
soleil, aucune impression analogue. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 95 


14. Hypothèse de M. J.-C. Delamétherie. 


M. Delamétherie, en faisant, dans le Journal de Physique, 
l'extrait de l'Astronomie théorique et pratique de M. Delambre, 
a donné une idée de la manière dont il croit que se forme 
les queues des comètes. Suivant lui : « Celte queue est un effet 
» du mouvement de la comète dans un fluide quelconque : la 
» flamme d’une bougie allumée qu’on meut dans l'air avec une 
» certaine vitesse, forme une queue dans une direction opposée 
» à celle du mouvement de la bougie. Or, on reconnoit au- 
» jourd'hui généralement, qu'il y a un fluide quelconque daus 
» les espaces célestes (18). » Cette hypothèse est très-simple 
et paroïit bien naturelle; une seule réflexion suflira pour la dé- 
truire, puisque dans celte hypothèse la queue d’une comète est 
nécessairement dirigée du côté oppose à celui vers lequel se 
meut la comète; il s'ensuit que lorsqu'une comète ayant passé 
le périhélie, s'éloigne du soleil, sa quene devroit être dirigée 
vers cet aslre; or, il est de fait qu'après le passage au peri- 
hélie, la queue précède la comète au lieu de la suivre, ce qui 
détruit totalement l'hypothèse de M. Delamétherie. 


Je finis cet examen des hypothèses imaginées pour expliquer 
la formation de la queue des comètes, qui sont venues à ma 
connoissance. On est sans doute étonné qu'il n’y ait aucune de 
ces hypothèses qui soit exacte, mais on doit l'être encore 
plus des absurdités dans lesquelles sont tombés, sur ce sujet, 
les plus grands génies, et de la confiance aveugle avec laquelle 
on a suivi leurs systèmes erronés, sans oser se permettre de les 
examiner. Tel est le sort des hommes dès qu'ils quittent la voie 

de l'expérience, hors de laquelle il n’ÿ a plus de science, pour 

s’égarér dans les systèmes et les conjéctures. Pourquoi ne pas 
avouer notre ignorance et y rester tranquillement tant que l’ex- 
périence et l'observation refusent de nous éclairer; cet état, 
triste, à, la vérité, n'est-il pas encore bien préférable à celui de 
suivre des opinions erronées sur la foi d'autorités mensongères ; 
et ne vaudroit-il pas beaucoup mieux, au lieu de disputer sur 
ces questions abstruses qui troublent depuis tant de siècles la 
tranquillité du genre humain, sans que leur solution soit plus 
avancée, faire la même réponse que sur la cause de la queue 
des comètes, ON N'EN SAIT RIEN? 


04 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


CITATIONS. 


(1) Conamen novi Systematis Cometarum in opera Jacobi 
Bernoulli. Basiliensis, tom. primus, pag. 17. 

(2) Traité physique et historique de l'Aurore boréale, par 
M. de Mairan, seconde édition, question xx11, pag. 286. 

(3) Zbidem, question xxu1r, pag. 290. 

(4) {bidem, quesuon xxv, pag. 203. | 

(5) L’atmosphère du soleil qui étant éclairée par les rayons 
de cet asitre, produit l'apparence qu’on désigne sous le nom 
de lumière zodiacale, à la figure d’un sphéroïde fort aplati, 
dont le pelit axe, vu de la terre, soutend un arc d’envirou 
25 degrés; le grand axe, 70°, 80°, et quelquefois 100°, et dont 
le plau diamétral perpendiculaire au petit axe, fait un angle de 
sept degrés et demi avec le plan de l’écliptique. 

(6) Rosa Ursina, lib. 1v, pag. 470, art. 50. 

(7) An attempt to demonstrale, than all the Phænomena ia 
nature, may the explained by two simple active principles At- 
traction and repulsions, by Gowin Knist, etc. 

(8) Essai sur les Comètes, où l’on tâche d'expliquer les phé- 
nomènes qu'ofirent leurs queues, etc., par André Oliver, tra- 
duit de l’anglois parJ, Allamand. Amsterdam , 1777, 1 vol. in-8°, 

(9) Zbidem, pag. 10. 

(10) Journal de Physique, tome LXIX, pag. 126. 

(11) Essai sur les Cometes, pag: 24 et suiv. 

(12) Œuvyres de Mariotte, etc., tome I, pag. 151 et suiv. 

(15) Philosophiæ naturalis Principia mathematica, lib. 11, 
prop. 23, tomus II, pag. 186. : 

(14) Essai sur les Comèles, par André Oliver, 1° partie, 

ag. 52 el suiv, 

(15) Jbidem, pag. 6x. 

(16) Zbidem, pag. 21. 

(47) Journal de Physique , tome LXXIIT, pag. 160 et suiv. 

(18) Zbidem, tome LXXIX , pag. 599 et suiv. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 0 


FIN DES OBSERVATIONS 


Sur la Famille naturelle des plantes appelées Composées ; 


Par ROBERT BROWN. 
TRADUITES DE L'ANGLOIS, ET ANNOTÉES 
PAR HENRI CASSINI. 
TROISIÈME PARTIE. 


Lrsrapports avec le sujet propre de cet écrit, me conduisent 
à décrire une plante envoyée depuis peu du Brésil, par M. Sellow, 
et qui appartient probablement à un genre admis jusqu’à présent 
parmi les Composées, quoique la plante dont il s’agit ne puisse 
pas être exactement rapportée à cette famille; j'ajouterai à sa 
description quelques observations, et je finirai par de courtes 
remarques sur la structure etles aflinités du Brunonïa. 

Je nomme Acicarpha spathulata Va plante du Brésil, que je 
décris de la manière suivante. 

Herbe annuelle ? très-glabre , rameuse, diffuse. Rameaux as- 
cendans, anguleux. Feuilles éparses, pétiolées, non stipulées , 
spathulées avec une petite pointe terminale très-courte, longues 
d’un pouce et demi, un peu épaisses?, glauques?, le plus sou- 
vent tnès-entières; les inférieures quelquefois dentées au - dela 
du milieu. Pétioles linéaires, à base un peu dilatée, semi-am- 
plexicaule; les inférieurs alongés, les supérieurs ordinairement 
plus courts que la feuille. Capitules solitaires, tantôt opposés 
aux feuilles et pédonculés, tantôt terminaux et presque sessiles, 
fleurissant ‘d’abord par la base, ovoides, jaunes. Involucre dis- 
posé sur un seul rang, foliacé, plus grand que le capitule 
fleuri; composé de cinq folioles inégales, spathulées, sessiles, 
très-entières , connées à la base. Réceptacle conique-subulé , pa- 
léacé. Paillettes lancéolées, mucronulées, plus manifestes entre 
les fleurons hermaphroaites-mäles, avortées çà et là entre les 
fleurons réellement hermaphrodites. Fleurons tubuleux, uni- 
formes, glabres. 

Fleurons de la circonférence disposés sur deux ou trois rangs, 
hermaphrodites, ayant les deux organes sexuels parfaits. Tube 


96 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


de la corolle grêle, cylindracé, continu avec l'ovaire, et adhé- 
reut par la base avec le style, marqué de dix stries visibles 
à la loupe. Limbe infondibuliforme, quinquéfide, à estivation 
valvée; à divisions demi-lancéolées, planes, trinervées ; à ner- 
vures latérales rapprochées des bords, et leur étant parallèles, 
indivises, confluentes au sommet, tirant leur origine de ner- 
vures alternes bifurquées au-dessous des sinus du tube. 

Cinq étamines épipétales, alternes avec les divisions du limbe. 

Filets adhérens inférieurement avec lé tube de la corolle, 
libres supérieurement, paroissant insérés à la gorge de cette co- 
rolle, réunis en un petit tube quinquédenté , dont les som- 
milés sont articulées par un changement subit de tissu, et dont 
la base est épaissie en dedans par cinq aréoles oblongues , alternes 
avec les axes des filets, 

Anthères continues, linéaires , solidement cohérentes en leur 
moilié inférieure , libres en leur moitié supérieure ; à deux loges 
s’ouvrant longitudinalement, à valves intérieures plus étroites, 
chaque loge munie d'un réceptacle du pollen longitudinal, sep- 
tiforme ; la base des anthères divisée par une échancrure en 
deux petits lobes dirigés en arrière, un peu aigus, courts, pol- 
Jinifères ; leur sommet simple, le connectif ne se prolongeant 
point au-delà des loges. Pollen subglobuleux, paroissant à une 
forte loupe obscurément anguleux. 

Ovaires soudés ensemble; chacun d'eux couronné par un ca- 
lice divisé en cinq dents spinescentes, alternes avec les divi- 
sions du limbe de la corolle; un seul ovule ovoïde, pendant, 
auaché un peu au-dessous du sommet à un funicule un peu 
épais ué du sommet étréci de la cavité de l'ovaire; un cordon 
vasculaire s'étend depuis le point d'insertion du funicule jusqu’à 
l'extrémité inférieure du même côté. Style filiforme, glabre, 
soudé inférieurement*avec la base du tube de la corolle. Stig- 
male simple, obtus , hispidule. 

Fleurons supérieurs nombreux , hermaphrodites-mäles, un 
peu plus petits que les fleurons vraiment hermaphrodites, à di- 
visions du calice presque membraneuses; à ovaires soudés en- 
semble, imparfaits, le plus souvent privés d'ovule. 

Achènes des fleurons de la circonférence soudés ensemble; 
chacun d'eux couronné par le calice accru, formant cinq épines 
élalées, coniques-subulées , d'une substance subéreuse et roide 
au moyen d’un axe d’une consistance plus ferme. 

Graine pendante, ovoïde , acuminée au sommet, pourvue 
d'un lesla membraneux, et d'une membrane propre adhérente 

1 4 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 97 


à l'amande. Albumen conforme à la graine, charnu, épais, blanc. 
Embryon axile, subcylindracé, presque aussi long que l'albu- 
men, blanc, dicotyledoné. Cotylédons linéaires, oblus, à face 
extérieure convexe, à face intérieure plane, égalant à peiue en 
longueur la radicule qui est cylindracée et supérieure. 


Malgré la grande différence qui existe entre ma description 
de cette plante, et celle que M. de Jussieu a donnée de son 
Acicarpha tribuloïdes, je ne doute presque point que ces deux 
plantes n'apparliennent au même genre, quoiqu'il soit évident, 
d’après la description qu’on vient de lire , que l’Acicarpha spa= 
thulata ne peut êlre rapporté aux Composées. Le Calicera de 
Cavanilles, dans les graines duquel M. Corréa a trouvé un al- 
bumen, paroît étre très-voisin de notre plante; et un troisième 

enre, appartenant probablement au même groupe, est le Boopis 
déni par M. de Jussieu dans le même Mémoire que l’Æcicar- 
pha. Néanmoins, les importans caractères de l’ovule pendant 
et de l'embryon renversé, n’ont point encore été observés dans 
ces plantes, non plus que la présence de l’albumen dans les 
deux espèces connues de Boopis, dans l’Æcicarpha tribuloïdes, 
et dans lAcicarpha lanata de Lagasca (Persoon, Syn., tome Il, 
pag. 488 ), si toutefois ce dernier RH réellement au genre 
Acicarpha. Une autre question relative au genre Boopis, est 
de savoir si son capitule est simple, comme dans l'Acicarpha 
spathulata, où cela est indubitable; ou bien s’il est composé, 
comme semble l'indiquer la figure que M. de Jussieu a donnée 
du Boopis anthemoïdes, 


En attendant, quoique je ne connoïsse encore d'une manière 
certaine que la structure du seul Æcicarpha spathulata, je ris- 
querai de proposer ce groupe comme une famille naturelle dis- 
tincte, qui doit étre placée entre les Composées et les Dipsacées, 
quoiqu’en tout point elle se rapproche un peu davantage des 
Composées. Si mes conjectures sur le Calicera et le Boopis se 
trouvent un jour vérifiées, celle famille pourra être appelée 
Æalicérées; parce que le nom d’Acicarpha peut à peine être 
conseryé même comme générique, si l'espèce originaire s’ac- 
corde avec celle qui est ici décrite ; car, s’il en est ainsi, M. de 
Jussieu a pris les divisions du périanthe pour des paillettes du 
réceptacle, dérivant le nom du genre de la forme de ces pré- 
tendues paillettes ; et il a entièrement méconnu les vraies pail. 
Jettes qui, bien qu’elles n’eussent pu lui suggérer ce même nom 
générique, peuvent néanmoins le soutenir, si on veut le cou- 


Tome LXX XVII, AOÛT an 1818. N 


98 JOURNAT DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


server, et s'il n’est pas encore plus convenable de le changer en 
celui de Æcicarpa (DD). 

On trouvera le même avantage à former une famille séparée 
du Prunonia, comme constituant un chaînon d’une égale im- 
portance, propre à lier les Composées avec les Goodénoviées , 
mais très-distinct des unes et des autres sous plusieurs rapports. 
Comme j'ai décrit ce genre ailleurs, et que j'ai présenté en 
même temps plusieurs observations sur ses principales aflinités 
(Prodr. Flor. Nov.-Holl., pag. 589), je me contenterai ici d’é- 
tablir les ressemblances et différences les plus importantes qui 
existent entre lui et les deux familles dont, selon moi, il se rap- 
proche le plus. 

Le Brunonia ressemble aux Goodénoyiées par l’enveloppe re- 
marquable du stigmate, par la structure et la connexion des 
anthères, par les graines dressées, et par l’estivation de la co- 
rolle. Il en diffère par son calice et sa corolle, tous deux dis- 
tincts de l'ovaire, par la disposition des vaisseaux dans la corolle, 
par les filets des étamines articulés au sommet, par les graines 
privées d’albumen, et par son inflorescence remarquable, cer- 
tainement compatible avec la nature de l'irrégularité propre à 
la corolle des Goodénoviées, mais qui peut dificilement se ren- 
contrer avec celle qui caractérise les Lobéliacées. (Flinders’s 
Voyage to Terra australis, tome IL, pag. 550.) 

Le Brunonia ressemble aux Composées par l'inflorescence , 
par l'estivation de la corolle, par la remarquable articulation , 
ou changement de tissu, au sommet des filets des étamines, et 
par la structure de l'ovaire et de la graine. Il en diffère par 
son Ovaire libre ou supère, par l'absence d'un disque Se 
laire, par l'insertion immédiatement hypogyne des filets des éta- 
mines, par l'enveloppe du stigmate, et par la structure vascu- 
laire de la corolle, dont le tube n'a que cinq nervures qui se 
prolongent dans le milieu des divisions, où tantôt elles se ter- 
minent simplement, comme il arrive fréquemment dans le Z. 
sericea, et lantôt comme dans le B. australis, elles se partagent 
au sommet en deux branches récurrentes formant des nervures 
latérales, ayant au premier abord la même aparence que celles 
des Composées, mais alteignant difficilement la base des divisions 
de la corolle. 

C'est un fait curieux, que le Brunonia diffère entièrement des 
Composées par la disposition des vaisseaux de la corolle, tandis 
que Îles deux ordres <e ressemblent par la structure non moins 
remarquable des filets dés étamines qui sont articulés. Ce ca- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 99 


racière n’avoit été observé que dans un très-petit nombre de 
Composées (Batsch, Anal. Flor., pag. 107; Schkubr, Æ/andb., 
tab. 236 et 244), avant la publication de la seconde dissertation 
de M. Cassini, où il est prouvé qu'il est presque universel dans 
cet ordre. 

On observe , sur les parois opposées de l'ovaire du Brunonia, 
deux nervures ou cordons vasculaires, qui se prolongent dans 
le style, où ils se rapprochent et deviennent parallèles. Cette 
structure, si analogue à celle des Composées, semble fournir 
uu argument en faveur de l’hypothèse proposée dans ce Mé- 
moire sur la nature composée du pistil dans cet ordre , et sur 
son type dans toutes les plantes phénogames. En effet, le Bru- 
nonia est évidemment très- voisin des Goodénoviées, dont la 
plupart des genres ont l'ovaire réellement biloculaire, avec un 
ovule ou un nombre indéfini d'ovules dans chaque loge; tandis 
que quelques genres du même ordre, comme le Dampiera, le 
Diaspasis , et certaines espèces de Scævola, ont l'ovaire réduit 
à une loge et à un ovule, comme le Brunonia. 

Sir Jacques Smith, qui a établi le genre Brunonia, est en- 
clin à le rapporter aux Dipsacées. Il est vrai que par le port 
il offre une ressemblance frappante avec certaines espèces de 
cet ordre ; il s’en rapproche aussi beaucoup par sa remarquable 
inflorescence ; et si l’on adopte les idées de M. Decandolle sur 
l'ovaire des Dipsacées, on écartera une grande objection contre 
la réunion du Brunonia avec cette famille. 

Mais le Brunonia diffère de toutes les Dipsacées par des ca 
racières de première importance, tels que l'origine et l'estivation 
de la corolle, l'insertion et toute la structure des étamines, 
l'enveloppe du stigmate, l’ovule inséré à la base de la cavité de 
l'ovaire, l'embryon dressé et privé d’albumen; c’est pourquoi 
je persiste à penser que sa vraie place dans la méthode natu- 
relle est entre les Goodénoviées et les Composées,. 

Avant d'abandonner ce sujet, je proposerai quelques questions 
sur l'enveloppe du stigmate du Brunonia et des Goodénoviées (EE). 

Cette enveloppe remarquable n'est-elle qu'un simple processus 
du sommet du style? ou bien est-ce une partie d'origine dis- 
tincte, quoique intimement adhérente avec le pistil? Dans ce 
dernier Cas, ne peut-on pas la considérer comme analogue 
au disque glandulaire qui entoure ou couronne l'ovaire dans 
plusieurs autres familles? Enfin, en adoptant l'hypothèse que 
Jai proposée ailleurs (ZLinn. Soc. Transact., tome X, p. 159) 
sur la nature de ce disque dans certaines familles, où je Le con- 


N 2 


100 JOURNAL DE PRYSIQUE, DX CHIMIF 


sidère comme composé d’une série d'étamines modifiées, la 
parlie en question n’a-t-elle pas une grande ressemblance par 
son origine manifeste el sa division, avec les étamincs de la 
famille des Stylidées qui est très-voisine ? | 

Cette supposilion paroitra un peu moins paradoxale, si l'on 
compare l'enveloppe du stigmate du Brunonia aux anthères im- 
parfaites des fleurs femelles du Æorstera. 11 devient important, 

our ces considérations, de décider si les élamines des Sty- 
ie sont opposées aux divisions du calice ou à celles de la 
corolle. La dernière disposition seroit en faveur de mon hypo- 
thèse. Mais c’est un point qu'il ne sera pas très-facile de dé- 
terminer, parce que les élamines sont de côté. Cependant, 
d'après l’existence et la division de la couronne de la gorge 
dans le Stylidium, 1] n’est pas tout-à-fait invraisemblable que 
les élamines soient opposées aux divisions de la corolle. 


SUPPLÉMENT. 


Depuis que le précédent Mémoire a été soumis à la Société 
Linnéenne, M. Cassini a publié (Bulletin des Sciences, 18:16, 
pag. 160) la substance d’un Mémoire qu’il avoit lu à l'Académie 
des Sciences de Paris, au mois d'août 1816, concernant une 
nouvelle famille de plantes nommée par lui Boopidées, et com- 

osée des Calicera, Boopis et Acicarpha. Grâce à la libéralité 
de MM. de Jussieu, Desfontaines et Delessert, j'ai eu aussi l’oc- 
casion d'examiner des échantillons d’Æcicarpha tribuloïdes en 
fleurs et en fruits, et des deux espèces de Boopis en fleurs, 
amsi que des fleurs et des péricarpes détachés de Culicera. Dans 
tous, J'ai trouvé l’ovule pendant; et dans lAcicarpha et le Ca- 
licera, j'ai trouvé l'embryon renversé occupant l'axe d’un al- 
bumen charnu. Ainsi mes conjectures du précédent Mémoire 
sur la structure de ces plantes, et sur leur ressemblance avec 
V’Acicarpha spathulata, se trouvent entièrement vérifiées par cet 
examen, aussi bien que par les observations de M. Cassini, 
qui, avec sa pénétration ordinaire, a découvert les principaux 
caractères distinguant les Boopidées des Composces et des Dip- 
sacées, entre lesquelles il les a aussi placées. 

Comme le Mémoire de M. Cassini, quoique lu après le mien, est 
déja publié, le nom de Calicérées, que j'ai proposé pour cette 
famille, est anticipé par celui qu'il a donne. 

Mais comme sa description de la famille n’est point du tout 
complète (FF), quoique aucun caractère de première importance 
n’y soit entièrement omis, il peut m'être permis d'ajouter à 


: ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. O1 


mon Mémoire quelques remarques sur les points les plus es- 
senliels de ressemblance et de différence entre cette famille et 
les deux dont elle est le plus voisine. 

Les principaux caracières distingant les Boopidées de 1oules 
les Composées, sont l’ovule pendant , et l’albumen contenant l’em- 
bryon, dont la radicule se dirige vers le sommet du péricarpe. 
Il me paroit nécessaire, pour deux motifs, d'exprimer tous ces 
caractères, et à peu près dans les termes dont je me sers ici: 
1°. l’ovule pendant entraine, à la vérité, le plus souvent, mais 
cependant pas constamment, la radicule supérieure, quoique 
celte direction de la radicule puisse ici, aussi bien que dans 
les Composées, être devinée avec assurance (XIII) d'après Ja 
structure vasculaire de l’ovule; 2°. quand l'insertion de l’ovule 
est, comme dans celte famille, évidemment au-dessous de l’ex- 
trémité supérieure , la radicule qui se dirige vers cette extrémité, 
ne peut, suivant le sens rigoureusement propre, êlre décrite 
comme se dirigeant vers l'ombilic. M. Cassini n’a point men- 
tionné la direction de la radicule, soit parce qu'il a supposé 
qu'elle étoit toujours la même que celle de l’ovule, ou, ce 
qui est plus probable, parce qu'il ne s’est point assuré du fait (GG). 

Ces caractères distincüifs peuvent être considérés comme irès- 
suflisans pour autoriser la séparation des Boopidées d’avec les 
Composées ; cependant les mêmes différences existent entre cer- 
tains genres rapportés avec raison aux Rubiacées et la partie 
principale de cet ordre. 

Ï y a cependant trois autres caraclères qui distinguent les 
fleurs des Boopidées des fleurs hermaphrodites de toutes les Com- 
posées, et qui n’ont point été remarqués par M. Cassini (HH): 
savoir, l’adhérence de la base du style avee le tube de la co- 
rolle, l'absence du disque épigyne ou nectaire, et la subdivision 
longitudinale de chaque loge de l’anthère par un réceptacle du 
pollen, qui existe aussi dans la plupart des autres familles, et 
dont, à la vérité, il semble y avoir un rudiment dans le genre 
Syngénèse Petrobium, décrit dans le précédent Mémoire. 

Les Boopidées diffèrent certainement de toutes les Composées 
connues par la connexion partielle des anthères, en quoi elles 
ressemblent au Jasione; mais comme dans certaines Composées, 
les anthères sont très-légerement connexes, ou même entière- 
ment distinctes , celle struclure, quoique remarquable, peut dit- 
ficilement être employée comme un caractère distinctif (H). 

Les principaux caraclères par lesquels les Boopidées dif- 
férent, non de toutes les Composées, mais de la plupart, sont 


102 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


la corolle continue, ou non articulée avec l'ovaire, les anthères 
privées au sommet d'un appendice membraneux, et le stigmate 
indivis. 

Les Boopidées différent des Dipsacées par la structure vas- 
culaire et l'estivation valvulaire de la corolle, par l’estivation, 
l'insertion et la connexion des anthères, par l'absence d’un in- 
volucre partiel, et par les feuilles alternes. 

En adoptant la description que M. Decandolle a faite des 
Dipsacées (Flor. franç., 5° édit., tome IV, pag. 221), les Boo- 
pidées en différeroient aussi par le caractère important d’ovaire 
infère ; mais celte différence n’est point universelle, ni, je crois, 
absolue dans tous les cas. 

M. Auguste Saint-Hilaire, dans son excellent Mémoire sur 
les Primulacées (Mém. du Mus. d'Hist. nat., t. I, pag. 47), ad- 
met l'exactitude de la description de M. Decandolle, à l'égard 
d'une grande partie des Dipsacées; mais en même temps il ob- 
serve fort bien que, dans plusieurs espèces de Scabieuses, l'ovaire 
est entièrement uni avec le tube du calice. Cependant ni l’un 
ni l’autre de ces auteurs n’a remarqué le fait curieux, et je 
crois unique, concernant la base du style, laquelle est cohé- 
rente avec le sommet étréci du tube du calice, même dans les 
espèces de Dipsacées où la partie élargie du tube est entière- 
ment distincte de l'ovaire. 

Cette sorte d’adhérence partielle entre le pistil et le calice, 
est absolument inverse de celle qui a lieu ordinairement, et 
par laquelle la base de l'ovaire est adhérente, tandis que sa 
partie supérieure est libre. Néanmoins, elle fixe de même l’ori- 
gine apparente ou l'insertion de la corolle et des étamines, et 
elle offre la combinaison inattendue de la fleur supère avec 
l'ovaire libre. 

Quant à la structure vasculaire de la corolle, les Boopidees 
peuvent être considérées comme essentiellement conformes aux 
Composées , dont plusieurs genres offrent, sur le tube et les 
divisions de la corolle, des nervures mitoyennes aussi mani- 
festes que celles des Boopidées. En établissant, dans chacun des 
deux ordres, le caractère dérivé de cette source, il ne sufht 
pas de décrire les nervures seulement dans les divisions de la 
corolle, comme a fait M. Mirbel dans son caractère des Com- 
posées (Æ/em. de Physiol. vég. et de Bot., tome 11, pag. 885), 
et M. Cassini dans celui des Boopidées ; il est encore néces- 
saire de décrire leur disposition dans le tube ou dans Ja partie 
indivise du limbe; parce qu’il y a des cas, dans les deux fa- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 103 


milles, où les nervures latérales des divisions de la corolle ne 
se rejoignent point au sommet; et parce que d’autres familles, 
comme je l'ai dejà remarqué, offrent plusieurs exemples d’une 
disposition presque semblable des nervures, dans les divisions 
de la corolle, accompagnée d’une disposiuon différente dans 
le tube. Aux exemples que j'en ai donnés, on peut ajouter celui 
du Globularia cordifolia, où l'on observe, dans les divisions 
de la lèvre inférieure de la corolle , trois nervures simples dont 
les latérales ne se rejoignent point au sommet, et se prolongent, 
sans se confondre , presque jusqu’à la base du tube, où elles 
convergent, et paroissent se réunir à la nervure miloyenne. 

Dans l’Acicarpha et le Boopis, les filets des étamines m'ont 
paru être articulés, comme dans les Composées; mais je n'ai 
pu observer ce caractère dans le très-pelit nombre de fleurs 
de Calicera que j'ai examinées. : 

Dans l’Acicarpha, les fleurettes de la circonférence sont her- 
maphrodites et évidemment complètes, les anthères contenant 
du pollen, et les ovaires produisant des graines; tendis que 
celles du disque sont mäles, ayant le pistil incomplet. Un tel 
arrangement n’a jamais été observé jusqu'ici dans les Compo- 
sées, où toules les fois que les fleurettes centrales sont mäles, 
ayant le pistil imparfait, celles de la circonférence sont femelles 
avec ou sans rudimens d’étamines. 

La régularité dans l'ordre d'épanouissement des fleurs, procé- 
dant de la base au sommet du capitule, fans les Æcicarpha 
tribuloïdes et spathulata; et l'irrégularité approchant de l'ordre 
inverse , que j'ai reconnue dans les deux espèces de Boopis (J9), 
semble prouver que le capitule est simple dans le premier genre, 
et composé dans le dernier, malgré la grande réssemblance de 
leurs involucres. Néanmoins, la véritable nature de sa compo- 
silion, dans le Boopis, ne pourra être déterminée d’une manière 
salisfaisante que sur des échantillons frais. 

Cet épanouissement irrégulier du Boopis, qui même rend im- 
propre le nom générique, et l’absence quant à présent de ca- 
ractères salisfaisans pour distinguer ce genre du Calicera, sont 
des objections contre le nom que M. Cassini a choisi pour cette 
famille ; tandis que celui de Calicérées que j'ai proposé, dé- 
rivé du premier genre décrit, et applicable à tous les genres 
de l’ordre, me paroïit à l'abri de tout reproche (KK); surtout 
parce qu'il n'est pas douteux que la partie que j'ai considérée 
comme un calice dans les Boopidées, est effectivement un calice, 
ses divisions élant généralement égales en nombre à celles de 


104 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


la corolle, et alternant avec elles. On peut observer qu'une pa+ 
reille alternation des divisions de l'aigrette avec celles de la co- 
rolle a lieu dans les genres de Composées où ces deux parties 
offrent un nombre égal de divisions. Mais, dans quelques cas, 
où les divisions de l’aigrette sont en moindre nombre, la même 
alternation n'a pas lieu, particulièrement dans les genres dla 
les péricarpes comprimés verticalement et surmontés de deux 
arêtes, comme le Spilanthus et le Salmea. 

L'absence du disque épigyne dans les Boopidées, est une con- 
séquence nécessaire de la soudure de la base du style avec le 
tube de la corolle. 11 me semble pourtant qu'on peut prendre 
pour une modification de ce même organe, les cinq aréoles 
épaissies qui existent en dedans et près de la base du tube 
formé par les filets des étamines dans l’Acicarpha spathulata, 
et beaucoup plus manifestement encore dans le Boopis balsa- 
muæfolia, où elles offrent l'apparence de cinq corps charnus 
adhérens, et alternes avec les filets des étamines. 

Cette décomposition du disque glandulaire dans les Boopidées 
comparée avec son élat dans les Composées, aussi bien que sa 
transposition et l’alternation de ses parties avec les étamines , 
semblent ajouter quelque poids à la conjecture que j'ai hasardée 
dans le Mémoire sur de Protéacées, publié dans les Transac- 
tions de la Société Linnéenne (tome X, pag. 159), et qui con- 
siste à croire que, dans plusieurs familles, car je ne prétends 
pas étendre cette hypothèse à toutes, le disque , même dans son 
état le plus simple, peut être considéré comme formé d'une 
série d’étamines modifiées (LL). Mon système est fondé sur ce 
que certaines familles ont tout-à-la-fois quelques genres dans 
lesquels cet organe se présente sous sa forme la plus simple, 
celle d’un anneau charnu indivis, et d’autres genres dans lesquels 
il est composé de plusieurs corps distincts alternant avec les 
élamines, et offrant quelquefois l'apparence de filets d’étamines 
stériles. k 

Cette hypothèse est principalement applicable aux familles 
dans lesquelles le nombre des étamines est égal aux divisions 
d'une seule enveloppe florale, le nectaire étant supposé formé 
par la seconde série. Mais le plus fort argument est fourni par 
les Scitaminées (Flinders’s Voyage to Terra australis, tome Il, 
pag. 574), où les corps glandulaires sont en effets disposés sur 
la même rangée que l'élamine parfaite. | QU 

Je ne me dissimule pas cependant que plusieurs objections 
peuvent être opposées à la généralisation de ce système. Ainsi, 


le 


£T D'HISTOIRE NATURELLE. vob 


le nectaire ou disque glandulaire existe dans des familles où les 
étamines, quoique définies, sont égales en nombre à la somme 
des divisions du calice et de la corolle; et de plus, dans des 
familles où cet organe est composé de parties distinctes, comme 
dans les Crassulacées, ces parties se trouvent situées sur les points 
où l'on pourroit admettre avec le moins de vraisemblance une 
augmentation du nombre des étamines. Ici, pourtant, comme 
dans plusieurs autres cas, les divisions du disque sont opposées 
aux ovaires; elles peuvent donc être supposées plus intimement 
unies avec les pistils qu'avec les élamines; opinion que l’ingé- 
nieux M: Decandolle, à ce que je crois, professe à l'égard des 
Renonculacées, mais qu'il n'a pas encore publice. A l'appui de 
cette opinion, l’on peut remarquer que, dans le Pæonta mou- 
tan, qui offre le disque ou urcéole à l’état du plus grand dé- 
veloppement, lorsque les pistils se multiplient, ce qui, dans les 
variétés à fleurs doubles de cette espèce, s'opère souvent par 
addition d'une ou de plusieurs séries intérieures, chaque série 
ajoutée est accompagnée des rudimens d’un disque analogue. 
Toutefois, cette idée est combattue par l'observation que j'ai 
faite sur une seule fleur de Pæonia moutan, où l’une des di- 
visions de l’urcéole étoit changée en une anthère; ajoutez que, 
dans l’Æquilegia, les divisions de l'organe vraisemblablement 
analogue , ressemblent, dans leur état ordinaire, à des filets 
stériles d’étamines, et qu’on les a quelquefois trouvées pourvues 
d’anthères parfaites. (Schkuhr, Handbuch, tab. 146.) 


NOTE DE L'AUTEUR. 


(XII) On a négligé jusqu'ici quelques-unes des indications 
fournies, dans plusieurs cas, par la structure de l’ovule non 
encore fécondé, sur la position et la direction des parties du 
futur embryon; mais ce sujet exigeroit, pour son explication, 
des détails incompatibles avec les bornes du présent écrit. J’ai 
ailleurs jeté en avant une autre idée de la même nature (Ælin- 
ders's Voyage to Terra australis , tome 11, pag. Gor), à laquelle 
on n’a pas probablement fait attention; et je dois réserver l’ex- 
position de ces deux objets pour un Mémoire particulier. 


Tome LXXXVII. AOÛT an 1818, 0 


106 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


NOTES DU TRADUCTEUR. 


(DD) Lorsque je rédigeai l’article Æcicarpha, dans le Dic- 
tionnaire des Sciences naturelles (tome 1, Suppl. pag. 32), je 
crus pouvoir adopter, sans les vérifier, les caractères génériques 
donnés par l’auteur du genre. Peu de temps après la publica- 
tion du volume qui contient cet article, je desirai faire des- 
siner et graver lAcicarpha tribuloides, pour donner, dans l'Atlas 
du Dictionnaire, un exemple de ma nouvelle famille des Boo- 
pidées. M. Turpin, chargé de l'exécution de cet atlas, et qui 
est aussi habile observateur qu’excellent artiste, découvrit, en 
dessinant les caractères, qu'ils étoient fort différens de ceux que 
l’on supposoit, et il me fit part de ses observations. Je m'em- 
pressai de les vérifier, et les ayant trouvées parfaitement exactes, 
J'ai cru devoir refaire entièrement, d’après nature, la descrip- 
tion des caractères génériques, et même modifier le nom du 
genre qui exprimoit une idée absolument fausse. Voici donc 
les vrais caractères du Cryptocarpha, tels qu'ils résultent des 
observations de M. Turpin et des miennes. 

CryrrocarprA. La calathide est composée de fleurs nombreuses, 
régulières, dont la plupart, occupant le milieu, peuvent être 
considérées comme mäles par avortement de l’ovaire; les autres, 
occupant la bordure, sont paucisériées, hermaphrodites. Le pé- 
ricline est formé de cinq squames unisériées , inégales, foliacées, 
greffées par la base entre elles et avec les ovaires. Le clinanthe 
est filiforme ; il n’offre aucune squamelle ni fimbrille visible , 
et 1l forme, dès l'origine , avec les ovaires entre-greffés et avec 
la base du péricline , une seule masse continue, subéroso-li- 
gneuse. Chaque ovaire parfait est greffé avec le clinanthe et àvec 
les ovaires voisins, à l'exception de sa partie supérieure qui 
reste libre, et qui est munie de cinq énormes côles; ces cles 
se prolongent au sommel en cinq grosses cornes inégales, co- 
niques , ligneuses, dont chacune est creusée d’une fossette à 
sa base interne. Les ovaires avortlés sont de même entre-greffés, 
et surmontés d'un petit calice membraneux, submonophylle, 
irrégulièrement quinquéfide. La corolle est persistante, marces- 
cente, sa base étant continue avec le centre du sommet de 
l'ovaire. Le style, épaissi supérieurement, se termine par un 
süigmate en forme de bouton globuleux, ou ovoide, glandu- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 107 


Jeux. Les autres caractères , que je passe sous silence, sont ceux 
que J'ai assignés à la famille des Boopidées. 

La description qu’on vient de lire sera plus claire pour ceux 
qui examineront la figure du Cryptocarpha tribuloïdes, formant 
la seconde planche du cinquième cahier de l'Atlas qui accom- 
pague le Dictionnaire des Sciences naturelles. 

M. Brown a rectifié à peu près comme moi, le caractère du 
genre Acicarpha, qu'il propose de nommer Acicarpa. Mais je 
revendique avec assurance la priorité sur lui, en faveur de 
M. Turpin et de moi-même. En eflet, son Opuscule n'a été 
publié à Londres qu’au milieu de l'année 1817, et l'exemplaire 
qu'il m'a envoyé ne m'est parvenu que le 5 septembre; tandis 
que les caractères du Cryptocarpha, tels qu'ils avoient élé re- 
connus par M. Turpin et par moi, ont été insérés dans le Bul- 
letin de la Société Philomathique de février 1817, lequel a été 
livré au public le 6 mars. Au surplus , les caractères que j'avois 
assignés à ce genre diffèrent en un point essentiel de ceux que 
J'ai lus depuis dans l’'Opuscule de M. Brown; car il admet sur 
le clinanthe de 4. spatulata, des appendices manifestes, que 
je n'ai point vus, non plus que M. Turpin, sur celui de l'A, 
tribuloïdes. S'il étoit permis de douter de l'exactitude d’une ob- 
servation faile par un bolaniste tel que M. Brown, je dirais 
que l’on conçoit difficilement comment les appendices du cli- 
nanthe peuvent encore élre manifestes et saillir au dehors, 
lorsque les ovaires sont entre-greflés. Cela n'est pourtant pas 
impossible, en attribuant à ces appendices une longueur suf- 
fisante; mais dans ce cas même, il seroit vrai de dire qu’au 
moins leur partie inférieure reste cachée, puisqu'elle est engagée 
entre les ovaires entre-greffés; d'où il suit que le nom de Cryp- 
tocarpha ne cesse pas d’être applicable à toutes les espèces du 
genre, et même d'exprimer le caractère qui le distingue essen- 
tiellement des deux autres, taudis que le nom d'Æctarpa, 
proposé par M. Brown, est applicable au Calicera. Quant au nom 
primitif d'Acicarpha, je ne pense pas qu'il soit possible de le 
conserver. 

(EE) Dans mon premier Mémoire sur les Synanthérées (Journ, 
de Phys., tome LXXVI, pag. 260), j'ai rapporté une observa- 
tion qui me semble former une objection très-grave contre le 
système de M. Brown sur la nature de l'enveloppe du stigmate 
du Brunonia et des Goodénoviées. 

Le style des Carduinées forme une tige divisée supérieure 
ment en deux branches, lesquelles sont articulées par la base 


O 2 


108 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


sur le sommet de la tige, et presque toujours entre-greflées 
iucomplètement. Le sommet de la tige est souvent un peu renflé, 
el presque toujours entouré d'une zone de poils fins, alongés, 
roides, dirigés obliquement de bas en haut sous un angle plus 
ou moins ouvert, Mais le Centaurea nigra et plusieurs autres 
m'ont offert une anomalie singulière : au lieu d’être entouré 
d'une zone de poils, le sommet de la tige a son contour pro- 
longé en deux membranes frangées, dirigées de bas en haut, 
qui correspondent aux deux branches, et ceignent leur base 
complètement, 

J'ai dit, dans le Mémoire où cette observation est consignée, 
que cette structure du siyle me sembloit avoir du rapport avec 
celle des Lobéliacées. J'ajoute aujourd'hui qu’il en résulte une 
forte présomption en faveur de l'opinion rejetée par M. Brown, 
que l'enveloppe du stigmate du Brunonia et des Goodénoviées 
n'est qu'un simple processus du sommet du style. 

(FF) C’est le 26 août 1816 que j'ai lu à l'Académie des Sciences 
mon Mémoire sur les Boopidées. M. Brown se trouvoit alors à 
Paris, et je crois même qu'il fut présent à la lecture de ce Mé- 
moire. Ce fut probablement après avoir entendu cette lecture 
à la séance de l’Académie, qu'il étudia, dans les herbiers de 
MM. de Jussieu, Desfontames et Delessert,-les caractères de 
l'Acicarpha, du Boopis et du Calicera. 

Quoi qu'il en soit, il est bien certain qu'avant cette époque, 
M. Brown n'avoit observé que son Acicarpha spathulata; d'où 
il suit qu’il ne pouvoit avoir, sur la famille dont il s’agit, que 
des notions très-vagues et douteuses, fondées sur de simples 
conjectures. Il ne peut donc prétendre avoir établi cette famille 
avant moi, dans son Opuscule ou Mémoire lu à la Société Lin- 
néenne en février 1816. D'ailleurs cet Opuscule n’a été publié 
qu'en 1817, et très-probablement vers le milieu de l’année seu- 
lement, puisque l’exemplaire dont l’auteur m'a gratifié ne m'est 
parvenu que le 5 septembre. Or, mon Mémoire sur les Boo- 
pidees étoit publié par extrait dans le Bulletin de la Société Phi- 
lomathique d'octobre 1816, lequel a été livré au public dès le 
26 octobre. 

Depuis cette publication de mon Mémoire, M. Brown, éclairé 
par les nouvelles observations qu'il avoit faites lui-même à Paris, 
dans les herbiers, vers la fin de 1816, et peut-être aussi, j'ose 
le dire, par celles que j'avois publiées, a rédigé le supplément 
de son Opuscule. Dans ce supplément, il est obligé d'avouer 
que j'ai publié avant lui la famille en question, et qu’ainsi elle 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 109 


doit conserver le nom que je lui ai donné, de préférence à 
celui qu’il proposoit; mais pour se dédommager de celle con- 
cession, il attaque de toutes ses forces et le nom et les carac- 
tères que j'ai donnés, en employant.contre moi des argumens 
que je qualifierois de pitoyables chicanes, sans le profond res- 
pect dont je suis pénétré pour lui. 

Sa première objection est que ma descriplion des caractères 
de la famille n’est point du tout complète. Je réponds que, sur 
ce point, M. Brown a eu tort de me juger d'après un court 
extrait, tel que celui qui est inséré dans le Bulletin de la So 
cité Philomathique, et toutefois je soutiens que cet extrait con- 
tient une description comparative très-suffisante, el tout aussi 
complète que la plupart des descriptions de famille qu'on trouve 
dans les livres de Botanique. Mais M. Brown pouvoit lire, dans 
le Journal de Physique d'avril 1817, mon Mémoire qui s’y trouve 
imprimé tel qu'il a été lu a l'Académie, et peut-être auroit-il 
jugé ma description moins incomplète. Énfin, s’il veut prendre 
la peine de lire mon article Boopidées, dans le Dictionnaire des 
Sciences naturelles (tome V, supplément , pag. 26), il y trouvera 
une descriplion encore plus ample, et très-minutieusement dé- 
taillée , ainsi que loules les remarques qu'il importe de faire sur 
les ressemblances et les différences entre la famille des Boopidées 
et les deux familles voisines. J'observe que le tome V du Dic- 
tionnaire , avec son Supplément, a été livré au public dès le 
4 mars 1817, d'où il suit que je n'ai pas pu, en rédigeant mon 
article Boopidées, profiter des observations de M. Brown , qui 
n'ont été publiées qu'au milieu de l’année 1817, tandis qu'il 
n’est pas impossible que M. Brown ait lu cet article avant de 
rédiger le Supplément de son Opuscule. 

(GG) Je me plains encore ici de ce que M. Brown s’obstine, 
coulre toute justice, à juger mon Mémoire sur le simple extrait 
inséré dans le Bulletin des Sciences, comme s'il ignoroit que 
les extraits de Mémoires destinés à ce Bulletin doivent étre tres- 
courts et dépouiilés de tous les détails. 

Dans le Mémoire lu à l'Académie des Sciences, je me suis 
exprimé sur le point dont il s’agit par les termes suivans : je 
suppose que la radicule correspond à l'ombilic, mais je ne m'en 
suis pas assuré par l'observation directe. me parut inulile, dans 
l'extrait destiné pour le Bulletin des Sciences, de rapporter un 
caractère alors douteux pour moi; c'est pourquoi je ne fis, 
dans cet extrait, aucune mention de la direction de la radicule. 
Mais depuis, ayant observé de nouveau des fruits de Calycera, 


110 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


jy reconnus distinctement que la radicule correspondoit à la 
pointe de la graine, dont l'ombilic est très-voisin, et je demeurai 
convaincu qu'il devoit en être de même chez le Boopis et le 
Cryptocarpha, quoique j'avoue n'avoir pu vérifier le fait dans 
ces deux derniers genres. C’est pourquoi, en rédigeant, pour 
le Dictionnaire des Sciences naturelles, Yarticle Boopidées , je 
n'hésilai pas à dire aflirmativement que la radicule correspondoit 
à l'ombilic; ‘et dans la deuxième planche du cinquième cahier 
de l'Atlas, où est figuré le Cryptocarpha tribuloïdes, je fis re- 
présenter par M: Turpin la radicule comme supérieure, quoique 
nous n'ayons pu, ni lui ni moi, distinguer bien nettement, 
dans cette plante, laquelle des deux extrémités de l'embryon 
étoit la radicule. Enfin, dans mon article Calicera, publié en 
avril où maï 1817, dans le Supplément du sixième volume du 
Dictionnaire des Sciences naturelles (pag. 36), j'ai dit que la 
radicule aboutissoit à l’ombilic. 

M. Brown dira-t-il que c’est d'après lui que j'ai attribué af- 
firmativement aux Boopidées le caractère de radicule supérieure? 
Non, sans doute, car mon article Boopidées du Dictionnaire des 
Sciences naturelles a été publié dès le 4 mars 1817, et par con- 
séquent avant son Opuscule. Je crois même pouvoir en dire 
autant de mon article Calicera, quoiqu'il ait été publié un mois 
ou deux plus tard que mon article Boopidées. | est vrai que, 
dans le Journal de Physique d'avril 1817, où j'ai publié mon 
Mémoire sur les Boopidées, tel qu'il avoit été lu à l’Académie 
des Sciences, j'ai laissé subsister la phrase où le caractère dont 
il s’agit n’étoit énoncé qu’avec doute; mais j'ai dû faire ainsi, 
pour ne rien changer à ce qui avoit élé lu devant l'Académie, 
le 26 août 1816. 

(HH) Des trois omissions que me reproche ici M. Brown, 
il n'y en a qu'une de réelle. L'adhérence de la base du style 
avec le tube de la corolle, est un fait qui avoit échappé à mon 
examen, je l'avoue. Mais j'avois très-bien rémarqué l'absence 
du nectaire, et la division de chaque loge de l’anthère en deux 
logettes; et cependant je n'ai pas cru devoir en parler dans ma 
description. Quand le nectaire existe dans une fleur, si celui 
qui décrit cette fleur omet d'en parler, sa description est in- 
complète; mais quand le nectaire n'existe pas, son absence est 
suffisamment indiquée par cela seul que la description ne le 
mentionne pas. Quant à la cloison qui divise en deux logeltes 
chaque loge de l'anthère, comme elle existe dans presque toutes 
les familles aussi bien que chez les Boopidées, il étoit inutile 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 111 


d'en faire mention, d'autant mieux qu'ayant observé celle cloison 
chez les Dipsacées, et l'ayant admise par analogie chez les Sy- 
nanthérées (Journal de Physique, tome LXX VIH, p. 275 et 285), 
je ne pouvois y voir un caractère distinctif pour les Boopidées. 

S'il me prenoit la ridicule fantaisie, ce qu'a Dieu ne plaise, 
de récriminer contre M.* Brown, il me seroit assurément bien 
facile de lui reprocher à mon tour, des omissions plus nom- 
breuses, plus réelles et plus graves que celles qu'il m'impute. 
On pourra s’en convaincre en comparant mon article Boopidées 
du Dictionnaire des Sciences naturelles , avec tout ce que M. Brown 
a dit sur celte famille. 

(II) M. Brown avoue que les Boopidées diffèrent de toutes 
les Composées par la connexion incomplète des anthères, et 
cependant il ne veut pas que celte structure soit employée comme 
un Caractère distinctif. Pour expliquer cette énigme, il suflit de 
remarquer que j'ai mis cette structure au nombre des caractères 
les plus remarquables des Boopidées, tandis que M. Brown, 
qui l'avoit cependant mentionnée dans la description de son 
Acicarpha spathulata , paroit n’y avoir fait aucune attention avant 
la rédaction de son Supplément. 

(JJ) L'ordre d’épanouissement des fleurs n'a paru très-1rré= 
gulier, non-seulement dans les Boopis, mais aussi dans le Ca- 
licera quoique l'échantillon de ce dernier que j'ai observé fut 
en très-mauvais état. J'ajoute que les fimbnilles, ou les squa- 
melles fimbrilliformes, dont le clinanthe est garni dans ces deux 
genres, m'ont semblé inégales, irrégulièrement disposées, et 
plus nombreuses que les fleurs. Ces observations viennent à 
l'appui de la conjecture de M. Brown, qui est disposé à atlri< 
buer au Boopis un capitule composé de plusieurs calathides. 
Le Calicera seroit, selon moi, dans le même cas. Malgré cela, 
je crois, comme M. Brown, qu'il faut encore suspendre son 
jugement sur la vraie nature de l’inflorescence propre à ces deux 
genres. 

(KK) M. Brown, après être convenu que le nom de Boo- 
pidées devoit être préféré à celui de Calicérées, parce que mon 
Mémoire sur celie famille avoit été publié avant le sien, éprouve 
un regret de celte concession, et il s'efforce d'établir que le 
nom de Calicérées est de beaucoup préférable à celui de Boo- 
pidées. 

Sa première objection contre le nom de Boopidées est d'une 
force vraiment acgablante , et je suis bien embarrassé pour y 
répondre; essayons pourlant de nous tirer de ce mauvais pas 


112 #” SOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


le moins mal que nous pourrons. Le mot Boopis signifie œil 
e Bœuf, ou grand œil. Ce nom s’appliqueroit merveilleusement 
au geure dont il s’agit, si les fleurs S'épanouissoient réguliè- 
rement de la circonférence au centre; mais comme leur épa- 
nouissement est irrégulier, on ne peut plus conserver à ce genre 
le nom de Boopis, et la suppression de ce nom de genre en- 
traine la suppression du nom de famille qui en est dérivé. Voila 
l'objection. | 

Voici la réponse. Le nom de Boopis donné à un genre de 
plantes, quel qu'il soit, est un de ces noms insignifians, qui 
peuvent s'appliquer à tout par la raison qu'ils ne s'appliquent 
exactement à rien. Il est donc fort indifférent , sous ce rapport, 
que l’ordre d’épanouissement des fleurs soit régulier ou irré- 
gulier; dans l’un ou l’autre cas, l’assemblage des fleurs du Boopis 
pe ressemblera jamais à un œil, En établissant la famille qui 
comprend les trois genres Calicera, Boopis et Acicarpha, je 
pouvois à mon gré lui donner le nom de Calicérées, de Boo- 
pidées, où d'Acicarphées. Ce n’est pas au hasard et sans motif 
que j'ai choisi celui de Boopidées; je l'ai préféré aux deux autres, 
parce qu'élant insignifiant, il peut s'appliquer à tout. Le nom 
de Calicérées, que préfere M. Brown, est très-mauvais, selon 
moi, parce qu'il est trop siguificatif, et ne peut s'appliquer qu’à 
des plantes dont le calice a ses divisions semblables à des cornes. 
Ainsi ce nom de famille, qui s’appliqueroit fort bien au Ca- 
licera et au Cryptocarpha, conviendroit fort mal au Boopis, 
dont le calice a ses divisions foliacées, demi-lancéolées. D'ail- 
leurs, il est très-possible que de nouveaux genres viennent uu 
jour se classer dans la famille, et que la structure de leur calice 
se trouve toul-à-fait en opposition avec le nom de Calicérées. 
Un autre motif encore m'a fait préférer le nom de Boopidées 
aux deux autres; c’est que des trois genres de la famille , le 
Boopis est celui dont la structure est Ja plus simple et la moins 
anomale, de sorte que ce genre peut être considéré comme le 


iype de la famille. 


La seconde objection de M. Brown, est que les Boopis ne 
sont pas génériquement distincts du Calicera, d'où il suit qu'il 
faut les réunir en un seul genre sous le nom de Calicera, et 
que le nom de Boopis se trouvant ainsi supprimé, le nom de 
Boopidées doit subir le même sort. Je réfute cette objection en 
décrivant les deux genres que M. Brown voudroit confondre , 
mais qui me semblent suffisamment distincts , ainsi que je crois 


l'avoir 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 113 


l'avoir déja démontré dans mon article Boopis du Dictionnaire 
des Sciences naturelles (tome V, Supplément, pag. 28). 


CarcerA. D'une racine fongueuse s'élèvent plusieurs tiges sca- 
piformes, simples, herbacées, cylindriques, presque nues, ac- 
compagnées à leur base de feuilles radicales pinnatifides, et 
terminées chacune par une seule calathide globuleuse, com- 
posée de petites fleurs hermaphrodites nombreuses, portées sur 
un clinanthe hémisphérique, garni de fimbrilles presque fili- 
formes , et entouré d'un péricline formé de plusieurs squames. 
Chaque petite fleur offre, 1°. une corolle monopétale, régulière, 
épigyne, verdätre, herbacée, membraneuse, formée d’un tube 
cylindrique long et grêle, surmonté d’un limbe profondément 
divisé en cinq lobes alongés, linéaires, obtus au sommet, chacun 
d'eux muni d'une nervure médiaire et de deux nervures sub- 
marginales; 2°. cinq élamines dont les filets greffés à la corolle 
presque jusqu’à la base des incisions du limbe, ont leur partie 
libre , grêle et filiforme supérieurement, élargie et membraneuse 
inférieurement; et dont les anthères entre-greffées en leur partie 
inférieure, libres en leur partie supérieure, sont linéaires, étrécies 
de bas en haut , obtuses au sommet, arquées en dedans, canaliculées, 
composées d’un connectif cylindracé, épais, très-saillant sur la face 
externe, sansappendice apicilaire , et de deux loges étroites, sans 
appendices basilaires sensibles ; 3°. un très-long style indivis, fili- 
forme, glabre, terminé par un stigmate très-simple ; 4°. un ovaire 
infère absolument sessile surle clinanthe, et qui devient un fruit de 
substance ligneuse, court, épais, subcylindracé, épaissi de bas, 
en haut, muni de cinq grosses côtes fongneuses, très-saillantes, 
tranchantes sur leur bord, inégales, irrégulières , lesquelles se 
prolongent supérieurement , autour du sommet du fruit, en au- 
tant de cornes très-inégales, longues et fortes, horizontales, tri- 
quètres, amincies en pointe à l'extrémité. Ce fruit uniloculaire, 
est rempli par une seule graine obovée, pentagone supérieure- 
ment, ayant son point d'attache au sommet de la cavité du fruit; 
elle est revêtue d’une tunique membraneuse, sous laquelle est un 
albumen charnu, très-épais , dont l’axeest occupé par un embryon 
cylindracé , à radicule aboutissant à l'ombilic. Il est très-remar- 
quable qu’en mürissant , les fruits du Calicera deviennent dis- 
semblables , tellement que la calathide se trouve composée de 
deux sortes de fruits irrégulièrement entremélés, et tous éga- 
lement fertiles ; les uns petits, de substance presque osseuse, 
et munis de cornes très-courles; les autres incomparablement 


Tome LXXXVII, AOÛT an 1818. P 


114 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
plus grands, de substance comme fongueuse, et munis de cornes 
d'une longueur vraiment prodigieuse, 

C’est sur la foi d'autrui que j'attribue au Calicera un péri- 
cline de plusieurs squames , et des feuilles pinnatifides ; car l'échan- 
tüillon en très-mauvais état qui existe dans lherbier de M. de 
Jussieu , et qui a élé le sujet de mes observations , ne m'a offert 
que de longues feuilles linéaires, très-simples, et je n'ai jamais 
pu y reconnoitre le péricline. Les filets des étamines m'ont quel- 
quefois offert une apparence d’articulation, mais trop foible et 
trop douteuse pour m'y faire admettre un article anthérifère dis- 
tinct. Je n’ai pas non plus aliribué aux anthères des appendices 
basilaires, parce qu’ils sont extrêmement courts et arrondis. 
Quant aux appendices qui garnissent le support des fleurs et 
sont interposés entre elles, je ne sais si ce sont des fimbrilles 
ou des squamelles fimbrilliformes ; quoi qu'il en soit, ces ap- 
pendices sont plus nombreux que les fleurs, irrégulièrement 
épars, inégaux, médiocrement longs, gréles, membraneux, sub- 
filiformes , lineaires, un peu plus larges supérieurement , aigus 
au sommet. Le nombre, la disposition et l'inégalité de ces ap- 
pendices concourent avec la diversité des fruits et leur mélange, 
pour me persuader qu'il y a irrégularité dans la ealathide où 
le capitule du Calicera, au moins sous le rapport de l’ordre 
d’épauouissement des fleurs. 

Boopris. Calathide hémisphérique, composée de fleurs herma- 
phrodites nombreuses. Péricline libre, plécolépide, formé de 
huil squames membraneuses , unisériées, entre greffées inferieu- 
rement , inégales, aiguës. Clinanthe très-petit, garni de fim- 
brilles (ou de squamelles fimbrilliformes). Ovaire infère, à einq 
côtes, portant aulour de son sommet cinq appeudices foliacés, 
demi-lancéolés, qui constituent un calice épigyne. Style épaisst 
supérieurement ; stigmale terminal, hémisphérique, papillé. 

Le Boopis diffère principalement du Calicera, en ce que les 
divisions du calice ne se convertissent point en longues cornes 
ligneuses; et du Cryptocarpha, en ce que les ovaires et le pé- 
ricline sont libres, et que les appendices du support des fleurs 
sont manifestes. Si le péricline du Calicera est formé de squames 
entièrement distinctes, ce que je n’ai pu vérifier par mes yeux, 
mais ce que semblent indiquer les descriptions que j'ai lues, 
ce sera encore un caractère propre à distinguer le Calicera du 
Boopis, dont le péricline est plécolépide. L'étrange diversité 
des fruits du Calicera est encore un caractère très-notable, et 
qui ne permet pas de confondre ce genre avec le Boopis. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 11 


Le Boopis anthemoïdes, que j'ai analysé plus en détail que 
le B. balsamitæfolia, m'a fourni la matière des remarques sui— 
vantes. 1°. La corolle n’est point herbacée, comme celle du 
Calicera; le tube, plus long que le limbe, est gréle, cylin- 
drique; le limbe, bien disunct du tube, est campanulé, ayant 
sa partie inférieure indivise, arrondie à la base , et ses lobes, 
pie longs que la partie indivise, linéaires inférieurement, demi- 
ancéolés supérieurement, un peu épais et opaques, munis de 
trois nervures, dont une médiaire plus forte, et deux intra- 
marginales plus foibles. 2°. Les étamines ont les filets gréles, 
élargis inférieurement, greflés à la partie basilaire du limbe 
de la corolle, et n'offrant point un article anthérifère suffisam- 
ment distinct; leurs anthères entre-greflées inférieurement, libres 
supérieurement, arquées en dedans , ont un gros connectif sail- 
lant en dehors, sans appendice apicilaire, et des loges très- 
étroites, sans appendices basilaires. 3°. L'ovaire contient un 
ovule obovale, suspendu par la pointe un peu latéralement à 
un pelit funicule qui s'attache au sommet de cet ovaire. 4°. Les 
fimbrilles, ou squamelles fimbrilliformes, sont plus longues que 
les ovaires, étroites et linéaires inférieurement, élargies et lan- 
céolées supérieurement, cuspidées au sommet. 5°. La composi- 
tion de la calathide ou du capitule est irrégulière. 

(LL) M. Brown pouvoit citer à l'appui de son système , l'ob- 
servation que j'ai faite sur le nectaire des Synanthérées, el que 
j'ai consignée dans mon premier Mémoire, en m'exprimant de 
Ja manière suivante. 

« Il est très-remarquable que l'avortement total ou partiel 
» du disque s’observe généralement dans les fleurs femelles ; 
» tandis que cet organe existe ordinairement d’une manière très- 
» apparente dans les fleurs hermaphrodites; et que, dans les 
» fleurs mâles, sa grandeur excède souvent les dimensions or- 
» dinaires. Ÿ auroit-il quelque relation entre le disque et les 
» étamines? » (Journal de Physique, tome LXX VI, pag. 257.) 

On voit, par cette dernière réflexion, que j'avois eu des-lors 
peu près la même idée que M. Brown. 


RE 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES 


A compter du 1° janvier 1818, les hauteurs du Baromètre 


ke. THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR Es ; = 
S TIGE, BAROMETRE MÉTRIQUE. z 2 
% 5. 
de MINIMUM. MAXIMUM. A MIDI. MAXIMUM. MINIMUM. A MIDI | © 2 
heurese heurese heures* mille heurese mille mille 
1laäos. <Ho6°75] à 4m. <+H14°95| +26,60| à 4 m... .761,69| à 105... .758,o1| 760,c0| 23°4 
2 | àmidi. +026,5ol à4m. “<+14,56| +26,50| à 105... -760,65 à midi... ..7b6,77| 756,77| 23,9 
5 |a3s. —+Hoo,75l à 4m. “10,25 +-20,00| à 10 m...762,86! à 8s...,.761,19| 762,49] 22,0 
4 | a midi. Ho2,5o| à4m. “<12,50| +22,50| à 4m... .780,10! àg9m....757,62| 7b8,77| 29,7 
5 la 35. - 25,10] à 4 m. ir) 22,25] à 10 1s...758,80| à Ds... 757,26! 758,1°| 23,0 
6|à3s. +o4,oo! à 4m. +13,75| +23,50] à 9 m....760,20| àBs..... 758,50| 759,85| 23,0 
7 |a51s. 03,95] à4m. 12,50] +22,10| à 4m. ..758,65 à 9 2 5....708,80| 755,51| 29,7 
8 [a3s. <+o3,75| à4m. “+H12,75| +23,10] à 10 5....757,31| à 4m 753,14] 754,55| 92,6 
9 | à midi. 93,25] à 4m. “<Hio,bc| 423,2] à gs......761,09! à 4 m 759,18] 759,76] 22,6 
10 | à midi. +o3,6 | à 4m. +13,2°| +23,65| à 7 m....761,8b| à 9 !s....759,0oc| 760,80| 22,8 
11 là3s. “+Ho5,| à 4m. +15,75| +24,25] à 4 m..…. .758, 10) ROBIEN 754,65] 756,67| 25,4 
12 | à5s. Ho3,o| à 4m. +H18,5c| +21,75] àgs..... 799,99] à 85... 755,81| 754,05] 22,7 
15 | à midi. Ho4,5c| à 4m. <+a2,5c| +24,50| à gLs....700,15| à 4 m....757,o1| 758,71] 20,6 
14 |à3ts. 94,95] à 4m. Hi4,oc| +25,9b| à gs..... 762, 96! à 4m....761,05| 769,34] 93,1 
15 | à3s. +o/,5c] à 4m. “<+H15,oc| +-23,75] à 9 m... -765, 6ë| àb4s....762,2q| 763,25] 93,0 
16 [a5s Hoyo|àaé4m. +15,20| +25,10] à 7 m....769,56| à9 s..... 760,68| 769,5:| 23,4 
17 | à3s. +Hoo,7 | à4m. +H18,10] +22,2] à9 m .::760, 2c| a6s 728,24] 759,74 23,1 
18 | à3s. Ho5,o | à 4m. “i5,oc| +25,7b] à 7 m....758,06| à gs... 754,8b| 756,41| 93,6 
19 ais. +o8,ac| à 4: m. 15,25] +28,29] à 7 m....755,72| à 4s..... 752,58] 753,04| 24,5 
20 | à midi. o7,bc| à 5is. 416,50] +27,bc] à g s..... 726,06! à 41 m...753,78| 954,47| 25,0 
21 làdss. +ob,75| à4? ï m. +-14,4c| 424,79] à g9ts....758, 82| à 41 m...756,72| 757,51| 24,4 
29 | à3s. —Ho6,o:| à 42m. +17,0oc| 25,0] à midi 701, 20] à 4 1m...759,87| 761,20] 24,9 
25 | à3s. +30,25| à 4m. +16,0c| +928,5c| à 4 ! m...760,30| à9s..... 723,50] 758,02| 26,1 
24 läos. +34,50| à 4i m. +19 75 +4,25 a7m....754,88| àg+s....752,90 75407| 2714 
25 | à midi. +29,2b| à 42m. +19,50| -La20,25|°à gs... 794,65| à 7 m. ...755,72| 754,20] 26,5 
26 | àäo ls. 31,90] à 4 Em. 18,25] +531,40| à 7 m....704,44| à 4 s.....752,59| 755,56] 26,8 
27 | àmidi. 97,85] àgs. 17,00 07,85 EU ÉDRErE 758,67| à 4+m...755,50| 754,48] 27,0 
28 | à3s. +17,00| àgm. 14,00! Hi14,o0| à gs. .... 763,12] à 4, m...759,81| 761,44] 923,1 
29 | àGs. +o5,5c| à 4 1m. 19,25) +21,90] à 9m....763,96 AA be 702,98] 765,45] 23,6 
30 | à%s. Æo95,25| à 4 1m. 15,00! +24,75] à 9 m.. .765,02| à 6s. 761,26| 762,77| 24,0 
31 1 à3s. +96,10| à 4 1 m. H15,00| +24,00| à 7 m....761, 84 AD See 758,82] 760,75| 24,1 
Moyennes. —+-25,55 +14741 +24,31 759,68] 757,07| 728,341 23,9 
RECAPITULATION. 
: Millim. 
Plus grande élévation du mercure..... 763°96 le 2g 
Moindre élévation du mercure........ 752,58 le 19 
Plus grand degré de chaleur........ .. +34°50 le 24 
Moindre degré de chaleur........... +10, À le 3 


Nombre de jours beaux,....... 


defcouverts 2 .1.0405 o 
déplier certe 4 
de vent......, RAA 31 
defpelées". 0... 10 
dertonnerre. #2. 2 d 
de brouillard, .,....... 4 
delneiress ste CReie o 


A L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. 


sont réduites à la température de zéro du Thermomètre. 
JUILLET 1818. 


Le 
© |AYG 
L=} 
= à midi 
1 56 
2 65 
3 60 
4 | 621 
5 | 65 
6 | 64 
7 | 62 
8 | 62 
9 | 54 
10 | 54 
11 62 
192 | 72 
15 | 67 
14 69 
151255 
16 | 5q 
17 56 
18 | 64 
19 | Bi 
20 | 58 
21 | 58 
22 3 
23 | Æ 
24 | 49 
25 63 
26 5g 
27 60 
28 | 8g 
29 | 53 
30 6: 
31 Te 
Moyen 62 


? sur l'Observatoire. 


EM = 


VARIATIONS DE L'ATMOSPHÈRC.. 


: POINTS 
VENTS. “s ES 
CONARS LE MATIN. À MIDI. LE SOIR. 
N.-E: Lune apogée. [Beau ciel. Légers nuages, Légers nuages à l’hor. 
FE: Nuages à l'horizon. [Nuageux. Nuageux. 
el N.L.a2h47/s.]Beau ciel. Idem. Idem. 
N.-O. Nuageux. Quelques éclaircis, [Beau ciel. 
Idem. Hein Très-nuageux. Nuageux. 
N.-E, Idem , léger brouil. |Couvert. Légers nuages, 
E. Nuazeux. Légers nuages. | Idem. 
N.-0. Idem. Nuageux. Idem. 
Idem. Idem, Idem. Idem. 
Idem. Couvert. Idem. Très-nuageux. 
O.-N.-O. [P.Q.à7h47's]Très-nuageux, brouil.|Très-nuageux. Nuageux. 
Idem Couvert , pluie à 8. |Couvert. Id., forte averse à3':. 
N.-0. Nuageux. Idem. Nuaseux, 
N.-E. Couvert, brouillard. |[Nuageux. Idem. 
Idem. Nuages au N.-O. Beau ciel. Beau ciel. 
N. Lune périgée. |Légères vapeurs. Légères vapeurs. Nuageux. 
E. P.L.àroh13. Couvert. Légers nuages. Idem. 
E.-N.-E Nuageux, Nuageux. Idem. 
Idem Idem. Idem. Idem. 
N.-0. Idem. Idem. Forte av. à 5', tonn. 
O. Légères vapeurs, Idem. Nuageux, 
N.-0. Couvert. Couvert. Idem. 
E.-S.-ÆE Beau ciel. Petits nuages blancs. |Beau ciel. 
S. Nuageux. Idem. Légers nuages, 
O. Quelques éclaircis.  [Nuag.,pl., tonn. à 10*.|Nuageux. 
S. D.Q.à0oh4’m.|Nuageux. Nuageux, Idem. 
S.-O. Idem. Idem. Idem. 
N.-N.-O: |Lunc apogée. Couvert, pluie averse.|Pluie fine. Très-nuageux. 
N. Nuageux. Ciel trouble. Nuageux. 
Idem Couvert. Couvert. Beau ciel, 
O.-N.-0. Couvert, brouillard, |[Nuageux, Nuageux, 
RÉCAPITULATION. « 
NORRIS 
NE. tte he 5 
EC de ile) 
Jours dont le vent a soufflé du A EURS RUE 2 
S.-0..... SEE ME 
PROMESSE 5 
NO teste D 
le 1°, 19°,086 
Thermomètre des caves centigrades, 
le 16, 12°,089 
lu de Ie tentée { dans la cour... .... 17%8,71=—=Op. 7lig. 


118 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


PSP PRES PRES PREET ET IP TEEN SEEN NP ELE CPR ENEUE ETES ETES ET ERNEST DEEE COUTEAU 


SUITE DU MÉMOIRE 
SUR LES TERRAINS D'EAU DOUCE, | 


Ainsi que sur les Animaux et les Plantes qui vivent 


alternativement dans les eaux douces et dans les eaux 
salées ; 


Par M. MARCEL pe SERRES. 


Lr Lez, petite rivière dont la source est à peu de distance 
de Montpellier, se jette, comme on le sait, dans la Méditer- 
ranée. C'est donc à cause de sa communication directe avec 
celte mer, que ses eaux sont souvent salées, et même à une 
distance assez considérable de leur embouchure; cette salure est 
sensible quelquefois à plus de trois quarts de lieue au-dessus 
de l'embouchure de la rivière dans la mer. Cette rivière, dont 
les eaux sont alternativement douces et salées, est curieuse à 
observer, parce qu’on peut y reconnoitre l'effet que produit la 
différence de nature de ses eaux sur les animaux qui y vivent. 
Pour mieux faire cette comparaison, j'ai loujours noté, outre 
le degré de salure des eaux de cette rivière, leur température 
ainsi que celle de l'air extérieur, afin que l’on püt juger si la 
température avoit ici quelqu’influence dans la salure des eaux. 
Mais la chaleur ne m'a paru influer nullement sur cette salure, 
et ici la direction du vent, et par suite le courant de mer, 
exercent seuls quelque influence. En effet, c'est pendant les 
vents marins et surlout après les gros temps, que les eaux du 
Lez ont un degré de salure bien sensible près de leur embou- 
chure; on observe même que les eaux sont salées à une distance 
proportionnée à la force du courant et au refoulement des eaux 
de la Méditerranée. 

Parmi les nombreuses observations que j'ai faites à cet égard, 
je n’en cilerai que les principales , celles-ci pouvant fort bien 
faire concevoir que les animaux qui habitent ordinairement les 
eaux douces , ne les abandonnent pas subitement , lorsque par 
une circonstance accidentelle elles éprouvent un certain degré 
de salure. Le 26 mai 1815, à 6 heures du matin, un thermo- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 119 


metre centigrade plongé dans l’eau du Lez à une petite lieue 
de son embouchure, marquoit 18°,45, tandis qu’à l'air libre, 
il ne se maintenoit qu'a 14°,80 , et l’aréomètlre à o n'indiquoit 
aucune salure. Des filets furent jetés dans celte eau, et on en 
relira, 1°. l’anguille (Muræna anguilla), 2°. la Saupe (Sparu 
salpa), 5°. le Muge (Mugil cephalus), 4°. la Perche (Perca labrax), 
5°. le Crabe PR Ar (Camer mænas), 6*. Lymneus auricularius , 
7°. Herita fluviatilis, 8°. Succinea amphibia , o°. Gammarus pulex, 
10°. Conferva glomerata. Ainsi l'on voit que dans une eau tout- 
à-fait douce, soit au goût, soit à l’aréomètre, vivoient cependant 
des poissons de mer, avec d’autres poissons et mollusques des 
eaux douces. Mais il y a bien plus; les pêcheurs m’assurèrent 
d’une manière unanime, avoir pris dans le même lieu des Ma- 
queraux (Scomber scombrus), ainsi que l'espèce de Pleuronectes 
nommé par Rondelet Ærnoglossus, et dont il a donné une assez 
bonne figure à la pag. 324 de son Histoire des Poissons. Les 
pêcheurs de la Méditerranée désignent cette espece dans leur 
langage sous le nom de Plane. Je doute beaucoup de la der- 
nière asserlion, car les Pleuronectes ne me paroissent jamais 
abandonner le bassin des mers, et peut-être plus à cause de 
la profondeur d’eau dont elles ont besoin, que de la salure de 
ces mêmes eaux; mais les autres poissons que j'y ai reconnus, 
prouvent fort bien, sans cette dernière observation, que cer- 
taines espèces sont intermédiaires, par leur manière de vivre, 
entre celles qui n’abandonnent jamais les eaux douces, et celles 
qui s’éloignent peu du bassin des mers. Tous les pêcheurs de 
la Méditerranée m'ont assuré (et mes observations s'accordent 
fort bien à cet égard avec les leurs) que parmi les poissons 
d'eau douce, l'Ombre (Salmo thymallus), la Perche et le Sangar 
abandonnent très-rarement les eaux non salées, et pour ainsi 
dire jamais; de même les Rougets (Mullus barbatus), les Sardines 
(Clupea sprattus), les Homars (Astacus gammarus), les Langoustes 
(Palinurus homarus) ne sortent jamais du bassin desmers, quoique 
toutes ces espèces s'approchent assez près des côtes. On sent 
bien que c’est seulement de ces espèces dont je venx m'occuper, 
car il ne peut y avoir de doutes pour les poissons ou les crus- 
tacés de la haute-mer. 

En citant ainsi les poissons de la haute-mer, nous n’entendons 
pas dire par là, que la grande profondeur des mers soit habitée 
comme sa surface, car 1] est à remarquer que généralement on 
ne trouve pas des poissons dans les couches intermédiaires entre 
les supérieures et les plus inférieures. En effet, quelque con- 


120 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


sidérable .que soit la profondeur où l’on est parvenu par les 
pêches (la plus grande est environ de 400 brasses ou 2000 pieds), 
elles le sont encore bien peu en comparaison de celle de l'Océan 
et des autres grandes mers, pour permettre de décider cette 
question. On pourroit cependant présumer que la grande pro- 
fondeur doit être inhabitee, en raison des changemens qui ré- 
Sulteroient pour l’économie des poissons, de l'augmentation 
d'épaisseur de Ja couche d’eau dont ils serotent alors recouverts; 
augmentation qui entraineroit avec elle un accroissement rapide 
de la pression, une diminution encore plus rapide de la lumiere, 
el enfin un grand éloignement de l'air atmosphérique. Toutes 
ces causes réunies, modifieroient tellement la manière d’être des 
poissons, qu'il est assez probable de penser, qu'ils doivent s’y 
soustraire, surtout lorsque rien ne les force à s'y soumettre. 
Du reste, l’éloignement de l'air atmosphérique n’est pas plus un 
obstacle à leur libre respiration, puisque l'oxigène est tenu en 
dissolution dans l’eau des grandes profondeurs , que l'obscurité 
à laquelle on les a cru soumis sous les grandes couches d’eau, 
n'est peut-être un obstacle à leur vision. Sous ce dernier rap- 
port, tout dépend, non pas seulement de l'intensité de la lu- 
mière que ces animaux peuvent recevoir, mais bien de la struc- 
ture et de la conformation de leurs yeux qui est telle, que les 
plus petites portions de lumière se concentrent sur leur rétine 
avec une force d'autant plus grande, que celte lumière est 
plus rare, 

En continuant de m’approcher de l'embouchure du Lez, je 
plongeai de nouveau mon thermomètre dans l’eau; il s’y éleva 
à 18°,50, tandis qu'à l'air il ne se maintenoïil qu'a 17°,95; déjà 
l'aréomètre indiquoit 0,90, aussi la salure de l’eau étoit-elle bien 
sensible. pe er on y observoit un grand nombre de mol- 
lusques et de plantes des eaux douces, et j'y recueillis, 1°. PAysa 
fontinalis , 2°. Lymneus auricularius, 5°. Gammarus pulex , 4°. di- 
verses espèces d Hydrophyles et d’Elophores, 5°. Ranunculus aqua+ 
tilis, 6. Serratophyllum demersum, 7°. Potamogeton crispum , 
densum, pectinatum et elongatum. Enfin à un quart de lieue de 
l'embouchure de la rivière dans la mer, l'eau étant tellement 
saumâtre , qu’elle n’étoit plus potable, l’aréomètre marquant 2°,55 
à 2°,75 suivant les points où frappoit le courant de la mer, vi- 
voient des poissons que l’on pêche ordinairement dans les eaux 
douces. Ces espèces étoient des Brêmes, des Carpes, des San- 
gars, des Buveltes et des Sophies. Les pécheurs m'observèrent 
avec raison, que ces poissons étoient d'autant plus abondans 


dans 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 127 


dans celte partie de la rivière, que le vent du sud étoit foible, 
ou, en d’autres termes, que le courant de mer sale moins 
les eaux de la rivière. Mais, d’après l'observation que je viens 
de rapporter, il n’en résulte pas moins, que des poissons que 
l'on doit ranger, par leurs habitudes connues, parmi les poissons 
d’eau douce, vivent cependant sans aucun inconvénient pour 
leur économie dans des eaux qui ont jusqu'à 2°,55 et 2°,75 de 
salure. Ce dernier fait, joint à ceux que nous avons indiqués, 
annonce, ce me semble, qu'il n'y a rien de bien absolu à cet 
égard que pour un certain nombre d'espèces qui peérissent in- 
stantanément dès que la nature du liquide vient à changer. Enfin, 
en m'approchant encore plus des bords de la mer, je vis sur 
les pierres de la jetée, exposées au courant des vagues dans 
le lieu où le Lez se jette dans la Méditerranée , une très-graude 
quantité de Mytylus edulis. Les pêcheurs m'assurèrent d'enu 
manière unanime, que ces Moules n’abandonnoïient jamais les 
rochers exposés au courant direct de la mer, et qu'ou n’en 
trouvoit point sur les pierres de la jetée latérale, quoique ces 
pierres fussent dans une eau presque aussi salée. Les Moules 
seroient donc des espèces complètement marines, tandis que 
le Cyclostoma acutum de Draparnaud , analogue aux Paludines 
fossiles des environs de Mayence, et regardé pendant long- 
temps comme marin, vivant dans des étangs dont le degré A 
salure varie de 0° à 4°, seroil intermédiaire entre les espèces qui 
vivent dans la mer et celles qui se plaisent au contraire dans 
les eaux des lacs et des fleuves. De même, le Cyclostoma trur- 
catulum et Y Auricula myolotis doivent être considérés comme 
intermédiaires entre les espèces terrestres des terrains d’eau 
douce, et celles qui peuvent vivre sur un sol légèrement salé. 
On observe, en effet, ces espèces sur les bords des étangs qui 
ont jusqu'a 4° de salure, ainsi que daus des lieux où je sel 
effleurit de toutes parts. 

Les lois que nous avons reconnues pour les divers genres 
d'habitations des Mollusques, sont peu différentes de celles aux- 
quelles on voit les Crustacés soumis. En effet , certains Crustacés 
sont tout-à-fait marins, et c'est le plus grand nombre, tandis 
que d’autres se trouvent dans les eaux saumäires , et quelquefois 
même dans celles tout-i-fait douces; tel est le Cancer mænas, 
Certains Brachiopodes paroissent vivre également dans l’eau de 
la mer et les eaux tout-à-fait douces; mais je n’ose encore 
l'assurer pour un grand nombre d'espèces. Le Gammarus pulez 
payant paru jusqu'a présent présenter seul celte singularité. 


Tome LXXXVII. AOÛT an 1818, Q 


122 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Quant aux reptiles sauriens et aux insectes, je n’en connois 
point près des côtes de la Méditerranée qui soient proprement 
marins. 1] n’y en existe qu’un fort petit nombre que l’on puisse 
considérer comme maritimes, c’est-à-dire se trouvant toujours, 
ou presque toujours, sur les côtes; de ce nombre sont les La- 
cesta algira et velox pour les reptiles, et les Scarites pyraemon(r), 
cursor, Carabus arenarius, Pimelia bipunctata, Phaleria pellucens, 
Ægialia globosa et Atenchus semi-punctatus, parmi les insectes. 

Mais ces animaux se lrouvent-ils constamment sur les plages 
maritimes, à cause du sel dont ces terrains sont imprégnés, ou 
seulement à cause du sable qui les constitue? Sans oser pro- 
noncer affirmativement entre ces deux opinions, je suis assez 
porté à croire que c’est la seconde cause qui a, à cet égard, 
le plus d'influence. Quant aux reptiles chénoniens, il en existe 
un certain nombre qui paroïissent bien marins, comme plusieurs 
espèces de Tortues, mais je n’oserai pas cependant assurer que 
ces espèces pussent vivre dans des eaux moins salées que la 
mer. Peut-être est-on en droit de le supposer, puisque M. de 
Humboldt a vu en Amérique les Crocodiles s'avancer à plus de 
deux lieues en mer, tandis que, d’un autre côté, nous avons déjà 
observé que les Dauphins remontoient bien avant dans les ri- 
vières. Ces faits indiquent du moins que certaines espèces ma- 
rines peuvent très-bien abandonner pendant quelque temps l’eau 
salée, comme les espèces d’eau douce, vivre sans inconvénient 
dans des eaux plus ou moins saturées de sel. Une observation 
qui confirme assez cetle manière de voir, est celle que M. Bron- 
gniarl a faite au sujet des lacs salés connus en Westphalie sous 
les noms de Salzer see et Salzee. Ces lacs, situés près de la 
petite ville de Halle où existent des sources d’eau salée, n’ont 
qu'un très-foible degré de salure vers leurs bords. Il n’est pas sûr 
que le milieu ne soit pas plus salé; maïs ce qu'il y a de par- 
üculier, c’est que les Lymnées et toutes les plantes aquatiques 
qu’on trouve dans les eaux douces, y vivent fort bien et y sont . 
même en grande abondance. 

Les observations que nous venons de rapporter, quoique n’ayant 
pas encore toute la généralité dont elles sont susceptibles, in- 
diquent cependant qu'il n’est guère possible de s'assurer par des 
caractères extérieurs certains, si une coquille a appartenu à 


(1) Observations entomologiques, par Bonnelli, H° partie, V* volume des 
Mémoires de l’Académie de Turin. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 123 


un animal vivant dans l’eau douce ou dans l'eau salée: car 
quelle différence existe-t-il, par exemple, dans les caractères 
tirés de la force et de la solidité du test, entre les Paludiues 
de Maguelonne et les autres petites Paludines des eaux donces? À la 
vérité, les Paludines de Maguelonne ne peuvent être considérées 
que comme intermédiaires entre ces deux genres €'habitation; 
mais il seroit facile de citer des exemples de coquilles d'eau 
douce ou marines, entre lesquelles il est impossibie de trouver 
la moindre différence pour la solidité et le brillant du test. Par 
exemple, certaines espèces de Mya (V'Arenaria des côtes de 
Cherbourg) qui sont des coquilles bien marines, ont un épi- 
derme verdätre tout-à-fait semblable à celui des Unio; et quant 
à la solidité du test, elle est peut-être encore plus grande que 
dans certaines Unio. Les Lingules, suriout l'Anatina de Lamarck, 
lorsqu'elles sont jeunes, n’offrent pas la moindre différence avec 
les espèces fluviatiles. Le capitaine Baudin a apporté de Timor 
une Cytherea qui est pour le test, en tout semblable à une 
Cyclade. Enfin il n’y a pas jusqu'à certaines espèces de Vénus 
trouvées dans la terre de Diémen par le même capitaine Baudin, 
qui ne soient analogues à des coquilles d'eau douce, par leur 
couleur et l'aspect dé leur test 
Quant aux espèces fluviatiles, il y en a un grand nombre 
parfaitement semblables à des coquilles marines. L'espèce la 
plus analogue à ces dernières, quoique fluviatile, est une co- 
quille voisine du genre Potamide, que M. Olivier a trouvée au- 
près de Bagdad dans des terres qui avoient été inondées par 
les eaux du Tigre. Le Melania buccinoïdes, apporté de Syrie 
par le même voyageur, est encoie dans le même cas, ainsi que 
le Melania cortata que M. Olivier a vu vivant dans l'Oronte. 
Toutes les Mélanies observées par le capitaine Baudin dans la 
Nouvelle-Galle du sud, présentent la même similitude , quoique 
moins évidente cependant que dans le Potamides muricatus (Ce- 
rithium muricatum, Bose) des embouchures des fleuves d'Afrique, 
Enfin, il n'est pas jnsqu'aux espèces du genre Melanopsis, formé 
tout nouvellement par M. Daudebard de Ferrussac (1), soit le 
Buccinoides qu'il a vu vivant dans les eaux de Borno en Anda- 
lousie, soit le Prararsa observé par lui dans les eaux de l’aquedue 


QG) Mémoires géologiques sur les terrains formés sous l’eau douce par les 
débris fossiles des mollusques vivant sur la terre ou dans l’eau non salée, p. 53, 


Paris, 1814, 
Q 2 


s 


124 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


de Séville, qui n’oflrent cet aspect brillant et ce test solide qu'on 
avoit cru à tort être un caractère propre aux espèces marines. 
Nos observations prouvent encore, 1°. que la présence des 
coquilles d’eau douce au milieu des formations marines, ne doit 
pas nous surprendre , puisque nous avons encore des exemples 
de coquilles non fossiles appartenant à ces deux genres d'ha- 
bitation, et cependant mélangées et confondues les unes avec 
les autres. Les côtes de la Méditerranée fournissent, ainsi que 
nous l'avons déjà observé, des exemples nombreux de ces sin- 
guliers mélanges. 
2°. Qu'il n’est pas aussi simple qu'on l’avoit cru, d’aflirmer 
si telle espèce a vécu dans l'eau douce ou l’eau salée, puisqu'il 
en existe qu'on peut considérer comme étant, par leur genre 
d'habitation, intermédiaires entre ces deux points extrêmes. 
3°. Qu'il est impossible de concevoir, d’après l'observation 
des faits, que les formations où l’on trouve des productions de 
l'eau douce, et celles où l’on n’en voit que de l’eau salée, 
aient été produites par un seul etmême fluide. On doit admettre, 
au contraire, si l’on veut étre d'accord avec ce que l’observa- 
tion directe nous apprend , que pour laisser des dépôts de na- 
ture aussi différente, il a fallu qu'il existât deux fluides dont 
les propriétés, ou, si l'on veut, la nature, ne fussent pas les 
mêmes; car un seul et même fluide n’auroit jamais pu nourrir 
des êtres dissemblables pour les habitudes, pas plus qu’aujour- 
d'hui l’eau des mers ne nourrit à la fois les Bucardes, les Vé- 
nus, avec les Lymnées et les Planorbes. Quoïqu’on ne puisse pas 
préjuger par ce qui est aujourd'hui de ce qui a dù ètre autre- 
fois , il faut avouer cependant qu'il y a toujours plus de pro- 
babilité à admettre ce qui est conforme aux lois actuelles, que 
tout ce qui se trouve en opposition avec ces mêmes lois. 
Après avoir disculé les faits relatifs à l'habitation des divers 
animaux qui vivent dans les eaux douces ou salées, examinons 
maintenant les diverses formations de ce genre, caractérisées 
par les fossiles qu’elles renferment. Il existe, ce me semble, 
quatre principales formations d’eau douce, ou, si l’on veut, 
quatre époques différentes où des dépôts de cette nature se 
sont opérés. Ce qui est remarquable, et tout-à-fait général , 
c’est que ce genre de formation ne commence à se montrer 
qu'avec le calcaire. On trouve bien, à la vérité, dans des terrains 
plus anciens, par exemple, dans les schistes argileux ou les 
grauwackes schisteuses, des débris d'animaux, principalement 
des poissons et des plantes fossiles; mais jusqu’à présent on 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 195 


n'ÿ a point observé de coquilles assez bien conservées pour 
pouvoir être déterminées. Dès-lors, on ne peut avec certitude 
rapporter ces terrains ni à la formation d'eau douce, ni à la 
formation marine. Il paroït cependant que l’on a rencontré avec 
ces schistes, quelques Corraliolites, des Ammonites même et 
quelques grandes Orthocéralites ; mais l'on n’a pas déterminé si 
les poissons qui y existent sont analogues aux genres ou même 
aux espèces vivant aujourd'hui dans nos fleuves, ou dans le 
bassin des mers. M. Voigt décide cependant cette question d'une 
manière aflirmative (1), en observant dans un de ses excellens 
Mémoires sur le bois bitumineux, que les houilles ont été for- 
mées dans la mer bientôt après les sols primitifs, et que la 
plupart des houilles sont plus anciennes que les autres couches 
des terrains secondaires, notamment que ce grès rouge qui forme 
le mur de la couche de marne bitumineuse imprégnée de cuivre, 
que l'on exploite dans une partie de l’Allemagne. 11 convient 
cependant ensuite, qu'il s'en est déposé diverses couches pen- 
dant la suite de la formation des sols secondaires; mais toutes 
les couches lui paroiïssent avoir été formées et déposées dans 
le sein de la mer. Je ne sais s'il est bien rigoureux de pro- 
noncer aussi aflirmativement sur l'origine de diverses espèces 
de houille, sans avoir examiné et comparé les fossiles qui les 
accompagnent avec les différentes productions de la mer. Tant 
que celle comparaison n'aura pas élé faile, nous croyons qu'il 
est plus sage de ne rien décider sur cette question importante. 

La plus ancienne des formations d’eau douce, ou celle des 
Lignites, est caractérisée par la présence de ce combustible, qui 
conserve presque toujours des traces de son origine, et celle 
du calcaire compact bitumineux subordonné au calcaire grossier 
coquiller. On peut encore regarder comme des caractères gé- 
néraux de cetle formation , la présence constante des argiles 
ou des marnes bitumineuses. Les mollusques d’eau douce qui 
accompagnent également , servent encore à la distinguer. Cette 
observation n’avoit pas échappé à la sagacité de M. Voigt, et 
il dit en effet dans le Mémoire que nous avons déjà cité, que 
les matières végétales qui ont produit ces couches, ont été char- 
riées et entassées dans les lacs et autres bas-fonds, par les fleuves 
les rivières et les torrens. Si la mer eût eu quelque part à cette 
formation, on trouveroit dans ces couches, des coquilles, des 


(1) Journal des Mines, tome XIV, pag. 242 et 246. 


126 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


roseaux exotiques, comme dans les houilles, tandis que ces 
bois bitumineux ne renferment que quelques Limaçons, el ja-; 
mais d'empreintes de fougères semblables à celles des anciennes 
houilles. Enfin, ajoute-t-1l, les houilles ont été formées dans 
le sein de la mer et déposées par elle; les Lignites ou bois bi- 
tumineux , l'ont été par les eaux douces des rivières et des lacs, 
Peut-être, c'est aux particules salines de l’eau de la mer, que 
la houille doit ces caractères qui la distinguent si sensiblement 
du bois bitumineux; ceux-ci ne pouvoient rien en recevoir, 
puisque la mer n’a eu aucune part à leur formation. M. Schlott- 
heim dit également n'avoir vu avec les Lignites que des débris 
de coquilles ou de végétaux, soit terrestres, soit fluviatiles , et 
Jamais aucune trace d'animaux marins (1). 

Quoique M. Voigt parle de Limacons trouvés au milieu des 
Lignites, il me paroît que jusqu’à présent on n'y a rencontré que 
des espèces fluviatiles, et point encore d'espèces terrestres. En 
effet, les coquilles fossiles de la formation des Lignites connues 
Jusqu'à présent, sont 1°. une {mpullaria trouvée dans les mines 
de Saint-Paulet par M. Faujas-de-Saint-Fond, et que nous 
nommerons Æmpullaria Faujacii; 2». deux Mélanies trouvées 
par le même observateur au milieu des Lignites de Saint-Paulet, 
et que nous désignerons, la première représentée dans le 1. XIV 
des Annales du Muséum, pl. 19, fig. 7 et 8, sous le nom de 
Ventricola, et la seconde, fig. 11 et 12, sous celui de Pyra- 
midata, 3°, Deux Paludina observées dans les mêmes mines , l’une 
par M. Desmarest , et décrite par lui dans le Journal des Mines, 
n° 199, juillet 1813, et l’autre par M, Brard dans son quatrième 
Memoire. 

4. Deux Planorbis, l'un de Saint-Paulet figuré par M. Faujas, 
sous les n° 13 et 14, dans le tome XIV des Annales du Muséum, 
pl. 19, et que nous nommerons Minutus ; Vautre, observé par 
moi dans les mines de Lignites de Cézenon, el que je dé- 
crirai plus bas sous le nom de Planorbis régularis. 5°. Enfin 
une Succinea dans les mêmes mines de Cézenon, et que je n’ai 
pas rencontrée assez bien conservée pour pouvoir en donner 
une description exacte. 

Quant aux exemples de la formation des Lignites , je citerai 


Q) Dissertation sur l'Histoire naturelle des Pétrifications sous le point de 


vue de la Géognosie, par Schlottheim, dans le T'aschenbuch Jur die Gesamnte 
Mineralogie Léonards , 7° année, 1813. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 127 


les mines de Saint-Paulet près le Pont-Saint-Esprit, dans le dé- 
partement du Gard, celles de Pepin, de Juveau et d’Aubagne 
dans la ci-devant Provence; celles de Pommier près de Gre- 
noble, de Son à une lieue de Crest dans l'ancien Dauphiné, 
celles de Mornas et de Piolène sur la route de Montdragon à 
Orange, et enfin les mines exploitées de Cezenon près Beziers 
dans le département de l'Hérault. 


Première formation d'Eau douce. 


Les Lignites d'une formation postérieure à celle des houilles, 
se montrent ou sur la ligne intermédiaire, entre les schistes 
micacés primitifs et les porphyres, après les grès quarlzeux et 
les véritables schistes argileux plus ou moins bitumineux qui 
leur sont antérieurs, ou bien enfin , se rencontrent dans les cal- 
caires placés au-dessus de la craie, ou même quelquefois in- 
terposés en couches beaucoup moins puissantes et moins con- 
tinues, soit dans la craie, soit dans le calcaire qui lui est im- 
médiatement inférieur. Enfin, quelques-uns se trouvent dans 
les terrains de transport, si l'on en croit l'observation de 
M. Voigt que nous avons déjà cité (1); mais ceux-ci sont-ils 
de véritables Lignites? c’est ce qui nous paroit douteux. Tou- 
jours est-il constant, que les Lignites accompagnant constäm- 
ment des lerrains où l’on ne voit que des débris de coquilles, 
soit terrestres , soit fluviatiles , et jamais aucune trace d'animaux 
marins, doivent avoir été déposés de lamême manière que les autres 
terrains d'eau douce, mais seulement à une époque différente. 
Leur position étant ou subordonnée au calcaire grossier eo- 
quillier, ou bien à la craie, il est évident dès-lors, que leur 
formation a été antérieure à celle des autres terrains d’eau 
douce que l’on a reconnus dans les environs de Paris, puisqu'ici 
le terrain d’eau douce inférieur y paroît bien long-temps après 
la craie, et se trouve immédiatement superposé au grès marin 
inférieur et au calcaire marin grossier à Cérithes. Ainsi les 
Lignites les plus modernes sont loujours subordonnées au cal- 
caire grossier, tandis que la formation inférieure d’eau douce 
des environs de Paris, se trouve au contraire superposée à ce 
calcaire ; la première de ces formations ne peut pas être consi- 
dérée comme de la même époque que la seconde, mais lui est 


(1) Traité sur la Houille et le Boisbitumineux, Journal des Mines, t, XX VIE, 
pag. 6 et suiv. 


128 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


évidemment antérieure. Du reste , la formation des Lignites paroit 
appartenir, ainsi que M. Schlottheim l’a déjà observé, à l'époque 
des trapps de sédiment. Enfin, il faut remarquer, malgré l'opi- 
mion de M. Schlottheim, que l’on n’a jamais reconnu aucune 
empreinte de fougère dans les véritables formations de Lignite, 
dans celles qui sont au-dessus de la craie, ou qui sont même 
interposées en couches beaucoup moins puissantes et moins con- 
ünues, soit dans la craie, soit dans le calcaire qui est immé- 
diatement inférieur à la craie. 

Quant à ceux que l’on exploite à Canezon dans le départe- 
ment de l'Hérault, ils sont subordonnés au calcaire secondaire 
coquillier ou calcaire à Cérithes. Comme ces mines sont ex- 
ploitées avec peu de régularité, et qu'on y compile à peine 
quelques ouvriers, il est assez difficile de reconnoitre l’ordre 
de superposition des couches; mais autant que j'ai pu m'en as- 
surer, voici celui qui m'a paru le plus constant. 

Au-dessous d’une couche de terre végétale généralement assez 
épaisse, on observe d’abord un calcaire secondaire coquillier 
de la plus nouvelle formation , et dont les affleuremens sont au 
niveau du sol. Ce calcaire solide renfermant des moules de 
Cérithes, offre encore d’autres coquilles marines dont les genres 
ne différent point de ceux qui existent maintenant. C’est après 
ce Calcaire, qu’on observe une masse calcaire endurcie à couches 
plus ou moins épaisses, et dans laquelle on ne voit point de fos- 
siles. Immédiatement au-dessous de cette marne, vient un cal- 
Caire fétide, bitumineux , compact, dont l'épaisseur des couches 
est assez variable, si l'on peut se fier à ce que disent les qu- 
vriers. Le calcaire bitumineux noirätre rempli de coquilles évi- 
demment fluviatiles, parmi lesquelles on reconnoît très - bien 
des Planorbes et des Ambrettes , paroît ensuite. Ce calcaire com- 
pact, à cassure irrégulière et raboteuse , offre une couleur d'un 
brun légèrement noiratre; mais en se décomposant à l'air, il 
prend une nuance d’un gris assez clair; il a, du reste, fort peu 
l'aspect des autres calcaires de la formation d’eau douce, qui 
ont en général un tissu assez lâche. Quant aux coquilles que 
ce calcaire renferme, elles sont le plus souvent tellement alté- 
rées, que leur couleur passe au blanc le plus parfait, nuance 
que fait encore ressortir la couleur sombre du calcaire. Au-dessous 
de cette roche, se montre une argile bitumineuse noiràtre qui 
repose sur une argile feuilletée également bitamineuse; celle-ci 
se distingue facilement de la couche précedente, par son as 
pect luisant et même éclatant, et enfin parce qu'elle se délite 

eu 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 129 


en feuillets très-prononcés. Après les argiles feuilletées, pa- 
roissent les Lignites, d'abord ceux qui conservent le tissu 
et l'aspect du bois, et puis les compactes distingués aussi par 
leur cassure conchoïde et éclatante. Comme les ouvriers qui 
exploitent cette mine, s'arrêtent lorsqu'ils sont arrivés aux 
couches de Lignites, il est difficile de savoir sur quoi ils re- 
posent. Du reste, ils m'ont tous assuré que les argiles repa- 
roissoient après les Lignites; et autant que j'ai pu le vérifier 
sur les lieux, ce fait me paroit exact. On sait d'ailleurs qu’il en 
est ainsi dans presque toutes les mines, soit de Liguités, soit 
de houilles, ce qui est une probabilité de plus en faveur de 
cette alternative. 

La seule coquille fluviatile parfaitement entière que j'ai pu 
gusqu’a présent détacher du calcaire bitumineux, est nn Pla- 
norbe qui se rapproche assez d’une espèce assez commune dans 
nos marées, le Vortex de Muller, J’erm. Hist., n° 345, p.158, 
et de Draparnaud, tab. 2, fig. 4. Geoffroy a décrit cette ‘espèce 
sous le n° 5, et il l’a caractérisée par la phrase suivante : « Le 
Planorbe a six spirales à arête. Cependant, quoiqu'il y ait 
entre l’espèce fossile et le Vortex quelques analogies, elles ne 
portent guère que sur la taille et l’ensemble des formes; car, 
du reste, elles diffèrent complètement, ainsi que notre déscrip- 
tion et la figure que nous avons donnée de cette espèce, dans 
le Bulletin de la Société Philomathique, année 1814, pag. 15, 
fig. 15, le prouvent. Le Planorbe des mines de Cézenon n’a 
pas non plus d’analogie avec les espèces fossiles déjà décrites; 
aussi le croyons nous totalement nouveau. 


Planorbe régulier. (Planorbis regularis.) 


Ce Planorbe a au moins quatre tours de spire, reniarquables 
par la régularité qui existe entre eux; car ils'grossissent si in- 
sensiblement, que ce n’est qu'a l'extrémité du dernier, que le 
renflement devient bien sensible. Il n'offre pas de carène, aussi 
ses tours sont-ils très-arrondis, et presque aussi convexes en 
dessus qu’en dessous. Il résulte de cette disposition, que les 
tours de celte coquille sont extrêmement prononcés. Lie point 
central ou l'ombilic de la coquille, est un peu enfoncé en dessous 
ct beaucoup moins en dessus. Autant qu'on peut en juger, 
l'ouverture de la bouche a la forme d'un ovale alongé et comme 
anguleux. Nous n'osons pas, du reste, assurer que le bord su- 
périeur de la bouche soit plus avancé que l'inférieur. La couleur 
de ce Planorbe est d’un brun-rougeätre foncé; probablement cette 


Tome LXXXVII, AOÛT an 1818, R 


150 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


couleur n'est qu’une suite de l’aliération qu'il a éprouvée, et 
d'un peu d'oxide de fer dont ïl est pénétré. 

Comparé avec les espèces fossiles déjà décrites, on voit ai- 
sément qu'on ne peut guère l'assimiler aux Planorbis cornea et 
prevostiana, figurés et décrits par M. Brongniart (1); et quoique 
ces Planorbes n'aient que quatre tours de spire, ils en diffèrent 
considérablement, surtout par la grandeur de leur dernier tour, 
et le peu de régularité qui existe dans l'accroissement de ceux 
de la spire. Le même caractère sépare également d'une ma- 
nière tranchée, notre Planorbe d'avec le Planorbis lens décrit 
par M Brongniart dans le Mémoire que nous avons déjà cité. 
On ne peut pas non plus confondre le Planorbe régulier avec 
ceux figurés par M. Brard (2); son Planorbe arrondi n'offre bien 
également que quatre tours à la spire, mais il diffère tellement 
du nôtre par sa taille et par sa concavité dans:un sens, et par 
sa convexité dans un autre, qu'il est impossible de leur trouver 
la moindre analogie. Notre Planorbe s'éloignant encore davantage 
des autres espèces fossiles connues jusqu’à présent, et même de 
toutes les espèces vivantes, doit être regardé comme entière- 
ment nouveau. 

La première des formations d’eau douce se trouve donc su- 
bordonnée aux calcaires coquilliers, plus ou moins compactes, 
et qui ne forment jamais de montagnes bien élevées ; aussi 
les collines qui recèlent les Lignites sont-elles assez éloignées 
des terrains primilifs, el se montrent comme adossées aux mon- 
fagnes du calcaire ancien analogue à celui du Jura. Quoique 
ces Lignites soient évidemment des bois fossiles qui souvent 
même en conservent tous les caractères, et qu'il paroisse pro- 
bable qu'ils ont végété dans les lieux où on les rencontre au- 
jourd'hui, ils ne sont jamais accompagnés d'aucun débris de 
plantes, tandis que les terrains houillers en recèlent une très- 
grande quantité. Quelle est la cause de ce singulier phénomène? 
c’est ce qui ne me paroit pas plus explicable dans l’état de nos 
connoissances, que ces retours réguliers des diverses couches 
des terrains houillers, et la position constamment horizontale 
des végétaux qui s’y trouvent dans des feuillets schisteux , ou 
de grauwacke schisteuse toujours développés dans la même di- 
reclion. Qu'il nous suflise donc, faute de pouvoir expliquer 


(1) Annales du Muséum d'Histoire naturelle, tome XV, pag. 357 et 405. 
(2) Idem, tome XIV, pag. 226 et 440. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 131 
ces grands phénomènes géologiques, d'avoir indiqué les limites 
qui existent entre la formation des Lignites et celle des houilles 
caractérisée par les débris de végétaux qui l'accompagnent con- 
slamment et l'absence de: coquilles fossiles, et enfin d’avoir tait 
senlir que cette formation devoit élre considérée comme Î2 plus 
ancienne de celles d’eau douce. Il me semble également qu'en 
faisant remarquer que les coquilles fluviatiles de la formation 
des Lignites, sont semblables , du moins pour les genres , à 
ceux qui vivent encore aujourd'hui, c'est indiquer assez bien 
que les bois dont les Lignites sont les restes, doivent avoir 
vécu dans les lieux mêmes où ils sont enfouis. Ce fait est d'autant 
plus important, qu'il se lie à ceux qui annoncerit que la surface 
actuelle du globe étoit à sec et peuplée d'animaux et de végé- 
taux terrestres, avant la dernière irruption des mers. 


e “ . 6] 
Deuxième formation d Eau douce. 


La seconde formation d'eau douce que l’on voit si étendue 
et si prononcée dans les environs de Paris, et qui paroît éga- 
lement exister dans différens lieux de l'Espagne et de l'Agénois, 
a été si bien décrite par MM. Cuvier et Brongniart (1), que 
nous en dirons peu de chose. Nous observerons seulement que 
celle que nous considérons comme la seconde des formations 
d'eau douce, est la première selon ces savans, parce qu’à l'é- 
poque où a paru leur beau travail, on n’avoit pas encore re- 
connu que les Lignites pouvoient appartenir à ce genre de 
formation. La seconde formation d'eau douce recouverte par 
le calcaire marin grossier ou à Cérithes, est principalement ca- 
ractérisée par les gypses à ossemens et les marnes calcaires 
blanchâtres. De nombreux fossiles de mammifères , presque tous 
d'espèces et même de genres inconnns, annoncent qu’elle a été 
déposée à une époqne où des animaux différens de ceux qui 
vivent aujourd'hui, peuploient celté partie de nos continens. 
Mais de nouveaux êtres qui appartenoient au bassin des mers, 
ont élé déposées sur les débris de ces grands animaux, et ont 
été à leur tour recouverts par des êtres qui, comme les pre- 
miers, ont vécu dans les eaux des étangs ou des fleuves, dépôts 
qui selon nous appartiennent à la troisième époque. 


(2) Essai sur la Géographie minéralogique des environs de Paris, 


R 2 


132 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Troisième formation d'Eau douce. 


La troisième formation d’eau douce, ou la seconde de MM. Cuvier 
et Brongniart | a élé observée dans un très-grand nombre de 
hcux de la France, de l'Allemagne, de l'Espagne et de l’An- 
gleterre. Partout elle s’est montrée avec les mêmes circonstances ; 
et son étendue a toujours paru en rapport avec celle de la 
vallée on du bassin où elle se trouve, ce qui annonce qu’elle 
n'est que le dépôt des lacs ou des rivières qui y ont séjourné: 
Cette formation ne s’elève jamais sur les crêtes élevées des mor: 
tagnes el y reste loujours adossée; aussi dans quelques circon- 
stances les couches ont-elles une assez grande élévation. Comme 
ce genre de dépôts d’eau douce n’exisle jamais que dans des 
l'eux où les eaux ont pu éprouver un certain repos, et que leur 
étendue est en rapport avec celle de ce repos, ïl en résulle 
qu'on l’observe constamment auprès des rivières, des vastes 
bassins et des grandes vallées. Ainsi dans les environs de Paris 
elle a été déposée dans une espèce de vaste golfe, dont les 
côtes étoient de craie; c’est également dans des circonstances 
a peu pres semblables, qu’elle se montre dans les bassins du 
Rhône, de la Tamise et du Danube. Nous verrons qu'il en est 
de même de la formation d’eau douce que nous avons reconnue 
dans le département du Gard, dans le bassin du Vidourle. Comme 
tous les autres dépôts de cette nature, cette formation se trouve 
fréquemment , et même on peut le dire, uniquement , dans les 
terrains calcaires, puisque ces terrains en forment essentiellement 
la base. Enfin, ce qui prouve que les fleuves , les lacs, les étangs, 
sont les causes immédiates de ces dépôts, c’est que genéralement 
on y observe peu d'espèces terrestres et beaucoup, au contraire, 
d'espèces fluviatiles. Généralement encore les petites espèces y 
sont en plus grand nombre que celles d'une certaine dimension, 
ce qui s'accorde parfaitement avec ce que nous observons dans 
les Mollusques actuellement vivans. 

La troisième formation d’eau douce est caractérisée en gé- 
néral par deux sortes de pierre, le silex et le calcaire; le cal- 
caire d'eau douce y est le plus commun; ce n’est qu'après que 
paroit le mélange de silex et de calcaire ; en effet, les grandes 
masses de silex d’eau douce sont les plus rares. Les coquilles 
appartenant à cette formation sont en général de genres sem- 
blables à celles de nos marais, quoique d’espèces différentes 
de celles qui vivent actuellement; ou bien lorsqu'elles sont sem- 
blables, on ne trouve qu’une partie de leur test. Il n'en reste 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 133 


le plus souvent que les moules, ou du moins ces coquilles ont 
passé à l’état pierreux. Quant aux calcaires qui appartiennent 
à cette formation, ils sont blancs ou d’un gris-jaunatre ; ils sont 
taulôt tendres et foibles comme de la marne et de la craie, 
tantôt compactes, solides, à grain fin et cassure conchoïde., Du 
reste, ces calcaires, soit marneux,.soit compactes, font voir très- 
souvent des cavités cylindriques irrégulières et a peu près pa- 
rallèles quoique sinueuses. Quelquefois aussi les terrains qui ap- 
partiennent à cette formation sont composés de calcaire et de 
silex mélés ensemble; ce dernier est souvent carié, caverneux, 
et ses cellules irrégulières sont remplies de la marne calcaire 
qui l'enveloppe. Enfin, dans d’autres circonstances , les silex sont 
remplacés par des calcaires siliceux compactes, toujours subor- 
donnés aux calcaires poreux. Après avoir exposé brièvement 
les caractères les plus généraux que l’on peut reconnoitre à 
celte formation, nous décrirons en détail celle des environs de 
Sommières dans le bassin du Vidourle. 

Les montagnes, ou pour mieux dire les collines calcaires 
qui bordent les rives du Vidourle, depuis la petite ville de Som- 
mières jusqu’au-dela du village de Salinelles, appartiennent à 
la lroisiéème formation d’eau douce. L’axe de cette formation 
est la colline de Montredon, dont la plus grande élévation peut 
être d'environ 50 toises au-dessus du niveau de la rivière. Cette 
colline est composée de deux sortes de calcaire; le plus inférieur 
est un calcaire siliceux, qui ne renferme jamais. que des Lymnées 
et des Paludines; ce n’est que dans les points de jonction avec 
le calcaire poreux supérieur que l’on commence à trouver des 
Planorbes et des Hélix. Les coquilles du calcaire inférieur con- 
servent encore leur test, mais un peu altéré. Ce test d’un blanc 
d'ivoire extrêmement luisant, n’a pas, du reste, éprouvé une 
telle altération, qu'on ne puisse juger parfaitement du nombre 
des tours de spire et de la forme des coquilles. Le calcaire si- 
liceux en remplit le moule intérieur. Mais dans Îles points de 
contact avec le calcaire poreux, il ne reste plus que les moules 
des coquilles, et le test a complètement disparu. Aïusi dans le 
calcaire poreux, on ne voit plus que les moules de quelques 
Planorbes , ordinairement de grandes espèces avec quelques 
Hélix, et presque jamais des Lymnées et des Paludines. Si l’on 
s'en tenoit à la structure de ces calcaires, l’un très-compacte, 
fort dur, cassant comme le silex, l’autre, au contraire, très- 
lâche, fort poreux, se mächant sous le marteau, ne cassant 
jamais nel, aiusi qu’à l’état des coquiiles qu'ils renferment, on 


154 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

seroit lenté de supposer qu'ils n’ont pas été précipités de Ja 
même manière. Le premier ou le plus inférieur doit avoir été 
déposé preque tout d’une pièce ; aussi n’y voit-on pas le moindre 
indicé de couches. Les coquilles entourées tout-à-coup d’une 
matière solide, ont dù peu s’'altérer, et aussi ont-elles conservé 
leurs formes. Le calcaire supérieur déposé au contraire dans 
une eau bourbeuse et dans un liquide d'où s’échappoient de 
nombreuses bulles d'air, a dû être lâche, poreux , d'autant qu'il 
ne paroit s’êlre précipité que d’une manière fort lente. Aussi 
sa masse se trouve-t-elle traversée dans une infinité de direc- 
tions par des sillons Jongitudinaux, qui annoncent le grand 
nombre de bulles d'air qui se dégageoient à travers cette masse 
non encore soliditiée. Les couches nombreuses que l'on y 
aperçoit en grand, indiquent également que ce calcaire ne s’est 
pas précipité d'une manière instantanée, Les coquilles entourées 
d'une matière qui a resté long-temps à se ‘solidifier, ont dù 
nécessairement s’allérer et finir même par perdre tout-à-fait leur 
test. Ce test ayant enfin disparu, les empreintes qu'il a laissées 
permettent seules de reconnoitre aujourd'hui l’ordre de forma- 
üon auquel appartiennent ces dépôts. 


Les assises du calcaire d’eau douce supérieur sont générale 
ment peu inclinées, suivant quelquefois la direction de la vallée ; 
d’autres fois elles sont évidemment horizontales et parallèles. Dans 
quelques parties de la montagne, on voit ces couches très- 
mullipliées, tandis qu'on distingue à peine des assises d’une 
grande épaisseur dans les masses du calcaire d’eau douce in- 
férieur. Le premier de ces calcaires est encore remarquable par 
les nombreuses traces d’oxide de fer qui le pénètrent de toutes 
parts, et particulièrement les moules des coquilles, et les vides 
longitudinaux produits par des bulles d’air. Quelquefois lorsqu'on 
le Potte avec force, il répand une odeur félide très-sensible , 
surtout dans les échantillons pris au point de contact des deux 
calcaires. 

La magnésile, si connue dans le commerce sous le nom de 
pierre à décrasser de Salinelles (1), appartient à la même for- 
malion d’eau douce dont nous venons de parler. Cette magnésite 
se trouve sur les bords du Vidourle à une petite portée de fusil 
et au nord-est du village de Salinelles, dans le département du 
Gard , dans le lieu nommé Las Parens. Les roches dout elle 


(1) On la vend à la carrière 3 fr. le quintal. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 135 


est accompagnée sont, en commençant par les couches les plus 
supérieures , 

1°. Terre végétale d’une épaisseur qui n’est guère au-delà d’un 
à deux pieds. 

2°. Calcaire d’eau douce d’un blanc sale, tendre, poreux, à 
bulles oblongues, et pénétré de lames spathiques brillantes, 
principalement dans ses fissures. On l'a pris à tort pour de la 


craie. L’épaisseur de ce calcaire est, en terme moyen, de deux 
à trois pieds, 


5°. Argile jaunätre, souvent calcarifere el alors passant à l’état 
de marne et devenant assez feuilletée. A l’état de marne, elle 
se délite et se brise avec facilité. Son épaisseur: n’est jamais au- 
delà d’un pied et demi. 

4. Silex compacte, grisatre , ne contenant plus les coquilles 
elles-mêmes, ni même complètement les moules, mais seule- 
ment les traces de la place où existoient les coquilles d'eau 
douce. Ainsi, quoique compacte, ce silex offre des bulles et des 
vides par intervalles. Son épaisseur est d'environ trois pieds. 

5°. Magnésite d'un gris violâtre foncé, qui à l'air devient d'un 
violet pâle ; cette substance perdant par la dessication une grande 
quantité d’eau. En grand, elle a l’aspect schisteux , et se montre 
en feuillets nombreux et distincts: Son épaissenr moyenne est 
d'environ dix-huit pouces; rarement va-t-elle jusqu'à deux 
pieds. 

6°. Calcaïre un peu argileux, comme crayeux, d'un beau blanc 
et compacte, quoique n'étant pas très-dense. Il fait fortement ef- 
fervescence avec les acides, et happe également à la langue, 
à cause de l'argile qu'il contient et de l’eau dont il est avide. 
L’épaisseur de ses couches n'excède pas beaucoup celle de la 
magnésite. 

7°. Argile feuilletée, un peu calcarifère, souvent friable et 
comme décomposée. L’épaisseur de ses couches paroit assez 
considérable. On ne peut cependant la déterminer ; les ouvriers 
qui travaillent aux carrières ne creusent pas au-delà. 


(La suite au Cahier prochain.) 


136 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
\ 


SUR LA FIGURE DE LA TERRE, 
ET LA LOI DE LA PESANTEUR A SA SURFACE; 


Par M. DE LAPLACE. 
Lu à l'Académie des Sciences, le 4 août 1818. 


Les géomètres ont jusqu'à présent, considéré la Terre, comme 
un sphéroïdé formé de couches de densités quelconques, et re- 
couvert én entier, d'un fluide en équilibre. Ils ont donné des 
expressions de la figure de ce fluide, et de la pesanteur à sa 
surface ; mais ces expressions, quoique fort étendues, ne repré- 
sentent pas exactement la nature. L/Océan laisse à découvert, 
une partie du sphéroïde terrestre; ce qui doit altérer les ré- 
sultats obtenus dans l'hypothèse d’une inondation générale, et 
donner naissance à denouveaux résultats. À la vérité, larecherche 
de sa figure présente alors plus de diflicultés; mais les progrès 
de l'analyse, surtout dans cette partie, donnent le moyen de 
les vaincre, et de considérer les continens et les mers, tels que 
l'observation nous les présente ; c’est l’objet de l’analÿse suivante 
dont voici les principales conséquences. ri) 

La Térre étant un sphéroïde peu différent d’une sphère, et 
recouvert en partie par la mer; la surface de ce fluide supposé 
en équilibre et fort peu dense, est du même ordre que celle 
du sphéroïde. Ainsi, cette surface est elliptique, lorsque le sphé- 
roïde terrestre est un ellipsoïide; mais son aplatissement n'est 
pas le même que celui du sphéroïde. Généralement les deux 
sürfaces, quoique du même ordre, ne sont pas semblables : seu- 
lement, elles dépendent l’une de l’autre. La théorie des attrac- 
tions des sphéroïdes, exposée dans le troisième livre de la Né- 
canique céleste, m'a conduit aux expressions les plus simples 
de cette dépendance réciproque, et de la loi que suit la pe- 
santeur sur chacune des surfaces. L'expression de cette loi est 
du même ordre, que celle du rayon terrestre; et il en résulte 
ce théorème général, quelle que soit la densité de la mer. 

« La pesanteur à la surface du sphéroïde, réduite au’niveaun 
» de la mer, en n'ayant égard qu’à la hauteur au-dessus de ce 
» niveau, suit la même loi qu’à la surface de la mer.» 

Cette loi bien déterminée par les observations du pendule, 


fera 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 157 


fera connoitre la figure de la mer, au moyen d’un rapport très- 
simple que l'analyse établit entre elles : les observations du ba- 
romètre donneront l'élévation des continens au-dessus de la mer. 
On connoiïtra donc les figures de la mer et du sphéroïde ter- 
restre, et les lois que la pesanteur suit à leurs surfaces, par 
le concours de ces observations qu’il importe de multiplier, en 
leur donnant une grande précision, et en ayant soin de les 
rendre comparables. Le théorème précédent sur la loi de Ja 
pesauteur, s'étend aux degrés des méridiens et des parallèles. 
Ces degrés mesurés sur le sphéroïde et réduits au niveau de la 
mer, en n'ayant égard qu'à la hauteur, suivent les mêmes lois 
qu'a la surface de la mer. 

L'expression de la pesanteur à laquelle je parviens, donne 

ce résultat singulier, savoir que le sphéroïde terrestre étant sup- 
posé homogène et de même densité que la mer, quelles que 
soient d’ailleurs la figure, l'élévation et l'étendue des continens; 
l'accroissement de la pesanteur à la surface de la mer, est égal 
au produit du carré du sinus de la latitude, par la force cen- 
trifuge à l'équateur, augmentée d’un quart. Des plateaux de 
densités quelconques, et de hautes montagnes dont on recou- 
vriroit les continens, changeroient la figure de la mer, sans 
altérer la loi de la pesanteur à sa surface. 
* Dans le nombre infini des figures que comprend l'expression 
analytique des surfaces de la mer et du sphéroïde terrestre; on 
peut en choisir une qui représente l'élévation et les contours 
des continens et des îles. Ainsi je trouve qu'un pelit terme du 
troisième ordre, ajouté à la partie elliptique du rayon terrestre, 
suflil pour rendre, conformément à ce que l'observation semble 
indiquer, la mer plus profonde vers le pôle austral, que vers 
le pôle horéal, et même, pour laisser ce dernier pôle à dé- 
couvert, Cependant, au milieu des inégalités qu'elle présente, 
on reconnoit par les expériences du pendule, que sa surface et 
celle de la mer sont à fort peu près elliptiques. Le rayon de 
la surface de la mer, diminué du rayon du sphéroïde , est 
l'expression de la profondeur de la mer : celte expression, lors- 
qu'elle devient négative, représente l'élévation des continens ; 
d’où il suit que la profondeur de la mer est peu considérable, 
et du même ordre que les hauteurs des coutinens au-dessus de 
son niveau. 

La petitesse de cette profondeur , sur laquelle les observations 
du pendule, que l'on fait maintenant dans les deux hémisphères, 
répandront un nouveau jour, est un résultat important pour la 


Tome LXXXVII. AOÛT an 1818. S 


156 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIÉ 


Géologie. Elle explique sans l'intervention de très-grandes catas- 
trophes , comment la mer a pu recouvrir et abandonner le même 
sol, à plusieurs reprises. On conçoit en effet, que si par des 
causes quelconques, telles que les éruptions des volcans sous- 
marins, le fond de la mer s’aflaisse dans une vaste étendue; 
ses eaux, en remplissant les cavilés formées par cet aflaisse- 
ment, découvriront un espace d'autant plus considérable, que 
la mer est moins profonde. Si dans la suite des’ temps , des 
Causes semblables, et les matières que les courans apportent, 
élévent. uue partie de ce fond; la mer viendra recouvrir 
d'espace qu’elle avoit abandonné. 

Je vicns de considérer l'Océan, comme un tout dont les di- 
verses parties communiquent entre elles; ce qui a lieu pour la 
Terre; car les petites mers isolées, telles que la mer Caspienne, 
ne sont à proprement parler, que des grands lacs. Mais on 
peut supposer au sphéroïde, une fignre telle que l'Océan ne 
puisse y être en équilibre, qu’en se divisant en plusieurs mers 
distinctes. L'analyse nous montre qu’alors l'équilibre peut s'établir 
d'une infinité de manières, et que les surfaces de ces mers 
sont semblables, c'est-à-dire assujélies à une même équation ; 
seulement, leurs niveaux peuvent étre différens. Si l'on imagine 
une atmosphère incompressible, très-rare et peu élevée, qui 
enveloppe toutes ces mers et le sphéroïde terrestre; sa surface 
extérieure sera semblable à celles des mers, en sorle que l'élé- 
valion des points de celle surface qui correspondent à chaque 
mer, Sera Constante; mais elle pourra être différente d’une mer 
à l'autre. Une communication qui viendroit à s'ouvrir entre 
ces mers, les réduiroit au même niveau, et ce changement 
pourroit à la fois inonder et découvrir des parties considérables 
de la surface terrestre. I] suit de là, que si FOcéan étoit dans 
un parfait équilibre, sa communication avec la mer Rouge et 
avec la Méditerranée , maintiendroit au même niveau, ces deux 
mers. La différence observée entre leurs niveaux, est done Ja 
partie constante de l'effet des causes diverses qui troublent sans 
cesse cet équilibre. 

La pesanteur et les degrés des méridiens et des parallèles, 
mesurés sur le sphéroïde terrestre, et réduits au niveau de la 
surface de l'atmosphère que je viens de considérer, en n'ayant 
égard qu'à la hauteur, sont les mêmes qu’à celte surface. C’est 
encore l’ellipticité de cette surface , que donnent les deux iné- 
galités de la Lune, dépendantes de l’aplatissement de la Terre; 
en sorte qu'elle est à la fois déterminée par ces inégalités, et 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 139 


par les mesures des degrés et de la pesanteur. Les ellipticites 
obtenues par chacun de ces trois moyens, sont à très-peu pres 
les mêmes et égales à +. Cette identité remarquable prouve 
la petitesse des causes perturbatrices de la figure elliptique de 
la Terre. 

Il suit de ces recherches, que la surface du sphéroïde ter- 
restre est à peu près celle qui couvient à Féquilibre de cette’ 
surface supposée! fluide ; mais sun aplalissement moindre que 
dans le cas de l'homogénéité, indique évidemment que la den- 
sité de ses couches croit de la surface au centre. Je trouve par 
l'ensemble des phénomènes: qui dépendent de l’aplatissement 
de la Terre, que si la densité des couches augmente en progres- 
sion arithmétique ; la moyenne densité de la Terre est 3} de la 
densité de la couche extérieure du sphéroïde ; en supposant donc 
la pesanteur spécifique de cette couche, égale à celle du granit 
ou à trois; la densité moyenne de la Terre sera quatre fois 
et deux tiers, celle de l'eau; ce qui tient le milieu entre les 
résultats que Maskeline et Cavendisch ont obtenus par l'obser- 
vation directe de Pattraction mutuelle des corps à la surface de 
la Ferre. La régularité de la pesanteur à cette surface prouve que 
les couches sont à trés-peu près elliptiques et disposées symé= 
triqaement autour du centre de gravité de la Terre. Une telle 
disposition ne peut exister que dans le cas où la Ferre entière 
a été primitivement fluide; car alors ses couches ont pris, en 
vertu des lois de l'équilibre, une forme elliptique qu’elles ont 
conservée en se refroidissant lentement. C’est la seule cause na“ 
turelle que l’on puisse assigner à ces phénomènes. 

L'analyse fait voir que l'équilibre de la mer est toujours pos- 
sible, quel que soit l'axe de rotation du spheroïde terrestre. 
Si la masse ou la densité de la mer étoit infiniment petite; 
l'axe principal de rotation de la Terre, seroit celui du sphéroïde. 
La mer étant peu profonde, et sa densité n'étant qu’un cin- 
quième environ de celle de la Terre; on concoit qu'en écar- 
tant un peu dans tous les sens, l’axe de rotation, de l’axe prin- 
cipal ; la série de ces écarts doit en offrir un qui donne à la 
Terre entière, un axe de rotation invariable. On voil ainsi gé- 
néralement la possibilité de cet axe dont toutes les observations 
astronomiques établissent l'existence, et qui dans le cas où la 
mer recouvriroit tout le sphéroïde terrestre, seroit un axe prin- 
cipal de ce sphéroïde, en supposant les densités de ses couches, 
diminuées de la densité de la mer. 

Tous ces résultats subsisteroïent encore dans le cas où de 


S 2 


140 JOURNAL DE PHYSIQUE, DFE CHIMIE 
vastes plateaux et de hautes montagnes recouvriroient une partie 
du sphéroïde terrestre. 

Il est facile, sans le secours de l'analyse, de démontrer les propo- 
silions énoncées précédemment sur la pesanteur et les degrés à la 
surface de l'atmosphère que j'ai supposéerecouvrirlameretle sphé- 
roïde terrestre. Pour cela, j'imagine un canal rentrant en lui-même 
et composé de quatre branches dont deux horizontales soient cou- 
chées, l’une sur la surface de la mer, l'autre sur la surface de l’at- 
mosphère; les deux autres branches étant verticales. Clairaut a fait 
voir dans son bel ouvrage sur la figure de la Terre, qu'un fluide 
qui rempliroit ce canal, y seroit en équilibre. Or dans les deux 
branches couchées sur les deux surfaces, le fluide seroit de 
lui-même en équilibre , par les conditions de l'équilibre de chaque 
surface ; les pressions des deux colonnes verticales doivent done 
être égales, quel que soit l'éloignement respectif de ces colonnes. 
La pesanteur est la même dans chaque colonne, aux quantités 
près de l’ordre de l’ellipticité de la terre. Les longueurs des 
colonnes ne peuvent donc différer que de quantités de l’ordre 
du produit de cette ellipticité, par la hauteur de l'atmosphère, 
hauteur que je suppose du même ordre. En négligeant done 
les quantités de l'ordre du carré de l’ellipticité, ow du second 
ordre; les colonnes seront égales, c'est-à-dire que les points 
de la surface de l'atmosphère seront tous également élevés au- 
dessus de la surface de la mer. On voit de plus que la pesanteur 
à la surface de l'atmosphère sera aux quantités près du second 
ordre , la pesanteur à la surface de la mer, réduite à la pre- 
mière surface , eu égard à sa hauteur : on voit encore que la 
direction de la pesanteur à la surface de l'atmosphère formera 
avec la verticale, un angle qui ne différera que d’une quantité 
du second ordre, de l’angle que fait avec la même verticale , 
cette direction à la surface de la mer, ou à la surface du sphé- 
roide; d'où il suit que les degrés mesurés sur le sphéroïde, et 
réduits à la surface de l’atmosphère, à raison de sa hauteur, 
sont ceux de la surface elle-même. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 141 


ÉCLAICISSEMENS 


SUR PLUSIEURS POINTS D'HISTOIRE NATURELLE; 
Pin J. N. VALLOT, 


D. M., Correspondant de la Société royale et centrale d'Agriculture. 
I. Corne RADIQUEUSE, Cornu plantabile. C.B. Pin, p.514, col. 2. 


Ex lisant, dans les anciens auteurs, des récits extraordinaires, 
on est, de nos jours, porté presque involontairement à les re- 
jeter, et à regarder comme trop crédules, les auteurs qui nous 
disent avoir vu, touché et examiné les substances dont ils nous 
parlent; c’est ce qui est arrivé pour le Cornu plantabrle. 

Jean-Hugues de Linscmor, voyageur estimable et véridique, 
annonce avoir 24, aux environs de Goa, et considere de près, 
avec admiration, des Cornes pourvues de racines. (Æist. de la 
navigation de J.-H. Linschot, hollandoiïs , «tx Indes ôrientales, 
5° édition, augmentée. Amsterdam, 1658, iu-fol.) 

J. Eusèbe de Niekemserc, parle aussi de Cornes pourvues de 
racines, mais seulement d'après Linschot, qu'il ne cite pas. 
(Hist. naturæ maxime peregrinæ , pag. 304, Kb. K1v, cap. x x1v.) 

Pierre Bor£r, médecin du Ror à Cästres, accusé, peut-être 
un peu trop légèrement, d'une grande crédulité, dit avoir vx 
des Cornes de Bélier et des Cornes de Bœuf, qui avoient poussé 
des racines comme celles dont parle Linschot (Petr. Borelli 
medici Regit Castrensis Histor. et Observat. medico-physicæ , cen- 
turiæ 1V, Paristis, 1657, in-12, pag. 318, cent. 1v, obs. rar.) 

Caspar Baunin termine son Pinax par un extrait de Linschot. 

Voilà des témoins positifs : cependant Rent (dans ses Observ. 
sur diverses choses naturelles) révoque en doute un fait attesté 
par deux témoins oculaires, Zinschot et Borel; il s'appuie sur 
des renseignemens négatifs. (Voyez Collect. acadèm., partie etran- 
gère, tome IV, pag. 567.) 

L'opinion de Rédi pourroit être d’an grand poids, si une 
corporalion savante ne venoit pas la détruire. Mais M. de Matra 
a fait voir à l'Académie des Sciences, une Corne de Pœuf qui 
paroissoit avoir végelé en terre; de sa base partoient de nom 
breux filets qui avoient l'air de racines; en les examinant plus 


142 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CIIMIE 


attentivement, on y distinguoit un tissu soyeux qui annonçoit 
l'ouvrage d’un insecte inconnu et souterrain. Voilà certes une 
attestation qui ne laisse plus de doute. (Mém. de l'Acad. des 
Sciences de Paris, 717, Hist., pag. 11, art. v, fig. p. 12.) 

Si l'on ouvre les Mémoires de l'Académie de Berlin (Miscellan. 
Beroliniensis,.…., continuatio 1°, 1723, pag. 54), on trouve une 
note intitulée, J.-L. Frisen de erm& canalicolä et de Papilione 
qui ex eà fit. Frisch cite l'observation de Mairan, il y ajoute 
foi, et l'explique en rapportant que lui-même a vu, dans de 
grands vases remplis de terre, pour élever des insectes, des 
canaux FONeUX, longs de neuf à douze pouces , construits par 
une chenille qui en occupoit l'extrémité la plus large: Frisch 
dit que celte larve est d'un, brun presque noir, longue d'un 
pouce , et qu'elle a les pattes jaunätres. Elle devient insecte parfait 
en mai; le Phalene qui en, sort est blanc, piqueté de petits 
points noirs, nombreux, qui, par leur réunion, forment des 
taches sur les ailes supérieures. 

Eu comparant les passages que je viens de citer, on s’assu- 
réra que les prétendues racines dout parlent Linschot et Borel 
ne sont que les fourreaux soyeux d'une larve de Gazrerie. Ces 
deux observateurs ont pu se tromper dans un temps où l’on 
regardoit les insectes comme le résultat d'une génération équi- 
voque. 

Jusqu'a ce que les naturalistes des Indes orientales assignent 
la différence entre la Gallerie des Cornes de ce pays, et la 
Gallerie des Cornes de France, je les confondrai sous la même 
dénomination, sous celle de GazreriE pes Cornes. Voyez /n- 
sector. incunabula, ete, etc., M. S. | 

Peut-être en lexaminant plus attentivement, trouvera-t-on 
qu'elle n’est qu’une variété de la Gallerie de la cire ou de la Gallerie 
du miel; je laisse ce soin aux nomenclateurs. 

L'explication qui précède, prouve avec quelle réserve on doit 
juger en Histoire naturelle, certains faits étrangers, que l'on 
peut avec des recherches ramener à la vérité en précisant da- 
vantage les observations. 


Il. Crymenos Dioscoridis. Col. Scorpiurus sulcata, Zinn. 


Sans vouloir rapporter toutes les plantes dont les anciens 
ont parlé, à celles décrites aujourd'hui si exactement par les 
botanistes modernes , on est cependant satisfait de connoilre 
celles désignces par les anciens. 

On trouve dans Fabius CorumNa (Minus cognitarum rariorum 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 145 


quo nostre cœlo orientium stirpium EK®PAZIC), au chap. XLIX , 
intitulé Ciymenos Dioscoridis, une dissertation très- savante , 
très-instructive sur l’étymologie du nom, et sur l'emploi qu’en 
ont fait les anciens. 

Fabius Corumna dit que le nom de Clymenos a élé donné 
à cette plante, parce que ses gousses sont contournées sur elles- 
mêmes, comme se contournent les bras des Polypes; et il dit 
que celte étymologie est préférable à celle indiquée par Pline, 
qui la tiroil du roi Clymene. R 

Tuéopnrasre a employé le mot C/ÿmenos pour désigner la 
plante que Droscorine a ensuite appelée Peryclymenos, à raison 
de ce qu’elle se roule autour des autres ; c'est le Chèvre-Feuille. 

Pre, lib. xxv, cap. vir, en extrayant de ces deux auteurs, 
a confondu sous le nom de Clymenos, les deux plantes que 
chacun d’eux avoit désignées par le méme nom; il leur a attribué 
les mêmes propriétés ; aussi l’article Peryclymenos, Gb. xxvit, 
Cap. x11, répète-t-il ce qu'il avoit dit précédemment, 

Daprès la description exacte et la bonne figure que Fabius 
Corumna a donnée du Clymenos Dioscoridis, Icon., pag. 156, 
Clymenum, on reconnoit la CHeniLLreTre Scorpiurus sulcata Linn. 
C. B. Pin, pag. 287, et Hermaun Boerhaave, /ndex Plant., 
part. 11, pag. 52, Scorpioïdes L, sont les seuls auteurs modernes 
qui aient cité Fabius Columaa , et cependant la figure et la 
description méritoient de ne point êlre oubliées par les bota- 
nistes modernes. 

Dans son Phytobazanos, publié 14 ans auparavaut, Corumwa 
avoit donné, pag 53, le nom de Clymenos Dioscoridis, au 
Calendula officinalis, Linn., parce que la courbure des graines, 
et les tiges anguleuses l’avoient décidé; c’est pour cela que C; 
B. Pin, pag. 274 , allégue encore Clymenos Dioscoridis, Col. 

Comment se fait-il que Janus PLancus, dans son annotation XT, 
pag. 47, de l'édition qu'il a donnée en 1744 du EU TOBASANOS, 
n'annonce pas que son auteur avoit changé d'avis et démontré 

ue le Clymenos Dioscoridis est le Scorpiurus sulcata? Je pensois 
qu'a l’article Ciymenos, 2° édit., Mouv. Dictionn. d'Hist. nat., 
tome VIT, pag. 211, je trouverois ce point éclairci; je n'y ai 
rien lu de convenable pour dissiper la confusion qui existe. 


HL. Ravunrium umbellatum, Col. Frachelium cœruleum, Linn. 


En parcourant l'ouvrage de Columna, j'ai trouvé (pag. 22, 
2€ parlie, cap. 1x, le titre suivant: Rapuntium umbellatum. Deux 
fleurs et une capsule sont représentées à la pag. 24. Columna 


144 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


rappelle que ZLobel Zcon, tab. 475, a donné la figure de cette 
plante sous le nom de Tecrpmium purpureum. I observe que cette 
plante, par son port, sa saveur, ses propriétés, ayant les plus 
grands rapports avec les Campanulacées, ne peut être rangée 
avec les Orpins. 


Malgré cette assurance, C. B. Pin, pag. 287, rapporte le Ra- 
puntium umbellatum Col., au 7! elephium purpureum majus. 


Ras, ist. Plant., tome I, pag. 689, à l'article Ænacamp- 
seros purpurea, ajoute, an Rapuntium umbellatum , Col.? 


Idem., pag. 745, à l'article Rapuntium umbellatum , Col., ajoute, 
an Thelephium purpureum majus, G. B.? T'elephium floribus pur- 
pureis , Parkin? 

Hermann Borrnaavr, Index, pag. 288, cite le Rapuntium 
umbellatum Col., parmi les Orpins , à la huitième espèce désignée 
sous le nom de Ænacampseros purpurea. 


, 


TournerorT, LiNNÉ, l'Encyclopédie méthodique, n'ont point 
cité la figure de Lobel, ni celle de Columna; en les compa- 
rant à la description très-bien faite par le dernier, on reconnoit 
cette jolie plante d'agrément, cultivée dans tous nos jardins, et dé- 
signée sous le nom de Tracwerrum cœruleum. 


Ce qui jusqu’à ce jour aura embarrassé les botanistes, c’est 
qu'ils n’ont pu croire que Lobel ait appelé rouge, une fleur 
bleue, et qu'il ait confondu une plante à corolle monopétale 
avec une autre plante à corolle polypétale; d'autant plus que la 
figure donnée par Losrc, a été copiée par tous les Commen- 
tateurs , ainsi que l’on peut s’en assurer en consultant l’ZZistoire 
générale des Plantes de Dalechamp, tome 11, pag. 205, où l’on 
trouve sous le nom de 7'éléphion aux fleurs pourprées de Lobel, 
la Trachélie bleue. Zrachelium cæruleum, Linn. 


JV. Ycno. Jarava usitata. Encyclopédie méthodique, supplément, 
tome IL, pag. 130. 


Parmi les preuves de l’incurie des compilateurs, j'ai pensé 
qu'il ne seroit pas inutile de noter la suivante. 


Frésier (Relation du Voyage de la mer du Sud aux côtes du 
Chili et du Pérou. Paris, 1752, in-4°) dit, pag. 158 : le Llama, 
Mouton du Pérou, ne se nourrit que d’une plante appelée Ycho, 
1cho, pag. 143.... La seùle plante que l’on trouve dans le 
pays, et qui remplace le bois, pag. 165, 250. 

De 


ET D'IISTOIRE NATURELLE. 145 


DE rA cnesvaye pe Bois (Dictionnaire raisonné et universel 
des Animaux, 1759, 4 vol. in-4°) dit, tome IV, pag. 580, 
YCHO ou ICHO , nom qu’on donne au Pérou au Lama ou 
Glama, espèce de chameau. 

eureusement que cette sollise ne s’est pas propagée. 

L'Encyclopédie ancienne parle de l’Ycho comme d'une plante, 

tome XVII, pag. 606. 


Varmonr DE Bowant (Dictionn., 4° édit., Lyon, 1791), parle 
de l'Fcho, tome X, pag. 11, tome XV, pag. 178. 


Dans le Mouv. Dictionn. d'Hist. natur., tome XXII (1804), 
pag 510, on lit : Ycuo, espèce de plante graminée du Pérou. 
On ignore à quel genre elle appartient , et cependant, tome XII, 


pag. 249, on lit, Jarave...., employée...., son nom vulgaire 
est Zchu. 


Dans la 2° édition du Now: Dictionn. d'Hist. natur., t. XVI, 
pag. 493; on lit, Jarave...., rentre dans les Stipes de Linné..., 
appelee vulgairement cha. 


Rurz et Pavon, Flor. Per., tome 1, pag. 5, tab. 6, fig. 6, 
décrivent et figurent le Jarava ichu. 


Parssor pe Beauvois (Essai d'une nouvelle Agrostographie, 
Paris, 1812) parle de cette plante sous le nom de Stipa jarava, 
Pag. 419, atlas, pag. 6, taB. 6, fig. 5. 

Don Félix de Azara (Voyage dans l'Amérique méridionale, 
tome II, pag. 459) parle de cette plante, dans les termes sui- 
vans : Ychoicho , paille haute du genre de la Festuca; on la 
mêle avec les excrémens secs des diflérentes espèces de Chameau 
du Pérou. Il paroïit que, par une erreur typographique assez 
grave, l’éditeur a réuni en un seul mot Fchorcho, les deux ma- 
nières d'écrirer le aom de la plante Fcho, Icho. 

J'observerai à celte occasion, qu'il est surprenant de retrouver 
dans l'Amérique méridionale les mèmes usages que dans les dé- 
serts de l'Afrique et de l'Arabie, puisque dans ces deux régions 
si distantes, les excrémens de Chameaux, mèlés avec quelques 
substances végétales, sont employés comme combustibles. On 
peut en conclure que, placés dans les mêmes circonstances, 
1 hommes useront des mêmes moyens pour satisfaire à leurs 

esoins. 


Tome LXXXVII. AOÛT an 1818, je T 


Sur plusieurs Animaux de l'Amérique septentrionale, et 
entre autres sur le upicapra americana, V Antilope 
americana , le Cervus major où #Faputi, ete.; 


Par M. Grorces ORD, 


DANS UNE LETTRE AU RÉDACTEUR DU JOURNAL. 


Jr vois avec beaucoup de plaisir, Monsieur, que l'attention 
des zoologistes d'Europe est dirigée vers l'étude de ce qua- 
drupède remarquable que vous avez décrit sous le nom de Aiu- 
picapra americana, dans le Bulletin de la Société Philomathique. 
Dans mon Essai sur le mème animal, publié dans le Journal 
de l’Académie des Sciences naturelles de Philadelphie, j'ai émis 
quelques doutes, si ce ne seroit pas plutôt un véritable Ovis. 
Ces doutes existent encore, et il est très-possible que nous 
soyons long-temps à les convertir en certitude, tant cet ani- 
mal habite des régions éloignées et inaccessibles. Il n’y a pas 
long-temps que j'ai eu la satisfaction de voir la laine d’une 
espèce de quadrupède , que l'on m’adit être la véritable Chèvre 
de Cachemire; cet échantillon était parvenu par le moyen d’une 
personne de Calcuta, qui a déclaré que c’étoit cet animal qui 
fournissoit la laine dont tous les fameux schalls de Cachemire 
sont fabriqués. La ressemblance de cette laine avec celle de 
notre animal ruminant est très-considérable , excepté que la nôtre 
est encore plus fine. L'une et l’autre sont mêlées avec du poil 
grossier. La couleur des deux est également blanche. A l’échan- 
üllon de laine dont il vient d’être parlé, étoit joint un déssin 
grossier de l'animal; d’après cela il est pourvu d'une barbe, 
el il porte sa queue comme le font ordinairement les Chèvres ; 
double caractère qui appartient à ce genre et non à celui des 
Moutons. Je sais qu'il y a ici beaucoup de discussions pour 
la détermination de l'animal de Cachemire, et que plusieurs 
personnes croient que c’est un Mouton. Que pensent à ce sujet 
les naturalistes d'Europe ? 

Si nous avons confiance au rapport du capitaine Lewis, les 
habitudes de notre ruminant alpin, ne sont pas celles des An- 
tilopes, mais bien plutôt celles des Chèvres. Il dit qu'il n’est 
pas vile, landis que la vitesse des Antilopes est passée en pro- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 147 


verbe. Il ajoute qu'il habite les rochers et les parties les plus 
inaccessibles des montagnes. Mais quoique les Antilopes se trou- 
vent généralement dans les contrées élevées, cependant elles 
préfèrent les plaines, dans lesquelles elles se retirent toujours 
quand elles sont poursuivies. La nature de la robe de notre 
animal est entièrement différente de celle d'aucune espèce d’An- 
tilope. J'espère , Monsieur , que vous ne me regarderez pas 
comme opiniätre, parce que je refuse mon assentiment à votre 
Opinion , que ce quadrupède doit être placé avec les Chamois, 
Fupicapra. 

Depuis la publication de mon Mémoire sur cet animal, j'ai 
examiné l'axe de ses cornes; il est entouré d'un périoste for- 
tement adhérent, et il se termine en une pointe cartilagineuse , 
d'où il faut conclure que l'individu étoit jeune. Il n'y a aucune 
apparence de cellules à l'extérieur. À l'endroit où il se séparoit 
de l'os du front, il étoit divisé par des cloisons osseuses en 
trois larges cavités, dont la profondeur de l’une éloit d'un demi- 
pouce. Le reste de la corne éloit parsemé de pores lrès-pelit, 
mais cependant visibles à l'œil nu (1). 

Malgré l’assertion récente d’un minéralogiste écossois (voyez 
Annales de Thomson, avril 1818), qui a répété entièrement 
l'opinion de Buffon, et de quelques autres naturalistes, que 
FAmérique ne possède pas une véritable espèce du genre An- 
ülope , nous avons un animal ruminant, sinon entièrement con- 
génère, au moins si extrémement rapproché de cette élégante 
tribu, qu'il doit former un anneau intermédiaire dans l'échelle 
animale , réunissant les geures Autilope et Chèvre. J'ai dejà 
publié dès l'année 1815, une courte notice sur cet élégant qua- 


(1) Ce caractère, tiré de la densité ou de la porosité plus ou moins con- 
sidérable de l'axe osseux qui supporte les cornes des animaux de ce groupe, 
et que nous deyons à M. Geoffroy, ne peut guère être pris en considération 
pour la séparation des Antilopes; 1°. parce qu'il est évidemment interieur et 
tout-à-fait anatomique; 2°. parce qu'il est à peu près indubitable qu'il doit 
varier suivant l'âge; 3°. parce qu'il doit y avoir une gradation à ce sujet, 
eomme il y en a pour tous les autres caractères dans le grand genre des Cé- 
rophores. On peut tirer une preuve de ce que je viens de dire , des observations 
mêmes de M. Ord, qui montrent que dans l'animal qui fait le principal sujet 
de cet article, et dont cet observateur veut faire une Antilope, les axes osseux 
aurcient des cellules, et qu'il en est de même de ceux d'une véritable espèce 
d: ce genre. Au reste, nous reviendrons sur ce point dans notre Mémoire sur 
la disposition systématique des Animaux ruminans, que nous nous proposons 
d'insérer dans un de nos prochains Cahiers. (R.) 


110 


148 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIÉ 


drupède, et je lui ai douné le nom de Prong-lorned Antelope; 
Antülope à cornes fourchues, Antilope americana , dénomination 
que je regarde comme particulièrement due à cet animal, jus- 
qu'a ce quil ait été assuré d'une manière certaine, qu'aucune 
espèce des genres Antilope, Chèvre ou Mouton ne soit pas in- 
digéne a l'Amérique. L’Antilope à cornes fourchues a élé 
irouvée en quantité considérable dans les plaines et les terres 
élevées de l'immense contrée qu'arrose le Missouri. C’est à 
MM. Lewis et Clarke que nous devons la première mention par- 
ticuliére de cet intéressant quadrupède : « De tous les animaux 
que nous avons vus, disent-ils, l'Antilope semble posséder la 
plus étonnante vitesse. Extrémement craintive, elle ne se repose 
que dans les endroits d'où elle peut apercevoir de tous côtés 
l'approche des ennemis. La finesse de sa vue lui permet de dis- 
tinguer le danger le plus éloigné. La délicate sensibilité de son 
odorat, met en défaut les embüches qu'on pourroit lui tendre 
en se cachant; et lorsqu'elle est alarmée, sa course rapide res- 
semble plutôt au vol des oiseaux qu'aux mouvemens d'un animal 
terrestre. » ÿ 

Cette espèce vient en rut vers le 20 septembre, et elle pro- 
duit deux petits à peu près au 1° juin; à cette dernière époque, 
les femelles se réunissent et se séparent des mâles. La grande 
horde d'Antilopes passe l'été dans les plaines à l’est de la ri- 
vitre de Missouri, et elle retourne à l'automne dans les mon- 
lagnes noires, où elle se nourrit de feuilles d'arbrisseaux, 
jusqu'à ce qu'elle recommence ses migrations au printemps. 

Depuis le temps d’'Hernandez, les naturalistes ont toujours 
eu des doutes sur cette espèce de quadrupède figurée et décrite 
dans son Æistoire du Mexique, chap. 14, pag. 324, 325, sous 
le nom de Mazame, seu Cervus et Semamacame; et dans le 
premier volume de Séba, tab. 42, fig. 3, 4, ily a des figures 
de deux animaux américains, qu'il appelle également Mazame 
et Semamacama, quoiqu'il ne paroisse pas qu’il les ait regardés 
comme ceux d'Hernandez. Buflon, tome XIE, pag. 317, dans 
ses Commentaires sur ces animaux de Séba, dit que l’un d'eux 
est le Kob ou la petite Vache brune du Sénégal; il assure pa- 
reillement que l'autre, ou le Mazame, est une Chèvre ou une 
Gazelle d'Afrique. Cet illustre naturaliste paroissoit douter que les 
cornes de ces animaux fussent persistantes, et s’ils ne devoient 
pas être placés parmi les Cerfs. Mais comme il avoit créé cette 
hypothèse, que les Chèvres et les Antilopes sont exclusivement 
propres à l’ancien continent, il fut forcé, pour être conséquent, 


FT D'HISTOIRE NATURELLE. Ù 149 


d'adopter l'opinion que les animaux en question n’éloient pas 
indigènes de l'hémisphère occidental. : 

Récemment, dans le cinquième volume du Nouveau Dic- 
tonnaire d'Histoire naturelle, M. Desmarest , d'après M. Cuvier, 
considère le Mazame du Mexique, le Cariacou de Daubenton et 
le Cerf de la Louisiane comme synonymes du Cervus virginianus 
ou Cerf commun des Etats-Unis d'Amérique; quant au Mazame 
d'Hernandez, il n'y a heureusement plus de doute, puisque ce 
nest cerlainement que le méme animal que nos voyageurs ont 
observé dans la Louisiane en si grand nombre. Un examen at- 
tentif des cornes de la figure donnée dans l'ouvrage de l'auteur 
cile, ne permet aucune incerlilude sur cette conclusion. Comme 
nous ne pouvons avoir confiance dans la véracité de l'historien es- 
pagnol touchant une espèce, ne devons-nous pas supposer que 
l'autre est aussi américaine , et qu’elle n’a pas encore pris place 
dans nos systèmes. Nous pouvons appuyer cette supposilion, en 
pensant qu'Henderson assure qu’une espèce d’Antilope qu'il re- 
garde comme l’4. dorcas, habite le pays d'Honduras. (/’oyez 
Son Âistoire des établissemens britanniques dans le pays d'Hon- 
duras, pag. 97, Londres, 1800.) 

L'espèce de rage que l’on a pour l'établissement de nouveaux 
genres, a tellement prévalu dans ces derniers temps, qu'il y 
a lieu de craindre que les progrès des Sciences naturelles en 
soient plutôt retardés qu'avancés; si cependant les caractères 
du genre Antilope, tels qu'ils ont été donnés par nos meilleurs 
auteurs systématiques, peuvent comprendre notre ruminant du 
Missouri , j'en serois fort satisfait; dans le cas contraire, et si 
J'on pense qu'il doive former un nouveau genre; je demanderai 
la permission de proposer le suivant : 


ORDRE. Les Ruminans. Ruminantia. 
Section. Cornes soutenues par un axe solide osseux. 
Genre, ANTILOCAPRA (1). 


Antilocapra americana. 
Cornes avec des stries nombreuses, légèrement ridées trans- 


(Gi) L'axe des cornes de l'individu sur lequel ce genre est établi, est lisse 
et solide dans sa moitié inférieure, et poreux ou spongieux dans le reste ; 
j'ignore s’il y a ou non des cellules communiquant avec les sinus frontaux, 
comme dans les genres Ovis et Bos, parce que je n’ai pu l’examiner que su- 


150 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


versalement et verruqueuses, un peu inclinées en dehors; la 
parlie supérieure lisse, recourbée ; le sommet rentrant en dedans 
et pointu ; un fourchon ( prong) sub-sagitté; les yeux grands et 
placés très-haut sous la base des cornes. 

Les oreilles sont pointues et éloignées du dos, blanchätres, 
et bordées de rougeätre; les jambes sont grèles; il y a une 
toufle de poils entre les cornes; la face et le nez sont chatain 
foncé; la couleur des partiés supérieures du cou et des parties 
extérieures des jambes, est buflle rougeätre; le croupion, les 
parties inférieures, la poitrine, le dedans des membres, le 
sommet et les côtés de la tête et de la face, ainsi que les 
lèvres, sont blancs; la partie antérieure du cou a aussi une 
tache blanche; la queue est d’une couleur de bufile rougeätre 
en dessus et blanchätre en dessous; le cou , ainsi qu'une cri- 
mére considérable qui l'orne, est de couleur de terre d'ombre 
foncée, et marqué derrière les oreilles de chaque côté d’une 
tache blanche. La fourrure est très - épaisse et grossière ; 
chaque poil comme moelleux, est aplati et ondulé (1); la lon- 
gueur des cornes, prise en suivant la courbure antérieure , est 
de douze pouces (2), et au-delà du fourchon (prong), de deux 
poucés seulement; la longueur du cerps de la partie antérieure 
des épaules au croupion, est de deux pieds neuf pouces; la 
hauteur au garrot est aussi de deux pieds neuf pouces; longueur 
de la queue, quatre pouces ;‘tout cela sur un individu mâle. 


perficiellement. L'étui corné; ou la corne proprement dite, est fournie en 
dedans de poils roides, dispersés. 

Le savant auteur de l'ouvrage intitulé, le Règne animal, fait observer que 
les Antilopes ont la substance osseuse de l'axe de leurs cornes solide et sans 
pores ou sinus, comme dans-les bois des Cerfs. Cela m'a conduit à faire un 
examen comparatif du bois du Cerf de Virgine, et de l’axe osseux des cornes 
de l’Antilope cervicapra. Le premier, à l'exception de sa partie centrale, 
est entièrement dépourvu de pores, tandis que le second en a plusieurs 
de différentes grandeurs, se portant de, la base au sommet où se terminent 
Jes plus con:iderables, Ces pores peuvent-ils ètre le résultat de l’action des 
insectes ? 

@). Cetterespèce de poils aplatis et ondulés, se trouve dans plusieurs, de 
nos animaux ruminans de l'Amérique du nord, comme dans l’Ovis ammon 2? 
le Cervus major et le €. virzinianus. Tous ces animaux et celui qui vient 
d’être décrit so haut, ontune légère enveloppe de poils très-fins, qui se trouve 
tout-à-fait sur la peau, pour les protéger de l'inclémence des saisons. 

(2) Une corne de cette éspèce qui se trouve dans le cabinet de l'Académie 
des Sciences naturelles, a 14 pouces de longueur prise de même ; sa pointe 
gst 1ecourbée comme un hamecon, À 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 151 


Je n'ai pas vu la femelle, mais le capitaine Lewis dit qu'elle 
est plus petite que le mäle, et que ses cornes sont plus grèles 
et plus courtes. 

Je vous envoie une figure gravée de ce quadrupède (1); elle 
doit faire partie d’un petit ouvrage de Zoologie, auquel je tra- 
vaille pour l'illustration du voyage de Lewis et Clarke. Ma figure 
el ma description ont été faites d'après un individu rapporté 
par Lewis, et maintenant dans le Muséum de Péale: (Je dois 
vous avertir qu'il y a dans cette figure une petite imperfection 
qui doit étre soigneusement corrigée; l'artiste, par erreur, a 
indiqué un sinus lacrymal que je n'ai pu observer, quelque 
altenlion que j'y aie apportée , dans l'individu bourré.) | 

Vous recevrez pareillement une épreuve de ma figure du 
Mouton à grosses cornes, Big-Orned Shup, que l'on a con- 
Jecturé être le véritable Argali. Vous, qui pouvez consulter la 
belle collection du Muséum du Jardin du Roi, vous pourrez 
déterminer si notre Mouton est l’Ovis ammon ou non. Le ca- 
pitaine Lewis a rapporté un male et une femelle qui sont dans 
le Muséum de Peale. Je n’ai point encore une figure de cette 
dernière , mais je vous en promets ure du pinceau de M. Lesueur. 
Ses cornes diffèrent d’une manière remarquable de celle du mâle; 
elles sont plus grèles et se courbent en arrière et en dehors, 
un peu comme dans quelques varietés de la Chèvre commune. 
La détestable figure de notre Bélier de montagne , telle qu'elle 
est insérée dans les Annales du Muséum d'Histoire naturelle , 
pour-1803, a trompé sans doute M. Geoffroy, et l'aura porté à 
regarder l’animal qu’elle représente comme une espèce nouvelle, 
sous le nom d'Oyis montana (2). 


6) M. Ord a eu la complaisance de joindre à cette Lettre , une fort bonne 
figûre de cet animal, qui nous paroît extrêmement singulier, si c'est une 
véritable Antilope ou même un Cérophore, en ce que ses cornes sont bi- 
furquées ou ont un petit andouiller comprimé vers le tiers de leur hauteur. 
D'après cette figure, j'ai pu voir que c’est très-probablement du même animal 
que provient l'espèce de bois que j'ai décrit dans l'extrait de mon Mémoire 
sur les Ruminans, inséré dans le Bulletin de la Société Philomathique , et que 
j'ai supposé avoir appartenu à un animal que j'ai nommé Cervus hamatus, 
parce que j'ai pensé que cette arme frontale étoit un véritable bois et non 
une corne, Nous aurons aussi l’occasion de revenir sur ce point, dans le Mé- 
moire cité à la note de la page 147, et nous publierons la figure que nous à 
envoyée M. Ord, qui desire qu'elle soit encore quelque temps inédite en 
Europe. (R.) 

(2) Les cornes de l'individu mâle que nous possédons empaillé , sont tron- 


» 


152 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CMIMIE 


Mon ami JLesueur a figuré pour moi la plus grande partie 
des quadrupèdes rapportés par Lewis, ou du moins ceux dont 
les peaux étoient dans un parfait état de conservation, comme le 
Bagger, Ursus labradoricus de Linnæus: la Marmotte de la Loni- 
Siane, Ærctomys Ludoviciana ; Ve Viverra alba ; Ve Columbia 
grey Squirrel; sciurus griseus ; le Red Breasted Squirrel, S, rubri- 
catus ; le Rocky mountain ground Squirrel, S: troglodytus ; le Great 
grizsly Bear, Ursus horribilis ; j'ai de ce dernier deux figures 
d'après deux beaux individus existant dans Je Muséum. 

Vous recevrez peut - être avec intérêt, un exemplaire de la 
figure que j'ai donnée du Lacerta orbicularis Linn., T'apayaxin , 
Lacerto orbiculari Novæ-H. ispaniæ Hernand., Hist. Mex., ch:xvr. 
— Séba, tome, pag. 134, tab. 85, fig. 1-2.— Bufo americanus, 
spinosus, sive Salamandra orbicularis, idem., tab. vog, n° 62 (1). 
lle a été faite d'après un superbe individu rapporté par le ca- 
pitaine Lewis, du Missouri , où cet animal est commun. L'examen 
attentif de cette figure vous montrera la source de la dénomi- 
nation impropre d'orbicularis sous laquelle cet animal est connu. 
Les figures donnéés par Hernandez ont le corps .orbiculaire, 
ainsi que la première de Séba, ce qui provient certainement 
de ce qu'elles ont été faites d’après une peau mal bourrée. Les 
naturalistes subséquens ont copié ces mauvaises figures; et quoi- 
qu'il ÿ ait une très-foible ressemblance entre leurs figures et la 
mienne, je n’ai cependant presque pas de doute qu'elles ont 
élé faites d’après la même espèce. Cette Lettre ne me permet 
pas de vous donner une description de ce singulier Saurien. 

Je me propose de publier un Mémoire sur le Cerf américain, 
Cervus major, enrichi de figures, d’après de très-beaux dessins 
de Lesueur; ces dessins ont été faits sur un individu mâle vi- 
vant, qui appartient à M. C. W. Peale, propriétaire du Muséum 
de Philadelphie, On a beaucoup parlé derniérement de cette Aa- 
jeslueuse espèce, à laquelle on a donné la dénomination barbare 


quées, comme vous le verrez dans la figure; cela n’est pas naturel, mais le 
résultat de l’habitude ; les mâles, d’après les détails particuliers que nous devons 
au capitaine Lewis, ayant pour coutume de frotter la pointe de leurs cornes 
contre les rochers ; aussi tous les individus mâles tués par la troupe de Lewis et 
Clarke avoient ainsi leurs cornes mutilées. [Il nous paroît extrémement pro- 
bable que le Mouton à grosses cornes de M. Ord, ne diffère point de l’Ovis 
montana de M. Geoffroy. (R.)] 

(1) Ne se pourroit-il pas que cette dernière figure de Séba et l'Agama 
orbioularis de Daudin, fussent la même espèce, et sont-elles de la même que 
celles d'Hernandez que nous venons de citer ? 


de 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 155 


de W'apiti; mais cenom, quand même il seroit bien appliqué, est 
inadmissible , parce qu’il y a long-temps que ce Gerf a éte decritpar 
Artorby sousle nom de C. major, et par Gmelin sous celui de ©, 
canadensis. D'après les règles de la priorité, la justice veut qu'un 
lui rende son premier nom. Il me semble que c'est un véritable 
manque de goût, en mème temps qu'une inconvenance, d'employer 
en Histoire naturelle, les noms des barbares , au lieu du langage 
philosophique tiré du grec ou du latin, que la prescripuüion a 
sanctionné, et qu'il semble que le temps ait rendu respec- 
table. Les naturalistes qui emploient ainsi des dénominations 
de patrie dans une. nomenclature scientifique , s’exposent jus- 
tement à élre censurés ; mais cela est encore beaucoup plus 
reprochable de choisir parmi les souvenirs traditionnels d'une 
nation obscure de sauvages, des noms qui ne servent à autre 
chose qu’à flatter la vanité pédantesque des collecteurs. Quel 
avantage relirons-nous de savoir sous quels noms les Delarvares, 
les Mohegans, les Narrugansets indiquentles animaux? Des connois- 
sances de cette espèce, peuvent-elles aider à reculer les bornes de 
la Science ou à en faciliter l'étude? ou bien cesdénominationsexpri- 
ment-elles quelques qualités particulières à l'espèce? S'il en est 
ainsi, avant que nous puissions espérer d’entirer aucun bénéfice , il 
faut nous instruire dans les langues élégantes dont ces noms sont 
trés. Certainement, pour une oreille classique, les termes Zs- 
chihoapekelis, Gisitschimnis, Squeteaque, Checouts et Wupuska- 
Pethaxisch sonnent très-mélodieusement; bientôt, peut-être, 
la supériorité de cette nomenclature sera évidente, et l'habitude 
que l’on appelle ordinairement Linnéenne, de dériver les noms 
triviaux des sources de nos connoïissances modernes, sera re- 
jetée comme entièrement inutile el sans usage. Alors, au lieu 
de classer le chef-d'œuvre de la nature, sous la vague dénomi- 
nalion de Homo sapiens, nous lirons , dans toute la majesté du 
caractère italique, dans un Synopsis méthodique, Æomoa pas- 
hisheook, ce qui signifie parmi les Clatsops, Chinnooks, etc., 
un. bipéde qui porte des vétemens! (Voyez Transactions of the 
lit. and Phil. Society of New-York, art. Fishes; Journal de Lewis 
et Clarke, tome II, pag. 132, etc., etc.) 


Mais, Monsieur, pour parler plus sérieusement, je ne puis 
exprimer suffisamment ma désaprobation de l'abus dont je viens 
de parler ; et c’est pour moi une véritable cause de regret que 
de voir que plusieurs naturalistes européens aient assez perdu 
de vue la dignité de la Science, pour dériver quelquefois même 


Tome LXXXVII. AOÛT an 1818. V 


124 JOURNAT DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


leurs noms génériques de la langue de nations auxquelles les 
Sciences et les Lettres sont tout-à-fait inconnues. 

Par la complaisance polie de M. Lesueur, j'ai vu les deux 
premiers volumes du Dictionnaire des Sciences naturelles, et j'y 
ai trouvé avec plaisir la preuve évidente du zèle des savans de 
Paris , et de leur détermination à se maintenir dans le rang préé- 
minent qu'ils ont obtenu depuis long-temps. 


J'ai l'honneur d’être, etc., Gsrorces ORD. 
Philadelphie , le 21 juin 1818. 


Note du Rédacteur. Dans mon travail sur les Animaux ruminans 
à cornes, que j'ai proposé de réunir sous le seul nom géné- 
rique de Cerophorus, ou de Cornifére, et dont un extrait seu- 
lement a élé publié dans le Bulletin de la Société Philomathique , 
J'ai en effet proposé de former un petit sous-genre du Chamois 
d'Europe, Rupicapra europæa, et de celui dont parle M. Ord 
dans cette Lettre, et que l’on pourroit nommer À. americana, 
toul justement parce qu'ils n’ont pas les caractères des Anti- 
lopes, que leur corps plus lourd, moins svelte, porté sur des 
jambes beaucoup plus épaisses, est couvert de poils longs re- 
couvrant une bourre plus ou moins considérable, etc. Je suis 
donc d'accord avec M. Ord, que cet animal n’est pas une vé- 
ritable Antilope, non pas cependant que je croie que la légèreté 
à la course, l'habitation des montagnes et même la solidité de 
l'axe qui porte les cornes, puissent jamais donner de bons ca- 
ractères zoologiques; les deux premiers n'étant pas inhérens à 
l'objet, et l'autre étant profondément anatomique, et d’ailleurs 
offrant certainement des passages dépendans peut-être de l’âge, 
du sexe et de l'espèce, comme tous les autres caractères des 
ruminans. En effet, M. Ord lui-même en donne la preuve plus 
bas, en traitant de son Antilochèvre, puisqu'il dit que non-seu- 
lement les axes osseux de ses cornes sont celluleux, mais qu'ayant 
examiné attentivement ceux de l’Antilope proprement dite, il les 
a également trouvées poreuses, ce qui rend, ce me semble, 
évident que ce caractère que nous devons à M. Geoffroy, ne 
peut guère être employé pour la séparation des Cornifères. Aussi 
ai-je eu, dans la disposition systématique que j'ai proposée pour 
ces animaux, plutôt recours à l'ensemble des caracteres qu’à un 
seul, parce qu'il m'a semblé qu'il n’y en avoit aucun d'assez 
important pour que les autres lui fussent subordonnés. ; 

Quant au rapprochement que M. Ord fait de son Chamois 


| ET DITISTOIRE NATURELLE, 155 


d'Amérique avec la Chèvre supposée de Cachemire, telle qu'il 
en a vu un mauvais dessin, et seulement un échantillon de laine, 
il est évident qu'il est peut-être un peu trop prématuré; en effet, 
quoiqu'il ne dise rien des corues de ce dernier animal, ce qui 
seroit important pour se déterminer, il paroit cependant par 
l'existence d’une barbe, et la manière: dont il porte sa queue 
que c’est une véritable Chèvre, ce qui se trouve exact d'après 
un dessin que je possède de cet animal'et que je publierai in- : 
cessamment , tandis que le Rupicapra americana n’a pas de barbe, 
ne paroit pas porter sa queue relevée, et surtout a ses cornes 
très-différentes de celles des Chèvres. Ce ne peutêtre, ce me 
semble, non plus un Mouton, puisqu'il n’en a ni les cornes ni 
la queue. Il faut donc le regarder comme un de ces animaux 
qui doivent nous montrer que la série des’ Corniféres est tel-” 
lement nuancée, que nos divisions doivent seulemerit être pour : 


faciliter la connoissance des nombreuses espèces que ce groupe 
contient. 


2 


LETTRE DE M. DELORME, D. M. P., 
‘AM. GIRARD; 
SUR LE VER DE GUINÉE, FILARTA MEDINENSIS. 


Je vous envoie, par une occasion sùre, un,Ver de Guinée, 
sorti. de la malléole externe d'un de; mes petits nègres: Je l'ai 
extrait en entier avec précaution, le dixième jour de:son ap- 
parition, ayant eu le soin d'én rouler chaque jour une portion 
autour d’un petit cylindre de toile. L'extrémité la plus fine est 
la tête du Ver, qui est fixée à un fil, et c'est celle qui a paru 
la première. Ce Ver a un peu noirci dans le tafia où je lai mis; 
il éloit d’un blanc mat. Lorsque la tête S'est présentée, il y 
avoit environ un pouce au dehors. Ce Ver avoit des mouve- 
mens d'ondulation très-prononcés , et le malade ressentoit les 
mouvemens du reste du corps dans l'intérieur de sa jambe. 

Vous savez que l'existence de ce Ver a été niée par MM. Larrey, 
Richerand et plusieurs autres. Vous vous rappelez sûrement 
que notre collègue Baud a fait le reproche aux savans mé- 
decins de Paris, dans un Journal de Médecine, de douter de 
tout ce qu'ils n’ont pas vu , quoique les faits soient atteslés par des 


V 2 


156 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


personnes dignes de foi. Je vous avoue que moi-même j'ai cr, 
d'après l’assertion de ces célèbres professeurs, que le Ver de 
Guinée et le Dragoneau, n’étoient que du tissa cellulaire frappé 
de mort à la suite des anthrax, et formés en filière par un 
trou de la peau; mais le tissu cellulaire auroit-il le mouvement 
d'un Ver, mouvement qui est si fort et si sensible, que si vous 
abandônnez la portion que vous avez saisie, elle rentre en lo- 
talité? La marche de la maladie ne ressemble nullement à un 
anthrax ; il n'y a presque pas de gonflement; il y a plutôt de 
la démangeaison que de la douleur, et au bout de huit ou 
dix jours, et quelquefois davantage, il se forme une pelite ou 
Ve:lure à la peau, par laquelle paroît la tête du Ver. Les Afri- 
Cains du Sévégal, qui y sont fort sujets, n’y appliquent aucune 
espèce de remèdes dans la crainte d'irriter le Ver qui se cas- 
serait, se relireroit et entretiendroit un uleère de mauvaise na- 
ture. Ils se contentent de saisir la portion sortie, de faire chaque 
jour de légères fractions, et de le rouler autour d’un cylindre 
de bois, de toile ou de papier. Dès que la totalité du Ver est 
sortie , l'ulcère guérit promptement. Il y a des individus qui en 
ont plusieurs à la fois, et cette maladie est sujette à récidive. 
Faites actuellement vos réflexions sur la manière dont s’engendre 
ce Ver; je vous fais grâce des miennes; car quoique nous soyons 
dans un siècle où l’on explique tout, il y a des choses qui sont 
pour moi inexplicables. Je voudrois seulement que nos savans 
incrédules voulussent bien s’en rapporter à nous, ou bien se 
donner la peine de se transporter sur les lieux pour vérifier 
le fait. M. Larrey a été en Egypte; et il dit avoir reconnu que 
l'existence de ce Ver étoit une chimère. J'ai certainement beau- 
coup de vénération pour M. Larrey, mais sans admettre les Vers 
d'Egypte, je ne puis m’empèécher de reconnoitre ceux que j'ai 
vus ici sur plusieurs nègres. 

Note du Rédacteur. Nous avons examiné avec soin ce Ver, 
ou mieux, celte portion de Ver, car Vanimal n’est pas tout 
entier. La portion que nous possédons, et que nous devons 
à la complaisance de M. Girard, a dix-huit pouces de long sur 
une ligne de diamètre ; l'extrémité antérieure est terminée en 
pointe , assez alongée comme dans les autres Filaires , et labouche 
est simple et terminale. Je n’ai trouvé à l'intérieur, rien autre 
chose qu'un canal intestinal, étendu d’une extrémité à l'autre. 
Quoi qu'il soit assez difficile de dire pourquoi cet animal sort 
presque constamment vers la partie inférieure des jambes, 1} 
n'offre du reste dans cette habitude de sortir du canal intes- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 157 


ünal (dans lequel il est très-probable qu'il est né ou a été in- 
troduit, pour pénétrer dans le tissu cellulaire , et même tra- 
verser ensuite la peau), rien que l’on ne retrouve aussi dans 
les autres espèces de ce genre. 


——————— 


NOUVELLES SCIENTIFIQUES. 
CHIMIC. 


Sur un nouvel Alcali végétal. 


Ex faisant l'analyse de la Fève Saint-Ignace et de la Noix vo- 
mique, MM. Pelletier et Caventou viennent de trouver le prin- 
cipe actif de ces deux graines. Le 1° août ils ont donné com- 
munication de leur découverte à la Société Philomathique, et 
le 10 du courant ils l'ont annoncée à l'Académie des Sciences. 
Voici quelles sont les: principales propriétés de la nouvelle 
substance. 

Elle est blanche, inodore, d’une amertume très-forle, cris- 
tallisable en prismes à quatre pans, terminés par des pyramides 
à quatre faces un peu surbaissées, soluble dans l'alcool, très- 
peu soluble dans l’eau et dans l’éther. Distillée dans des vaisseaux 
fermés, elle se fond , noircit, se décompose et donne tous les 
produits des matières végétales non azotées; l'analyse en a été 
faite par Je deutoxide de cuivre, et l’on n'a obtenu que de 
l’eau et de l'acide carbonique, ce qui confirme les résultats 
précédens. 

Elle est sans action sur le curcuma , verdit les couleurs bleues 
végétales, et fait revenir au bleu le papier de tournesol rougi par 
un acide. Elle se dissout très-bien dans les acides, les sature et 
forme avec eux des sels plus ou moins facilement cristallisables. 
L’acide nitrique foible la dissout sans l’altérer ; mais lorsqu'il est 
concentre, cet acide fait prendre à la substance ane couleur rouge 
de sang; lorsque l’action est continuée, la dissolution jaunit et 
laisse de l'acide oxalique pour résultat, L’acide acétique forme 
avec elle un sel plus soluble que celui obtenu avec l'acide sul- 
farique, mais le sulfate cristallise très-facilement en belles lames 
rhomboïdales. Il est à remarqner que ces combinaisons salines 
sont moins amères que la substance elle-même , et que la dis- 
solution nitrique a une saveur d’abord sucrée, et qui laisse en 
dernier lieu un goût àpre et un peu amer. 


158 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CITIMIE 


Elle a une action très-énergique sur l’économie animale. Cette 
aclion est la mème que celle de la Noix vomique et de la Fève 
Saint-Ignace , c’est-à-dire qu'elle produit le tétanos, mais en bien 
moins de temps et à des doses bien inférieures. Un demi-grain 
suffit pour tuer dans l’espace de quelques minutes, les lapins, 
les chiens, les chats et les cochons d’Inde auxquels on l’admi- 
nistre , soit en l’insufilant dans la gueule de ces animaux, soit 
en l’introduisant dans une blessure pratiquée à dessein. 

La classe des substances végétales acides est nombreuse; celle 
des substances végétales alcalinessembloit étre au contraire bornée 
à la morphine. Cependant M. Vauquelin avoit reconnu des pro- 
priétés alcalines dans une substance trouvée par lui, en analysant 
le Daphné alpina ; c’est pour rappeler ces faits, que MM. Pelletier 
et Caventou ont nommé leur alcali Fauqueline (1), en l'honneur 
du célèbre chimiste qui le premier a entrevu la nouvelle classe 
de corps dont la substance du Daphné, la Morphine et la Vau- 
queline formeront les trois premiers genres. 


Sur deux nouveaux oxides de Strontiane et de Calcium. 


M. Thenard a lu à l'Académie des Sciences, dans la séance 
du 19 août, la suite de ses recherches sur l’oxigénation, par 
le moyen du péroxide de barium; il a découvert deux nouveaux 
oxides, l’un de Calcium et l’autre de Strontium, qu'il obtint 
en versant de l’eau de chaux ou de strontiane dans l'acide 
hydro-chlorique oxigéné ; ces oxides se précipitent à l'instant 
sous forme de belles paillettes très-brillantes ; quand lacide est 
très-concentré, ainsi que l'eau de Strontiane, les liqueurs se 
prennent en masses. 


Oxide de Mercure. 
Le 28 mai dernier , un Mémoire de M. Donovan, sur les oxides 


de Mercure ; fut lu à la Société royale de Londres. 
M. Donovan commence par donner un apercu de ce qui a 


(1) En donnant à la substance qu’ils ont découverte , le nom de 7’auqueline, 
MM. Pelletier et Caventou ont sans doute oublié que d’après les principes 
de la nomenclature de Lavoisier, on a entièrement proserit en Chimie les noms 
propres d'hommes, de villes, etc., et nous pensons qu'il n'y a pas de raison 
de changer ces principes; s'il devoit en être autrement, nous serions les pre- 
miers à applaudir à l’idée des auteurs; mais nous le répétons, il nous semble 
que les innovations en ce genre pourroient amener une confusion dont iln'y 
a déjà que trop d’élémens dans la, nomenclature. (R.) 


LE, Las 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 159 
été fait sur cet objet par les chimistes qui l'ont précédé, et 
ensuite il rapporte ses propres expériences. 

Il pense que le protoxide de Mercure consiste en 100 partiés 
de Mercure et 4,12 parties d'oxigène, tandis que le péroxide 
contient 100 de Mercure et 7,82 parties d’oxigene; il suppose 
que ce sont les seuls oxides de Mercure, l’un répondant à l’oxide 
noir et l’autre à l’oxide rouge de Mercure. (Annals of Philo- 
sophy, juillet 1818.) 


Sur le Platine fondu; par M. PRECHTEL. 


M. Prechtel, directeur de l'Institut Polytechnique à Viénne, 
a réussi à fondre le Platine à l’aide d’un feu extrêmement violent 
et dans des creusets très-réfractaires. Le plus grand degré de 
chaleur qu'il ait produit, peut être estimé à environ 180° W. 
Le platine ainsi fondu, perd beaucoup de sa pesanteur spéci- 
fique qui n’est plus que de 17 5. On peut le rayer avec le cou- 
teau , il cède aisément aux coups de marteau et peut être divisé 
avec la scie comme le cuivre. Rougi au feu et ensuite battu 
avec le marteau , il s’écaille et présente une fracture granuleuse, 
semblable à celle de pareilles pièces de fer cru. Ce qui le con- 
duit à croire que le Platine en se refroidissant , descendant ra- 
pidement d’un très-haut degré de température, se réunit sous 
forme cristalline. La mine de Platine ne se fond pas au même 


degré que le Platine pur. (4nn. de Phys. de Gilbert, janv. 1818.) 


MINÉRALOGIE,. 


Annonces de deux nouvelles espèces minérales et de gissemens 
nouveaux de deux espèces connues. 


D'après une Lettre de M. Heuland à M. Léman, en date du 
8 juillet 1818, on lui annonce de Freyberg en Saxe, deux nou- 
velles espèces minérales, le Scorrodite et le Tungstate de plomb; 
la première vient de Baïerfeld, près de Schneeberg en Saxe, et 
la seconde de Zinnwalde en Bohème. On apprend par la même 
Lettre, que la Fiorite vient d’être trouvée dans le Mittel-Gebirge 
en Bohème, et l'Alun natif dans le Phytanthrace subschisteux 
(Gemeine Braun Kobhle), entre Kaden et Saatz sur l'Eger en 


* Bohème. 


60 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, €lC. 


ZOOLOGIE. 


Sur les Mammiftres sujets à la Léthargie périodique; par le pro- 
Jesseur G. Mancirr. (Dei Mammiferi soggeti a periodico Le- 
targo ; dal prof. G. Mangili, membro dell IL. R. Instituto, etc. 
Pavia , 1818.) 


M. le professeur Mangili vient de publier un cinquième Mé- 
moire sur les Mammifères sujets à la Léthargie périodique, 
dans le but surtout de combattre les assertions publiées il y a 
déja plusieurs années sur ce sujet, par un auteur francois. Les 
sRnese rapportés par M. Mangili, semblent d’une grande 
valeur; le principal est appuyé sur une expérience faite par lui, 
et qui consiste à mellre au milieu de l'hiver, une Marmotte 
en léthargie dans du gaz acide carbonique : une heure après, 
le principe vital cesse entièrement dans l'animal, ce qui provient 
certainement de la très-grande lenteur de la respiration qui, 
d'après les nombreuses observations du professeur Mangili, n’est 
que seulement suspendue pendant le long période de la torpeur 
conservatrice. 


PRIX PROPOSÉ. 


L'Académie royale des Sciences, des Belles-Lettres et des Arts 
de Rouen, propose pour sujet de prix, en 18109, la question 
suivante : 

Quels sont les moyens, dépendans ou indépendans du pyro- 
mètre de Weegwood, les plus propres à mesurer avec aulant 
de précision qu'il est possible les hauts degrés de chaleur que 
certains arts, tels que ceux du verrier, du porcelainier , du 
faïiencier, du potier de terre, du métallurgiste, elc., ont besoin 
de connoître? 

Le prix sera une médaille d'or de la valeur de 300 fr. 

Les Académiciens résidans sont seuls exclus du concours. 

Les Mémoires, écrits en, francois ou en latin, devront être 
adressés, francs de port, à M. Vitalis Secrétaire perpétuel de 
l'Académie, pour la Classe des Sciences, avant le 1° juillet 1818. 
Ce terme sera de rigueur. 


De Imprimerie de Mme Ve COURCIER , rue du Jardinet ,n° 12, 


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JOURNAL 


DE PHYSIQUE, 
DE CHIMIE 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 


SEPTEMBRE «an 1818. 


SUITE DU MÉMOIRE 
SUR LES TERRAINS D'EAU DOUCE, 


Ainsi que sur les Animaux et les Plantes qui vivent 
alternativement dans les eaux douces et dans les eaux 


salées ; 
Par M. MARCEL pe SERRES. 


Tarces sont les circonstances qui accompagnent le gissement 
de la magnésite de Salinelles; cette magnésite se trouvant au 
milieu des terrains d’eau douce des bords du Vidourle, et au- 
dessous des couches qui recèlent des fossiles des terrains nou 
salés, doit, ce me semble, être considérée comme appartenant 
à cette sorte de formation. Quant aux mollusques que l'on ob- 
serve dans le calcaire d’eau douce inférieur de Montredon, ils 
n’y sont pas en grand nombre, et parmi ceux dont on peut re= 
connoitre les espèces, j'y ai remarqué : 

1°. Lymnœus elongatus, Brongniart, Mémoire sur des Terrains 
qui paroissent avoir élé formés sous l’eau douce, pl. 1, fig. 9. 


2°. Lymnœus æqualis. Nouvelle espèce bien caractérisée par la 
grosseur du second tour, qui rend les deux premiers presque 


Tome LXXX VII. SEPTEMBRE an 1818. X 


162 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


cylindriques. La spire n’a du reste que cinq tours assez égaux ; 
et allant peu en diminuant, comme dans les autres espèces du 
même genre. Le bord columellaire est très-sensiblement plissé 
du côté de l'intérieur de la bouche. Le test de cette espèce, 
est fortement strié, et les stries en suivent la courbure. Quant 
à la grandeur de ce Lymnée, elle est d'environ 29 millimètres, 
ou à peu près la même que celle du Lymnœus acuminatus. 

5°. Lymnœus pygmœus. Celle espèce se rapprocheroit assez , 
surlout par sa taille, du Zymnœus nunutus de Draparnaud , mais le 
peu de largeur du premier tour de sa spire l'en sépare d’une 
manière tranchée. Ainsi, comme ce premier lour est peu évasé, 
et que le second est assez large, celle coquille présente une 
forme alongée. Comme la précedente, elle n’a au plus que cinq 
tours de spire, mais au lieu d’être striée dans le sens longitu- 
dinal, elle l’est au contraire en travers. La taille de ce Lymnée 
n’est pas au-delà de trois millimètres. 

4°. Paludina affinis. Quoique cette espèce soit très-distincte, 
il est cependant difficile de la caractériser; elle se rapproche, 
au premier aspect, du Cyclostoma simile de Draparnaud, mais 
le premier tour de la spire est loin d’être aussi renflé. Elle auroit 
“aussi quelques rapports avec les Paludines qu'on voit mélées aux 
moules fossiles de Mayence, et enfin avec celles que l’on ob- 
serve dans le calcaire siliceux du même lieu. Mais elle diffère 
des premières, en ce qu’elle est beaucoup plus renflée et con- 
slamment plus petite, et des secondes, en ce que ses derniers 
tours sont beaucoup plus prononcés. 

Enfin, on ne peut la confondre avec les petites Paludines 
fossiles, que l'on trouve isolées dans les environs de Mayence, 
et qui se rapprochent du Cyclostoma acutum de Draparnaud , 
quoique cependant il y ait entre ces deux Paludines, de vraies 
différences spécifiques. Voilà parmi les espèces connues, celles 
qui ont le plus de rapporls avee notre Paludine. Quoique cette 
dernière ne soit pas très-différente du Cyclostoma simile, nous 
croyons cependant qu'elle doit en être distinguée. Celle coquille 
offre quatre tours de spire; le premier, ou le plus considérable 
n'est pas très-renflé, et en effet, la diminution dans la sphé- 
ricité des tours n’a heu que d’une manière insensible. Cette 
espèce est, du reste, fort ventrue. Sa bouche est arrondie ; 
quoiqu’un peu pliée vers la columelle près de laquelle on ob- 
serve un ombilic. Des stries-longitudinales couvrent toutes les 
spires, et ces stries sont nombreuses et rapprochées. Quant à 
ouverture ombilicale, elle est arrondie et fort profonde, tandis 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 163 


que dans le Cyclostoma simile de Draparnaud , celle ouverture 
est oblique et très-peu creusée. Du reste, notre espèce, comme 
celle de Draparnaud , est courte, el a son sommet fort aigu. 

Son test très-bien conservé, n'a guère plus de deux millimètres 
de longueur. On trouve cette Paludine fossile en très - grand 
nombre dans le calcaire d’eau douce inférieur de Montredon ; 
il paroît qu'il en est de même de toutes les petites Paludines, 
ce qui s'accorde parfaitement avec ce que nous savons sur l'ha- 
bitation des espèces vivantes. 

Les mollusques qui accompagnent le calcaire supérieur , ap- 
partiennent presque tous aux genres des Hélix ou des Planorbes. 
Nous décrirons d'abord ces derniers. 

. 1°. Planorbis rotundatus? Brongniart, pl. +, fig. 4 et 5, va- 
riété a, ou Planorbis similis, de Daudebard de Férussac. Comme 
je n’ai observé que des moules de celte espèce, je n’oserais as- 
surer qu'ils appartinssent au Planorbe arrondi. Cependant nos 
Planorbes ayant bien leurs tours de spires arrondis et cylindriques, 
et ne diminuant que graduellement de grosseur , il est assez 
difficile de les rapporter à aucune autre espèce, et surtout au 
Planorbe corné, dont ils ne se rapprochent que par la taille 
et la grosseur. Mesurés dans la plus grande largeur, ces Pla- 
norbes ont jusqu'a 24 millimètres. 

2°. Planorbis prominens. Celte espèce seroit la même que le 
Planorbis cornu de Brongniart, si elle n'avoit pas ses quatre 
tours de spire bien complets, et si le dernier n’offroit pas une 
largeur telle, qu'a lui seul il forme presque la coquille. Enfin, 
notre fossile ne peut pas être le Planorbis prevostinus de Bron 
guiart, parce que ses tours sont déjà plus saillans que le cornu, 
tandis que ceux de ce dernier sont plus aplatis. Ce Planorbe 
ne peut, du reste, être confondu avec aucune autre espèce. 
Ses caractères principaux sont d’avoir quatre tours de spire com- 
plets et saillans, surtout le dernier qui, à cause de sa saillie 
et de sa grandeur, paroît comme envelopper tous les autres, 
Sa saillie est si considérable, que les autres tours quoique cy- 
lindriques et assez élevés, paroissent enfoncés et l'ombilic fort 
profond. Sa grandeur est de 5 millimètres. 

3°, Planorbis compressus. Celte espèce est remarquable par 
le grand aplatissement des tours de sa spire, et la grandeur du 
dernier. Cet aplatissement seroit-il dû à la position dans laquelle 
s'est trouvée cette coquille ? c’est ce qui pourroit être, sans que 
j'osasse cependant l’affirmer. Elle offre cinq tours de spire com- 
plets, et l'ombilic peu profond, Ces caractères, joints à sa 


X 2 


164 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
grandeur de 16 à 17 millimètres, empèchent de la confondre 
avec aucune autre. 

On trouve encore différentes espèces de Planorbes dans le cal- 
caire , mais ils ne sont pas assez bien conservés pour qu'onsoit sûr 
de l'espèce à laquelle ils appartiennent. J'ai cru cependant y 
reconnoitre, 4°. le Planorbis rotundatus de Daudebard , et 5°. le 
Planorbis cornu de Brongniart. Ce dernier se trouve également 
dans le calcaire supérieur. 

6°. Ancylus deperditus, Desmarest, Bulletin de la Société 
Philomathique, année 1814, pag. 19. Notre fossile a, comme 
celui décrit par M. Desmarest, son sommet beaucoup plus ex- 
centrique que celui des Æncylus fluviatilis et riparius. Sa hauteur 
est aussi bien moins considérable. Cette espèce est beaucoup 
moins alongée que l’Ancylus lacustris, et en diffère encore par 
son sommet moins élevé et sa plus petite taille. Quant à ce 
sommet, il est un peu acuminé et très-légèrement recourbé. 
Cette coquille est parfaitement lisse; sa forme générale est celle 
d'une ellipse dont le grand diamètre est de 5 millimètres, et le 
petit de 2 millimètres, en sorte que cette coquille n’est pas très- 
alongée. Ces caractères la rendent essentiellement différente de 
toutes les Ancyles connues, et c’est avec raison que M. Des- 
marest en a fait une espèce particulière. Il n’est pas également 
fondé à placer, à l'exemple de Draparnaud, parmi les Ancyles, 
une espèce que ce dernier a nommée Spina rosæ, Car celte-co= 
quille, vraiment bivalve, ne peut être classée parmi les Ancyles. 
La méprise vient de ce que les observateurs que nous venons 
de citer, n’ont connu et décrit qu’une seule des valves de celle 
coquille. 

7°. Le calcaire d’eau douce supérieur offre un grand nombre 
d'Hélices fossiles ; mais comme il ne reste plus que les moules 
brisés de la plupart de ces Hélices, ilest assez dificile d’en 
reconnoilre les espèces. J'en compterai cinq ou six, mais au- 
cune n’est assez bien conservée pour pouvoir être caractérisée 
d’une manière exacte, Je n’y ai encore observé d’enlière que 
V'Helix coquii de M Brongniart. Je remarquerai enfin , que parmi 
ces Hélices, il y en a plusieurs dont les dimensions sont au 
moins égales à celles de l'Æelix ramondi. 

Telles sont les différentes espèces de mollusques que lon ob- 
serve dans la formation d’eau douce de Montredon. Il paroîtroit, 
d’après la manière dont ces fossiles sont placés dans les deux 
sortes de calcaire de cette formation , que lors de la première préci- 
pilalion, il n’existoit pas encore surce point des espèces terrestres , 


2T D'HISTOIRE NATURELLE. 165 


celles-ci ne se trouvant en effet que dans les couches du 
calcaire supérieur. Le calcaire inférieur recèle, au contraire , 
un grand nombre d'espèces fluviatiles, et même de ces espèces 
que nous considérons comme intermédiaires entre celles qui 
vivent dans l’eau salée, et celles qui ne se plaisent que dans 
les eaux douces. Mais il est à remarquer que, quoiqu’on ne 
puisse pas douter que ces calcaires n'ont pas élé précipités à la 
même époque, il n'y a pas eu d'autres êtres existans entre le 
temps qui a pu s’écouler entre ces deux dépôts de couches cal- 
caires, aussi différentes par leur nature chimique que par l’espèce 
de fossiles qu’elles renferment. Enfin, ici comme dans les autres 
formations d'eau douce, les espèces fluviatiles, ou pour mieux 
dire , aquatiques, sont en nombre plus considérable que les ter- 
restres. Il est donc évident que les lacs, les étangs ou les fleuves 
ont été les causes immédiates du dépôt de ces êtres, qui ne 
pouvoient vivre que dans le sein des eaux; aussi l'étendue de 
la formation particulière que nous venons de décrire, est-elle 
en rapport avec celle de la vallée ou du bassin du Vidourle. 

Toutes ces circonstances réunies prouvent, ce me semble, 
que les calcaires de Montredon doivent être rapportés à la se- 
conde des formations d’eau douce, si bien décrite par MM. Cuvier 
et Brongniart, formation supérieure au calcaire marin grossier 
coquillier. Quoique je n’aie pu reconnoître ici d’une manière 
positive celle superposition, les couches du calcaire d’eau 
douce étant plus basses que le niveau du Vidourle, je suis 
d'autant plus porté à l’admettre, que les couches du calcaire 
marin exploité dans les carrières de Boisseron, baissent extré- 
mement dans la même direction. 


Quatrième formation d'Eau douce. 


J'ai annoncé qu'il existoit une formation d’eau douce éen- 
core plus moderne que celles déjà décrites. Cette formation 
est, ce me semble, le dernier dépôt de ce genre qui ait eu 
lieu sur le globe, puisque ce dépôt recouvre tous les autres 
terrains, et n’est recouvert que par le dernier sol d'alluvion. 
La quatrième formation d’eau douce se montre immédiatement 
superposée aux lerrains primitifs, comme aux calcaires de tous 
les âges. Quoique toujours superficielle, elle se trouve dans 
toutes les situalions , avec cette différence cependant, que dans 
les grands bassins, on la voit plutôt vers le sommet des col- 
lines et sur les grands plateaux, que dans le bas ou le fond 
des vallées, tandis qu'il en est tout le contraire dans les vallées 


166 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


profondes et resserrées. Dans ces sortes de vallées, elle est adossée 
aux formations de tous les âges, même les plus anciennes, aux- 
quelles elle est quelquefois superposée. Mais en général cette 
formalion ne paroit s'être déposée que d'une manière partielle 
et accidentelle ; aussi n’occupe-t-elle jamais un espace aussi étendu 
que les autres formations calcaires. On la voit s’interrompre 
brusquement, et se remontrer avec la même promptitude , sans 
que l’on puisse reconnoilre aucune loi bien précise sur ses re- 
tours et ses interruptions. 

J'ai déjà observé cette formation dont je viens d'indiquer les 
principaux Caractères dans un assez grand nombre de vallées; 
ainsi je l’ai reconnue, 1°. aux environs de Montpellier dans la 
vallée du Lez; 2°. dans deux points différens de la vallée de 
Y'Hérault, à Ganges et à Saint-Guillem-le-Désert; 5°. dans la 
vallée de Coudoulous près du bourg d'Avèze; 4°. dans la vallée 
d'Ares près du village de Las Font; 5°. dans la vallée du Gardon, 
entre Saint-Jean de Gardonenque et Anduze; 6°. dans la vallée 
du Lot, près de la ville même de Mende; 7°. dans la vallée 
de l’Ergue, près de Lodève ; 8. enfin, dans la vallée du Rhône, 
près de Lyon. 

La formation d’eau douce que nous avons dit exister dans 
la vallée du Lez, commence presqu'aux portes de Montpellier, 
et les fouilles que l’on a faites à un quart de lieue au nord-est 
de la ville, près la campagne Draparnaud, l'ont mise parfaite- 
ment à découvert. Cette formation succède, ou, pour mieux 
dire , est limitrophe vers le sud et à l'est, à la formation d'at- 
terrissement marin qui compose les envirous de Montpellier, 
formation caractérisée par des couches sableuses de la plus 
grande épaisseur, traversées dans une infinité de directions par 
des bancs coquilliers, principalement par des bancs d'Huitres. 
Le calcaire grossier coquillier eutoure, au contraire, celte for- 
malion au nord et à l’ouest; on remarque même que dans quel- 
ques points toujours dans la même direction, la formation d’eau 
douce est limitrophe au calcaire ancien, sur lequel elle est tantôt 
superposée , comme dans d’autres parties, au calcaire grossier 
coquillier. Dans toute la partie nord-est de la vallée du Lez, 
nommée la Plaine de Soret, on observe au-dessous de trois pieds 
d’une terre végétale rougeûtre, une couche fort épaisse d’un cal- 
caire jaunälre mélé assez intimement avec un calcaire rougeätre. 
C'est dans les masses de ce calcaire que l’on commence à trouver 
des fossiles; ce sont presque toujours des espèces terrestres, 
principalement des Hélices. Ces Hélices sont entiers, et leur test n’a 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 167 


perdu que ses couleurs. Quant aux espèces que l’on y observe , 
elles ne paroissent pas difiérer de celles qui existent encore au- 
jourd'hui sur notre sol. Ainsi, les //elix variabilis, neglecta et 
striata de Draparnaud abondent dans les couches calcaires ; elles 
n'ont pas éprouvé assez d'altération pour qu’on puisse douter de 
leur identité avec les espèces vivantes. 

En se dirigeant toujours vers le nord, et gagnant un peu à 
l'est vers les rives du Lez, on traverse un sol d’eau douce ca- 
ractérisé par les mêmes fossiles, au milieu desquels on observe 
en grande abondance le Cyclostoma elegans. Mais une fois qu’on 
a traversé Ja rivière, en se dirigeant vers le village de Castel- 
naud, on voit la formation d'eau douce s'élever tout à coup 
‘et former alors des collines, dont les unes ont une quarantaine 
.de toises et les autres environ soixante au-dessus du niveau de 
la rivière; c’est sur la principale de ces collines qu'est bäti le 
village de Castelnaud. Ces collines sont formées par un calcaire 
sédimentaire, ou tuf rempli de coquilles fossiles et d'empreintes 
de végétaux; eelte roche repose sur des lits d'Albâtre calcaire, 
ou de calcaire compacte d’eau douce. On voit dans la masse 
de ce dernier, un grand nombre de fossiles, maïs presque tou- 
jours et uniquement des Lymnées. Le test de ces coquilles a 
totalement disparu, et il ne reste plus aujourd'hui que les moules. 
Aussi est-il fort diflicile d’en déterminer les ‘espèces ; cependant 
j'en ai trouvé deux assez bien conservés pour pouvoir les rap- 
porter, lun au Lymnœus palustris, var. B. de Draparnaud, et 

‘autre au Lymnæus minutus. Ce calcaire compacté forme les 
dernières assises de la formation d'eau douce, qui repose, ainsi 
que nous l'avons déjà dit, tantôt sur le calcaire grossier et tantôt 
sur le calcaire assez analogue à celui du Jura, dans lequel on 
voit à peine ous fossiles, si ce n’est quelques ammonites. 
Enfin, dans de certaines parties de la colline de Castelnaud , 
les couches du calcaire d’eau douce caractérisé par la présence 
des Lymnées, alternent avec le calcaire sédimentaire ou tuf qui 
Offrant les mêmes fossiles, doit avoir eu la même origine. Evi- 
demment ces deux calcairesontdù être déposés à la même époque, 
puisqu'on voit leurs couches alterner les unes avec. les autrés. 
Quant au calcaire sédimentaire , il est aussi remarquable par le 
nombre et l'espèce de fossiles qu'il renferme, que par la ma- 
nière dont äl paroit avoir été formé: I} présente un si grand 
nombre d'empreintes de végétaux , que l'on doit naturellement 
supposer que $es molécules ont dû se déposer sur ces végétaux 
qui ayant totalement disparu, n’ont laissé que leurs empreintes. 


4 
68 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Mais ces empreintes sont souvent d'une dimension enorme ; 
ainsi dans plusieurs points de la colline de Castelnaud, on voit 
des moules de troncs d'arbres de la plus remarquable grosseur. Ces 
empreintes examinées avec soin, paroissent avoir été laissées 
par des Pins qui, comme l'on sait, ont l'écorce disposée en 
écailles ou par plaques, surtout lorsqu'ils sont vieux. Partout 
on observe ce calcaire traversé dans un infinité de directions 
différentes, par de pareils moules de végétaux, soit par des 
tiges, soit par des racines, dont l’intérieur est quelquefois formé 
par des couches calcaires concentriques, et d’autres fois se trouve 
entièrement vide. Le désordre qui existe dans les masses de ce 
tuf, presque toujours repliées de la manière la plus irrégulière 
el la plus sinueuse, annoncent que le liquide dans lequel il s’est 
déposé , devoit être violemment agité. Ce qui le prouve encore, 
c'est que les cavités qui existént entre les masses du tuf, sont 
remplies d’une sorte de poudingue calcaire composée de galets 
arrondis de la même nature, réunis par un ciment. C’est prin- 
cipalement auprès de la campagne Vialar, sur la rive droite du 
Lez et tout-à-fait sur la hauteur, qu'on observe ces poudingues 
-n'bancs plus ou moins étendus, qui ont l'air d’alterner avec 
Je calcaire sédimentaire, mais qui remplissent uniquement les 
cavilés laissées par ces calcaires après qu'ils ont été déposés. 
Et cependant au milieu de ces masses ainsi tourmentées, on 
trouve en grande abondance des coquilles fragiles très-bien con- 
servées, et n'ayant perdu en quelque sorte que leur couleur, 
dont quelques-unes même en couservent encore des traces. Ce 
qui surprend encore davantage, c'est que ces fossiles si dé- 
Jicats abondent dans les lieux où le désordre est le plus ma- 
nifeste; c'est surtout auprès-du cimetière du village de Castel- 
naud , que ce point de fait est le plus évident. Ainsi, dans cette 
partie, certaines couches sont parfaitement horizontales ; ce sont 
les plus inférieures : d’autres sont tellement tourmentées et fléchies, 
qu’elles semblent nous retracer encore les fluctuations du liquide 
qui les agiloit; enfin, par une irrégularité non moins remar- 
quable, on voit quelques-unes de ces couches complètement 
redressées , et ayant aujourd'hui une position parfaitement verti- 
cale, quoiqu'on ne puisse douter qu’elles aient été déposées 
dans une pareille position, à moins cependant que s'étant for- 
mé des vides entre les couches déjà déposées, cet espace ait 
été rempli après coup, ce qui peut se concevoir pour des ter- 
rains de sédiment. Il est permis de se l’imagmer dans cette 
circonstance, où les couches verticales sont parallèles, et placées 


de 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 169 


de distance en distance à peu près comme les pilicrs d’une 
porte. 

Si la position générale de ces couches ne paroït suivre au- 
cune loi, il en est de même de leur retour ou de leurs re- 
lations avec celles qui les accompagnent. Ainsi lorsqu'on quitte 
la formation d’attérissement marin sur laquelle est bâtie la ville 
de Montpellier, on trouve au-dessous de la terre végétale, le 
calcaire tendre rempli de coquilles terrestres, dont nous avons 
déjà fait connoître les espèces. Plus loin, et vers le grand che- 
min de Paris, on voit au-dessous de la terre végetale dont 
l'épaisseur est très-variable, le calcaire sédimentaire ou tuf, en 
couches puissantes, alterner de la manière la plus irrégulière 
avec des couches sableuses jaunätres et des galets calcaires. Ici 
le calcaire sédimentaire d’eau douce repose sur le calcaire gros- 
sier coquillier. Mais à un petit quart de lieue plus loin , et avant 
d’être au moulin de Castelnaud, un grand escarpement permet 
de reconnoitre un plus grand nombre de couches, ainsi que leur 
ordre de superposition. 

Au-dessous de la terre végétale, dont l'épaisseur n’est jamais 
au-delà de deux pieds, on observe une couche de tuf qui a 
environ six pieds de puissance. Ce tuf est traversé dans toutes 
sortes de directions , par des troncs et des tiges de diverses es- 
pèces d'arbres, dont il ne reste plus aujourd'hui que les moules 
ou les empreintes. On y voit également une grande quantité 
de feuilles, et cela dans toutes sortes de directions et de po 
sitions. Ce tuf paroît avoir été déposé d’une manière tranquille, 
car ses couches sont horizontales. 

Immédiatement après, vient une couche sablonneuse mêlée 
de cailloux calcaires roulés; ce sable, dont l'épaisseur n’a guère 
plus d’un pied, recouvre une marne calcaire endurcie, jau- 
nâtre, dont la puissance est égale à celle de la couche sableuse. 
Après celle marne, paroissent des couches d'argile plastique un 
peu calcarifère, renfermant des bois qui conservent une partie 
de leur tissu, n'ayant point encore passé à l’état de Lignites. 
Les uns sont compactes et noirälres, d’autres, au contraire, 
sont péuétrés d’oxide de fer, qui les colore en jaune-brun. Cette 
couche d'argile est en général fort puissante; elle a, en terme 
moyen, de 4 à 5 pieds. Au-dessous de cette argile, on observe 
un calcaire très-sablonneux et assez compacte, dont les couches 
ont environ cinq pieds. Enfin, on revoit le calcaire sédimen- 
taire reparoître, et faute d’excavations, je ne puis dire à quelle 
profondeur il parvient ni sur quelle couche il repose. 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Y 


170 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Une fois qu'on est auprès de la rivière du Lez , la formation 
d'eau douce s'étend parallèlement des deux côtés de la rivière 
et dans les deux directions opposées du nord et de l’est. Tout 
semble prouver que la rivière a creusé de préférence son lit 
dans celte formation, ces sortes de terrains étant plus atta- 
quables que ceux dont ils sont entourés. Aussi rongés et détruits 
facilement par les eaux, présentent-ils aujourd’hui des coupes 
perpendiculaires el abruptes des deux eôtés de la rivière, où 
les eaux ont miné la base de ces collines. 

J'ai déjà dit que les dépôts d'eau douce sur lesquels est bâti 
le village de Castelnaud, paroïssent avoir été laissés par un 
fluide violemment agité; et le désordre qui existe dans la po- 
silion des couches , l'annonce d’une manière aussi évidente que 
les rapports de ces couches entre elles. Ainsi, dans de certaines 
parlies, on voit de puissantes couches sableuses qui n'ont pas 
moins de douze pieds d'épaisseur, s'étendre sans interruption 
au-dessous de la terre végétale, tandis qu'ailleurs on les ob- 
serve par intervalles, comme déplacées de leur position pri- 
mitive, et mêlées confusément et sans ordre au milieu des cou- 
ches du calcaire sédimentaire. De même, tantôt ce calcaire reste 
compacte pendant un assez long intervalle, conservant tous ses 
caractères el contenant des bois fossile qui n’onl point encore passé 
à l'état de Lignite , et tantôt d’une manière très-brusque, ce cal- 
caire devient tendre et comme friable , sans qu'il y ait la moindre 
transition entre laltération de l’un et la compacité de l’autre. 
Dans ce dernier, les bois fossiles n’existent plus, et Fon n’en 
trouve que les moules et les empreintes. Mais outre ces 
bois fossiles, les deux calcaires d'eau douce, soit friable , soit 
compacte, sont remplis d'empreintes de fruits, de feuilles et 
d’autres débris de végétaux si peu altérés, que l’on reconnoît 
fort bien les genres auxquels ils ont appartenu, et quelquefois 
même les espèces. Dans de certaines parties, les couches de ce 
‘calcaire sédimentaire friable, sont tellement multipliées et ont 
si peu d'épaisseur, qu’elles ressemblent en quelque sorte aux 
feuillets d’un livre. Quant aux masses où aux couches solides 
de ce méme calcaire, elles out souvent jusqu'a dix ou quinze 
toises d'épaisseur; alors on les exploite avec beaucoup d’avan- 
tages, d'autant qu’elles réunissent une grande solidité à une ex- 
trème légereté. 

Enfin, l’ordre de superposition des couches qui appartiennent 
à celle formation, n'est pas toujours le même que celui dont 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 171 


nous avons déjà parlé; voici l’ordre des couches d'une coupe 
abrupte que l’on voit près de l’église de Castelnaud. 

1°. Terre végétale calcaire d’un pied et demi à deux pieds de 
puissance. 

2°. Argile calcarifère jaunâtre, friable où l'on commence à 
trouver des mollusques fossiles fluviatiles et terrestres, et dont 
l'épaisseur est de deux à trois pieds. 

5°. Calcaire sédimentaire rempli d'empreintes de tiges, de 
feuilles, de troncs et de fruits de divers végétaux, avec des co 
quilles fossiles, soit fluviaüles, soit lerrestres, mais en moindre 
quantilé que les débris de végétaux. L’épaisseur de ce calcaire, 
quoique trèes-variable, n’est jamais moindre de douze aquinze pieds: 

4. Argile calcarifere mêlée confusément avec le calcaire sé- 
dimentaire pulvérulent, renfermant beaucoup de coquilles fos- 
siles , et peu de débris de végétaux. Son épaisseur ne va guère 
au-dela de trois pieds. 

5°. Calcaire sédimentaire solide et compacte, formé en grande 
partie de débris de végétaux, contenant peu de coquilles fossiles. 
C'est dans cette couche que l’on observe les fruits les mieux 
conservés. L’épaisseur de ce calcaire est souvent de plus de 
cent pieds. 

6°. Albâtre calcaire grossier rubanné, d’un brun jaunètre, et 
composé de lames éclatantes. Dans les cavités qui se sont opérées 
entre les masses de cet albâtre , on en trouve souvent en ma- 
melons énormes qui annoncent qu'ils ont été déposés de la 
même manière que les autres Stalagmites. Quant à l'épaisseur 
des couches de cet albâtre, elle varie entre cinq et huit pieds. 

7°. Calcaire sédimentaire ou tuf compacte solide, à peu près 
le même que celui de la cinquième couche, et composé, comme 
lui, d'un grand nombre de débris de végétaux. L’épaisseur de 
cette couche est souvent bien grande, puisque dans quel- 
ques parties de la haute colline de Castelnaud , ce calcaire s'é- 
tend au-dessous du niveau de la rivière. Dans les parties où 
l’on peut reconnoître les couches sur lesquelles il repose, on le 
voit tantôt superposé au calcaire marin grossier coquillier , et 
tantôt au calcaire dur ancien ou calcaire à Ammouites. Enfin, 
il n’est pas inutile de remarquer qu'entre les interstices de ce 
calcaire, on observe une assez grande quantité de sulfate de 
chaux. Ce sulfate de chaux s'y présente sous la forme d’un 
duvet soyeux, ou en efllorescence d'un blanc éclatant. 

Il nous reste maintenant à faire connoître les espèces de fos- 
siles de cette formation d’eau douce. Ces fossiles appartiennent, 


Y 2 


372 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


les uns à des plantes, et les autres à des mollusques. Parmi 
les derniers, on en voit de terrestres et de fluviatiles. Les es= 
pèces que l’on peut reconnoitre parmi celles-ci sont : 

1°. Lymnœus ovatus de Draparnaud, avec de nombreuses va- 
riétés. 

2°. Lymnœus corvus. 

3°. Lymnœus palustris. 

4. Lymnœus nunutus. Ces Lymnées fossiles sont en général 
en très-grand nombre au milieu des masses de calcaire sédi- 
gmentaire, ou de couches argileuses. 

5°. S'uccinea amplhibia. 

G. Planorbis carinatus. 
7°. Planorbis marginatus. 

8. Cyclostoma impurum. 

9°. MNerita fluviatilis. 

10°. Cyclas fontinalis. Je n'ai encore trouvé qu’un seul in- 
dividu complet de cette Cyclade et une seule valve isolée, J'ai 
également observé au milieu de ce calcaire divers fragmens que 
Jon ne peut rapporter qu'a l'Unio pictorum. 

Parmi les espèces terrestres on y remarque, 

11°. Cyclostoma elegans. Cette coquille y est extrêmement 
commune , el peut-être y est-elle en plus grand nombre qu'au- 
œune aulre espèce. 


12°. Bulimus acutus. 20°. Helix cespitum. 
33°. Bulimus lubricus. 21°. Helix cinctella. 
14°. Bulimus decollatus. 29°. Helix limbata. 
35. Helix variabilis. 23°. Helix striata. 
16°. Helix rhodostoma. 24°. Helix obvolutæ 
17°. Helix nemoralis. 25. Helix lucida. 
18°. Helix vermiculata. 26°. Helix nitida. 
10°. Helix ericetorum. 27°. Helix rotunda. 


Parmi ces différentes espèces , 1] n’y en a aucune qui n'existe 
maintenant en France; mais parmi celles que l’on trouve fos- 
siles dans les environs de Montpellier, il en est plusieurs que 
l'on n’y rencontre plus vivantes. Ainsi l'Æelix nemoralis si com- 
mune à vingt lieues de nous, ne vit plus aujourd'hui sur notre 
sol; il en est de même des Âelix cinctella, limbata et obvoluta. 
Cependant elles ont dù vivre autrefois sur notre sol, puisqu'on 
les y trouve fossiles et en nombre assez considérable. 

Quant aux fragmens de végétaux que l’on observe dans le 
calcaire sédimentaire , ils appartiennent à plusieurs parties; on 
y reconnoît, 1°. des porlions de liber et d’écorce, 2°. des por 


ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 173 


tions de tiges, 3°. des feuilles, 4. des fruits. Parmi les nom- 
breuses empreintes de feuilles que recèle ce calcaire, on peut 
démèler quelques espèces ; ainsi les feuilles de vignes sont très- 
reconnoissables, et leur nombre est fort considérable. Les feuilles 
de laurier, de chène vert, de Nérium, d’orme et d’olivier, 
sont également assez bien conservées pour avoir peu de doute 
sur leur détermination. J'ai, du reste, consulté à cet égard 
mon savant collègue M. de Candolle, qui pense que l’on ne 
peut pas faire d’objection fondée à celui qui considéreroit ces 
empreintes comme ayant été laissées par les espèces dont nous 
venons de parler. Quant aux empreintes de fruits que l’on ob- 
serve dans ce calcaire, il afirmeroit avec plus d'assurance qu’elles 
ont dù se mouler sur les espèces auxquelles on est fondé à 
les rapporter. Le grand nombre d'empreintes de cônes de Pins 
que l’on rencontre dans ce calcaire, joint à ces énormes troncs 
près desquels ces fruits se trouvent , laissent d’autant moins de 
doute, que le fruit du Pin a une forme qu’il n’est guère pos- 
sible de confondre avec aucun autre genre de conifères. On 
trouve encore souvent dans les masses de ce tuf, un fruit à quatre 
valves ovales, concaves et aiguës. Dans leur intérieur, ces valves 
sont marquées par trois sillons profonds, et leur réunion pré- 
sente vers leur base, un cercle relevé vers l’intérieur du fruit. 
Quant à la grandeur de ces fruits fossiles, elle est la même 
que celle des fruits du Convoloulus arvensis. Quoique nos fos- 
siles se rapprochent assez du genre Convolvulus, ils me paroïissent 
différer de toutes les espèces connues par les sillons profondément 
imprimés dans l’mtérieur de leurs valves. Malgré cette différence 
évidente , M. Duhamel jeune, botaniste de Montpellier, connu par 
son excellente Dissertation sur les Solanum , n’est pas très-éloigné 
de regarder notre fossile comme ayant appartenu au Convol- 
vulus sepium. M. de Candolle , dont le suffrage dans ces sortes 
de matiere, est d’un bien grand poids, n'ose pas émettre une 
opinion aussi aflirmative, et paroit, au contraire, plus porté à 
regarder ces fruits fossiles comme n'ayant pas d'analogues très- 
évidens. Quant aux tiges si abondantes dans cette formation, 
on en reconnoît qui paroissent avoir appartenu à des plantes 
monocotylédones et dicotylédones. Parmi les premières, on y 
rencontre assez souvent des tiges d'AÆrundo. Enfin, on découvre 
aussi quelquefois entre les masses du caleaire friable , des em- 
preintes d'insectes, principalement des Aptères. Mais on ne 
peut guère déterminer le genre auquel ces empreintes appar- 
tiennent; une seule cependant m'a paru se rapproëher des Jules. 


174 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


D'après les faits que nous venons de rapporter, la formation 
d'eau douce de Castelnaud annonce qu'il doit y avoir eu des 
bouleversemens dans de certaines parties de nos couches, pos- 
térieurs à l'existence des espèces qui vivent aujourd'hui, soit 
dans nos couches, soit dans le bassin de nos lacs et de nos 
fleuves. Ces bouleversemens partiels, à la vérité, doivent être 
considérés, ce me semble, comme tous ceux qui ont englouti 
des êtres vivans. Si je ne décris ici aucun débris d'animal d’un 
ordre supérieur, c’est peut-être uniquement faute d'avoir pu 
faire les fouilles que leur recherche exigeroit. J'ai, en eflet, 
appris des paysans qu’en creusant profondément, ils avoient 
quelquefois rencontré des ossemens; mais comme personne ne 
m'en a montré, je ne puis rien dire de positif à cet égard. Quoi 
qu'il en soit, cette formation doit être distinguée de celles déja 
décrites, d'autant qu’elle n’est point accidentelle aux environs 
de Montpellier, et que ses caractères sont aussi tranchés que con- 
stans. Ainsi, pour nous, la formation des Lignites seroit la plus 
ancienne des formalions d'eau douce. Celle qui, recouvrant le 
calcaire marin grossier ou à Cérithes, se compose de gypse à 
ossemens et de marnes calcaires blanches, seroit la seconde. 
Quant à la troisième, elle est fort bien caractérisée par la pré- 
sence des silex et du calcaire, ou bien lorsque les silex man- 
quent , par le mélange du calcaire siliceux et du calcaire po- 
reux, ainsi que par les fossiles d'eau douce qu'elle renferme. 
Ces fossiles, tous ou presque tous semblables pour les genres 
à ceux que nous connoissons vivans, sont aussi presque toujours 
différens des espèces qui vivent encore aujourd'hui sur notre 
globe. Les couches ou les formalions marines subordonnées à 
cette troisième formation d’eau douce, servent encore à la faire 
reconnoître. Quant à la dernière formation , les fossiles sem- 
blables pour les espèces à celles qui vivent maintenant , et la 
nature même du calcaire qui la compose, la caractérisent assez 
pour qu’on ne puisse pas la confondre avec les autres forma- 
tions d’eau douce d'une date plus ancienne. 

La quatrième formation d’eau douce se rencontre avec les 
mêmes caractères et presque les mêmes circonslances, dans deux 
points de la vallée de l'Hérault, près de Gange et de Saint- 
Guillem-le-Désert. Les couches du calcaire sédimentaire y sont 
moins tourmentées, mais également remplies d'empreintes de 
végétaux et de coquilles fluviatiles ou terrestres. Comme c’est 
toujours les mêmes espèces, nous ne les nommerons pas de 
nouveau. Dans ces deux localités, la formation d'eau douce im- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 179 


mediatement superposée au calcaire ancien, ne s'élève pas au 
dessus du niveau de la rivière de plus de deux cents pieds. 
Quant à cette même formation que l’on observe dans la vallée 
de Coudoulous, près du bourg d'Avèze, dans le département du 
Gard, elle est remarquable en ce qu’elle repose sur les schistes 
argileux , et qu’elle se trouve isolée au milieu d’un sol ancien. 
Elle reste ici constamment dans la vallée, formant au-dessus 
de son niveau des collines peu élevées, dont les plus hautes 
n'ont guère plus de soixante toises. Ces collines ont cela de com- 
mun avec les autres collines calcaires, d’avoir leurs sommets 
aplatis et disposés en vastes plateaux. Le pourlour de cette for- 
mation peut avoir au plus deux lieues. Quant au calcaire sédi- 
mentaire de celte vallée, il est généralement compacte et con- 
tenant peu de débris de végétaux. Il alterne souvent avec des 
couches de marne calcaire, d'argile plastique et de sable, et 
cela dans le même ordre que le calcaire sédimentaire de Cas- 
telnaud. Je n’y ai vu que des Lymnées et des Helices fossiles. 
On retrouve également cette même formation dans la vallée 
calcaire d’Arres, qui forme comme un angle droit avec celle 
de Coudoulous. Ici la formation d’eau douce repose, non sur 
le schiste, mais bien sur le calcaire à Ammoñites, el se pro- 
longe parallèlement sur les deux côtés de la pelite rivière d’Arres, 
pendant un espace d'environ deux petites lieues. Peut - être 
s’étend-elle encore plus loin, ce que je ne puis dire, ne l'ayant 
pas suivie au-delà. Mais ici elle ne forme pas des collines par- 
ticulières, comme dans la vallée de Coudoulous, et probable- 
ment à cause du resserrement de la vallée d’Arres, qui se trouve 
bordée par des montagnes calcaires escarpées, dont l'élévation 
au-dessus du niveau de la rivière, se maintient constamment 
au-delà de deux cents toises. Cette formation d’eau douce est 
ici presque uniquement composée par un calcaire sédimentaire 
compacte, où l'on voit peu de débris de végétaux et de co- 
quilles fossiles. J'y ai observé une Hélice de la grosseur de la 
Némorale, qui me paroit nouvelle, mais dont je n'ose donner 
la description, les individus que je possède étant très-dégradés. 
Quant aux autres espèces , elles ne diffèrent pas de celles dont 
nous avons déjà donné la liste, en parlant de la formation d'eau 
douce. Je remarquerai seulement en passant, que l'Helix cris- 
tallina est assez commune dans le calcaire de Las Fons. 

J'ai encore rétrouvé la quatrième formation d’eau douce dans 
trois autres vallées des Cévennes. On la voit surlout bien ca- 
yactérisée dans la vallée du Gardon, entre Saint-Jean de Gar- 


+76 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


donenque et Anduze. Le calcaire sédimentaire y alterne avec 
uve argile plastique rougeätre , qui est exploitée par les paysans. 
Le calcaire d'eau douce est ici superposé au calcaire ancien, 
étant comme adossé aux coupes perpendiculaires et abruptes, 
que présente cette roche des deux côtés de la rivière de Gardon. 
Aussi, le calcaire d'eau douce n’y a-t-il pas une grande élé- 
vation, et il ne monte guère au-delà de deux cents pieds au- 
dessus du niveau de la rivière. Cette roche alternant , ainsi que 
nous l’avons déja dit, avec des couches puissantes d'argile for- 
tement colorée, est recouverte par intervalles par des poudingues 
calcaires, restes d'anciennes alluvions; ces poudingues sont eux= 
mêmes revêtus par la terre végétale, mais d’une très-petite 
épaisseur. C’est dans cette seule localité que j'ai observé l'Æelix 
algtra fossile au milieu des autres espèces, soit terrestres, soit 
fluviatiles dont j'ai déjà fait connoître les noms. 

Cette même formation se montre avec ses caractères distinctifs 
dans plusieurs points de la vallée du Lot, mais surtout auprès 
de la ville de Mende, où elle est entourée par des montagnes 
de calcaire ancien, caractérisé par la présence des Bélemnites 
et des Ammonites. C’est principalement dans le lieu nommé 
Lavabre , où la formation d'eau douce est la plus prononcée. On 
y reconnoît un ordre de superposition à peu près semblable à 
celui que nous avons déjà indiqué. Ainsi, au-dessous de la terre 
végétale et du sol d’alluvion dont l'épaisseur est fort considé- 
rable, on voit un calcaire sédimentaire un peu friable, d’un 
jaune päle, rempli d'empreintes de végétaux , et contenant quel- 
ques coquilles fossiles. Au-dessous de ce calcaire, paroissent les 
marnes calcaires superposées à une argile plastique rougeätre, 
qui recouvre enfin uu calcaire sédimentaire coloré de la même 
manière par des oxides de fer. Ce dernier a une grande épais- 
seur el repose sur le calcaire ancien à Ammowuites. Du reste, 
cette formation d’eau douce n'offre ici ni une grande étendue 
ni une grande élévation. Elle ne paroit pas s'étendre à plus 
d’une lieue; à la vérité souvent interrompue, elle se rencontre 
dans d’autres parties de la vallée du Lot, n'abandonnant jamais 
les terrains calcaires. Nous remarquerons enfin, que plusieurs 
des fossiles particuliers à cette formation, ne se trouvent plus 
maintenant vivans dans les environs de Mende; tel est entre 
autres Je Cyclostoma truncatulum. Quant aux Crclostoma impu- 
rum, Bulimus lubricus, acicula, et aux Helix carthusiana, striata, 
cristallina, vivant encore dans le département de la Lozère, il 
n’y a rien d'étonnant à les y voir fossiles, comme à y observer 


de 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 177 


de nombreuses empreintes de feuilles du Æagus sylvatica. J'ai 
encore rencontré dans le même lieu, une Hélice fossile de la 
grosseur du Ramondi qui me paroîtroit nouvelle; mais comme 
elle n’est pas entière, je n’ose en hasarder la description. 
Les vallées de l’Ergue et du Brez , près Lodève, m'ontencore 
présenté la dernière ou quatrième formation d’eau douce. Le 
point central de ce nouveau gissement est la colline de Soubez, 
sur laquelle se trouve bâtie le village qui porte le même nom. 
Elle commence à trois quarts de lieue au nord de Lodève, après 
les carrières de grès. Cette formation, recouverte seulement dans 
le bas de la vallée par les alluvions de la plaine, se prolonge 
vers le nord d’une manière fort irrégulière, en suivant par in- 
tervalles les bords de la rivière de l’Ergue et du Brez. Mais dans 
les parties où les dépôts d’eau douce ont été beaucoup plus 
considérables, ils ont formé diverses collines qui s'élèvent plus 
ou moins au-dessus du niveau de la plaine. La plus haute de 
ces collines peut avoir de soixante à soixante-dix toises, et il 
est à remarquer que toutes sont couronnées par un plateau uni 
et d’une assez grande étendue. Le calcaire sédimentaire dans 
l'ordre de superposition , est semblable à celui que nous avons 
déjà indiqué ; il offre ici cette particularité remarquable, que ses 
masses les plus supérieures semblent n'avoir pas été déposées 
d’une manière horizontale et successive, comme toutes les autres 
couches, mais en quelque sorte à la manière des Stalactites. 
Toutes les portions que l’on en détache ont une forme si con- 
slamment pyramidale, qu'il est difficile de ne pas avoir cette 
idée, quoique certainement il n’en a pas élé ainsi. Ces calcaires 
recèlent un grand nombre de débris de vépeune, mais peu de 
ces débris sont reconnoissables. En grand comme en petit, 
ils offrent entre leurs masses de nombreuses cavités dont la 
partie supérieure présente comme des Slalactites. Aussi ces ca- 
vités, lorsqu'elles sont un peu grandes, ont un aspect lrès- 
pittoresque, et les curieux s’empressent de recueillir les masses 
les plus bizarres qu'offre leur intérieur. Du reste , cette forma- 
tion est si étendue, que les calcaires d'eau douce qui en font 
partie, sont exploités avec avantage, réunissant une grande 
solidité à une extrême légèreté. Les maisons de Soubez en sont 
presque toutes bâties, et la route de Lodève au Vigan en est en 
Maude partie pavée. Ainsi , les deux rives et les vallées de l'Ergue 
et du Brez, appartiennent à cetle formalion, qui s'étend dans 
la première de ces vallées jusqu’à l'Escalette, dans un espace 
d'environ trois lieues ,et dans la Pa au nord jusqu'a laRoque, 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Z 


‘ 


178 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

et à l'est jusqu'à Notre-Dame-de-Parlages, comprenant ainsi 
une étendue un peu plus considérable. Quant aux fossiles que 
l'on observe dans ce calcaire, ils ne diffèrent pas en général 
des espèces que nous avons dejà décrites, mais on remarque 
que les petites espèces y sont plus abondantes. 

Nous pourrions ajouter aux diverses localités dont nous venons 
de parler, celle de Nant sur le Durson dans le département 
de l'Aveyron ; mais comme nous n’avons pas reconnu par nous- 
même ce gissement, nous en dirons peu de chose, quoiqu'on 
nous ait annoncé que la formation d’eau douce ÿ étloit accom- 
pagnée de fossiles qui avoient appartenu à de grands animaux. 
Nous attendons pour donner quelques détails à cet égard, que nous 
ayons vérifié ces faits. Quant à la formation d’eau douce que nous 
avons sigualée dans la vallée du Rhône, pres de Lyon, et sur 
le chemin qui conduit à la Carette , nous nous bornerons à faire 
remarquer ‘qu'elle doit être rapportée à la quatrième époque, 
En effet, les fossiles que l’on y rencontre sont semblables aux 
espèces actuellement vivantes, et dès-lors elles doivent avoir 
été englouties à une époque postérieure à l’existence des mol- 
lusques que nous trouvons aujourd'hui sur notre sol. Du reste, 
ayant publié depuis long-temps les détails qui ont rapport à 
celle formation, nous n'y reviendront pas de nouveau. 


EE — 


RECHERCHES ANATOMIQUES 


Sur les Scozres et sur quelques autres Insectes hymé- 
noptères ; 


Par Lion DUFOUR, 
D. M., Correspondant de la Société Philomathique de Paris. 


LA prodigieuse variété des insectes hyménoptères , l’histoire 
curieuse de leurs mœurs et de leurs métamorphoses, l’admi- 
rable industrie qui leur est plus particulièrement échue en par- 
tage, rendent l'étude de cette classe l’une des plus intéressantes 
de l'Entomologie. Quoiqu'illustrée par les savantes observations 
et les recherches multipliées de Réaumur, de Swammerdam, de 
Latreille, de Jurine, etc., combien n’avons nous pas encore 
à acquérir, soit pour la connoissance de la structure anatomique 


N 
ET D'HISTOIRE NATURELLE. 179 
des diverses familles qui la composent , soit pour l’exacte ap- 
préciation des signes extérieurs qui caractérisent les sexes, soit 
enfin pour la détermination rigoureuse des genres et des es- 
pèces? En attendant que de nouvelles dissections me mettent 
à même de faire hommage à la Science d’un travail anatomique 
plus complet, je vais exposer succinctement le résultat de mes re- 
cherches sur quelques Hyménoptères, et plus en particulier sur les 
Scolies. Je m'étois d'abord proposé d'accompagner cet opuscule 
du signalement des différentes espèces de ce dernier genre que 
j'ai rencontrées en Espagne, mais je réserve ces descriptions pour 
un autre temps. 

La Scolie des jardins (Scolia hortorum, Latr.) est la seule es- 
pèce que j'aie disséquée. Cet insecte, l’un des plus grands Hymé- 
nopières d'Europe , est fréquent aux environs de Valence en 
Espagne, où j'ai fait mes observations en 1812 et 18135. La 
phrase suivante suflira pour exprimer ses traits les plus carac- 
terisliques. 

Atra, hirsuta, maxima; antennis, in utroque sexu, totis nigris; 
abdominis segmento 2°—3° que maculis 2 dorsalibus magnis, haud 
rard coadunatis, flavis ; alis rufescentibus apice latè violaceo- 
cœruleis ; capite, in fæmina lantum, supra antennas flavo -ru- 
fescente. 

Cette Scolie, ainsi que toutes celles du même genre, se plait 
dans les expositions très-chaudes, et recherche particulièrement 
les fleurs des plantes à odeur forte , telles que celles de Rue, 
d’Aïl, de Psoralier, etc. Le mäle, dont je joins ici la figure 
(vor. fig. 1), a de 14 à 15 lignes de longueur. La femelle, que 
Villers a représentée à la pl. 8, fig. 15, en la rapportant à la 
Scolia flavifrons, Fabr., en acquiert jusqu'a 18. 

Nous allons examiner dans autant de chapitres distincts, 1°. le 
système nerveux; 2°. l'organe de la respiration ; 30. celui de la 
digestion ; 4°. celui de la génération ; 5°. enfin, l'appareil destiné 
à la sécrétion et à l’excrétion du venin. Il eût fallu , pour le com- 
plément de ces recherches anatomiques, parler aussi de l’organe 
circulatoire ; mais l'impossibilité où je me suis trouvé, de mettre 
en evidence le vaisseau dorsal et ses dépendances, par le secours 
des injections, me réduit à un silence absolu sur ce point. 


CHAPITRE PREMIER. 
Système nerveux. 
(Fig. 2.) Placé le long de la ligne médiane du corps de l’in- 
Z 2 


180 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


secte, tout-àa-fait au-dessous des autres organes, dont il est séparé; 
dans la cavité abdominale, par une toile mince, membrano- 
musculeuse, il consiste en un cordon principal formé de l’ados- 
sement de deux nerfs contigus, mais bien distincts et en gan- 

lions. Ceux-ci, au nombre de sept, dont cinq sont renfermés 

ans l’abdomen, émettent chacun trois nerfs, savoir, deux late- 
raux et un postérieur récurrent. Les deux ganglions qui Ller- 
minent en arrière le cordon sont très-rapproches, presque con- 
fondus. Le dernier, sensiblement plus grand que celui qui le 
précède, fournit plusieurs filets divergens, dont la distribution 
est principalement réservée aux organes de la génération. Une 
trachée assez forte accompagne de chaque côté le tronc du sys- 
tème nerveux. 

L’extrème difliculté de la dissection ne m'a point permis de 
voir l’origine de celui-ci à la tête. 


CHAPITRE II. 
Organe de la respiration. 


1°. Stigmates. Les thorachiques sont au nombre de deux seu 
lement, situés, un de chaque côté, derrière l'insertion des ailes, 
sur celle portion du corcelet appelée mnétathorax par quelques 
entomologistes ; ils sont étroits, transversaux, bilabiés. 

Les abdominaux s'ouvrent le long des côtés des segmens dor- 
saux de l'abdomen, par un pertuis bien moins alongé que ceux 
du corcelet, et placé dans une petite dépression ovale. Il y en 
a une paire pour chaque segment. Ceux des deux premiers an- 
neaux sont habituellement à découvert sur la surface pointillée 
et hérissée de ceux-ci, tandis que les suivans occupent la portion 
de ces segmens qui est lisse, glabre et recouverte par la pièce 
qui précède. 

2°. T'rachées. Ainsi que celles de tous les Hyménoptères dont 
j'ai étudié l'anatomie, elles ont un degré de plus de perfection 
que dans d’autres classes d'insectes. Au lieu d’être uniquement 
constituées par des vaisseaux cylindroïdes et élastiques, qui dé- 
croissent de diamètre par leurs divisions successives, elles offrent 
des dilatalions constantes, des veésicules bien déterminées, fa- 
vorables à un séjour plus ou moins prolongé de l'air, susceptibles 
de se distendre ou de s’affaisser suivant la quantité de fluide 
qu'elles admettent. De chaque côté de la base de l'abdomen, 
se voit une de ces vésicules, grande, ovale, oblongue , d’un 
blanc mat lacté, dont la périphérie émet ca et là des faisseaux 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 118 


rayonnans de trachées vasculaires, qui vont se distribuer aux 
organes voisins. En pénétrant dans le corcelet, elle s’étrangle, 
se dilate de nouveau, el dégénère insensiblement en un tube 
dont les subdivisions se perdent dans la tête. 

En arrière de ces deux vésicules abdominales, l'organe res- 
piraloire se continue en deux tubes filiformes qui fournissent 
une infinité d’arbuscules aériens, et deviennent confluens vers 
l'anus , pour se ramifier ensuite et éluder toutes les recherches. 

Telles sont les trachées dans la Scolie. Elles ont absolument 
la même conformation dans l’4beille commune , d'après l'obser- 
vation de Swammerdam et la mienne. Je les ai trouvées en tout 
semblables dans l'Anthidium florentinum et le Polistes gallica. 
La Xylocope perce bois et les Bombus offrent cette seule dif- 
férence, que les deux grandes vésicules abdominales ont cha- 
cune à leur surface supérieure et antérieure, un corps cylin- 
drique , grisätre, élastique, qui, dansla Xylocope, est intimement 
adhérent dans toute sa longueur, tandis qu'il est libre dans le 
Bombus. Cette espèce de trachée-artère, qui se dirige vers l’in- 
sertion des ailes et qui aboulit peut-être au stigmate thorachique, 
n’est pas sans doute étrangère à la production du bourdonnement, 
puisque celui-ci peut avoir lieu même après la soustraction com- 
plète des ailes. 

CHAPITRE III. 


Organes de la digestion. 


1°, Epiploon. Cet organe, bien apparent dans beaucoup d’in- 
sectes , notamment dans les Coléopteres à étuis soudés, ou dont 
le genre de vie est peu actif, consiste dans la Scolie comme 
dans la plupart des Hyménopières, en petites granulations adi- 
peuses rares, tantôt collées sur les muscles des parois ventrales, 
tantôt soutenues par un lacis de trachées capillaires. 

Dans la Xylocope, ces granulalions m'ont paru vesiculeuses, 
et en les crevant il s’échappa une liqueur d’un blanc azuré. Cette 
observation a besoin d’être répétée. 

2°. Vaisseaux hépatiques. Ce sont des tubes filiformes, au 
nombre d’une vingtaine environ, blanchätres ou jaunâtres, sim- 
ples, c’est-à-dire nullement rameux, plus longs que le corps, 
repliés, entorlillés , insérés autour du bourrelet qui termine le 
second estomac. 

3°. Tube alimentaire. Sa longueur n’excède pas deux fois celle 
de tout le corps de l’insecte. Quelques trachées étalent à sa 
surface leurs ramifications nacrées, et servent à la maintenir 


182 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE! CHIMIE 


daus sa position. L’æsophage sous la forme d’un tube très-délié, 
se dilate après le corcelet en un premier estomac membraneux , 
demi-translucide , plus ou moins ovoïde, lisse à l'extérieur. Le 
second estomac, essentiellement musculeux, séparé du premier 
par un élranglement qui est le siége d'une valvule pylorique, 
est alongé, cylindriqué ou conoïde, contourné sur lui-même, 
formé de bandelettes transversales plus ou moins saillantes , 
suivant l'état de contraction de l'organe. Indépendamment de 
ces rides annulaires , il est hérissé de papilles d'une brièveté ex- 
trème, que la loupe seule rend sensibles. La valvule pylorique 
dont je viens de parler, devient très-apparente , lors de la va- 
cuité du, premier estomac, et a la forme d’un bouton saillant 
marqué d'une: fente cruciale. Le second estomac se termine 
postérieurement par un bourrelet où s’insèrent les vaisseaux hé- 
patiques. L’intestin brusquement distinct: de ce dernier, est 
gréle, filiforme, lisse, glâbre, flexueux , un peu plus court que 
daus d'autres Hyménoptères: Avant de se terminersà l'anus par 
un rectum, ayant à peine une ligne de longueur ; il offre une 
dilatation, plus ou moins marquée, un: cœcum qui renferme les 
excrémens, et dont la longueur est parcourue par six rubans 
musculeux, tantôt presque effacés, tantôt déterminant des can- 
nelures profondes. j 

Le tube alimentaire a la même forme, la même structure 
dans l’4beille, le Poliste, l'Anthidie , le Bombus, excepté que 
dans ce dernier l'intestin proprement dit est plus long et forme 
deux circonvolutions sur, lui-même. 

Dans la Xylocope, le cϾcum offre une organisation toute par- 
ticulière. On aperçoit à sa surface six espaces, ovales irréguliè- 
rement, placés, formés par une, membrane diaphane, vitrée, 
tantôt plane ou déprimée , tantôt convexe. Leur contour offre 
un léger rebord ou,cerceau brunätre qui, à la vue, semble car- 
tilagineux. Ces espaces vitrés sont, je le présume, les points d’atla- 
Che d'autant.de muscles qui croisent en divers sens la largeur du 
cœcum, à peu près comme les cordes musculeuses qui,. dans 
les Scorpions et les Araignées; traversent de part en part le foie, 
en se fixant aux: parois supérieures etinférieures de l’abdomen (1). 
Je n’ai pas eu, l’occasion de constater l'existence de ces muscles 
dans la Xylocope; mais voici sur quelles raisons je fonde ma 


(1) oyez Mém. anatom. sur le Scorpion roussâtre ;. etc., Journal de Phy+ 
nee juin 1817. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 183 
présomption. Lorsqu'on saisit cet insecte, il fait jaillir au loin, 
par l'anus, une liqueur excrémentitielle jaunâtre, assez abon- 
dante, ce qui suppose une contraction prompte et énergique 
du réservoir de celte liqueur. Cette faculté d’une émission fécale, 
au gré de l'animal, ne s’est point offerte à mon observation 
dans les Hyménoptères cités plus haut. Je remarque aussi que le 
cœcum dans la Xylocope soumise vivante à la dissection , est 
susceptible d’une contractilité bien plus forte, bien plus variée 
que les autres portions du tube alimentaire. Lorsque cet organe 
est vide et resserré sur lui-même, on y voit des plicatures 
irrégulières. 

CHAPITRE IV. 


Organes de la génération. 


Avant d'entrer en matière, je ferai une observation générale. 
De tous les organes internes des insectes, ceux qui président 
aux fonctions génératrices présentent les différences les plus 
variées; et si l'on vouloit établir une classification fondée sur 
l'Anatomie, ils fourniroient les caractères les plus solides pour 
la formation des genres. Les dissections assez nombreuses aux- 
quelles je me suis livré jusqu’à ce jour, témoignent admira- 
blement en faveur des divisions génériques de Latreille, et con- 
firment le tact exquis de ce savant Académicien. 


Arr. |. Organes générateurs mâles. 


Un corps plus gréle et infiniment moins robuste , une petite 
tête ronde, des mandibules courtes, des antennes longues et 
droites, l'absence d’un aiguillon rétractile à l’anus, le dernier 
segment de l'abdomen fortement triscupide, tels sont les ca- 
ractères extérieurs qui distinguent les Scolies mäles des femelles. 

Les organes mäles de la génération peuvent étre divisés en 
ceux qui servent à la préparation, à l'élaboration du sperme, 
et en ceux qui sont destinés à l'acte de l4 copulation. 

1°. Organes préparateurs. — ls comprennent les testicules et 
les vesicules séminales. 

a. Testicules.— Ces organes sont, ainsi que les vésicules sé- 
minales, placés dans l’anse de la partie inférieure du second 
estomac, où un lacis de trachées et de vaisseaux hépatiques 
les maintient comme agglomérés. Chacun d’eux est un corps 
plus ou moins arrondi, formé par les nombreux replis d’un 
seul vaisseau spermatique fort delié. Il est muni d’un canal dé- 


184 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Jférent très-court, qui n’est que la continuation de ce vaisseau, 
et qui s'abouche au côté interne de la vésicule correspondante. 

b. Vésicules séminales. — Elles sont au nombre de deux, 
plus grandes que les testicules eux-mêmes, constituées cha- 
cune par un corps ovoide oblong, dégénérant postérieurement 
en un pédicule tubuleux, et rempli d’une liqueur spermatique 
transparente ou blanchätre, suivant son degré d'élaboration. Les 
deux vésicules aboutissent en arrière à un conduit spermatique 
commun qui s'enfonce dans l’armure de la verge. 

L'organe préparateur mäle de la génération, nous a offert, 
dans d’autres Hyménoptères, des différences de forme très-re- 
marquables. 

Dans la Xylocope, chacun des testicules, ou du moins l'or- 
gane que je considère comme tel, se présente sous la forme 
d'un petit corps ovale vésiculeux, logé tout-à-fait à la base de 
l'abdomen, terminé en arrière par un canal déférent, long, 
capillaire, droit, qui, immédiatement avant de s’aboucher au 
bord interne de la vésicule séminale, offre brusquement un ren- 
flement sphéroïdal. Ce testicule ne résulte point de l’entortil- 
Jlément d’un seul vaisseau spermatique comme dans la Scolie, 
ni de tubes ou de boyaux agglomérés comme dans le Bombus. 
Mes dissections me l'ont représenté comme une capsule membra- 
neuse, rémplie d’un sperme diaphane , et dont l'axe est occupé 
par un tube unique. Celui-ci, lorsqu'il est dégagé de son en- 
veloppe, est un peu plus long que sa capsule , ce qui autorise à 
penser qu’il éloit, avant celte opération, fléchi sur lui-même. 

Les vésicules séminales de la Xy/ocope sont oblongues, cy- 
lindroïdes , obtuses à leur extrémité libre, et se terminent en 
arrière comme dans la Scolie. 

Dans le Bombus, chaque testicule est essentiellement composé 
de quatre boyaux agglomérés , confluens à leur base qui est 
reuflée, et se terminant du côté opposé par autant de filamens 
capillaires. Le canal déférent est très-entortillé. Les vésicules 
séminales ont la forme de longues massues, faisant une circon- 
volution sur elles-mêmes. 

Dans l’Anthidie, au lieu de deux testicules distincts et sé- 
parés, je n’en observe qu’un seul assez gros, presque globuleux, 
revêtu d'une sorte de scrotun mince, lisse, d’un jaune päle, 
qui recoit de chaque côté deux branches trachéennes assez fortes. 
Dégagé de cette enveloppe, le testicule se déroule en deux vais- 
Seaux spermaliques qui se continuent hors de la capsule en 
deux canaux déférens déliés, droits, entre lesquels s'engage le 

tube 


m/s 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 185 


tube intestinal. Les vésicules séminales sont filiformes, retour- 
nées en spirale, et se terminent par un conduit commun qui, 
avant de s’enfoncer sous le rectum, offre un renflement bien 
distinct. 

2°. Organes copulateurs. — La verge de la Scolie ne s’est pas 
plus offerte à mon observation que celle des autres Hyménop- 
tères , et cet organe ne sauroit être mis bien à decouvert, même 
dans les plus grands insectes, hors de l'acte de la copulation. 
Je ne peux donc parler que des pièces plus où moins cornées 
qui recèlent la verge, où qui favorisent son intromission dans 
Ja vulve. Ces pièces, dont l'ensemble constitue l’armure, sont 
figurées avec l'appareil générateur, et je me bornerai, pour le 
moment, à renvoyer le lecteur à l'explication de la planche. 


Arr. IL. Organes générateurs femelles. 


1°. Organes préparateurs. 

a. Tubes ovigères. — Il n'y en a que trois de chaque côté. 
Ce sont des boyaux membraneux, diaphanes, alongés, conoïdes, 
très-eflilés par leurs extrémités antérieures. Celles-ci convergent 
de part et d'autre pour se fixer toutes six ensemble à un liga- 
ment capillaire, dont le point d'attache paroît être vers le milieu 
de l'intérieur du corcelet. Le tube alimentaire s'engage dans 
anse qui résulte de cette convergence. Ces boyaux sont mar- 
qués d’étranglemens successifs, dont les intervalles, d'autant 
plus grands qu'ils sont plus postérieurs , renferment les germes 
des œufs. : 

Chacun des faisceaux qui est conslitué par trois tubes ovi- 
gères, aboutit en arrière à un conduit un peu renflé, destiné 
à recevoir les œufs parvenus à lerme, et ces deux conduits 
propres se confondent en un oviductus commun, qui s'enfonce 
sous le rectum et transmet les œufs au dehors à l'époque de 
la ponte. 

Le Polistes gallica ne m'a offert que deux tubes ovigères 
pour chaque ovaire. L’Anthidie en a trois. La XYylocope el le 
Bombus en ont quatre. Dans l’Æbeille commune ouvrière, qui 
n’est qu’une femelle stérile et non un eunuque naturel, comme 
le dit Swammerdam, les tubes ovigères sont confondus, en quel- 
que sorte desséchés, et n'existent que comme des vesliges. 

Observ. Dans les individus de la Xy/ocope, considérés géné- 
ralement comme des femelles, j'ai observé, ainsi que dans plu- 
sieurs Bombus du sexe féminin, que un ou deux des tubes 
ovigères, toujours les supérieurs, étoient bien plus développés 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Aa 


86 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE - 


que les autres, ‘et en grande partie remplis par une matière 
d'apparence sébacée, formant un corps cylindrique d'un volume 
fort supérieur à celui d'un œuf, et d’une nature très-différente 
de celui-ci. Ge sont sans doute des germes inféconds, des espèces 
de moles. 

b. Je ne sais trop sous quel nom désigner un organe qui se 
rattache évidemment à l'appareil générateur de la femelle, et 
que j'ai rencontré dans tous les Hyménoptères soumis à mon 
scalpel. Swammerdam l’a décrit et figuré, en parlant de l’ana- 
tomie de l’Abeille. 11 dit que c’est un sac sphérique daus ce 
dernier insecte, pyriforme dans la Guêpe, destiné à fournir 
une malière visqueuse qui enduit les œufs lors du passage de 
ceux-ci dans l’oviductus. Dans la Scolie, le Bombus, la Xylo- 
cope, j'ai trouvé que ce sac éloit un tube long, cylindroïde, 
fermé par son bout flottant (1). Il s'abouche dans l’oviductus 
où tronc commun des tubes ovigères. Le savant auteur du B1- 
blia Naturæ, parle de deux vaisseaux aveugles qui versent dans 
cette bourse le produit de leur sécrétion. Ils ont échappé à mes 
recherches jusqu'à ce jour. 

2°. Organes copulateurs. — a vulve de la Scolie s'ouvre au- 
dessous de l'anus, entre deux appendices oblongs, cornés, bi- 
articulés, velus en dehors , et-susceptibles d’un assez grand écar- 
tement. Quant à l'enveloppe cornée qui est commune au con- 
duit excréleur du venin, au rectum et à l'oviductus , je renvoie 
le lecteur à la figure qui la représente. 


CHAPITRE V. 
Organes du venin. 


ls n'existent que dans la femelle , et se distinguent en ceux 
ui servent à la sécrétion, à la conservation et à l’excrétion 
En venin. 

1°. Organe sécréteur. — 1 consiste en deux tubes filiformes, 
flexueux , flottans, qui s’ouvrent isolément dans le réservoir. Ce 
sont, à rigoureusement parler, deux glandes déroulées. 

Dans la Xy/ocope, ces deux vaisseaux sécréteurs, qui ont de 
trois à quatre lignes de longueur, se réunissent postérieurement 
en un tube commun fort entortille, deux fois plus long que 
chacun d'eux, se confondant facilement avec les vaisseaux hé- 
patiques. 


(1) Dans la Cigale ce sac est fort grand et ovoïde. 


"V3 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 187 


Ces mêmes organes sont plus longs, plus pelotonnés dans le 
Bombus, et le conduit commun qui résulte de leur réunion en 
arrière, n'égale point en longueur un de ces tubes. 

2°. Organe conservateur.—C’est un réservoir vésiculeux, mem- 
braneux, qui recoit vers le milieu de sa longueur les vaisseaux 
sécréteurs, et dégénère postérieurement en un tube presque ca- 
pillaire. Celui-ci, avant de s’enfoncer dans l’arfture du dard, 
aboutit à une bourse musculo-membraneuse dont je parlerai 
plus bas. 


Le réservoir à venin de la Xy/locope, ne semble qu’une simple 
dilatation du conduit commun des vaisseaux sécréteurs, comme 
celui de l’Abeille décrit par Swammerdam. Dans le Bombus, 
il est fort grand, ovoïde ou pyriforme, rempli ordinairement 
d'un liquide diaphane. Il recoit par sa grosse extrémité, qui 
est antérieure, le conduit déférent des tubes sécréteurs. 


5°. Organe excréteur. — J'ai remarqué dans la Scolie, une 
bourse musculo -membraneuse qui ne s’est point offerte à mon 
observation dans les autres Hyménoptères, et qui, à raison de 
celle particularité, me paroit mériter de nouvelles recherches. 
Cette bourse, dont le contour paroît comme lobé, est placée 
entre le rectum et l'oviductus, et me semble plutôt une dépen- 
dance de l'organe du venin que de ce dernier conduit. Elle 
est plus ou moins arrondie, et sa lunique extérieure, qui est 
assez épaisse el musculeuse, sert d’enveloppe à une vessie mem- 
braneuse, remplie d’une substance presque gélatineuse vert- 
bleuätre. Lorsqu'on comprime légèrement entre les doigts l'ar- 
mure de l’aiguillon, on aperçoit la liqueur vénéneuse s'écouler, 
ou peut-être s’éjaculer, avec ceite même nuance. 

L’aiguillon ou dard est une tige cornée, brunätre, sétacée , 
arquée, très-acérée à sa pointe, qui est armée latéralement de 
petites dents imperceptibles dirigées d’arrière en avant. Sa base 
va se fixer par une bifurcation à différens muscles qui s’attachent 
à des pièces mobiles, et qui favorisent ses mouvemens de pro- 
jection et de rétraction. Il est formé par l'adossement de deux 
lames qui laissent entre elles une gouttière par où filtre le 
venin. 


Dans la Xylocope, le dard ne m'a point paru dentelé à sa 
pointe, et il est renfermé dans un étui corné en forme de cou- 
lisse profonde. 


Aa 2 


168 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


EXPLICATION DE LA PLANCHE. 


Fig. 1. La Scolie des jardins male, de grandeur naturelle. 
2. Système nerveux grossi. 
3. Trachées grossies. aa Vésicules abdominales. 
4. Vésicule abdominale grossie du Bombus. b Sorte de 
trachée-artère,. 

Fig. 5. Organe digestif grossi. a Vaisseaux hépatiques. ? Œso- 
phage. c Premier estomac membraneux. 4 Valvule pylorique. 
e Deuxième estomac musculeux. f Intestin grèle. g Cœcum. 
h Rectum. 

Fig. 6. Cœcum grossi de la Xylocope. 

Fig. 7. Organe générateur mâle grossi. aa Testicules. b Vé- 
sicules séminales. c Conduit spermatique commun. d Partie 
antérieure où basilaire de l’armure. de la verge, noirätre et 
de consistance cornée. ee Deux pièces cornées se prolon- 
geant postérieurement en une tige déprimée et velue. f Une 
üge centrale formée par l’adossement de deux pièces sem- 
blables, armées en dessous de dents crochues. g C’est au- 
dessus de la gouttière qu’elles forment que se glisse la verge. 
h Petite pièce lancéolée articulée à la base interne de la 
pièce e. : Pièce membrano-cornée placée au-dessous du corps 
e et sur le rectum. 7 Plaque tricuspide en avant et en arrière 
placée au-dessous de l'appareil. 

Fig. 8. Organe générateur femelle et appareil du venin grossis: 
aa Tubes ovigères. » Oviductas. ce Cœcum. d Organe parti- 
culier versant dans l’oviductus le produit de sa sécrétion. 
e Organes sécréteurs du venin. f Organe conservateur ou ré- 
servoir. # Bourse musculeuse. À Armure des organes externes 
de la génération. : Dernier anneau ventral destiné à recevoir 
l'armure. À Deux appendices oblongs entre lesquels se trouve 
l'ouverture du vagin et au-dessus desquels est placé l’anus. 
l Le dard ou aiguillon. »# Le dard fort grossi. 

Fig. 9. Organe générateur mâle grossi de la Xylocope perce-bois. 
Fig. 10. Les vésicules spermatiques de cet insecte encore plus 
grossies pour mettre à découvert l'insertion du canal déférent. 
Fig. 11. Organe générateur femelle et appareil du venin grossis 

du même insecte. 

Fig. 12. Organe générateur mâle grossi du Bombus. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 189 


RECHERCHES EXPÉRIMENTALES 


Sur les Chaux de construction , les Bétons et les Mortiers 
ordinaires ; 


Par L. J. VICAT, 


Ancien Élève de l'École Polytechnique, Ingénieur du Corps royal des Ponts 
et Chaussées de France. (Un vol. in-4°, chez Goujon, Libr., rue du Bac.) 


EXTRAIT PAR M. GAULTIER DE CLAUBRY. 


LA grande solidité de quelques mortiers anciens, et parli- 
culièrement de ceux des Romains , avoit dû nécessairement attirer 
l'attention des chimistes, afin de découvrir à quels corps ils 
devoient cette propriété si importante; mais jusqu'ici, les travaux 
entrepris dans celte vue, n’avoient produit aucun résultat sa- 
tisfaisant ; et les chimistes qui s’étoient occupés de cet objet, 
n'éloient nullement d'accord sur la nature des substances dont 
les anciens faisoient usage pour la composition des mortiers. 

M. Vicat, placé dans une position avantageuse pour ce genre 
d'expériences nécessaires à la solution de cette question, a eu 
l'avantage de résoudre le problème, et de déterminer d’une ma- 
nière exacte, quelles étoient les circonstances qui influoïent sur 
la bonté des mortiers. 

Cet auteur donne le nom de Chaux hydrauliques à celles des 
Chaux qui sont susceptibles de se solidifier sous l’eau sans l’ad- 
diion d'aucune substance; il appelle Chaux communes, celles 
qui n’ont pas cette propriété, et enfin Chaux grasses et Chaux 
maigres celles qui absorbentplus ou moins d’eau pour former pâte. 

Il est impossible de juger de la bonté d’une Chaux par sa 
couleur, comme quelques chimistes l’avoient cru; il faut né- 
cessairement l'essayer. Le meilleur moyen pour cela, parce qu'il 
est à la portée de tout le monde, consiste à calciner la pierre 
à Chaux, à en former par l'extinction, une bouillie pâteuse que 
l'on place sous l’eau pure dans un vase; la Chaux est hydrau- 
lique, si au bout de huit jours la pâte résiste à l’action du doigt; 
si elle reste molle, la Chaux est commune. 

Guyton-Morveau , qui a fait beaucoup de recherches sur les 


100! JOURNAL DE PHYSIQUE," DE CHIMIE 


Chaux de construction, a cru que l'on pourroit se procurer 
de bonnes Chaux artificielles, en y mêlant de l'argile, de l’oxide 
de manganèse ou du fer carbonaté ; mais les travaux nécessaires 
pour arriver à ce but, ne permettroient pas de faire usage de 
ce moyen; M. Vicat a reconnu qu’en mélant de la Chaux éteinte 
ayec une quantité plus ou moins grande d'argile ou de terre à bri- , 
que, et en formant des boules que l'on fait sécher et cuire ensuite 
convenablement, on peut obtenfr des Chaux artificielles qui sur- 
passent les Chaux les plus estimées. 

Ce qu'il y a de très-remarquable dans l’action qu'exercent 
l'une sur l’autre les deux terres dont on fait usage, c’est que 
si l'argile avoit été cuite d'avance, elle ne donneroit pas une 
Chaux hydraulique, tandis qu’elle en produit une quand on chauffe 
ensemble les deux terres. 

Il paroïlroit au premier eoup-d'œil, que les frais de prépa- 
ration pourroient empêcher de faire usage de ce moyen; mais 
M. Vicat démontre que le mètre cube de chaux ne reviendroit 
qu'a 55 fr., y compris le bénéfice et les frais d'établissement. 

Un autre fait remarquable qu'a observé M. Vicat, c’est que 
daus la calcination de la pierre à Chaux, l’action de la chaleur 
ne dégage pas seulement l'acide carbonique et l’eau, elle dé- 
termine ainsi une combinaison entre les substances que contient 
cette pierre; aussi quand on traite par l'acide nitrique une pierre 
à Chaux siliceuse, l’acide laisse un grand résidu siliceux; au 
contraire, après la calcination, la plus grande partie de la silice 
se dissout. On peut aussi vérifier facilement ce fait, en trailant 
par l'acide nitrique un mélange de Chaux et de silice seulement 
desséché, et un autre qui aura été calciné fortement ; le der- 
nier se dissoudra en entiér, tandis que le premier laissera toute 
la silice. 

Il y a trois procédés suivis pour éteindre laChaux; le premier est 
d'y verser de l’eau peu à peu et d'en former une bouillie épaisse ; 
le second consiste à plonger la Chaux dans l’eau pendant quel- 
ques inslans, et à la laisser ensuite fuser seule; le troisième, 
à laisser la Chaux s'éteindre seule à l'air libre; M. Vicat a com- 
paré avec beaucoup de soin l'influence de chacun de ces pro- 
cédés, sur la solidité des malières qui en proviennent, et il a 
vu que, selon la nature des substances que l’on mêle avec la 
Chaux pour former le mortier, l'un des procédés l'emporte sur 
l'autre : et que l'on ne peut encore rien établir de bien absolu 
à cet égard; dans la seconde partie de son ouvrage, on trouve 
des tableaux d'un grand nombre d'expériences dirigées vers ce but. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 101 


Les pouzzolanes artificielles dont on fait ordinairement usage 
pour les matières hydrauliques, se préparent avec diverses sub- 
stances que l’on soumet à l’action du feu ; on n'avoit pas cherche 
jusqu'ici à déterminer quels étoient les degrés de feu les plus 
convenables; c’est encore un des objets dont s’estoccupé M. Vicat; 
ainsi que de l’influence que le temps exerce sur les mortiers 
faits avec les diverses espèces de Chaux ; on croit généralement 
que l’espace de temps dans lequel un mortier a acquis sa plus 
grande dureté , est très-long; mais M. Vicat pense que l'on peut , 
sans beaucoup d'erreur, croire que dix années suflisent. 

Les Chaux qui, par le moyen de l’eau seule, donnent les 


- hydrates les plus solides, donnent les plus mauvais morliers. 


La Chaux réduite en bouillie et mélée avec du sable, donne 
naissance aux mortiers, mais dont la bonté varie selon la na- 
ture de la Chaux et celle du sable. Les Chaux hydrauliques agissent 
de la maniere la plus forte sur le sable que l'on y méle, et 
c’est là leur caractère distinctif. Mais si la nature du sable a beau- 
coup d'action sur les propriétés des mortiers, la grosseur de 
celui qui est éminemment siliceux, exerce aussi une grande 
inflhence, et ce qui est remarquable, c'est que pour les Chaux 
hydrauliques les sables fins occupent la première place, et le 
sable grossier la dernière, et que pour les Chaux grasses c'est 
l’ordre inverse. 

Les mortiers une fois faits avec les soins convenables, seront 
capables de devenir parfaits ou de se détériorer, selon qu'ils 
seront exposés dans des circonstances où ils pourront sécher 
lentement, ou d’une manière très-rapide ; el comme les mor- 
tiers à Chaux hydrauliques peuvent solidifier toute l'eau qu’ils 
contiennent , il faut les faire sécher lentement; les mortiers à 
Chaux grasses ne gagnent rien à une dessicalion lente, mais 
éprouvent souvent une détérioration très-forte quand ils se des- 
sèchent trop rapidement. 

Nous avons vu plus haut, que le mode d'extinction de la 
Chaux peut avoir une influence sur les propriétés des mortiers; 
l'extinction spontannée paroït en général préférable pour les Chaux 
grasses, et cela est dû à un fait curieux observé par M. Vicat; 
c’est que l'exposition à l'air dans un lieu couvert et fermé au 
vent seulement ,- donne aux Chaux très-grasses des propriétés 
hydrauliques. 

M. Vicat, dans son ouvrage, examine en délail chacune de 
ces questions, et beaucoup d’autres dont la connoïssance étoit 
importante pour donner à son travail le degré d'utilité qu'il a 


192 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


acquis; la première partie de son livre renferme le détail des 
expériences et l'examen des diverses conditions à remplir pour 
former un bon mortier; dans le second, on trouve vingt-quatre 
tableaux des nombreuses expériences qu'il a été obligé de faire 
Pour parvenir au but qu'il s'éloit proposé. 

L'analyse rapide que nous avons faite de cet intéressant ou 
vrage, est Join sans doute d'en donner une idée; mais’ on 
Pourra toujours juger combien le travail dé M. Vicata d’im- 
portance pour les constructions; et les rapports avantageux , ainsi 
que les récompenses flatteuses que l’auteur a recues, prouvent 
combien on a apprécié son travail. 

. L'objet le plus intéressant auquel M. Vicat soit parvenu, est 
d'avoir donné le moyen de faire de bonnes Chaux hydrauliques 
avec des Chaux communes, et non susceptibles d’être employées 
pour les bonnes constructions; et depuis la publication de son 
ouvrage, M. Vicat, dans un voyage qu'il a fait à Paris, a exé- 
cuté par ordre de l'Administration des Ponts et Chaussées, à 
l'abattoir du Roule, quelques expériences dont nous avons le 
détail sous les yeux , et que nous croyons devoir citer. Il a mêlé 
85 parties mesurées en pâte de Chaux vive de Champigny, et 
de Chaux de Claye éteinte depuis quelques temps et conservée 
en fosse, avec 15 parties d'argile de Vanvres mesurées de même 
(ces deux espèces de Chaux et l'argile de Vanvres, sont d’une 
très-mauvaise nature , la Chaux de Seuonches est la plus estimée) ; 
on a divisé les mélanges en plusieurs centaines de boules de 
4 à 5 centimètres de diamètre que l’on a cuit dans un petit four 
de briques. 

On a fait avec ces chaux factices, six espèces de mortiers, 
dans lesquels il n'est entré que du sable de la Seine, mais en 
diverses proportions; on a composé d'autres mortiers avec de 
la Chaux de Senonches pour comparaison; chacun d’eux a été 
placé dans des pots et immergé aussitôt. Sept jours après, les 
morliers relirés en présence des commissaires, on a laissé tomber 
de quatre mètres sur la surface de chacun d'eux, une balle de 
plomb ; les dépressions sur les mortiers à Chaux factices ont 
varié du quart à la moitié du diamètre de la balle; celles sur 
les mortiers à Chaux de Senonches ont été de 4 à 5 fois le dia- 
mètre de la même balle. Des résultats aussi positifs el anssi in- 
téressans, ont déterminé le Directeur des Ponts et Chaussées 
à faire organiser des fabriques de Chaux hydrauliques factices 
pour les travaux des abaltoirs, du canal de Saint-Maur, etc. etc. 


MONOGRAPHIE 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 193 


OO OT 


MONOGRAPHIE 
DE LA COULEUVRE COURESSE DES ANTILLES, 


COLUBER CURSOR pr DE LACÉPÉDE. 


Lu à l'Académie des Sciences de l'Institut royal de France, 
le 50 mars 1818; 


Par LE cer p’Eescapron MOREAU pe JONNES, 


Correspondant de l’Académie royale des Sciences de l'Institut, de la Société 
Philomathique, etc. 


C’Eesr de son agilité tres-remarquable que ce reptile a pris, 
dans les Antilles, le nom de Couresse, dont les naturalistes ont 
conservé la signification dans l’épithète de Cursor. 

Il appartient au genre de Serpens qui ont pour caractères 
des plaques ventrales et des plaques caudales géminées, la tête 
couverte de neuf grandes écailles, et des mâàchoires garnies de 
dents d'égale grandeur sans crochets venimeux. 

La longueur totale de son corps est de 2 à 3 pieds, el son 
grand diamètre de 9 à 11 lignes; la queue a un peu plus du 
quart de la longueur du reptile. Elle s’est trouvée être de 8 
pouces et demi dans treize individus longs de 32 pouces. Dans 
un qualorzième elle n’avoit que la moïlié de cette étendue, 
ainsi que du nombre de plaques géminées qui la garnissent en 
dessous ; elle étoit moins effilée que dans les autres, et n’offroit 
aucune indice qui püt donner lieu de croire qu’elle avoitété tron- 
quée par quelque accident; cet individu ne présentoit d’ailleurs 
que celte différence, et celle d'une nuance jaune dans les ma- 
cules de la partie antérieure du dos, qui sont blanches quand 
ce replile est vivant. 

Le corps est couvert dans toute salongueur d’écailles arrondies, 
minces, lisses, luisantes, diaphanes, non carénées, imbriquées 
et disposées de manière à former des lignes parallèles entre 
elles, mais obliques dans le sens de la longueur du reptile. 
Vers la iète et la partie supérieure du corps, ces écailles sont 
plus petites, et semblent des rhombes dont les angles sont ob- 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Bb 


194 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE 


scurs. Vers la partie postérieure elles sont deux à trois fois plus 
grandes , et paroïissent hexagones. 

La tète est couverte de neuf grandes écailles, savoir, quatre 
sur deux rangs, au-dessus du museau, trois entre les yeux et 
deux plus grandes vers la partie postérieure de la tête. Celles-ci, 
qui n'existent point dans la vipère Fer-de-lance,, sont ordinai- 
rément rendues plus remarquables, par deux points ou macules 
d'un jaune tirant sur l’orangé. 1l y a dix-neuf écailles au bord 
de chaque màchoire. 

La forme de la tête est elliptique, et le peu de saillie des 
mâchoires la rend beaucoup moins distincte du corps que dans 
le Trigonocéphale. Dans ce Serpent, le museau est relevé, 
tandis quil ne l’est point dans la Couresse ; mais le caractère de 
dissemblance le plus grand entre ces espèces, qui habitent les 
mêmes campagnes, c’est la longueur de la queue, dont l'étendue 
est égale à la quatrième partie du corps de la Couresse, tandis 
qu'elle ne fait que le dixième de celui du Trigonocéphale 
lancéolé. 

Toutefois le, caractère essentiel, celui qu'on ne peut recon- 
noître, lors de la rencontre de ces deux espèces de reptiles, 
dans les hautes herbes des sayanes et dans les fourrées inex- 
tricables , où le naturaliste et le militaire doivent pénétrer, 
c’est l’absence de ces dents canaliculés, qui font du serpent Fer- 
de-lance l’un des animaux les plus redoutables du Nouveau- 
Monde. Les dents de la Couresse sont simples, pleines, nom- 
breuses , très-aiguës, reçourbées vers. la gorge, et semblables 
à celles du Coluber natrix, dont il paroït que le Coluber cursor 
n'est pas éloigné dans l’ordre naturel. 

Le nombre de plaques ventrales et caudales varie comme 
dans les autres reptiles de Ja même: famille. J'ai trouvé com- 
munément. dé, 190 à, 196. plaques transversales sous le ventre, 
et 103 ou 104 plaques doubles sous la queue. L'individu ano- 
mal que j'ai cité plus haut, n’en avoit que 55: Celui décrit 
par M. de Lacépède, n’ayoit que 185 plaques ventrales, nombre 
inférieur a ceux que m'ont offert tous les individus que j'ai ob- 
servés aux Antilles; le nombre de plaques caudales étoit le 
meme. 

La couleur du reptile est.en dessus un brun noirätre très- 
luisant, et en dessous un blanc, argenté, qui reflète également 
bien la lumière. Deux lignes. blanches s'étendent de la tête a 
la queue sur le milieu du dos; dans quelques individus, elles 
sont seulement, ponctuées et non continues. Les écailles latérales 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 105 


offrent, d'espace en espace, des macules blanches, et parfois 
des lignes de cette même couleur, qui est constamment unie 
au brun noir dans tous les individus, tandis que les macules 
de brun-roux qu'on observe sur le museau, manquent assez 
fréquemment. 

Les habitudes de ce reptle sont celles d'un animal timide, 
foible et dépourvu de tout moyen de défense. C’est dans la 
fuite qu'il cherche toujours sa sûreté ; et le besoin d’échapper 
à ses ennemis, Jui fait contracter une rapidité de locomotion 
dont les autres Ophidiens des Antilles n’oflrent aucun exemple. 

S'il n’a rien à craindre des hommes , et si sa vie est presque 
toujours épargnée, quand elle est à leur disposition, ce n’est 
pas, comme on pourroit le croire, par reconnoissance pour 
les services qu’il rend; les Anolys qui, comme lui, font la 
guerre aux Hélices et aux Limaces, et qui délivrent les jardins 
de ces espèces dévorantes, sont souvent poursuivis avec autant 
d’acharnement que s'ils étoient coupables des ravages qu'ils pré- 
viennent, tandis que, au contraire , l'existence de la Couresse 
est respectée. Ce sort différent a ses causes dans l'opinion du 
vulgaire , dont l'erreur à ce sujet est assez digne d'attention, 
puisqu'elle a constamment été partagée par tous les voyageurs 
qui ont fait mention de cette espèce de couleuvre. 

Dans les iles de la Martinique et de Sainte-Lucie, on accorde 
à la Couresse une protection semblable à celle dont une énorme 
araignée domestique est l’objet (1). On croit que tandis que 
celle-ci délivre les habitations d’une parlie des insectes qui y 
pullulent, l’autre contribue à diminuer, dans ces cultures, le 
nombre inquiétant d’une autre espèce animale bien autrement 
dangereuse. Par l'effet d’une tradition adoptée sans le moindre 
examen, c’est maintenant une croyance commune aux Antilles, 
et consignée dans les compilations volumineuses publiées sur 
les îles de l’Archipel, que la Couresse est l’ennemie implacable 
et le destructeur de la vipère Fer-de-lance. Pour être convaincu 
du peu de fondement de cette opinion populaire, il ne falloit 
que comparer ces deux reptiles. L'un sans crochets venimeux, 
et dont l’ossature mince, frèle et sans vigueur, n’alleint pas 
même une longueur de trois pieds; l’autre, parvenant à une 
taille deux à trois fois plus grande, et joignant à un corps ro- 
buste, des dents armées d'un poison subll, qui est injecté à 


(1) Aranea venatoria de Linné. 


Bb 2 


196 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


une profondeur de 12 à 15 lignes, dans les blessures qu'elles 
produisent. Il est vrai que pour établir entre ces antagonistes 
prétendus, un équilibre que semble devoir exclure la différence 
de leurs forces et de leurs armes, on a répété de la Couresse 
ce qu'on a jadis imaginé de la couleuvre d'Europe, qui, lors- 
qu'elle est blessée par la vipère, va, dit-on, se rouler sur des 
plantes qu’un instinct conservateur lui fait connoiïtre pour l’an- 
tidote du poison de son ennemi. C’est ainsi qu’on prélend, aux 
Antilles, que la Couresse arrête les effets du venin dont elle a 
recu l'atteinte dans ses combats avec le Trigonocéphale, et que 
la plante à laquelle elle a recours, est l'Euphorbia parviflora dont 
les tiges, qui contiennent un suc lactescent, sont, suivant l'opinion 
vulgaire, indiquées par cet instinct animal, pour servir aux 
hommes contre le mème danger. 

Ces récits merveilleux qui, par une préférence singulière , 
ont embelli de tous temps et en tous lieux, l’histoire de cette 
famille de reptiles, sont sans doute inutiles pour expliquer 
comment la Couresse ne succombe point à la morsure du Tri- 
gonocéphale; car il a été expérimenté par Fontana, que les vi- 
pères ne sont point soumises à l'action du venin des individus 
de leur espèce, et l’on concoit que des animaux congénères 
peuvent jouir de la même faculté. Mais, 1l ne faut pas moins 
que ce penchant decidé pour les choses extraordinaires, pen- 
chant qui diffère peu de l’aveuglement, pour croire, ainsi que 
la plupart des voyageurs, qu'il peut exister, entre ces deux 
espèces, une inimitie funeste à la plus puissante qui est dévorée 
par la plus foible. 

Cette opinion est, comme beaucoup d'autres, l'effet d’une 
méprise dans les termes. 

Il paroit que lors de la colonisation des petites Antilles, 1l 
y avoit dans ces îles trois espèces d'Ophidiens. Par une sorte 
de phénomène , jusqu’à présent inexplicable, la Martinique, 
Sainte-Lucie et l’un des Grenadins étoient, el sont encore au- 
jourd'hui, le séjour des Trigonocéphales, dont la population 
nombreuse et redoutable semble s'être accrue plutôt qu'avoir 
diminuée par les progrès de Ja culture. Dans ces mêmes iles, 
ainsi qu'à la Dominique, à la Guadeloupe et sans doute dans 
le prolongement nord et sud de la chaîne des Antilles, on trou- 
voit deux autres repliles du même ordre. L'un est la Couresse, 
que je viens de décrire; l’autre est un serpent non-venimeux, 
qui ne s'est offert à ma vue, au milieu des bois, que dans des 
occurences militaires, où je n’étois pas le maitre de l'observer. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 197 


Sa force doit être quatre à cinq fois celle de la Couresse, et 
je soupconne qu'il appartient au genre Bou. Ces deux espèces 
sont mentionnées par le père Dutertre, qui a donné les notions 
les plus anciennes et les plus exactes sur les Antilles, mais dont 
l'ouvrage ne peut servir aux naturalistes, parce que le défaut 
d'énoncialion des caractères naturels, empèche de reconnoîlre 
les animaux et les plantes, dont il a donné l'histoire. 

C’est de la Couresse que ce missionnaire a dit (pag. 355) 
qu'elle n’a jamais plus de deux pieds ou deux pieds et demi de 
longueur, qu’elle est grosse comme le pouce, qu’elle s'enfuit 
toujours, et qu'on peut marcher sur elle ou la toucher avec la 
main sans en avoir rien à craindre. 

C’est du serpent que j'ai vu à la Dominique, et que je crois 
être un Boa, qu'il fait deux espèces, parce qu'il y a des in- 
dividus dont la taille diffère d’un pied , et dont la peau est noire 
et jaune, au lieu d’être entièrement noire. Ce reptile qui, d'après 
son témoignage , atteint une longueur de plus de sept pieds, 
et qui, loin de fuir comme la Couresse, poursuit opiniätrement 
ceux dont il a recu quelque tort, ce serpent, dont le regard 
est tellement affreux, dit le missionnaire, qu'il fait rebrousser 
chemin aux plus hardis, c’est le véritable antagoniste du Tri- 

onocéphale ; c'est celui dont Labat parle dans le premier volume 
de son Voyage (pag. 431), mais qu'il distingue à tort des ser- 
peus de la Dominique qu'il ne connoissoit point , et qu’il con- 
fond dans son quatrième volume (pag. 97) avec la Couresse ; 
ce que n’ont pas cessé de faire tous ceux qui, depuis un siècle, 
ont consulté cet ouvrage, le seul où les voyageurs et les ha- 
bitans des Antilles francoises trouvent une description détaillée 
de ces iles. 

Les circonstances que rapporte Labat étoient propres cepen- 
dant à faire cesser cette erreur. Il dit qu'il vit en 1694 à la 
Martinique , une couleuvre Couresse dévorer l’une de ces Gre- 
nouilles dont le corps a près d'un pied de long.— ARana gru- 
niens de Daudin; cet acte, qui seroit impossible pour le Co/uber 
cursor, n’avoit rien d’extraordinaire pour un serpent de 10 pieds 
de long, et gros comme la jambe d'un homme, tel que celui 
dont parle Labat sous un nom erroné. Alors s’explique.ce qu’on 
ne peut croire de la véritable Couresse qui, selon le même 
voyageur, combat les Trigonocéphales., eten dévore autant qu'elle 
en peut attraper; ce qu’elle effectue , en leur saisissant la tête 
et en les engloulissant tout entier par une aclion progressive, 
analogue à celle de la succion. 


198 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Deux circonstances ont contribué à propager celte étrange 
erreur , qui fait confondre des reptiles s1 différens; la première 
est l'identité de leur couleur , la seconde est la destruction de l’une 
de leurs espe ces. 

On sait que pour tout autre que le naturaliste, le caractère 
le plus frappant est celui de la couleur; on a dù d'autant plus 
y recourir aux Antilles, pour des Ophidiens, que cet ordre 
d'animaux ne présente à la vue aucune de ces différences mar- 
quées qui, dans d’autres classes , sont saisies au premier coup- 
d'œil. La ressemblance générale des formes et celle de la couleur 
ont fait confondre des espèces différentes , de même qu'il a sufñi de 
Ja variation des couleurs pour former plusieurs espèces d'une espèce 
unique. Nous trouverons des exemples de l'une et de l’autre 
de ces erreurs, dans l’histoire des reptiles de l’Archipel et peut- 
ètre n'est-il pas inutile de les signaler. 

C’est la différence de couleur qui fait croire, à la Martinique, 
qu’au lieu d'une seule espèce de Trigonocéphale, il y en a 
trois : les noirs, les roux et les jaunes. Ces derniers sont même 
les plus dangereux, selon l'opinion commune , et l'on ne manque 
pas de faits pour le prouver. 

C’est la ressemblance des formes et de la couleur, qui a fait 
confondre deux espèces de serpens non-venimeux , en une seule 
espèce, dont les individus, qu'on croyoit jeunes parce qu'ils 
étoient d’une moindre grandeur, n’éloient autres que des cou- 
leuvres Couresses ; tandis que ceux qu’on croyoit plus àgés, 
parce qu'ils étoient plus grands, appartenoïent noloirement à 
un genre différent, et, sije ne me trompe, étoient des Bous. 

C'est la ressemblance des formes et des couleurs, qui, dans 
l’ordre des Sauriens, fait aujourd’hui confondre à la Martinique, 
sous le nom générique d’Ænrolys, deux espèces distinctes : le 
Lacerta bullaris et le Lacerta strumosa; et c’est cette confusion, 
jointe à l'oubli des noms que ces animaux ont portés jadis aux 
Antilles, qui a causé l’incertitude des naturalistes dans la no- 
menclature et dans l’histoire de cette famille. 

Enfin, c’est encore cette ressemblance générale de formes et 
de couleurs qui, dans l’Archipel d'Amérique, fait donner in- 
distinctement le nom de Mabouia à deux espèces de Gecko, 
dont l’une atteint à peine une longueur de 4 à 5 pouces, tandis 
que l’autre parvient à plus du double de cette grandeur. 

À celte première cause d'erreur, on doit joindre celle pro- 
venant de Ja destruction de l’une des deux espèces de serpens 
non venimeux qui habitoient primilivement la Martinique. Tout 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 109 


ce qui avoit été dit de l’espèce hardie et puissante a été attri- 
buée à l'espèce foible et timide; et parce que les premiers 
historiens des Antilles avoient parlé d'un couleuvre qui dévoroit 
les Trigonocéphales, on a dù croire que c’étoit la Couresse, 
puisqu'elle est, avec. la vipère Ker-de-lance, le seul Ophidien 
qu’on trouve maintenant à la Martinique. 


On n’a point observé la perte de l’autre espèce non venimeuse, 
parce qu'elle aura sans doute été progressive, comme dans les 
îles voisines de Sainte-Lucie et de la Dominique, où l'on ne trouve 
plus que rarement quelques individus désignés sous le nom de 
Serpent tête de chien, où à cros de chien, appellation qu'ils ont 
recue, non pas d'une certaine ressemblance de la conformation 
de leur tête avec celle de cetanimal, maisde l'effet de leur morsure, 
qui n’est pas plus dangereuse que la sienne, et parce que leurs 
mächoires sont armées de dents plulôt analogues. à celles de 


ce quadrupède qu'aux crochets mobiles, canaliculés et injecteurs 
du Trigonocéphale lancéolé. 


La destruction entière d’une espèce animale n’est point, au 
surplus, un évènement unique dans ces mêmes iles, quoique 
la connoiïssance n’en soit donnée ni par les voyageurs, nt 
même par les habitans. Pendant un long séjour dans les forêts 
et dans les montagnes de la Martinique, les plus éloignées des 
cultures, il ne s’est offert pas plus de deux occasions, où j'ai 
vu la Perruche à gorge brune.— Psittacus æruginosus de Linné. 
Depuis longtemps il n'y a plus dans cette ile de Perroquets 
à ventre pourpre et à tète bleue, quoique cette espèce, qu'on 
prétend être une variété du Psittacus leucocephalus, soil encore 
assez. nombreuse à la Dominique, au-delà d'un bras de mer 
dont la largeur est de sept lieues. 


Le nom seul du Lamantin est resté sur ces bords où il 
habitoit, dans les eaux des rivières que l'Atlantique, remonte 
lentement à travers les forêts immergées des Palétuviers. Le 
Phénicoptière ne se montré plus nulle part, et le Cayman est de 
venu étranger à ces rives où jadis il se: faisoit redouler. 

Cependant, deux siècles ne se sont pas encore écoulés depuis 
l'établissement des Éuropéens aux Antilles; mais iln’en est point 
de ces rives circonscrites comme des contrées continentales. La 
conservation des espèces;animales n'y trouve point de:garantie 
dans la contiguilé et la: vaste étendue des régions; et sisleur 
destruction est égale à celle de l'espèce humaine, elle doit ètre 
également immense et rapide, puisqu'en moins de trois cents 


200 JOURNAL DE PHYSIQUE ; DE CHIMIE 


ans quatre races d'hommes ont paru, dans cet Archipel et que 
le souvenir des deux premières est déja fugitif et confus. 

Il résulte de ces recherches et de ces observations : 

1°. Que lors de la colonisation de la Martinique, il y avoil 
dans celle île trois espèces d'Ophidiens, savoir : le Trigonocé- 
phale et deux espèces de serpens non venimeux. , 

2°. Qu'il n'y a plus maintenant dans celte île que deux es- 
pèces de ces repüles : la vipère Fer-de-lance et la Couresse. 

3°. Que l'espèce perdue qui semble avoir appartenu au genre 
du Boa, et qui a été confondue avec le Coluber cursor, est 
celle dont la force musculaire et les mächoires puissantes triom- 
phoient du Trigonocéphale lancéolé, ce que par une erreur pro- 
longée jusqu’à ce jour, l'opinion vulgaire et les voyageurs ont 
altribué à la Couresse. 


RÉVISION DU GENRE OPÉGRAPHE 
DE LA FLORE FRANÇOISE, 


ET OBSERVATIONS CRITIQUES SUR DES ESPÈCES DE CE GENRE; 
Par Léon DUFOUR, 
D. M., Correspondant de la Société Philomathique de Paris, etc., etc. 


LE domaine de la Botanique s’est si prodigieusement accru 
depuis un demi-siècle, qu'a moins d’être un Linnæus ou un 
de Jussieu, il y auroit de la témérité à prétendre en embrasser 
le vaste ensemble. Depuis long-temps, pénétré de cette vérité, 
je me suis réfugié, pour ainsi dire, dans un coin de la Science, 
et je me suis borné au rôle qui me convient, celui d’un simple 
manœuvre préparant quelques matériaux pour le grand édifice. 
La plus petite production de la nature, la plus chétive en apa- 
rence, ne sauroit être indiflérente aux yeux de l'observateur 
philosophe, et la découverte de la vérité, quelle que soit la 
source d'où elle émane, est toujours utile aux progrès de la 
Science. La Cryptogamie, malgré les nombreux ouvrages que 
nous devons principalement à l'infatigable sagacité des botanistes 
du nord, est encore, et sera pour long-temps, un monde 
nouveau, un répertoire inépuisable d'observations curieuses, et 


malheureusement 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 201 


malheureusement aussi, un dédale où l'erreur et la vérité se 
jouent de la foiblesse de nos organes. 

Adonné, spécialement depuis plusieurs années, à la recherche 
et à l'étude des Lichens, j'ai recueilli sur cette famille de Cryp- 
togames , de nombreuses observalions que je me propose de 
coordonner et de publier. En attendant que ce travail général 
puisse être mis au jour, je vais essayer d'éclaircir l'histoire des 
végétaux que Decandolle a compris dans le genre Opégraphe 
de la dernière édition de la Flore francoise. Lorsque ce dernier 
savant s'occupoit de la publication de cet ouvrage important, je 
mis à sa disposition ma Collection cryptogamique, et il eut le 
soin d'y établir la concordance de sa nomenclature. Mes rela- 
tions avec le fecond Lichénographe suedois Acharius, auquel 
j'ai communiqué la plupart des espèces observées en France, 
et dont il m'a chligeamment transmis les noms, me mettent aussi 
à même d’avoir des données positives sur la synonymie de ces 
productions. 

Avant d'entrer en malière , je ne puis m'empêcher de déplorer 
l'exubérante facilité de plusieurs auteurs, à grossir le nombre 
des espèces et des variétés. Peu imbus de cet esprit philoso- 
phique , dont les législateurs de la Botanique nous ont laissé 
de grands exemples, trop renfermés dans la sphère de leurs 
collections, facilement séduits par les nombreux échantillons qui 
y affluent de toutes parts , ils écrasent la science sous le poids de 
vaines richesses , ils découragent les naturalistes les plus zélés pour 
son étude, ils l’accablent d’entraves et la replongent dans le 
chaos. Le grand livre de la nature est ouvert à tous, mais peu le 
feuillètent avec soin, et plusieurs le traduisent mal. Est-ce donc 
rendre un service à la Science, qne d'entasser à la suite d’une 
même espèce obscurément caractérisée, sept ou huit variétés 
précédées chacune de leur lettre grecque, accompagnées d'une 
épithète nominative, et suivies d'un sisnalement qui souvent ex- 
prime des traits tout-ä-fait étrangers à l'espèce primordiale? Non 
certainement. C'est au contraire y introduire un embarras inex= 
tricable, une confusion désespérante. La manie de traveslir en 
espèces de simples modifications ou aliérations individuelles, 
est incompatible avec le véritable esprit d'observation , et tend 
à saper les fondemens de la Science. 

Le genre Opégraphe, établi d'abord par de Humboldt, adopté 
ensuite par Persoon, Schrader, Acharins, Decandolle, qui l'ont 
successivement enrichi d'un grand nombre d'espèces, a pour 
type primitifle Zichen scriptus de Linnæus. Acharius, dans sa 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Ce 


202 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
Lichenographia universalis, a distribué dans trois genres parti- 
culiers, les espèces qu’il avoit d’abord comprises parmi les Opé- 
graphes. Je m'abstiens d'exposer ici en détail les différens carac- 
ières sur lesquels ce savant a fondé l'établissement de ces genres. 
Je me bornerai à en signaler succinctement les traits essentiels 
les plus évidens. Il a reservé le nom d'Opesrapha aux plantes 
lichénoïdes dont le réceptacle oblong ou linéaire est creusé 
d'une gouttière et muni de bords propres analogues au disque. 
Il a désigné sous celui de Graphis, celles dont les réceptacles 
plus essentiellement linéaires, mais pourvus des mêmes carac- 
ières organiques que les Opegrapha, sont enfoncés dans la croûte 
et comme rebordés par elle. Cette distinction est purement illu- 
soire. Enfin, il a formé le genre Arthonia de quelques espèces 
à réceplacles entièrement dénués de bord propre et non saillans 
au-dessus de la croûte. 

Decandolle, dans la Flore françcoise, a confondu ces trois 
genres en un seul, celui des Opégraphes. Je ne concois pas 
comment cet auteur, doué d’ailleurs d’un tact si exquis en Bo- 
tanique , a relégué dans la famille des /Z/ypoxylons ces produc- 
tions qui, par la présence bien manifeste d’une croûte, se ral- 
tachent impérieusement à celle des Zichens. 

La présence ou l’absence d'un bord propre dans les récep- 
tacles des Lichens , forme un caractère organique de première 
importance, qui imprime à ces végétaux une physionomie toute 
particulière. Cette considération, aidée de la nécessité de re— 
courir à des divisions lorsque les espèces sont nombreuses, m'a 
déterminé à conserver les deux genres 4rthonia: et Opegrapha. 
Je vais exposer le signalement de l’un et de l’autre, et décrire 
les différentes espèces que j'ai observées jusqu’à ce jour en France. 

PREMIER GENRE. 
ARTHONIE. Arthonia. Ach. Lich. univ., pag. 25. 


Réceptacles de formes variées, planes, solides, lisses, dé- 
pourvus de bord propre , enfoncés dans la croûte. 

Croûte hchénoïde, mince, membraneuse, lisse, rarement 
lepreuse. 

Obs. Les Arthonies différent des Coniocarpes de Decandolle 
ou Spiloma d'Acharius, en ce que leurs réceptacles n’ont pas, 
comme dans ces derniers, une surface pulvérulente et en quelque 
sorte floconneuse, et ne sont pas sensiblement saillans au-dessus 
de la croûte. La configuration variée de leurs cupules, qui sont 
ou arrondies, ou linéaires, ou rameuses, ou étoilées, et leur 


£T D'HISTOIRE NATURELLE, 503 


manière de croitre, les rapprochent des véritables Opégraphes, 
dont elles sont essentiellement distinctes par l'absence d'un re- 
bord aux réceptacles. Elles végètent sur les écorces des arbres, 
et notamment sur celles revètues d’une épiderme lisse. Ce geure, 
établi par Acharius, comprend des espèces qui, dans la Flore 
françoise, se trouvent mentionnées parmi les Opégraphes, les 
Verrucaires et les Patellaires. 

1. Arthonie blanc de lait. 

Arthonia galactites. 

Verrucaire blanc de lait, FL. fr., n° 859. 

Arthonia punctiformis, 8 galactina, Ach. Lich. univ., p. 141. 

Crusta determinata , tenuissima, membranacea , lævigata, albo- 
lactea; apotheciis minutis, sparsis, punctiformibus, ovatisque ; 
planiusculis, nigris. 

Hab. in cort. tener. populi. 

La petitesse de ses réceptacles, leur analogie apparente avec 
ceux de quelques espèces de Verrucaires , avoient fait présamer 
à Decandolle qu'elle devoit appartenir à ce dernier genre. Sa 
croûte forme sur l'écorce tendre des peupliers, des taches plus 
ou moins irrégulières d'un blanc de lait pur, et d'une ténuité 
extrême. Observée à la loupe, cette croûte est parfaitement hsse, 
et les rides légères qu'on y découvre sont uniquement formées 
par le fendillement de l'épiderme. Ses réceptacles se présentent 
comme des poinis noirs ou noiràtres, planes, opaques, ronds 
ou ovales, distincts les uns des autres. En vicillissant ils dispa- 
roissent, el on n'observe à leur place qu’une légère dépression, 
teinte d'une couleur roussâtre, È 


2. À. sans croûte. 

A. ecrustacea. 

Crusta effusa nulla; apotheciüis sparsis , ovatis, rotundatisque > 
planis, atris, epidermide cinerascente tenuissimo circumductis. 

IH. in cor. tener. quercus emort. 


Elle diffère de la précédente, et par l'absence absolue d'une 
croûle, et par ses réceptacles plus grands ordinairement, entourés 
d'une espèce de pellicule cendrée qui appartient à l’épiderme 
de l'écorce. 

Obs. Cette production pourroit bien être plus convenablement 
placée parmi ies Hypodermes. 

3. A. dispersée, 

A. dispersa, 

Cc 2 


204 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, 


Op. dispersa, FI. fr,, n° 853. 
Op. epi,; asta, Ach. Ï. c.;,p. 258 (Secund. lite). 


Crusta determinata, tenuissima, membranacea , glabra, albido 
glaucescente nitida ; apothectis minulis variis, atris minoribus punc- 
tiformibus, longioribus axilissimis fléxuosis subramosis planis- 
SUNES immarginalis. 

H. in cort. tener. var. arb. 


C'est à tort qu'Acharius a compris celle espèce dans le genre 
Opégraphe, dont son facies et le caractère de ses réceplacles 
léloiguent entiérement. Sa croûte forme des plaques circon- 
scrites d'un blane glauque, quelquefois satiné ou argenté, glabre, 
lisse, d'une grande ténuite. Ses re ‘ceptacles fort petits, ordinai- 
rement disperses, planes ou à peine saillans, ont des formes 
varices; tantôt ils paroissent comme des points arrondis, tantôt 
ils s’'alongent, deviennent flexueux, et enfin offrent des courtes 
et minces ramifications, 

J'en ai observé sur l'écorce de cerisier, une modification où 
les réceptacles un peu plus grands , plus larges surtout, pré- 
sentent des di. giHatious qui le rapprochent de l4. radiata. 


4 Alraqie. 
A. radiata, Ach.]. c., p. 144 
Op. radiata, F. fr., n° 832. 


Crusta determinata, membranacea, tenuissima, lævigata albida 
nec non fumoso subolivacea ; apothectis confertis, alris, planis, 
multifido- radiatis, variis , AA r'UGOSLS. 

1. in cort. tener. vartar. a L. 


Elle forme sur les jeunes éeorces des arbres, notamment du 
chène et da chätaignier, des taches circonscrites , très-super= 
ficielles, glabres, membraneuses, ordinairement blanchätres, 
quelquefois avec une lelule TETE Ses réceptacles sont nom 
bréux, rapprochés, noirs, planes, à peine ridés ou fendillés, 
irréauliérement Abe dans leur contour en lobules où digita= 
‘tiôns qui leur donnent des formes très-varices, tantôt en des 
riques, tantôt en caractères hiéroglyphiques entremèlés de ré- 
ceptacles simples, 


5. A. obscure. 
A. obscura, Ach. |. c., p. 146. 
A, radiata, \av. € hyparcha, Ach. I. c. (Sec. litt.). 


Crusta determinata, membranacea, tenuissima, Jfumoso-cinerea; 


% 


ET D'HISTOIRE N AMULTELE. on 


apotheciis confertis, minutis, nigris, depressis, puncliformibus , ova- 
lis, difformbusque rartter subdentalrs. 
Î. in cort. ten. arb. Fraxuni, æseuli ad Parisios. 


Lorsqu’ on observe soigneusement les diverses! modifications 
qui fournissent celles ei et la précédente, on est tenté: de les 
réunir en une seule et même espèce. Cependant V4. obscure 
différe de l'4. radice par la couleur cendrée el enfumée dessa 
croûte qui est moins luisante, el par ses réceptacles plus petits 
presque tous ovales ou oblongs, et. très-rarement dentelés dans 
leur contour, J'ai trouvé assez fréquemment cette espèce sur 
l'écorce lisse du frène à Versailles et du marronier à Paris, 


6. A. ochracée. 
A. ochracea. 


Crusta determinata , tenuissima, membranacea, Levisata, albida: 
apotheciis prominulis, confertis, vartis, ste He disais, Cube 
mosis, ocrhaceo-fulvis, demum difformibus Honierre 

H. cort. var. arb. (quercus, cerast) in Gallia merid. 


On prendroit au premier coup-d'æil, cette espèce pour un 
individu détérioré du Coniocarpon cinnabarinum , FI. frs; maisen 
lexaminant plus allentivement , on voil que la conformation 
de ses réceptacles la rapprache de l'#r1h. radive. Sa croûte, d’an 
cendré blanchàätre, est lisse et très-mince. Les réceplacles, assez 
nombreux el rapprochés, sont légérement saillans, d'un roux 
fauve ochr ace , et variés pour leur forme: Parvenus à leur,élat 
de perfection, leur surface est aplatie , divisée dans son contour 
en digitations plus où moins rayonnantes , marquees de quelques 
fendillemens. On y en rencontre aussi de plus petits. simples, ovales 
ou oblongs et un peu convexes. Malgré la solidité,de leur sub= 
Stance, ils sont lavés plutôt que saupoudres d’une teinte de la 
même couleur qui se répaud dans leur voisinage. Dans la de 

ù crépitude, ils se déformeut, devicnnent dé liquese ens, SU fondent 
et finissent par ne laisser autre trace de leur HÉCUtN qu'une 
tache ochracée déprimée J'ai rencoutré cette e spece aux.en\iFons 
de Saint-Sever sur l'écorce du chère, du cerisier, du charme, 
-M. Grateloup l'a aussi trouvée aux environs de Dax. 

7. À. rebordée. 

A. marginata. 4 \ 

Crusta subdeterminata } membraracea , lœvissima , cineréo-oli- 
“pace, subnitida ; apotheciis nigro-c sis, cruséts, chunpentibus , 
oblongis , longiusculisque ; simplicibus mul sfidisve > prominulis , 


306 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

margine Spurio crustaceo incrassato albissimo obtuso limbatis; disco 
planiusculo lato. 

II. in cort. quercus Gallia meridionalis, 

Cette belle espèce, parfaitement caractérisée par la bordure 
blanche qui entoure ses grands réceptacles, ne paroît pas avoir 
été connue des lichénographes. Sa croûte a beaucoup d'analogie , 
et par sa couleur et par sa structure, avec celle de la f’errucaria 
nitida. Elle est unie, glabre, comme vernisée, vaguement cir- 
conscrite, d'une couleur cendrée, olivätre ou un peu glauque. 
Les réceptacles fort grands, comparativement à ceux des autres 
‘espèces, d’abord niches sous la croûte, rompent cette dernière, 
s'élèvent au-dessus d'elle, deviennent proéminentes, et s'en- 
tourent d’une bordure blanche, épaisse, fournie par la substance 
intérieure de la croûte qui se renverse en dehors. Ils ont des 
formes très-variées. Il y en a d’ovales et même d'arrondis, 
mais Ja plupart sont SLloue ou alongés, droits ou flexueux, 
tantôt simples, tantôt divisés en deux ou trois rameaux. J’en 
observe qui sont tout-à-fait diformes, et d'autres dont les bifur- 
cations sont ovales, pointues. Le disque est large, plane, d'un 
gris d’ardoise, et quelquefois fendillé en travers, et sans bord 
propre apparent, 

J'ai rencontré assez fréquemment l'O. bordée sur l'écorce des 
troncs de chêne, aux environs de Saint-Sever. M. Grateloup 
Ta observée aux environs de Dax, et M. Léman m'en a com- 
muniqué un échantillon qui a été cueilli dans la Bretagne par 
M. Cauvin. 

Obs. J'en ai observé sur l'écorce du hêtre une modification 
produite et par l’âge de la plante et par la nature du support, 
dans laquelle la croûte est fendillée en écailles et les récep- 
tacles deformés, usés, à bords moins proéminens. 

Quelquefois ceux-ci s’eflacent entièrement, malgre que Île 
Cryptogame ne soit pas dans la décrépitude, et alors les ré- 
ceptacles ont un aspect qui induit facilement en erreur pour lg 
détermination de l'espèce, S 


8. A. Dendrite, 

A. dendritica. 

Graphis dendritica, Ach. 1. e., p. 271, t. IN, f. 16, 

Op. dendritica, Ach. meth., p.131,t.1, f. 10. 

Crusta determinata, tartareo - subpulverulenta alba; apothectiis 
émmersis, confertis , Cœsio-prutnosis, planissimis, eleganter linearie 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 207 


“ramosis, ramis furcatis divergentibus acuminatis, nec non sum- 
plicibus, crusta elevata submarginatis. 

JT. in cort. arb. var., quercus præsertim in Gallia merid. 

Celle élégante espèce, propre aux contrées méridionales , res- 
semble, au premier aspect, à une véritable Opégraphe, à cause 
de la forme linéaire de ses réceptacles. Mais ceux-ci n'ont ja- 
mais de bord propre, ce qui l'éloigne de ce genre. Sa croûte, 
ordinairement d’un beau blanc, forme des taches circonscrites, 
dont la surface assez unie est tantôt finement pulvérulente et 
tantôt presque glabre. Les réceptacles d'un gris bleuätre , très- 
rarement noirs, sont constamment planes, enfoncés dans la 
croùle qui, sapce le Jong de leurs bords, recouvre un peu 
ceux-ci sans cependant leur former une bordure adhérente. Très- 
rapprochés, souvent confondus, ils ont fréquennment une dispo- 
sition rayonuante, et leurs extrémités loujours pointues ont des 
bifurcations divergentes qui représentent des dendrites. Il n’est 
pas rare que parmi ces réceptacles rameux il s’en trouve de 
simples , ou de bifides. Quelquefois, dans le jeune âge, les cu- 
pules ne se dénotent que par une étroite fente pratiquée à la 
croûte, et ces espèces de stries donnent à celle modification 
une physionomie iusidieuse. Elle n’est pas rare avec ces traits 
sur Je tronc de l'aulre. 

Obs. Quoique A charius ait décrit son Graphis dendritica comme 
ayant des réceplacles noirs, je ne doute pas cependant que ce 
soit de mon 4. dendrite dontil ait voulu parler. Je observe avec 
celte couleur sur l'écorce lisse du fusain. 


9. A. obtusangle. 

A. obiusangula. 

Crusta determinata, tartareo-subpulverulenta alba; apotheciis 
immersis confertis, cϾsio-pruinosis, planissimis, nunc distinctis 
simplicibus aut brevi-angulatis, nunc ramoso-confluentibus , con- 
geslo subradiosis, ramis brevissimis obtustis. 

H. cort. quercus in Gallia merid. 

Elle a sans doute beaucoup d’analogie avec la précédente, 
mais elle en diffère surtout et par la briéveté de ses rameaux 
toujours obtus, et parce que ceux-ci ne sont point bordés par 
Ja croûte. Cette dernière forme une tache circonscrite, blanche, 
mince, comme pulvérulente. Ses réceplacles tantôt simples et 
distincts, tantôt rameux et confluens , sont quelquefois disposés 
par taches rayonnantes , dont la circonférence est divisée en 


208 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CIIMIF 


courtes digitations. Leur couleur est d’un gris ardoisé ou noi- 
râtre. J'en ai vu qui étoient si rapprochés, qu'ils ressembloient 
à une mosaïque. Cette Arthonie, assez rare, croit sur l'écorce 
du chène aux environs de Saint-Sever et de Dax, 


10. À. Saupoudrée, 
A. pruinosa, Ach. I. c., p. 146. (Sec. litt.) 
Patellaria detrita, F1. fr., n° 953. (Excl. syn.) 


Crusta late effusa, tartarea, dura, crassiuscula, rimosa , albido 
cinerea , intus flavescente ; apothectis unmersis , latiusculis, planis, 
irregularibus | polygonis, difformibus , obscure fuscis , albido 
pruinosis. 

H. in cortice quercus annosarum. 


QU 


Sur la foi de Persoon, j'avois désigné dans ma collection celte 
espèce sous le nom de Zichen detritus, Hoffin., et c'est ce qui 
a induit en erreur Decandolle. Le Lichen figuré par Hoffmann 
(Plant. Lich., tab. 64, f. 1—4), s'éloigne beaucoup de l'4r- 
thonie saupoudrée. 

La croûte de celle-ci occupe souvent des espaces de plusieurs 
pieds carrés, sur les troncs des vieux chènes dans diverses con- 
trées de la France. Elle est blanchâtre , assez épaisse, dure, 
compacte, très-adhérente, plus ou moins fendillée à sa surface, 
et remarquable en ce qu’elle est entièrement d’un jaune verdàtre. 
Les réceptacles sont tellement de niveau avec elle, qu'il faut 
une attention particulière pour les distinguer malgré leur abon_ 
dance. T'rès-variés pour leur configuration, ils sont arrondis, 
anguleux , oblongs, difformes, absolument dépourvus de bord 
propre et recouverts d'une saupoudrure grise. Lorsque celle-ci 
a été enlevée ou par le frottement, ou par les progrès de l'âge, 
la couleur des réceptacles, qui alors se dessinent mieux , est 
branätre ou même roussätre. 


Obs. La physionomie de ce Cryplogame s'éloigne de celle 
des autres pero et a de l’analogie avec les Patellaires de 
Decandolle. L'A4rthonia lrncea, Ach., a, d'après ce que nr'écrit 
Acharius lui-mème, de grands rapports avec V4. saupoudrée. 


11. À. épaisse. 

A. crassa. J 

Op. crassa, FI. fr., n° 846. 

Crusta determinalo-limitata , tumente, levigata, cohærente, al- 
bida aut subrufescentée; apotheciis mUNULISSUNLS inunersis, Varils? 


punctiformibus , 


ET D'MISTOIRE NATURELLE. 209 


punctiformibus, subtiliter linearibus, passim interrupte calenatis, 
subramosis, flexuosis, disco inconspicuo. 
I. cort. tener. Carpini et trunc. quercus Gall. merid. 


Elle a une physionomie toute particulière qui ne permet pas de la 
confondre avec les autres espèces, et qui l'éloigne méme du 
genre où je la place. Sa croûte, d'an gris blanchätre où rous- 
sätre, forme une intumescence remarquable entourée d’une bor- 
dure obscure, surtout lorsque plusieurs individus sont rapprochés, 
ce qui s’observe très-fréquemment. Leur ensemble offre alors des 
bosselures irrégulières. La surface de la croûte est lisse, unie, 
et ce n’est qu'à l’aide d’une forte loupe qu'on peut y apercevoir 
quelques fendillemens très-superficiels. Les réceptacles sont d’une 
extrême ténuité et enfoncés dans la croûte, D'abord sous la forme 
de points presque imperceptibles assez analogues à ceux des 
ÆEndocarpes, is s’alongent ensuite, deviennent linéaires, et sont 
uen interrompus dans leur longueur, de manière à n’offrir 
que des points à la file les uns des autres, tantôt droits et tantôt 
flexueux , et comme rameux. Ils n’ont pas de rebord sensible. 

M. Thore a d'abord découvert cette curieuse espèce sur le 
charme aux environs de Dax; je l'ai retrouvée assez abondam- 
ment sur les troncs des chênes près de Saint-Sever (Landes.) 

Obs. L'Op. picea. Pers. (/]n Act. Wetteraw, vol. IT, p. 14) est 
voisine de l'Art. épaisse, comme je m'en suis assuré par l'étude 
de l'échantillon décrit par Persoon, et que cet auteur m'a com- 
muniqué. 

GENRE Il. 


Orécrarue. Opesrapha. Ach. Lich. univ., pag. 43. 


Réceptacles de formes variées, solides, pourvus d’un bord 
propre, plus ou moins saillans au-dessus de la croûte. 

Croûtelichénoïde , plus ou moins lépreuse ou membraneuse. 

Obs. Les Opégraphes se rapprochent plus immédiatement que 
les Arthonies, des Lichens à croûte lépreuse et à scutelles, ou 
des Patellaires de Decandolle. Quelques espèces, telles que FO. 
batarde et VO. attrayante, ont même la plus grande analogie 
avec ces derniers, par la configuration de leurs réceptacles. 
Ceux-ci forment au-dessus de la croûte une saillie souvent très- 
remarquable , et lorsqu'ils sont envahis par cette dernière, comme 
cela a lieu dans la plupart des espèces qu'Acharius a rangées 
dans le genre Graphis, ils ne laissent pas que d'offrir dans l’émi- 
nence de leurs bords, les caractères génériques qui les distinguent 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Dd 


210 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


des Arthonies. Ils varient depuis la forme arrondie jusqu’à la forme 
lineaire. Leur disque est tantôt creusé en gouttiére, tantôt en- 
tièrement caché par le rapprochement et la contiguité des bords, 
tantôt enfin plane ou convexe par l'effacement de ces derniers. 
Ces circonstances, dont Acharius s’est servi pour établir des 
divisions dans ce genre, sont fréquemment dépendantes ou de 
la localité, ou de l’âge de la plante, ou enfin des accidens sur- 
venus pendant sa végélation. 

Il me semble naturel de distribuer en deux sections les nom- 
breuses espèces d'Opégraphes, suivant que les réceptacles sont 
simples ou divisés. 

Réceptacles. simples, 


1. Opégraphe à taches. 

Opegrapha macularis, Ach. 1. c., p. 247. 

Op. quercina et O. faginea, F1. fr., n°5 850, 831. 
O. quercina, — conglomerata, — faginea, Pers. 


Lichen rugosus, Hoffm. En. Lich., p. 10, tabl. 2, f. 5. 


Crusta una cum lirellis , maculas inæquabiles subrugosas nigras 
efficiente; apotheciis simplicissimis , confertis, ovatis oblongisque, 
disco rimæformi, demum subobliteratis. 

IT. in cortice fagi, ramisque juniorib, quercus. 

La détermination rigoureuse du genre auquel doit appartenir 
celle production végétale, est encore problématique pour moi, 
et en la conservant parmi les Opégraphes, je suis aveuglément 
l'exemple de tous les Lichenologistes. Elle me paroît avoir des 
caractères miloyens entre ce dernier genre et celui des Hystéries. 
Je ne vois pas distinctement une croûte proprement dite; mais 
voici comment se développe successivement cet obscur Crypto- 
game. Les réceptacles rassemblés par groupes plus ou moins 
considérables, sont d’abord logés sous l'épiderme de l'écorce. 
Mais bientôt par les progrès de leur développement , cette épi- 
derme se rompt. tantôt par une seule grande fente, dont la di- 
latation met à découvert tout un groupe de capsules, tantôt 
par des gercures partielles, des fendillemens dont les lambeaux 
simulent une croûte membraneuse. Les réceptacles petits et d'un 
noir mat, n'ont une forme bien déterminée que dans leur pre- 
mier àge. Alors on les voit ovales ou oblongs, quelquefois ar- 
rondis. Ils s'ouvrent ordiuairement par une fente bilabiée qui 
les fait ressembler à des Hystéries, mais il n’est pas rare qu'ils 
se fendent en trois et mème en quatre fragmens. À mesure 
qu'ils approchent de la dernière période de leur végétation, ils 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. S11 


se déforment , semblent émettre une poussière noire, ou tomber 
en déliquescence, et se fondre en une sorte de croûte noire 
homogène plus ou moins rugueuse, dont les diverses plaques 
deviennent confluentes. C’est dans ce dernier état qu’on l'observe 
fréquemment sur les troncs du hêtre. 


2. O. pellicule. 
O. pellicula. 


Crusta interrupte effusa, membranacea , pelliculæformi sub- 
pellucida, glabra, albido flavescente; apotheciis prominulis sim 
plicissimis, sparsis, erumpentibus , ovato-ellipticis, disco canali- 
culato tandem planiusculo, margine inflexo obtusiusculo. 

I. in cortice læviuscula arborum cirea Lutetiam. 


Je n'ai trouvé dans aucune espèce de ce genre, une croûte 
de cette structure. C’est une membrane irrégulièrement répandue, 
d’un blanc jaunätre, ayant tout l’aspect d'une pellicule sèche. 
Vue au microscope, elle offre une structure réticulaire assez 
analogue à celle des feuilles de certaines mousses. Je me suis 
bien convaincu qu’elle n’étoit point fournie par une exfoliation 
de l’épiderme de l'écorce , puisque malgré sa dissémination 
vague, il n’y a de lirelles que là où elle existe, et qu’elle est 
aussi distincte par sa couleur que par son organisation, de la 
membrane corticale qui l'avoisine. Les réceptacles, d’abord ca- 
chés sous la croûte, rompent ensuite celle-ci et se montrent 
sous la forme de petites cupules noires, ovales ou elliptiques, 
munies d’un rebord obtus replié en dedans, et d’un disque tantôt 
resserré en gouttière, tantôt presque plane. 

J'ai découvert, il y a plus de douze ans, cette curieuse Opé- 


graphe aux environs de Paris, près de Marly, sur l’écorce lisse 
d'un arbre mort. 


3. O. vulvelle, F1. fr., vol. VI, p. 160. 
O. vulvella, Ach. I. c., p. 257. 


O. diaphoræ, var. B spurcata, Ach. 1. c., p. 254. (Sec. litt. 
autor.) 

Crusta effusa , tenuissima , lævigata, albida aut subnulla ; apo- 
theciis simplicissimis (parvis) prominulis , distinctis, ovatis, oblon- 
gis, cymbiformibusque, disco rimæformi, concavo, demum plano, 
margine nunc inflexo nunc subvanescente. 


H. cort. popul, juglandis, quercus. (Paris , Montpellier, Saint- 
Sever.) 


Sa croûte est souvent peu apparente et vaguement répandue, 
Dd 2 


212 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CILIMIE 


blanchätre ou grisätre. Les réceptacles, bien plus petits et moins 
approchés entre eux que ceux de l'O. notha, sont, les uns 
arrondis ou ovales, les autres oblongs , quelques-uns amincis 
aux deux bouts et dilatés au centre, ce qui leur donne, dans 
ce dernier cas, une forme naviculaire. Tantôt les bords sont 
repliés en dedans et contigus, de manière que le disque ne se 
dénote que par une fente comme dans les //ysterium , lantôt ce 
dernier est décidément concave avec ses bords redressés, enfin 
il finit par être plane, mais non convexe, circonstance qui le 
distingue encore de l'O. notha. 

La modification qu'Acharius lui-même m'a désignée sous le 
nom d’O. diaphora, B spurcata, a des réceptacles un peu plus 
déprimés , mais ne mérite pas d’être mentionnée avec un nom 
particulier. Je l'ai pareïllement trouvée sur Pécorce du figuier 
en Espagne; celle qui vient sur le noyer est remarquable par 
la petitesse des lirelles, leur forme en nacelle et l'absence de 
la croûte. Ces capsules se trouvent souvent disséminées au mi- 
lieu des autres espèces d'Opégraphes ou de Lichens. 


4. O. batarde, FL. fr., n° 854. 2 
O. notha, Ach. 1. c., p. 252: 
O. lichenoides. Pers. 


Crusta subleprosa, effusa, cinereo-albida; apothectis simplicibus 
(majusculis) prominulis, subrotundis, ovatis, diflormibusque, obtu- 
sissimis, confertis disco demum convexo tmmarginato. 

1. ad arb. var. cortices. 

.: J'ai souvent vu cette espèce occuper, sur les vieux troncs de 
chène ou, d'ormeau, soit aux environs de Paris, soit dans le 
midi de la France, des espaces de plusieurs pieds d’étendue. 
Sa croûte est blanchätre ou grisètre, tantôt lépreuse, tantôt à 
peine sensible. Les lirelles assez grandes et souvent très-rap- 
prochées entre elles, sont noires, obtuses, la plupart arrondies 
ou ovales. Leur disque finit par être convexe , difforme et comme 
rugueux. J'en possède une variété qui, par sa croûte en forme 
de tache distincte et par ses réceptacles très-noirs, ressemble 


beaucoup au Lichen corticola. 
5. O. bleuitre, F1. fr., n° 837. 
O. cæsia, Ach. I. c., p. 2534 


Crusta late effusa, alba, leproso-pulverulenta; apotheciis ad- 
pressis, conferts, nigris cæsio-prunosis , rotundis , oblongis, pas- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 213 


simque flexuosis obtusissimis; disco plano in longioribus canali- 
culato demum turgido convexo; margine tandem evanescente. 
11. in cort. exarid. quercus. 


Sa croûte, assez épaisse, blanchätre et pulvérulente, n’est point 
circonscrile, et occupe souvent de grands espaces sur les troncs 
de chène, où je l'ai fréquemment observée aux environs de Paris. 
Ses réceptacles, un peu enfoncés dans la croûte et comme dé- 
primes, sont nombreux , pressés entre eux et plus ou moins 
saupoudrés d’une poussière grise qui leur donne une nuance 
bleuâtre. [ls sont tout-à-fait ronds, ou ovales, ou oblongs, mais 
toujours obtus. Leur disque, dans ceux qui sont peu avancés 
en äge, est plane ou rarement canaliculé dans les lirelles alongées; 
il finit par devenir convexe, et dans ce dernier cas, surtout 
si la saupoudrure n’existe point, on prendroit cette Opégraphe ou 
pourl'O. notha , ou pour une modification du Lich, corticola, Ach. 


6. O. attrayante. 

O. illecebrosa. 

Crusta albissima, pulverulenta, tenui, subeffusa; apothectis scu- 
telliformibus rotundatis (rarissime subovatis ) amæne pruinoso- 
cæstis, disco plano lato, margine tenuissimo subintegro. 

1. in rimis truncorum antiquorum quercus Galliæ meridionalis. 

Cette jolie espèce a des rapports avec l'Op. bleuâtre; mais, 
outre qu'elle a un facies qui la distingue facilement au premier 
aspect, elle diffère, 1°. par sa croûte moins étendue, plus 
mince et d’un blanc plus pur, assez semblable à de l’amidon; 
2°. par ses lirelles moins nombreuses, rondes et jamais oblongues, 
d'un bleuätre plus tendre, ne devenant pas noiratres. Ces ré- 
ceptacles ne sont ni difformes, ni flexueux comme dans la va- 
riété Æmylacea de YOp. cæsia, Ac. Ts ressemblent , à s’y mé- 
prendre, aux scutelles de quelques Lichens. Leur bord est 
très-mince, entier et moins bleuätre que le disque, surtout dans 
leur jeunesse. 


7. O. concaye. 

O. concava. 

Op. pruinata, Pers., in Act. Welteraw, vol. If, p. 14. 

Crusta effusa, glabra, cohærente , vix rimosa albida ; apothecris 
subtransversis , utrinque, altenuatis, disco concavo cæsio, mar- 
ge tenu. 

H, cort. cerasi. Persoon. 


214 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Ses lirelles sont plus grandes et moins saillantes que dans l'O. 


vulvelle. Leur disque, qui est creux et d’un gris bleuatre, est 
ordinairement dilaté dans son milieu. 


8. O. grumeleuse, 
O. grumulosa. 


O. Persoonii, var. B aporea, Ach. 1. c., p. 246? 
O. calcaria? Ach., tb. 


Crusta subeffusa, tartara , crassissima , friabili , albissima , gru- 
mulosa; apotheciis simplicibus magnis nigro cæsus, con ertis con- 
fluentibus , conglomeratisve ; ovatis difformibusque , disco lato 
planiusceulo , marginibus tandem varie flexuoso-denticulatis, mesen- 
teriformibus. 

H. in rupib. cale. Galliæ australioris. 


Sa croûte forme, sur les rochers, des plaques assez étendues, 
souvent indéterminées, d’une substance épaisse, inégale, bosselée, 
grumeleuse, friable, blanche intérieurement comme de l'amidon. 
Les lirelles saupoudrées d’un gris bleuâtre, et souvent fort 
grandes, ordinairement groupées sur les bosselures de la croûte, 

‘ ont des formes très-variées et insolites : tanlôt ovales, amincies 
par les deux bouts, tantôt oblongues et obtuses, enfin le plus 
fréquemment alongées , flexueuses, confluentes et tout-à-fait dif- 
formes. Leur disque est large , plane ou concave, et leur bord 
se fléchit, se replie, se contourne de tant de manières , que 
tantôt elles ont un aspect mésentérique , et tantôt elles ressemblent 
aux réceptacles des Gyrophores. Il n’est pas rare même qu'elles 
deviennent prolifères, par la pullulation de nouvelles lirelles 
sur le disque des plus anciennes. 

J'ai rencontré en 1806, cette singulière espèce sur les rochers 
calcaires verticaux de Mont-Redon, près Marseille , et à Beaucaire. 

9. O. verrucaire. 

O. verrucarioïdes, Ach. 1. c., p. 244, æ. 


V’errucaria salicina, FI. fr., n° 855. 


Crusta subeffusa, tenui, contigua, vix rugostuscula, albido- 
cinerascente; apothecüs simplicissimis, confertis, prominulis, mt- 
nutis, subglobosis , disco punctiformi quibusdam ovatis longius- 
culisve, disco rimæformi. 

H. in cort. exarid. salicino circa Lutetiam. 

C’est sur les échantillons qui ont servi de type à Decandolle 


et à Acharius, que j'établis le signalement de cette espèce. Sa 
croûte n’a pas de limites bien distinctes. Elle est mince, quoique 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 215 


très-apparente, d'un gris cendré ; sa surface , observée à la loupe, 
offre quelques inégalités à peine sensibles, et me paroit plutôt 
glabre que pulvérulente. Ses lirelles fort rapprochées, saillantes 
el très-peties, se présentent sous la forme de points noirs , 
ronds et ovales, dont le disque est tanlôt comme un pore central, 
ce quien a imposé à Decandolle, qui a cru y voir une espèce de Ver- 
rucaire, et tantôt en fente bilabiée. Parmi ces réceptacles, on 
en voit par-ci par-là qui sont alongé sel peut-être parasites. 


10. O. hystérie. 

O. hysterioïides. 

Hysterium Opegraphoïdes, F1. fr., n° 829. 

Op. verrucarioides , d'pepega, Ac. 1. c., p. 245. (Secund. litt. 
auloris.) 

Crusta subeffusa , tenui, subnulla, cinerascente subrimosa; apo- 
thectis simplicissimis, subimmersis, erumpentibus , quibusdam mi- 
nutts punctiformibus, aliis oblongis longtusculisque confluentibus, 
disco rimæformi. 

IT. in ligno subputresce. circa Lutctiam. 


Celle-ci a sans doute de grands rapports avec l'O. verrucarioides, 
dont Acharius la regarde comme une variété; mais elle en dif- 
fère essentiellement par ses lirelles plus longues, souvent con- 
fluentes , à demi-enfoncées dans les fibres du bois qu’elles écartent 
pour éclore. Ce dernier trait les fait ressembler à un Æysterium, 
geure auquel Decandolle a mal à propos rapporté cette espèce, 
qui s’en distingue et par la présence d’une croûte et par ses 
réceptacles plus opaques, moins durs, munis de rebords plus 
marqués. Parmi les lirelles alongées , il s’en trouve quelques- 
unes plus ou moins arrondies, dont le sillon est peu apparent 
ou effacé. 

11. O. fendillée, F1, fr., n° 847, 

O. rimosa. 


O. depressa, Ach. 1. c., p. 262. (Sec. litt.) 


Crusta determinata, suborbicularis, crassiuscula, glabra, læ- 
vigala, rimoso-areolata , albida; apotheciis simplicibus confer- 
tissimis, confluentibus , oblongis, longiusculisve, attenuatis, sub= 
Jlexuosis, crusta subimmersis , disco planiusculo, passim rimæformr. 

H. trunc. juglandis ad Parisios. 

Sa croûte lisse, glabre et blanchätre , est assez épaisse pour 
pouvoir se fendiller en aréoles; elle forme une plaque plus ou 
moins orbiculaire de 6 à 7 lignes de diamètre. Les réceptacles 


2167 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


très-noirs , nombreux, fort serrés entre eux et empiélant les 
uns sur les autres , eccupentpresque toute l'étendue de la croûte, 
de manière qu’à une certaine distance leur ensemble représente 
une tache noire. Ils ont une disposition concentrique. Leur 
forme est alongée, pointue aux deux bouts. Ils sont d’abord à 
demi-enfoncés dans la croûte. On en voit à la circonférence 
quelques-uns isolés, plus petits, ovales ou en forme de points. 
Leur disque est ordinairement à découvert et plane, mais il 
n’est pas rare d'observer des lirelles avec une fente bilabiée. 

Cette espèce , qui croît particulièrement sur l'écorce de noyer, 
est très-distincte de l'O. atra. Quelquefois une fuliginosité. obs- 
cure se répand parmi les lirelles , et empêche de bien recon- 
noîlre leur forme. 

12. O. rougeätre, FT. fr., n° 836. 

O. rubella, Pers., Ach. I. c., p. 249. 

Crusta late effusa ; lenut, lœvigata 5 cinereo-subrufescente; apo= 
theciis simplicibus prominulis, oblongis, longiusculisque, distinctis, 
acutiusculis; disco nunc rimæformi marginibus involutis, nunc pla- 
niusculo. 

IT. cort. trunc. pop. æscul. querc. Paris, Saint-Sever. 


Elle a quelques rapports avec l'O. notha dont elle diffère , 
surtout par la petitesse de ses lirelles, qui ne sont jamais ni 
rondes, ni convexes, et dont les extrémités sont eflilées. La 
couleur roussätre de sa croûte, la simplicité de ses réceptacles 
dont les bords sont souvent bien repliés en dedans, la distinguent 
de l'O. hébraïque. Peut-être que sa croûte emprunte sa couleur 
de la Zèpre odorante. J'ai du moins constaté que quand on l’hu- 
mecte elle répand une légère odeur de violette. Ses cupules , 
lorsque les bords en sont bien contractés, ont de la ressem- 
blance avec le Hysterium pulicare, mais elles sont bien moins 
saillantes, plus ternes et moins grosses que dans ce dernier. 


13. O. dartreuse, F1. fr., n° 855. 

O. herpetica, Ac. 1. c., p. 248. (Sec. litt. autor.) 

Crusta nunc subeffusa', nunc determinata, tenui, æquabili, ci- 
nereo-fucescente vel fumosa, sub lente punctis albidis adspersa ; 
apotheciis simplicibus , adpresso-subimmersis, parvis, confertis, ova- 
us, oblongis passimque longiusculis; disco planiusculo, rarius 
canaliculato. 

H. cort. variar. arb. (querc. pop.) Paris, Saint-Sever, Dax. 

Le signalement que je viens de donner a été tracé et d’après 

les 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 217 


les échantillons que Decandolle a décrits dans mon Herbier, et 
d’après ceux qu'Acharius lui-même n'a désignés sous ce nom. 
J'ai vu, outre cela et étudié, dans la collection de Persoon, 
un individu de cette même espèce, envoyé et nomme par le 
lichénographe suédois. Il étoit en tout semblable aux miens. 
Malgré toutes ces données positives, ce n'est pas sans une cer- 
taine hésitation que je me décide à regarder cette Opégraphe 
comme. distincte de l'O. roussätre. 

Sa croûte, qui est mince, tantôt limitée, tantôt vaguement ré- 
pandue, a une couleur rembrunie tirant sur le cendré verdàtre 
obscur; mais je n'ai jamais observé qu'elle fùt bornée par une 
ligne moire comme l'avance Decandolle , sans doute d'après 
Acharius, qui, dans son Prodromus et son Hethodus, admettoit 
ce caractère, tandis qu'il ne le mentionne plus dans sa Liche- 
nographia universalis. Sa surface n'est pas sensiblement bour- 
souflée, Elle est lisse, et si quelquefois on lobserve fendillée, 
cela tient plutôt à l'écorce qu'a la croûte elle-même. Observée 
à la loupe, on y apercoit, surtout dans le voisinage des lirelles, 
de petits points blanchätres qui ne sont nullement parasites. Les 
réceptacles, loin d’être proéminens et sillonnés, sont, au con- 
taire, déprimés, presqu’enfoncés dans la croûte, et leurs bords 
sont rarement satllans. [ls sont noirs, simples, les uns ovales 
ou oblongs, les autres alongés, quelquefois flexueux. 


14. O. pointillée. 
O. punctulata. 


Crusta effusa, tenuissima , lævigata, submembranacea, ferru- 
gineo-rufa, nigro punctulata; apothectis minutis subsimplicibus , 
anguste longiusculis, subflexuosis, distinctis, vix prominulis, disco 
runæformtr. 

II. in cort. quercus Galliæ meridionalis. 


Sa croûte ressemble à celle de l'O. roussätre, maïs elle en 
diffère , parce qu'au moyen de la loupe on découvre à sarsurface 
une foule de petits points noirs, saillans, convexes ; quelquefois 
percés d'un pore dans leur centre, comme dans les verrucaires , 
mais appartenant essentiellement à cette Opégraphe , et ne devant 
pas être considérés , je crois, comme les germes des ‘hirélles, 
Ces points sont moins prononcés que ceux de 1Q.. verrucaire) 
dont elle differe par la longueur de ses lirelles. Crles-ci, peu 
saillautes et moins distinctes, sont fort. étroites, nojres, siniples 
et marquées d’un sillon linéaire. 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Ee 


218 JOURNAL DE PHYSIQUE s DE CHIMIE 


** Réceptacles divisés. 
15. O. difficile. 
©. difficilis. 

O. rimalis, Ach. I. c., p- 260. (Sect. litt.) 


Crusta determinata , crassiuseula , contigua , subpulverulenta 
(laud membranacea) albido cinerascente: apotheciis confertis oblon- 
gis, longiusculisque, simplicibus, passimque bifidis, depresso-sub- 
unmersis, tandem confluentibus amorphis, disca rünæformi. 

A. in Ligno pütresc. salieis ad Parisios. 


Lorsque je consultai Acharius sur celte Opégraphe, de je 
lui envoyai un échantillon , il me répondit qu’elle ne différoit point 
de son ©. rimalis. Je n'ai pas cru, malgré cela, devoir adopter 
ce dernier nom, parce qu'il me reste des doutes sur l'identité 
de celte espèce avec celle décrite par cet auteur. Peut-être que 
l'exigaité ou l'imperfection de l'individu communiqué à celui-ci, 
ne la pas mis à même de saisir ses caractères. 

Sa croûte forme des laches plus où moins alongées, circon- 
scriles, d'un cendré blanchätre, dont la surface unie, sans être 
membraneuse, offre, dans sa jeunesse, quelques points obscurs, 
mis en évidence par la loupe, et qui ne sont peut-être que les 
germes élouffés des lirelles. CeHes-ci, à demi-enfoncées dans la 
croûte, noires, alongées, simples ou très-rarement bifides, rap- 
prochées, el souvent confondues, de manière à n'avoir plus de 
forme déterminée, ont un disque en rainure apparente dans celles 
qui ne sont pas conflueutes, el effacée dans les plus anciennes. 


J'ai trouvé cette espèce rare dans le creux des vieux saules. 
à Gentilly près Paris. 


16. O. hébraïque. 

O. hebraïca. 

Lichen hebraicus, Hoffin. En. Lich., p. 15, t. I, £ 2, f. 
Op. signata-rimalis-diaphora, Ach. ]. c. 


Op. signata, FI. fr., n° 839. 


Crustaeffusa, tenui, albido-cinerea ; apotheciis prominulis variis, 
rainoribus ovatis , oblongisque; majoribus elongatis, attenuatis, 2-3 
Jidisve; disco canaliculato tandem planiusculo. 

H. in trunc. arb. variar. 


J'ai acquis la certitude, par les divers échantillons de cette 
Opégraphe envoyés à Acharius, et par la correspondance de 
celur-ei, que les troisespèces de cet auteur mentionnées plus haut, 
devoient se réduire toutes à une seule. Sa croûte diffuse et iné- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 219 


galerment répandue, lisse ou à peine fendillée, est blanchätre, 
quelquefois presque nulle. Les réceptacles, d’un noir profond , 
bien saillans au-dessus de la croûte, sont, pour la plupart, 
simples, oblongs ou ovales, pointus aux deux bouts; mais il 
en est de bifurqués en YŸ, d'autres triangulaires assez ressemblans 
à un petit chapeau à trois cornes, et peut-être peu differens 
de ceux de l’Op. tridens, Ach.; enfin, j'en ai observé qui avoient 
quatre branches disposées en croix. Leur disque, souvent caché 
par le rapprochement des bords, ou canaliculé et concave , 
finit par être plane. < 

C'est évidemment à celte espèce et non au Graphis scripta, 
Ach. (Lich. univ.), qu'il faut rapporter le synonyme cité de 
Hoffmann. Ce dernier auteur, en parlant des lirelles, dit qu’elles 
sont crassæ breves, expressions qui ne sauroient convenir au 
dGraphis précité, dont les réceptacles sont absolument linéaires 
et enfoncés dans la croûte. La figure de l'iconographe allemand 
cadre fort bien avec l'Opégraphe que je viens de décrire, etJat 
vu à Lyon dans l'herbier de Latourette, que M. Gilibert a eu 
la complaisance de me laisser parcourir, cette espèce désignée 
par Hoffimann jui-même sous le nom de Lichen hebraicus. 


17. O. élevée. 
O. elevata, F1. fr., vol. VI, p. 160. 


Crusta effusa, tenui, albida, subpulverulenta, æquabili;: apo- 
theciis crassis, elevatis, turgidis, confertissumis, subacervulatrs , 
ovatis , oblongis, 2-4 fidisve demum convexis, difformibus, rugosis; 
disco canaliculato nec non planiusculo, passim albido pruinato. 

I. in ramis exsiccatis juniperi Phaniceæ Galliæ australioris. 


Cette Opégraphe , que je rencontrai abondamment en 1806, 
sur les branches du genevrier phénicien à Porquerolles, l’une 
des iles d'Hières, est remarquable par la grosseur et la saillie 
de ses réceptacles. Sa croûte blanchâtre, unie, mince, quoique 
bien sensible , et d’un aspect pulvérulent, enveloppe les dre 
sans avoir des limites tranchées. Les lirelles noires ou quelquefois 
saupoudrées, surtout dans leur jeunesse, d’une poussière blanche 
ou glauque, sont nombrenses, rapprochées, el même groupées 
et presque confondues. Les unes tout-à-fait simples, ovales ou 
oblonues , les autres bifides, trifides où même à quaire angles, 
ont leur disque concave dans le premier âge ayec les bords 
renversés en dedans, ensuite plane. Elles finissent par deveuir 
convexes, difformes et plus où moins rugueuses, 

Cette espèce établit la filiation entre l'O. notha et O0. hebraica. 


Ee 2 


220 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIS 


18. O. roussätre, F1, fr., n° 842. 

O. rufescens, Pers. 

O. siderella, Ach. (Ex autoris sententia.) 
O. bullata; FI. fr. 


Crusta latè effusa, tenuissima, submembranacea , lævigate, 
obscüre rufescente; apothectis depresso-subirmersis, distinetis, lon- 
giusculis, semplicibus, 2-3 fidisve, flexuasis; disco planiusculo, 
pass vix canaliculato. 

I. incorticel lævigäta querous. 


Celle-ci se distingue parfaitement de toutes celles qui lavoi- 
sinent, et par la teinte roussätre de sa croûte, qui est très- 
mince, unie, répandue au loin sur l'écorce, et par ses lirelles 
nullement satllantes, déprimées, planes ou à peine munies d'un 
mince rebord, élroites, linéaires, flexueuses, taulôt simples, 
tantôt bifides où trifides. La croûte observée à la loupe, offre 
de très-petites ébullitions sous la forme de points blanchätres 
presqu'imperceplibles. Je trouve ce caractère un peu plus pro- 
noncé dans l'échantillon que Decandolle a décrit dans mon her- 
bier sous la dénomination d'O. bullata, que Persoon lui ayoit 
imposée au hasard. 


19. O. groupée. 

O. acervulata. 

Crusta effüusa, tenuissima, lœvi, subrufescente subnulla; apo- 
thécits aterrimis, prominulis , nitidis linearis angustissimis apice 
muleifidis, in macullulas complanatas radiosas congestis, confluen- 
tibus ; disco canaliculato. 

H. cort. lœvis. truncorum quercus ad Saint-Sever. 

«C'est une des espèces les plus rares et les mieux caractérisées. 
Sa croûte est imperceptible et peut-être nulle. J'aperçois une 
‘teinte’roussätre sur l'écorce. Les lirelles, d’un noir profond, proé- 
®minéhtes él un peu luisantes, ont une disposilion fort remar- 
*quäble. Elles sont réunies par petites taches, de deux lignes 
au plus de diamètre, aplaties, plus ou moins arrondies, irra- 
diant du centre à la circonférence. Ces réceptacles fort étroits 
et linéaires, paroïssent se confondre au centre de ces élégantes 
astérisqües, mais leurs extrémités Circonférentielles sont plus 
distinctes ét, pour l'ordinaire, divisées en rameaux courts, très- 
manifestes. Leur disque,est une rainure bien enfoncée , bilabiée. 
“Au miliéu de ces petits groupes en rosettes, on en observe çà 
et là de moins parfaits formés par la réunion. et l'entrecroise- 


ET D'HISTOIRE NATUNELLF. 22% 
ment de deux ou trois lirelles. On y reconnoit loujours une 
disposition rayonnante. 

Cette jolie espèce, qui croît sur l'écorce encorelisse du chêne, 
eit fort différente de l'O. radiata, Pers., et de VO. dendritica , 
Ach. La forme, la structure de ses lirelles , la rapprochent de 
VO, atra. 

20. O. noire, F1. fr., n° 840. 

©. atra, Pers. 

O. denigrata, Ach. 1. c., p. 259. (Sec. lit.) 

O. pedonta, var. y sychnotea, ib., p. 265. (See. litt.) 

O. nimbosa, var. B subobliterata , ib., p. 246. (Sec. lit.) 

Lichen scriptus, Hoff., en. Lich., var. c. d. 


Crusta determinata, lævissima, tenui, æquabili, membranacea 
albida ; apotheciis angusto-linearibus prominulis, subnitidis, ater- 
rimis, flexuosis, simplicibus passimque, 2-5 fidisve, varie implexo- 
conferlis; disco canaliculato aut rimæforme. 

1. in cort. arb. var. 


æ Stenocarpa.-Apotheciisangustissimis congesto-maculiformibus, 
O. stenocarpa, var. B hapalea, Ach. 1. c., p. 256. (Sec. litt.) 
O. stenocarpa , F1. fr., vol. VI, p. 170. 

©. reticulata, 1b. 

H. in cort. exarida salicis. (Paris, Saint-Sever.) 


Cette Opégraphe, sujette à une foule de modifications dont les 
auteurs ont surcharge le catalogue desespèces et des variétés de ce 
genre , est reconnoissable, au premier aspect, à sa croûte mince, 
lisse, glabre, blanchätre, formant des taches plus ou moins 
distinctes, et à ses lirélles d’un beau noir pur, glabres, presque 
luisantes, fort étroites, linéaires , proéminentes, fort rappro- 
chées entre elles, différemment entrecroisées, entorlillées, sans 
être soudées ou confluentes. La plupart de ces lirelles sont 
simples, mais en y promenant la loupe, on en découvre de 
bifides et même de trifides. Le disque est le plus souvent.caché 
par le rapprochement , la contiguité des bords. Dans quelques 
circonstances rares, on l'observe un peu apparent, mais ce 
caractère est des plus inconstans, et c’est à tort qu'Acharius 
l'admet comme base distinctive de l'espèce. 

Je me suis assuré du synonyme de Hoffmann, par un échan- 
tillon que ce lichénographe avoit envoyé à Latourette avec cette 
dénomination. 

Acharius a décrit sous le nom de O. pedonta, y sychnotea, 
un individu saupoudré d’une poussière parasite verdàtre qui, en 


222 JOURNAL DE PUYSIQUE, DFE CHIMIE 


conservant plus long-lemps l'humidité aulour des lirelles, a em- 
èché leurs bords de se contracter, ce qui laisse à découvert 
e disque. Mais avec un peu d'attention on voit que le fond de 
la croûte, lorsqu'il n’est pas altéré par la présence de la pous- 
sière en question, est lisse, blanchätre, et que les lirelles ont 
dans ce cas, tous les caractères de l'O. atra. J'ai observé celte 


modification sur l'écorce du chêne, soit aux environs de Paris, 
soit dans le Midi de la France. 


Ce même auteur a mentionné sous la variété y melania de 
son Op. denigrata, une modification assez commune sur les 
jeunes troncs du chêne, dont la croûte a une légère nuance 
glauque, et dont les réceptacles, d’une extrême ténuité et un 
peu moins saillant, ont quelquefois une disposition radiée. 


J'avois envoyé dans le temps à ce lichénographe, sous le nom 
de Op. atra, var. subablitterata , un état particulier de cette èspèce, 
qui paroît avoir éprouvé quelque trouble, quelque crise dans 
son développement. Sa croûte, dont la surface est un peu inégale, 
mais pas assez pour mériter l’épithète de rodulosa , par laquelle 

‘il la désigne, forme, sur l'écorce lisse du frène, aux environs 
de Versailles, des taches blanchâtres transversales. Ses lirelles 
très-noires , tantôt très-petites, ce qui tient à leur imperfection, 
tantôt alongées, sont irrégulièrement disséminées , quelquefois 


confondues et difformes. Acharius en a fait la variété B de son 
Op. nimbosa. 


La variété que j'ai signalée sous le nom de Stenocarpa, est 
remarquable par l’étroitesse de ses lirelles, qui sont quelquefois 
tellement serrées et entassées , que leur ensemble représente 
une tache noire. D'autrefois elles sont enchevetrées comme un 
réseau noir sur un fond blanc, et c’est cette modification, 
assez fréquente sur les vieux troncs de saule, d’ormeau et de 
pin, que Decandolle a décrite comme une espèce, sous la dé- 
nomination d'O. en réseau. Nul trait vraiment spécifique ne jus- 
tifie l'établissement de cette variété et de sa modification en es- 
pèce. Cette démarcation peut être apparente sur un individu 
isolé, mais n'existe pas dans le fait. 

21. O. des pierres. 

O. saxatilis, FI. fr., n° 848. 

©. lithyrga, B confluens, Ach. 1. c., p. 247. 


Crusta, determinata, tenuissima , fere nulla, albido-cinerascente 
(rupicola); apothectis aterrimis, subnitidis, prominulis, longiusculis, 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 225 
simplicibus, divisisque, flexuosis, confertis passim confluentibus, 
disco rimæformi. 

ÎT. rup. cale. Galliæ australis. 


Elle a plusieurs traits de ressemblance avec l'O. atra, mais 
la nature de son support, la ténuilé de sa croûte, qui n'est pas 
membraneuse, et ses lirelles moins lungues el moins entrelacées , 
l'en distinguent suflisamment. 

Sa croûte forme, sur les rochers, des pliques d’un gris cendré, 
quelquefois avec une teinte roussätre, comme l'a fort bien ob- 
servé Decandolle, mais si minces, si superficielles, qu'elles 
échappent presqu'a la vue. Les lirelles, d’un beau noir un peu 
luisant, très-proëéminentes, la plupart linéaires dans leur parfait 
développement, tantôt simplement courbées , tantôt flexueuses, 
sont ordinairement siinples; mais on en rencontre qui ont un 
ou deux rameaux. Quelquefois elles sont distinctes les unes des 
autres, mais souvent elles sunt rapprochées, enfin on en ob- 
serve de groupées et de confluentes. 

J'ai trouvé cette espèce sur les roches calcaires des environs 
de Montpellier et de Beaucaire, et sur les pierres des murailles 
dans le département des Landes. 

22. O. sillonnée. 

O. sulcata, FI. fe, vol. VI, p. 171. 


Crusta tenui, subeffusa, albida nunc glabra submembranaceu , 
nunc rugosulè subpulverulenta ; apotheciis elongato-linearibus, pro- 
minulis, flexuosis, simplicibus, 2-3 fidisve, disco longitudinaliter 
rugoso, sulcato convexiusculo. 

H. in cort. variar. arbor. in Gallia merid. 


Voila encore une espèce supérieurement caractérisée par Îles 
sillons ridés qui parcourent la longueur des lirelles. Sa croûte 
mince, blanchätre, fort adhérente, présente, quant an poli de 
sa surface, des différences qui tiennent sans doute à la qualité 
de l'écorce. Je lai observée lisse et comme membraneuse sur 
les rameaux du chêne et sur l'écorce du houx. Sur les troncs 
du chène et du chätaignier, elle forme des plaqnes plus cir- 
conscrites, d’un aspect un peu pulvérulent, ayant de légères 
inégalités exanthématiques. Quoi qu'ilen soit de ces modifications 
de la croûte, les réceptacles ont une forme el une structure 
constantes. Ils sont proéminens , alongés, linéaires, plus ou 
moins flexueux, tantôt simples, tantôt branchus où bifurques, 
presque toujours terminés en pointe. Leur disque est convexe 
et marqué de sillons longitudiuaux très-prouoncés, souvent 1r- 


224 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


» . . 2 La 
réguliers ou interrompus. Il n’est pas rare de les observer étranglés 
en travers , ou même avec une solution complète de continuité. 


23. O. du cerisier, 1. fr., n° 841. 
O. cerasi, Pers., Ach. meth., p. 27. 
Graphis cerasi, Ach. lich. univ., p. 268. 


Crusta tenuissima , membranacea , lævigata nitidula 5 albido- 
glaucescente; apotheciis lineuri - angustissimis , conferlis erum- 
pentibus rectis, subparallelis, subsimplicibus, acununatis; disco 
canaliculato nec non runæformi, subpruinoso. 


H. transversim cort. cerasi. 


La direction constamment transversale de sa croûte, qui n’est 
qu'un mince vernis blanchätre , la rectitude de ses lirelles pa- 
reillement transversales, nombreuses, pressées entre elles , 
presque toujours simples, sont les principaux caractères qui dis- 
tinguent celte espèce de l'O. écrite. Je ne sais pas jusqu'à quel 
point peut influer sur ces Caractères, la direction circulaire des 
fibres de l'écorce du cerisier. Les lirelles acquièrent jusqu'à 
deux et trois lignes de longueur, et lorsqu'elles se réunissent 
en se soudant bout à bout, comme je l'ai observé plusieurs fois, 
elles ont alors une étendue démesurée. Leur disque est saupoudré 
d'un gris bleuâtre. 

24. O. serpentine, F1. fr., n° 845. 

O. serpentina, Ach. meth., p. 29. 

Graphis serpentina, Ach. lich. univ., p. 260. 

Crusta determinata, tumidula , rugulosa, cinereo-albida, nec 
non albissima; apotheciis immersis, angusto linearibus, cæsio prui- 
nosis, confertissünis, variè implexo - flexuosis , subsimplicibus 
divisisque; disco canaliculato, marginibus tenuissimis aculis, tan- 
dem planiusculo. 

H. in cort. var. arb. 


Sa croûte, tantôt décidément blanche, tantôt grisätre ou cen- 
drée, souvent presqu’entièrement envahie par l'abondance des 
reéceplacles , forme une plaque circonscrite dont la surface glabre 
et plus où moins fendillée , offre de légères rugosités. Les li- 
relles fort nombreuses, serrées entre elles , longues et étroites, 
simples ou rameuses, enfoncées dans là croûte , diversement 
flexueuses et entrelacées, ont leur disque d'un gris bleuâtre, 
creusé en étroite rainure , avee des bords relevés, minces, tran-" 
Chaus , ordinairement moins saupoudrés que le disque , quelque- 
fois connivens, Dans un âge plus avancé, leur bord s’eflace, elles 

paroissent 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 225 


paroissént planes et comme rebordées par la croûte qui, dans 
ce cas, offre une surface finement fendillée en divers sens. C’est 
cette modification que j'ai vue dans l'herbier de Persoon sous. 
le nom d'O. subtilis, et qu'Acharius a mentionnée comme une 
variété. Toutes celles que ce dernier auteur a décrites, ne sont 
que des différences dépendantes de l’âge ou de la localité. 


25. O. écrite. 

O. scripta, Ach. meth., p. 30. 

Graphis scripta, Ach. lich. univ., p. 265. 

©. pulverulenta et limitata, F1. fr., n° 844, 845. 

Crusta tenuissima, membranacea, læevigata x subnitida ; apo4 
theciis lineari-angustissimis, acutis erumpentibus, simplicibus, di- 
visisque, disco rimæformi, marginibus conniventibus, crusta ment- 
branacea circumductis. 

H. cort. tener. var. arb. 


Sa croûte lisse, parfaitement glabre, membraneuse et souvent 
Juisante, a une telle ténuité, qu’elle est inséparable de l’épiderme 
de l'écorce. Elle donne à cette dernière une sorte de vernis, 
tantôt blanchätre, tantôt gris plombé plus ou moins enfumé et 
bordé d’une ligne noire, ce qui a suffi à plusieurs auteurs pour 
former une espèce sous le nom d’'O. Zimitata. Les lirelles longues; 
étroites et pointues, droites ou fléchies, simples ou bifurquées, 
fendent la croûte pour éclore, deviennent légèrement proémi- 
nentes, et tiennent souleyée cette dernière. Elles sont noires 
et marquées , d’une rainure profonde béante ou quelquefois plus 
rétrécie par la connivence des bords. 

La plupart des auteurs ont décrit sous le nom d'O. pulveru= 
lenta, une modification de celle-ci. 


Tome LXXXVII. SEPTEMBRE an 1818. Ff 


| 2 


OBSERVATIONS MÉTEOROLOGIQUES TAIÎTES 


A compter du 1° 


THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR 


La 
= CENTIGRADE. 
7 
? MINIMUM. MAXIMUM. A MIDI. 
heures Ra; 
1 | àmidi. +2400| à 4 = m. +16°25| +24,00 
2 | à3s. +Lo93,00! à 4 1 m.—+12,79| +92,80 
8 | à515. 94,50! à 4! m. 10,50| +227 
4 |à5s +07 50| à {£im. #18,25| 26,00 
5 |à3s. +530,40! à4 1m. -+15,00|,+29,2b 
6 | à3s. +3250| à 41m 15,25] 30,75 
7 |à3s. + 29,25] à 4 km. H19,60| 498,40 
8 | à3s. +-25,40| à 4 im. 15,95] +2,79 
9 [à3s. +50,4|.à 42m. +7,25] +8,90 
10 a4is. Lo9,75] à 45m. 17,10] Hoi, 40] à 
11 | à3s. +1,50) à 4 $ m. +14,25| 20,29 
12 | à3s. +93,9b| à 4 3m. +18,oc| +22,00 
13 | à8s..., +260 à 4 $mr. io 5o| +21,5c 
14 là3s. —Hos,ic] à 45 m. +19,50| Ho1,5c 
15 [à5s, Ho1,25| a 43 Sin. 415,00 +19,60| : 
16 | a8s.  +91,50 à4im. 192,50 420,95 
17 | à midi. +99,j0 à 4% me Hu 1,50|( +29, 96 à 
18 | à midi, 25,60 à 4me1) +19,2P| 95,60 
19 labs. , Ha5,75| à5m.y 13,00 15,90 
20 | a8s. 17,50! à 5 m. 10,90], +16,40! à 
o1 | a8s. i8,oo| à5m. (+i9,50| L18,/0| à 
22 | à3s. 417,55] à5m. H11,95 16,90! : 
25 | à midi. +417,60| à5m... 10,80 17,60 
24 là 3s. Hoi,95| à 5m. + 8,75 19,00 
25 | à3s." +oi,4ol à5m. +13,50| +a1,05l 
26 | à midi. . 19,40] à5m. +12,60 +19, 4° 
27 | à 535:  Ho0,25| à5m. -+11,50 +19, 2) 
28 | à3s. <o4ob] à5m. +15,05 22,60 
29 | à midi. +24,95| à 5m. 16,60 Hope 
50 | à 10 3m.4-25,q0| à 5 Em. +11,50 ne 
_311à8s. 25,60! à 5 m.+u11,10 _=+23,56 
Moyennes +25,17 413.41] +02,,4 4 
RECAPIT 


Plus grand degré de chale 


Plus grande élévation du mercure 
Moindre élévation du mercure 


Moindre degré de chaleur 


COUVERIS Te eee 


ÿ 
© janvier 1818, les hauteurs du Fee 


El 
BAROMÈTRE MÉTRIQUE. -5 
MAXIMUM. minimum, la mi | F5 | 
El 
heures* mille heures« mil. mill | 
à95..... 760,82) 4 5s.....958,24| 758,52] 24 
à 9 m....760,25 à 55s....758,80| 759,61| 25,6 
ag m....799,80! 45 5s....708,15| 7b9,10| 23,5! 
à gym... 759,93! EIRE 728,41| 759,421 24,81 
a 10, M..7D9,08| à g 5..... 727,97| 758,48] 25,14 
47 m....757,48| à 9% S....704,96| 756,5] 26,6 
à9s......758,b8] à 4 1m. “BA ba 756,29| 26,4M 
a gm, 2.729,52] à gs.....756,50| 758,70] 25,41 
à7m 759,25| à 105....750,84| 755,20| 26,2 
A OS e.e 796,05] à 4 Ÿm...7b0,41| 753,68| 243 
a7m.2709 01 | ag an 756,54| 758,66] 22, 
à 4 Sm.795,509| à Dis, +. ..753,0b| 754,47] 23, 
a,gm:...796,00| à 4 #m,..755,70| 756,55] 29} 
ES CH It 796,114 DS "et 754;9°| 755,60] 22,4 
ATOS et 707,95) à 4 #m...755,97| 756,61| où, 
à gm:...:799,09| à 4 s..:..758,0b| 758,81| 2186! 
à 7 mi..1706,89| à gs... .757,44| 758,39| 99! 
à 5 m....7b6,67| a gs... .L 723,39| 755,56| 22,5h 
AUOISS LIde 794,65| à 7 m 702,72] 752,88] 20; 
ENCNCUPERE 799,81] ab m 757,30] 758,46| 20, 
à7m 750,02] 4 gs. ..., 757,90] 758,88| 20,2 
aigis 0 759,44] à 5 m....757,05| 757,55] 1954 
a 105... .709,06| à 5 m 760,47| 751,79| 19% 
| àgm,...765,81 abs .-761,14| 763,23| 20,21! 
à 9,m..:..761,76| 4 5 s. 759,78| 761,15] 20,14: 
| à 9 m.,..708,07| 495... 797,79| 758,02| 20,40! 
la gme 766 45 46 8.0. 76404l 755,88 [80 
àg s...0.756,67| à 5m...,755,21| 753,51] 20,2Ml! 
à midi....760,16! à 5 m 758,48] 760,16| 20,744) 
à9S-2--.7b7,DOl A4... 755,85 726, 24| 29,0 
à 925....758,58) à 9 m....7b3,07| 757,20! 21 
758,61 755,57| 767,51, 22, Ml 
ULATION. 
Millim. 


763°81 le 24 


750,41 le 10 


Use aa di tade +-31°50 le 6 

Pate 0e DO va 10,80 le 23 
Nombre de jours beaux........ 28 
6 


DE 


L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. 


sont réduites à la température de zéro du T'hermomètre. 
… AOUT' 1818. 


e ve POINTS VARIATIONS DE L'ATMOSPHERC. 
= VENTS. 
um |à midi LUNAIRES. 
? LE MATIN. A MIDI. LE SOIR. 
1 | 63 |N.-O. Très-nuageux Couvert. Nuageux. 
2 58 |E. N.L.a4h#m.] dem. Nuageux, Beau ciel. 
3 | 54 |E.-N.-E, Beau ciel Beau ciel, Légers nuages. 
4 5o |E. Légers nuages. Idem. Beau ciel. 
5 | 48 | Idem Idem, brouillard. Idem. Idem. 
6 45 Idem Beau ciel, brouillard. | dem. Nuag.par intervalles. 
7 6q [N.-O. Nuageux, Nuageux. , Nuag-ux. 
8 | 61 NE, Idem Légères vapeurs, Lézers nuages. 
g | 52 [E. P.Q.à2h32s] Jdem. Nuageux. Quelques éclaircis. 
10 | 82 IN. PI.fine,tonn.av.lejour.|Très-nuageux. Nuazeux. 
11 65 |N.-E. Nuageux. Légers nuages. Idem. 
19 | bo | Jdem Légers nuages, Beau ciel. Beau ciel. 
15 | 5o | Idem Lune périgée. [Beau ciel. Idem, Idem. 
14 | 49 Idem , Nuageux, Nuageux. Couvert. 
2D | 77 |N: Couvert. Très-nuageux. Idem. 
16 | 69 |N.-O. P.L.àGh14/m.| /dem, Couvert. Nuageux. 
17 | 60 | Jdem * [Nuageux, brouillard. | Jdem. Idem. 
18 | 59 |O.-S.-0 Très-nuageux , brouil.|Ciel trouble et nnag. |Couvert. 
19 | 87 |N.-E. Pluie. Pluie continuelle. Pl.abond, dans lanuit. 
20 | 72 |N.-O. Couvert, pluiefine. |Couvert. Couvert. 
21 55 Idem Couvert. Idem. Nuageux. 
22 | 56 | Jdem Nuageux, Nuageux. Iden. 
23 | 60 | Jdem, \D:Qa5h2s| Idem Couvert, par intervall.| dem. 
24 | 55 | Idem Idem Nuageux. Très-nuageux. 
25 62 | Jdem Couvert Très-nuageux. Idem. 
26 | 6o| Idem Idem Couvert. Légers nuages, 
27 | 65 |O. Nuageux Très-couvert. Couvert. 
28 | 72 |[O.-S.-0 Lane apogée, Petite pluie Id.. quelq. g. d'eau. Idem. 
29 | 60 | Idem Couvert. Très-nuageux, Beau ciel. 
30 | 62 |O. Nuageux, brouillard. | {dem. Idem, 
51.| 63 |S.Æ. N.L.a5h37s] Jaem. |Légères vapeurs. Idem. 
Moyen 61 ù 
RÉCAPITULATION. 
INÉNETESE DO 2 
NERSPE EC ER 6 
Téepicldts cho be 6 
Jours dont le vent a soufflé du Se NERSE ET fie À 
S.-0..... ane o 
(CEREEENTEUTE 5 
NEO FETE soin 
le1°", 12°,086 


Thermomètre des cayes 


centigrades, 
le 16, 12°,086 


dans la cour 


28mm 70 — 0 p. 11 lig- 
sur l'Observatoire... 257,50 — 0 


Eau de pluie tombée $ 


7 
10° 


11 


228 JOURNAL DE PIYSIQUE, DE CHIMIE 


NOUVELLES SCIENTIFIQUES. 
MÉTÉOROLOGIE, 
Sur une nouvelle chute d'Aérolithe. 


Le 29 juillet dernier, il est tombé du ciel une pierre dans 
le village de Slobodka (gouvernement russe de Smolensk). Sa 
chute a été tellement violente, qu’elle s’est enfoncée de plu- 
sieurs pieds dans la terre; son poids étoit de 7 livres , sa cou- 
leur d’un brun foncé, et elle avoit l'aspect métallique. (Journal 
général de France, 13 octobre 1818.) 


GÉOLOGIE. 


Notes sur les monts Himäl&, par M. Frazer, lues à la Société 
Géologique (en Angleterre), le 20 février 1818, et accompagnées 
d'échantillons minéralogiques. 


Les plaines de l'Indostan sont terminées au nord-est par une 
chaine montagneuse qui court des bords du Burrampooter à 
l'Indus, et qui traversant celle rivière, forme, en se dévelop= 
pant, une contrée élevée, moins circonscrile et moins impo= 
sante , dont les chainons se rattachent à la plupart des principales 
montagnes de l'Asie. La ceinture des montagnes qui sépare ainsi 
l'Indostan du Thibet, est parfaitement isolée et n’est interrompue 
nulle part, présentant dans son cours des hauteurs irrégulières, 
qui ne sont divisées par aucune vallée remarquable, allant d'une 
plaine à l’autre. Ces montagnes, du côté de l'Indostan , offrent 
des flancs roides et escarpés, qui succèdent brusquement à un 
terrain de niveau, tandis qu’au nord-ouest, suivant les meilleures 
relations qu’on a obtenues, la pente descend par degré, forme 
des collines couvertes de verdure, et se termine en une plaine 
légèrement inclinée. 

Les grands monts Himälà forment le centre de ce rideau; ils 
élèvent leurs crêtes aiguës, couvertes de neiges éternelles, à 
une hauteur presque incroyable, absolument déserte et inacces- 
sible. M. Colebrooke, dans le douzième volume des Recherches 
asiatiques (Asiatic Researches), estime la hauteur des différens 
pics de 26,862 pieds à 22,000 pieds (le pied anglois est à peu 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 229 


près les 2 du pied francois). Jumnatra, la source du Jumna, 
s'élève, dit-on, à 25,500 pieds au-dessus du niveau de la mer. 
Durant le voyage, dans lequel on recueillit les échantillons mis 
sous les yeux de la Société, la route eut lieu sur la pente de 
cette montagne à 2000 pieds du sommet, autant qu’on put con 
jecturer. Les échantillons furent ramassés entre les rivières Bha- 
girutta et Sutlej. La direction générale des montagnes est ici 
presque nord-ouest et sud-est; une pelite colline escarpée qui 
s'élève de 5oo à 750 pieds en hauteur, et qui s'étend de trois 
à six milles en largeur, court vers les plaines de Hurdwar, à 
moitié chemin de Sutlej. Elle consiste en sable, en argile durcie 
et en lits de cailloux arrondis et de gravier. Le rideau suivant 
de montagnes, a de 1500 à 5000 pieds de hauteur, avec des 
cimes étroites et aiguës, el se compose d’une argile compacte, 
très-décomposable, d'une couleur brune-erisätre, et contenant 
de la matière siliceuse. Justement au-delà de ce rideau s'élève 
une montagne de pierre calcaire d’environ 7000 pieds de baut. 
Un courant assez considérable, et qui coule toujours, marquoit 
la séparation entre cette chaine et une masse de montagnes , 
composées presqu'entiérement de variétés de schiste, avec beau- 
coup de mica, et de veines de quartz. Parmi ces substances, 
ou observoit un grès grossier et une agglomération de sable, 
de mica et de gravier, ayant pour ciment un spath blanc qui 
se cassoit aisément, À mesure qu'on approchoit des monts nei- 
geux, on distinguoit des roches de quartz blanc et d’une pierre 
dure, à demi-transparente, qui présente plusieurs couleurs, le 
gris, le rouge, le jaune et le verdätre. Quand on fut arrivé 
au centre de ces montagnes couvertes de neige, les pics éloignés 
paroïssoient être stralifiés et s’incliner vers le nord-est sous un 
angle d'environ 45 degrés. A plusieurs milliers de pieds au-dessous 
de leurs sommets, toute végétation cesse, el on n'y voit aucun 
être vivant. La route , en revenant, se fit en grande parle Je 
long du lit de la rivière Pabur, qui prend sa source dans les 
profondeurs de l'Himälà; ce lit offrit des blocs d'une espèce par- 
ticulière de roche. Le schiste et le calcaire composoient les 
roches voisines. Il se présenta une autre occasion de voir les 
sommets de l'Himälä; ce fut du mont Jumnatra, d’où s’élévent 
deux grands pics couverts au sud et au sud-est de meige per- 
pétuelle, mais montrant vers le nord-ouest une face escarpée 
et une roche à nu. La rivière Jumna, qui prend sa source;en 
cet endroit, étoit partagée en une multitude de pelits ruisseaux 
coulant de dessous la neige et réunis dans un étang, au fond 


250 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE 


d'une gorge profonde. On trouva ici presque chaque sorte de 
roche observée durant le voyage, particulièrement la roche 
qu'on a cilée ci-dessus, comme se rencontrant dans la rivière 
Pabur; et la stratification générale étoit entrecoupée de veines 
de quartz blanc. De ces veines sort un courant d'eau chaude, 
chargé de matière caleaire, qu'il dépose sur la surface des ro- 
chers, à mesure qu’il coule dessus. Il n'y a point de glaciers 
en aucun endroit de ces monts couverts de neige; mais il 
semble qu'il gèle perpétuellement sur leurs sommets. 

Après être descendu dans le lit de la rivière nommée Bhagi- 
ruila, On ÿ Voyagea aussi presque jusqu’à sa source ; la vallée à tra- 
vers laquelle il esttracé est plus profoude et plus sombre, et les 
précipices sur l’un et l’autre côtés sont plus grands que ceux qui 
forment le lit de la rivière appelée Jumna; la roche dans le 
voisinage de sa source éloit granilique , et contenoit de la tours 
maline noire. (nnals of Philosophy, juin, 1818.) 


BOTANIQUE. 


Sur l'espèce de circulation de la Charagne, Chara fœtida, par 
M. Gazzi, et sur sa composition chimique , par MM. Chevalier 


et Lassaigne. 


La Charagne transparente de Vaillant est une plante aquatique 
partagée en plusieurs parties, par des nœuds qui se trouvent 
le long de ses tiges, à peu près comme le sont les graminées, 
et qui se trouve dans les eaux douces de toutes les parties de 
J'Europe. Dans cette Charagne on voit, au moyen du micros- 
cope, un fluide circuler dans l'intervalle des nœuds, de telle 
sorte que le tube compris entre deux nœuds, présente dans sa 
longueur deux courans de fluide séparés et dans une direction 
opposée; dans l’état ordinaire, quand le fluide qui, par exemple, 
monte visiblement à droite est arrivé à un nœud supérieur, il 
redescend le long du bord gauche de la tige; et lorsqu'il est 
arrivé au nœud inférieur, il passe de nouveau à droite pour 
remonter, et ainsi de suite. Le fluide circulant n’est autre chose 
qu'une lymphe dans laquelle nagent des matières plus ou moins 
denses et colorées, qui sont transportées avec elle et qui ser- 
vent à faire voir sa circulation. Quelquefois, si l’on vient à agiter 
ou à comprimer , ou à frapper le chara, elle semble suspendre 
elle-même le mouvement de ses fluides pour le ranimer ensuite. 

L'abbé Corti, qui a fait à ce sujet un petit ouvrage fort cu- 
rieux, en conclut, non pas d’après une observation directe, 


ET D'HISTOIRE NATURYLLE. 251 


imais d’après le raisonnement, que dans chaque entre-nœud de 
la plante, il y avoit deux sortes de vaisseaux analogues au double 
système artériel et veineux, de la plupart des animaux; il en 
conclut que chacun des canaux avoit deux*ordres séparés de 
vaisseaux dirigés dans sa longueur, en sorte que le fluide as- 
cendant restoit dans toute l'étendue d’une articulation séparé du 
fluide descendant. Mais les observations de M. Grossi, continuées 
pendant plusieurs ahnées, l'ont convaincu que les deux mouve- 
mens opposés de chaque entre-nœud, s’exécutent contempo- 
rainement dans un seul et même vaisseau ; les preuves qu’il ap- 
porte en faveur de celte opinion, sont les suivantes: 

1°. Sil'on partage en deux un entre-nœud, au moyen d’une 
ligature faite avec un fil de soie, et si on laisse ensuite la plante 
se reposer, bientôt la contraction produite par le fil produit 
l'effet d’un nœud; c’est-à-dire que le fluide parvenu jusque là 
redescend et forme deux ordres de circulation parfaitement sé- 
parés et distincts l’un de l’autre, dans chaque moitié de l'entre- 
nœud naturel. La même chose arrive lorsqu'on appuie fortement 
avec un corps quelconque, au milieu de lespace qui sépare 
deux nœuds naturels. 

2°. Bien plus, si par le premier procédé on partage l'entre- 
nœud en trois parties, au moyen de deux fils, alors on ob- 
servera trois systèmes de circulation complets, c'est-à-dire uñ 
pour chaque intervalle, quoiqu’avant l’opération il n’y en eüt 
également qu’un seul pour le tout. 

3°. Quelquefois même sans avoir recours à la compression 
artificielle, on voit cependant naître ces circulations distinctes 
et multipliées, et cela parce qu’une trop grande quantité des 
matières plus ou moius denses et colorées, -qui nagent dans la 
lymphe, se rassemblent dans quelque lieu du tube, et alors 
en diminuent le courant ou l’arrêtent tout-à-fait. Si l’obturation 
se fait complètement dans un ou deux endroits, il en résulte 
alors deux ou trois circulations, absolument comme avec les 
ligatures. Mais si les matières, par leur agglomération, n’arz 
rivent pas à empêcher entièrement Ja circulation, mais lembarz 
rassent seulement, alors le fluide lui-même se divise en deux 
parties, l’une passe au-delà de l'obstacle et continue son cours, 
tandis que l'autre rebrousse chemin et constitue une circulation 
particulière dans une seule partie du tube. Quelquefois il arrive 
que l'obstacle est détruit par la partie qui suit la marche or- 
dinaire, et alors la circulation générale se rétablit comme elle 
est ordinairement entre deux nœuds. | 


252 JOURNAL DE PHYSIQUE, DÉ CHIMIE, lc. 


Tous ces phénomènes soigneusement observés et décrits par 
M. Gorri, ne peuvent se concilier avec l’idée que chaque canal 
Jatéral est divisé dans sa longueur, par une sorte de diaphragme 
qui le partageroit en deux courans , l’un ascendant et l’autre 
descendant. 11 pense plutôt que les deux courans opposés, s’exé- 
cutent dans un seul et unique canal, l’uu à droite et l’autre à 
gauche. Il trouve d'autant plus de raison pour soutenir cette 
opinion, qu'il est parvenu à mettre pour ainsi dire à nu le tube 
latéral , en le séparant de la plus grosse écorce qui l'enveloppe, 
Dans cet état, il lui a paru comme un boyau fermé par une 
tunique très-fine , transparente , dans lequel se continueroit tou- 
jours, après quelques momens de repos depuis l'opération , les 
deux courans; jamais il ne lui a réussi d’apercevoir aucune trace 
de diaphragme longitudinal; bien plus, en prenant un de ces 
inbes ainsi mis à découvert, et en le divisant en plusieurs pelits 
anneaux, et en les exposant d’une manière convenable sous le 
microscope, il n’a pas vu davantage le diaphragme, Il a aussi 
observé, comme l’avoit déjà fait le professeur Amici, que dans 
l'intérieur de l'écorce se trouvent d’autres canaux dirigés lon- 
finalement , Mais beaucoup plus petits que le canal inférieur, 

ans lequel , comme il a été dit plus haut, se continue la grande 
circulation après que l'écorce est enlevée. (Journal de Physique 
de Brugnatelli, 3° bimestre, 1818.) 

Nous ajouterons à ces nouvelles observations sur la physio- 
logie de la Charagne, les résultats principaux de l'analyse chi- 
mique que MM. Chevalier et Lassaigne en ont donnée dans le 
Journal de Pharmacie pour le mois d'avril de cette année. Cette 
plante contient, 1°. une matière particulière de nature animale; 
2°. une matière huileuse de couleur verte, avec une odeur de 
poisson; 8°. du muriate de soude, du sulfate, du muriate et 
surlout du carbonate de chaux qui forme la moitié de la plante 
desséchée, et auquel est dû l'aspect blanc et terreux qu’elle 
prend quand elle à été retirée de l’eau. La grande quantité de 
carbonate de chaux qui recouvre la Charagne, et qui n'existe 
pas dans les autres végétaux qui se trouvent avec elle, a fait 
soupconner à M. Vauquelin que ce pourroit bien être un poly- 
pier, ce qui se trouve en rapport avec le résultat des observas 
tons de M. Bosc sur ce singulier corps organisé. 


De YImprimerie de Mme Ve COURCIER , rue du Jardinet, n° 12. 


Grave par Ambroise. Tarduu, Rue du Jardnet N° 12 . 


JOURNAL 


DE PHYSIQUE, 
DE CHIMIE 
ET D'HISTOIRE NATURELLE. 


OCTOBRE an 1818. 


OBSER V ATIONS 


SUR LA MESURE DES ANGLES DES CRISTAUX ; 
Par M. HAUY. 


Lorsque j'ai composé, il y a environ vingtans, mon 7raité 
de Minéralogie, ma collection, outre qu’elle ne se trouvoit pas 
éloignée de sa naissance, se ressentoit de la rareté dont étoient 
parmi nous les cristaux réguliers et nettement prononcés. C’est 
presque uniquement avec ces foibles moyens, que j'ai entrepris 
d'appliquer ma théorie à toutes les variétés décrites jusqu'alors, 
en ajoutant celles qui étoient nouvelles pour moi. On sait qu’en 
général l'étude des corps dont il s’agit exige beaucoup de choix 
de la part de ceux qui la cultivent, pour en trouver dont la 
formation ait élé à l'abri des causes accidentelles qui altèrent 
le niveau des surfaces, et occasionnent des différences appré- 
ciables entre leurs inclinaisons respectives et celles qui dérivent 
des lois invariables de la structure. Ces sortes d’accidens ont 
été la cause d’une partie des inexactitudes qui me sont échappées 
à mOn insu, el que j'aurois pu reclifier, si j'avois eu plusieurs 
cristaux de la même variété, pour vérifier mes observations. 
D'autres inexactitudes ont été occasionnées par des imperfec- 
tions dort je m'apercevois, sans pouvoir dissiper les incerti- 


Tome LXXXVII, OCTOBRE an 1818. Gg 


234 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


tudes qu’elles faisoient naître; et dans ces sortes de cas, j'ai 
eu soin d'avertir que je ne garantissois pas la précision de mes 
mesures (1). 

Tel est le sort des ouvrages qui sont comme les premiers 
jets d’un grand travail, surtout lorsqu'il présente les résultats 
d'une mullitude de recherches délicates, que parmi ceux qui 
portent l'empreinte de la précision et de l'évidence, il s’en 
trouve d'autres qui laissent encore des doutes à éclaircir, et dont 
la détermination définitive est réservée à des observations failes 
sur des objets plus parlans. ; 

Les accroissemens considérables que ma collection a recus 
pendant les années qui ont suivi l'impression de mon Traité, 
m'ont fourni les moyens de faire diverses corrections à mes an- 
ciennes déterminations. J'en ai fait connoître quelques-unes 
dans mon Tableau comparatif, et depuis l’époque où il a paru, 
j'ai continué de m'occuper du même sujet, me réservant à in- 
sérer les nouveaux résultats auxquels j’étois parvenu, dans la 
seconde édition que je prépare de mon Traité de Ninéralogie. 

Je n’avois point d'autre instrument pour la détermination des 
angles, que le goniomètre inventé par M. Carangeot, et avec 
lequel on ne doit guère se flatter de saisir les différences 
moindres qu'un demi-degré, et qui peuvent aller jusqu'à en- 
viron un liers de degré, lorsque le cristal sur lequel on opère 
est d’une perfection qui ne laisse rien à desirer. Mais la méthode 
que Jj'avois adoptée el que j'exposerai bientôt, serbloit me dis- 
penser d'une plus grande précision, parce qu’elle me fournissoit 
un moyen de reconnoitre, à l’aide de la théorie, le terme où 
je devois m'arrêter, au milieu dés variations que subissoient 
mes résullats, tantôt dans un sens, tantôt dans l’autre. 

À mesure que les sciences font des progrès, ceux qui les 
cullivent inventent de nouveaux moyens de déterminer plus exac- 
tement les quantités qui servent de données pour la solution 
des problèmes. Le cercle répétiteur de Borda avoit fourni un 


mo 


QG) En traitant de la cristallisati n de l’étain oxidé (Traité de Minéralogie, 
tome IV, pag. 153), j’avois employé des considérations puisées dans la loi de 
symétiie qui me faisoient présumer une différence entre la forme primitive de 
ce minéral, et le cube dont elle ne s'éloigne pas beaucoup. Mais les seuls cris- 
taux que j'euse alors entre les mains, et qui étoient de ceux qu’on appelle ma- 
clés, se refusoient aux observations qui m'auroient mis à portée de vérifier la 
difference dont il s'agit, et que j'ai indiquée dans mon T'ableau comparatif, 
pag. 284 et 285. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. ; 235 


de ces moyens à l’Astronomie et à la Géodésie. Malus l'a em- 
ployé pour mesurer au moyen des angles d'incidence et de ré- 
flection de la lumière, les angles de plusieurs corps naturels 
qu'il se proposoit de faire concourir au développement de sa 
belle théorie de la double réfraction. M. le D' Wollaston, à qui 
les sciences ont tant d'obligations, a imaginé un autre instru 
ment très-ingénieux, fondé sur le même principe, pour en faire 
des applications directes à la Cristallographie. La petitesse des 
corps, loin d’être pour lui une cause d’exclusion, semble de- 
venir plutôt un motif de préférence, et c’est une prérogative 
dont jouit ce savant si distingué, de faire servir les moyens que 
lui fournissent la Physique et la Chimie, à déterminer tantôt les 
angles, tantôt les principes composans d’un objet qui échappe 
presque aux yeux, et qui semble emprunter de l’extrème ha- 
bileté de la main qui le soumet à l'expérience, ce qui manque 
à ses dimensions ou à son volume. 

M. Phillips, qui s'est exercé avec succès dans l’art de manier 
le même instrument , a publié dans les 7'ransactions de la Société 
Géologique de Londres (1), les résultats des opérations qu’il a 
faites, pour mesurer les anglés d’un cerisin nombre de cristaux, 
et sans même leur comparer ceux auxquels je suis parvenu, il 
suflit de considérer la manière dont cet instrument est construit et 
divisé, pour se croire fondé à en conclure que le goniomètre 
ordinaire est incapable de lutter avec lui, et qu'il n’y a point 
à balancer sur le choix, toutes les fois que l’on voudra obtenir 
une précision satisfaisante dans les mesures des angles des 
cristaux. 

Les résultats de M. Phillips , qui n’avoit aucune connoïssance 
de la plupart des rectifications que j'ai faites de mes anciennes 
déterminations , indiquent avec plusieurs de celles-ci des dif- 
férences très-sensibles , qui semblent achever de garantir la 
prééminence du goniomètre à réflexion; et l'espèce de défaveur 
- qu’elles tendent à répandre sur celui dont je me suis servi, 

pourroit même être une raison de douter si ma théorie est aussi 
bien prouvée que je l'ai cru, et si elle ne doit pas finir par 
être rejetée, comme n’ayant pu porter dans ses applications celte 
exactitude qui est de l'essence de toutes les théories. 

Je me propose de faire voir que la mienne , dans l’état auquel 


of tin, etc. (Transactions of the geological 


(1) À Description of the ox 
76) 


Society, tome XI, pag. 336— 
Gg 2 


256 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


l'ont amenée les nouvelles tentatives que j'ai faites pour la per- 
fectionner, ne peut faire naître aucun doute sur la justesse des 
résultats qui.s’en déduisent; que les déterminations des formes 
primilives auxquelles je me suis arrêté, conduisent, à l'égard 
des formes secondaires, aux véritables lois de décroissement 
dont ces formes dépendent, el que les mesures mêmes qui ont 
été prises à l’aide de la réflexion, confirment l'existence de 
ces lois. 

J'ajoute que l'application de la théorie à la méthode minéra- 
logique a également toute l'exactitude nécessaire pour faire con- 
courir les formes des molécules à la distinction des espèces. 

Enfin, sans exclure, dans certains cas particuliers, l'usage 
des mesures prises à l’aide de la réflexion, je suis convaincu 
que celles auxquelles conduit le goniomètre ordinaire , et qui 
ont l'avantage d'être à la fois directes et expéditives, suffisent, 
soit pour déterminer une nouvelle variété, soit pour reconnoître 
à laquelle des variétés déja classées dans la méthode, appartient 
un cristal qui en présente la forme, et que l’on voit pour la 
première fois. 

Je vais ciler trois exemples à l'appui de ce que je viens de 
dire. Les deux premiers, dont l’un me sera fourni par le quartz 
et l’autre par l’étain oxidé, ont été choisis parmi ceux dont la 
détermination a été publiée, soit dans mon Traité, soit dans mon 
Tableau comparatif. Le sujet du troisième sera le plomb sulfaté, 
dont je me suis occupé plus récemment. Je comparerai les ré 
sullats des mesures obtenues à l'aide des deux goniomètres, et 
je irerai de cette comparaison les conséquences qui me paroissent 
garantir la vérité de lout ce que j'ai avancé. 


Quartz. 


Quoique les cristaux de quartz soient sujets à de fréquentes 
anomalies qui occasionnent de légères variations dans les po- 
silions de leurs faces, surtout de celles qui sont parallèles à 
l'axe, cependant il n’est pas difficile d’en trouver, sur le grand 
nombre de ceux qui sont répandus dans les collections, dont 
la forme ait toute la régularité que l’on peut desirer, pour se 
prêler aux mesures mécaniques. Tels sont en particulier ceux 
qu'on a nommés f/yacinthes de Compostelle, dont beaucoup sont 
isolés et complets, et dont tous les plans sont lisses et parfai- 
tement de niveau. 

Je me trouvois donc, à l'égard de ces cristaux, dans une 
circonstance favorable pour ramener le rapport de leurs dimen- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 237 


sions à une limite simple, susceptible de conduire à des ré- 
sultats sensiblement d'accord avec ceux de la cristallisation. 

Je pris pour donnée l'inclinaison d'une des faces de la py- 

ramide, telle que P (fig. 1, pl. I) sur le pan adjacent r. Je 
trouvai qu'elle tomboit entre 14192 et 1421. Je la supposai de 
14144, Dans cette hypothèse, si du centre c de la base de la 
pyramide dont es est l'axe, on mène une perpendiculaire cr 
sur un des côtés, puis la ligne rs, on aura crs — 51445! et 
cr: cs :: sin 384 15/: sin 51445'. Pour avoir le rapport cr: es ex- 
primé en quantités radicales, je prends les logarithmes des 
carrés des deux sinus, et cherchant dans la table des nombres 
naturels ceux auxquels ils répondent, je trouve que l’on a 
crics:: /3835: V/6167, à peu près :: y/38 : ÿ/B2 Ou :: V19:V/31; 
ce qui donne ers—51156/, et csr—38!4, dont le premier est 
trop fort et le deuxième trop foible, par une suite des quantités 
que j'ai négligées. Je vois que si j'ajoute une unité à chaque 
terme du rapport, er se trouvera plus augmenté à proportion 
que cs, ce qui tend à rapprocher les deux angles de ceux que 
donne l’observalion. J'aurai donc er:cs:! y/20:4/32, ou :: 5:48; 
et ainsi le rapport a toute la simplicité convenable, pour lui 
imprimer le caractère d'une limite. Ce rapport donne 51440 
pour la mesure de l'angle ser, et 141440/16" pour l'incidence 
de /sg sur lgdn, résultats qui touchent de bien près celui de 
la mesure mécanique. 
_ Dans la même hypothèse, le rapport entre les deux demi- 
diagonales g et p, des faces du rhomboïde primitif, est celui 
de ÿ15 à 13, et le cosinus de l’angle qui mesure la plus petite 
incidence des faces du rhomboïde est -- du rayon, ce qui 
donne pour cette incidence 85136, et pour la plus grande 
941 24. En partant du même rapport, on a 133448' 46" pour 
l'angle que font entre elles deux faces adjacentes /sg, gst sur 
la même pyramide. 

On trouve dans le bel ouvrage publié par M. Malus, sur la 
double Réfraction, une détermination des incidences mutuelles 
des faces du rhomboïde du quartz, que ce savant célèbre a 
prise à l’aide de la réflexion , en se servant du cercle répétiteur. 


Il indique 941 16’ pour la plus grande, et 85144 pour la plus 
petite (1). 


(1) (Théorie de la double réfraction, pag. 242.) M. Phillips indique 94415’, 
et 85445’ dont la différence n’est que de 1° avec les résultats obtenus par 


238 SOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

J'ai desiré de savoir jusqu'où iroient aussi les différences entre 
les deux déterminations relativement aux autres incidences, et 
quels seroient les rapports qui résulteroient des mesures de 
M. Malus entre les dimensions principales du rhomboïde du 
quartz. J’ai trouvé, en suivant une marche analogue à celle qui 
m'a conduit au rapport y5:48, que dans l'hypothèse présente 
on auroit g:p:: V/718: V/625; que le cosinus de la plus petite 
incidence des faces seroit les -?%- du rayon, et que le rapport 
entre er et es serait celui de ÿ/1157 à ÿ/718. On auroit pour l'in- 
cidence de /gs sur gts 13314446", au lieu de 155148'46"; dif- 
férence 4/. 

On pourroit substituer au rapport ÿ/1157 à ÿ718, entre cret 
es, celui de ÿ/149 à ÿ/240, qui est plus simple, et qui ne donne 
qu’une demi-minute de diflérence dans les angles qui en dé- 
pendent, avec ceux auxquels conduit le premier (1). Ceci me 
suggère une réflexion que je ne crois pas devoir omettre. 

Si je montrois à un physicien géomètre le rapport 149 à W240; 
en Jui disant que c’est celui qui a lieu dans la pyramide du 
quartz, entre la perpendiculaire menée du centre de la base 
sur un des côtés et la longueur de l'axe, il est très-probable 
qu'après l'avoir considéré , 1l y trouveroit une petite correction 
à faire, pour le transformer en un autre rapport beaucoup plus 
simple ; il ne s’agiroit que d'ajouter une unité au dernier chiffre 
du terme ÿ/149, et alors le rapport deviendroit, au moyen de 
la division des deux termes par 30, celui de 4/5 à y/8; c’est 
précisément celui auquel je suis parvenu. Je répondrois que 
l'extrème précision de l'instrument qui a servi à déterminer le 
rapport dont il s’agit, ne me permet pas de l’altérer. Il pourroit 
me demander jusqu'où s’étend la différence entre l’inclinaison (2) 
des faces de la pyramide donnée par ce rapport, et celle qui 
résulte du rapport. 5 à 8, et si je lui disois qu'elle se réduit 
à environ 4', je doute s'il ne seroit pas tenté de la rejeter sur 
l'observation, plutôt que de l’imputer à la nature. 


M. Malus. Elle provient de ce que le goniomètre dont s’étoit servi M. Phillips, 
n’étoit divisé que de 5 en 5 minutes. 

Q@) M. Malus paroît avoir négligé les secondes, en mesurant les angles cités 
ci-dessus. 

(2) On auroit pu prendre pour angle fondamental celui qui dérive de cette in- 
clinaison tout aussi bien que celui qui a lieu entre les faces du rhomboïde, et 
dans ce cas, l'instrument , pour être d'accord ayec lui-même, auroit dû donner 
immédiatement l’angle de 1334 44 46". 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 259 
Etain oxide. 


Dans les déterminations que M. Phillips a publiées des formes 
cristallines relatives aux substances minérales qui ont eté le 
sujet des articles précédens, ce savant s’est borné à donner les 
inclinaisons des faces de la forme primitive. J'ai déduit de ces 
inclinaisons celles des faces produites sur les formes secondaires 
en vertu des lois de décroissement , et je leur ai comparé celles 
auxquelles on parvient, en partant des angles donnés par le 
rapport que j'ai adopté entre les dimensions principales du so- 
lide primitif, comme étant la limite dont le choix est indiqué 
par le caractère de sa simplicité. M. Phillips a été beaucoup plus 
loin à l'égard des cristaux d’étain oxidé ; il a mesuré immédia- 
tementles diverses inclinaisons des faces qui terminent les formes 
secondaires , en sorle qu'ici je serai dans le cas de le comparer 
avec lui-même ; et ce qui rendra, je l'espère, cette comparaison 
plus instructive et plus intéressante, c’est qu'une partie des in- 
clinaisons dont il s’agit sont indépendantes des angles primitifs, 
et dérivent uniquement des lois de décroissement dont l’exi- 
stence ne peut être révoquée en doute. 

La forme primitive de l’étain oxidé , telle que je l’ai indiquée 
dans mon Tableau comparatif, est un octaèdre (fig. 2) dans lequel 
la base commune des deux pyramides dont il -est l'assemblage 
est un carré. Tel est le rapport que j'ai adopté entre les di- 
meusions principales, que l’arête oblique bs (fig. 3) de la py- 
ramide, et la demi-diagonale bc de sa base, sont entre elles 
comme les nombres entiers 7 et 5, ce qui donne ÿ/4o pour la 
valeur de la demi-diagonale 4e de sa base, et ÿ/20 pour celle 
de la perpendiculaire menée du centre sur l’un des côtés (1). 

Parmi les divers anglés que font entre elles les faces des cris- 
taux d’étain oxidé, il en est un qui a fixé particulièrement l’at- 
tention de M. Phillips. C’est celui qui mesure l’incidence de s 
sur g (fig. 4), dans la variété que j'ai nommée bissexdécimale. 
Il a desiré de comparer cette incidence , telle que l'indique ma 
théorie, avec celle que lui auroit donnée le goniomètre à ré- 
flexion; et comme l'instrument dont il se sert n’est divisé que 
de 5 en 5 minutes, il a emprunté celui de M. Carey, dont la 
division va jusqu'aux demi-minutes (2). L'angle dont il s’agit, 


.Q@) I résuite de cette détermination , que la moitié du carré 40 de la demi- 
diagonale bc est égale à la somme 7 + 3 des lignes bs et cs. 
(2) Ouvrage cité, page 348. 


240 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


mesuré à l’aide de cet instrument, est de 133132/ 30". Suivant 
ma théorie, il est de 133429/ 29"; différence 3/. 

M. Phillips ayant déterminé tous les autres angles avec son 
goniomètre ordinaire, j'ai choisi de préférence celui qui vient 
d'être cité, pour en déduire géométriquement ces mêmes angles, 
et en faire la comparaison avec ceux qu'a obtenus M. Phillips, 
en employant les mesures mécaniques. Le rapport qui m'a servi 
de donnée est celui de er à cs (fig. 2), entre la perpendiculaire 
menée du centre de la base de la pyramide ahsb et l’un des côtés, 
t:lque ab. J'ai trouvé que pour remplir le but que je me pro- 
posois, il falloit faire cr—y/700 et es — y Æ7. med. 5 

Ici se présente une remarque analogue à celle que j'ai faite 
à l'égard du quartz. Si lon multiplie par 2 les deux termes du 
rapport précédent, on a ÿ/1404 et ÿ/634, et retranchant de part 
et d'autre le dernier chiffre, puis divisant par 7, cri05i: V/20:3; 
ce qui est le rapport que j'ai adopté. 

Je vais maintenant parcourir les diverses faces de la même 
variété, et faire la comparaison des résultats obtenus par les dif- 
férentes méthodes, relativement à leurs incidences. Je les divi- 
serai en deux séries, dont l’une comprendra les faces termi- 
vales P, S (fig. 4), et l'autre les faces latérales g, r, L: 

Pour les faces terminales. Nous avons ici trois espèces de 
résultats à comparer; savoir, 1°. ceux auxquels conduit la théorie; 
2°. ceux qui ont été déterminés par M. Phillips, au moyen du 

oniomèlre à réflexion; 5°. ceux qu'il auroit dû obtenir pour 

être d'accord avec lui-même , c’est-à-dire ceux auxquels on est 

conduit par le calcul, en partant des données du même savant. 

Je désignerai ces trois espèces de résultats par les lettres T, G, C. 
Incidence de P sur P'(fig. 1 et3) T, 67442/ 30"; C, 67448 4"; G, 67d5o”. 
différ, avec T, 7’ 28”; et avec C, 156”. 

de P sur P' (fig. 1 et 3).T, 133436/18/; C, na M: Philips na 

pas donné la me- 


sure de cette in 
différ.entreCet T,3/40". }cidence. 


deSsurS (fig. 5) T, 12144594"; C, 101441 54'";G, 191440". 
différ.avecT,, 524"; et avecC, 1° 54". 

de P sur S T, 150d 52! 12"; C, 15od Bo’ 27"; G, 15od 45”. 
différ. avecT, 712"; et avecC, 5 27". 

Si M. Phillips ne s’éloit imposé la loi de s’en tenir stricte- 
ment aux mesures mécaniques, il auroit pu déduire l'incidence 
de P sur s, de celle de 121440! qu’il avoit trouvée entre s ets, 
en ajoutant god à la moitié de cette dernière; ce qui lui auroit 
donné 150 60’, et l’auroit fait apercevoir que son goniomètre 
le mettoit en opposition avec lui-même d’une quantité égale à 5°. 


Pour 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 241 


Pour les faces latérales. Les incidences/mutuelles de ces faces 
sont dans un cas particulier, par une suite de ce que la base 
commune des deux pyramides , dont l’octaèdre primitif peut 
étre regardé comme l'assemblage, est un carré. Elles peuvent 
être assimilées à celles qui résultent des lois de décroissemens 
sur les bords d’un cube, et dont il sufit que la mesure soit 
donnée, pour que les angles qui en dérivent s'en déduisent 
géométriquement, avec une précision rigoureuse. 

Une construction simple fera aisément concevoir ce que je 
viens de dire. Soit absh (fig. 5) le carré qui représente Ja base 
indiquée par les mêmes lettres , et soient de, dk, kr, etc., des 
lignes qui fassent entre elles les mêmes angles que les pans g, 
r, L (fig. 4), dont les lettres indicatives se trouvent répétées sur. 
les lignes dont il s’agit (fig. 4). Prolongeons Ad et x3 jusqu'a la 
rencontre de fi et ka, sb, jusqu'à la rencontre de fk et ix; puis 
menons Xz et xy perpendiculaires sur fi. Les triangles ade, nkf 
seront semblables à ceux que j'appelle triangles mensurateurs , 
et c'est en les résolvant-qu'on détermine les inclinaisons des 
faces telles que r, g (fig. 4 et 5) dont les positions coïncident 
avec leurs côtés extérieurs de, kd (fig. 5). Or, ces triangles sont 
évidemment rectangles dans le cas précédent, et tels sont les 
rapports entre leurs côtés adjacens à l'angle droit, que ad est 
égal à ae, et que nf est triple de kn. Je joins ici le tableau des 
angles auxquels conduisent ces données, comparés à ceux qui 
ent été déterminés à l’aide du goniomètre à reflexion. Je con- 
tinuerai de désigner les premiers par T et les seconds par G. 

M. Phillips a omis d’in- 
1251 L Pa D de 
Hope lait supposce. 
de Z sur r ou sur 7’; T, 161433 54"; G, 101435 
Différ. 1/6”, 
de g sur r ou sur r'; T, 153126! G'; G, 153125, 
Différ. 1” 6”, 
de r' sur r...,....5 T, 1434 7/48"; G, 143410”, 
Différ. 2! 12". 
de r sur r,.Mh...; T, 126152/12/; G, 126145. 
Différ. 7’ 12". | 

Je rémarquerai encore ici, que les deux faces 7‘, r'; faisant 
des angles égaux en sens contraires avec la face g, il sufit de 
connoître Jun de ces angles, pour en déduire l’inclinaison mu- 
tuelle de »’ sur 7’, en retranchant 90! de l'angle dont il s’agit, 


Tome LXXXVII, OCTOBRE an 1818. Hb 


Incidence de g sur l'et sur l';T, 


24% JOURNAL DE PHYSIQUE; DEICHIMIE | 


et en doublant le reste: Ainsi l'angle qué forme l'une des faces »’, r' 
avec g étant de 1554 25/, comme l'a trouvé M. Phillips, l’in- 
clinaison de r sur r doitl être égale au double de 163125/—90f; 
c'est-à-dire de 126150! et non pas de r26145/; comme l’a donné 
le goniomètre à réflexion; ce qui se rapproche de la véritable 
mesure, qui est de 126152!12". 

Il me reste à parler de la variété: que j'appelle distique; et que 
représente la figure 6. Les facettes 3, 7 qui la caractérisent, ré- 
sultent d’un décroissement mixte par trois rangées en largeur 
et deux en hauteur sur les angles latéraux sab, sba (fig. 1); d'où 
il suit qu’elles ont deux inclinaisons mutuelles différentes , dont 
la plus grande est celle de z sur z/. Ces deux inclinaisons étant 
données, celle de l’ume quelconque des mêmes faceltes sur g 
s’en déduit nécessairement à l’aide de la seule Géométrie. 

Je compareraï encore ici les trois espèces de résultats obtenus 
par les différentes méthodes, en me servant des mêmes lettres 
indicatives. 


Incid. dezsurz'........T,1501 658"; C, 159640"; G, 159157. 
Différ.avecT,1/58";etavec C, 1/40”. 
degsurz.., 2: 15119410 2480, 140119/22 ; G;118410/ 
Différ.avec T,9! 24"; etavecC, 8/22", 
de zou dez'sur.g; TT, 1541509"; C, 1554051"; G, 155125", 
A Différ. avec T,,26/; et avecC, 24/9”. 


La comparaison de ces résultats me conduit à une remarque 
qui ne me paroit pas indifférente. Dans ceux qui sont relatifs 
à l'incidence de z sur z/, la différence dépendante de celle qui 
a lieu entre les données dont ils partent , s’est atténuée au point 
de se réduire à une minute et quelques secondes, et l'existence 
de la loi simple de décroissement qui, dans ma théorie, dé- 
termine les mêmes facettes, se trouve ainsi garantie de trois 
manières: Or, cette loi étant donnée, les autres résultats relatifs, 
soit à l'incidence de 3 sur z, soit à celle de 3 sur g, deviennent 
les corollaires dû premier.(1}; en.sorte qu'ici, comme dans. 


à MAPREUT I MEET NAN OTIPMET IVIPÆRN RTE 
(1) Si l’on désigne par 7 la perpendiculaire cr sur ab (fig. 2), par h l'axe es de 
la pyramide, et par » le nombre de rangées soustraites, le rapport entre le sinus 
et le cosinus.de l’angle qui-mesüre là moitié de l'incidence de z surz’ (fg..6), 
$ n'— 1\2 ty Di è PRES 
est celui d ve (=) h°à h.—-— ; et à l'égard de la moitié de l'inci- 
FORT E nm 1 + ñnæ+i? ? 


dencé de z surz, lerapport correspondant est celui de ÿ/1° (n — 1) + h°n° à h. De 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 243 


une multitude d'autre cas, le Cristallographe qui a calculé un 
de ces angles liés étroitement à un résultat fondamental, ne le 
mesure ensuile que comme pour se salisfaire. Il ne doutoit pas 
d'avance que l'observation, si elle étoit exacte, ne duüt parler 
comme la théorie. 

Cependant les mesures des deux dernières incidences prises 
au moyen du goniomètre à réflexion, divergent plus fortement, 
surtout la seconde, à l'égard du premier résultat, que toutes 
celles qui ont été citées jusqu'ici; et il semble qu'on n’auroit 
pas eu lieu de s’y attendre. Car, suivant M. Phillips, les cris- 
taux de la variété distique sur lesquels il a opéré réunissoient : 
au mérite d'une singudiére beauté, celui d’étre d'uu très- petit 
volume (1), condition si importante pour la précision des me- 
sures, que le même savant, après avoir dit, dans un autre en- 
droit (2), que les cristaux d’un certain volume , même ceux dont 
les faces paroissoient être le plus exactement de niveau, offroient 
des différences très-sensibles dans la détermination de leurs 
angles , tandis qu'au contraire ceux qui ont de petites dimensions 
donnent des résultats uniformes, en conclut qu'ils sont les seuls 
sur lesquels on puisse compter, pour arriver à la précision. 

J'ajouterai ici une considération qui sort naturellement de 
tout ce qui précède. Le tableau des mesures d'angles prises par 
M. Phillips sur les différentes variétés d’étain oxidé (3), à l'aide du 
goniomètre à réflexion , quelque supériorité qu’ait cel instrument 
sur le goniomètre ordinaire , et quelle que soit l'habileté avec 
laquelle il le manie, présente une série de résultats qui ne sont 
réellement qu'approximatifs, qui ayant été déterminés comme 
à l'insu les uns des autres, n’ont aucun lien commun, et dont 
quelques-uns méme sont contradictoires. Bien loin de s’accorder 
avec les lois simples de la structure, ils tendroient plutôt à les 
transformer en autant d'anomalies. Si l’on supposoit, par exemple, 


plus, le sinus de l'angle, dont le supplément mesure l'incidence de z sur g, est 
au cosinus comme (7—1)4/2r°-+h est à (n—a)h. Dans Je cas présent, 
n =, et si l'on fait r—ÿ/20,h—3, on ales résultats indiqués par T. En fai- 
sant r— 702 et A—V/317, on a ceux que désigne C. Or, il est visible que 
l'angle qui se déduit du premier rapport ayant été vérifié par l'observation, la 
mesure des angles auxquels conduisent les deux autres rapports, n'est, pour 
ainsi dire , que de surabondance, 

() Mémoire cité, pag. 563. 

(2) Idem, pag. 347. 

(3) Idem, pag. 349. 


Hh 2 


244 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


que l'incidence de r sur r' des deux côtés de g (fig. 4) füt exac- 
tement de 1434 10/, comme l’indique M. Phillips, les deux côtés 
adjacens à l'angle droit dans le triangle mensurateur, seroient 
entre eux en se bornant de part et d'autre à 5 chiffres, comme 
94378 : 31393, et les nombres correspondans de rangées sous- 
traites suivroient le même rapport. Substituez à ces deux séries, 
les nombres 3 et 1 auxquels elles sont à peu près prôportion- 
nelles, et vous avez une loi simple, qui est celle de la nature. 
Cet exemple fait voir combien il importe aux progrès des 
sciences que la théorie se joigne à l'observation, pour la régu- 
lariser, pour faire disparoître les défauts de liaison qu'elle lais- 
seroit entre ses résultats, si elle restoit abandonnée à elle-même, 
et pour en composer un ensemble dont toutes les parties soient 
en harmonie les unes avec les autres. 


Plomb sulfate. 


La description que je vais donner des cristaux de plomb 
sulfaté , a été amenée par des observations que j'ai faites depuis 
la publication de mon T'ableau comparatif. L'examen des nou- 
veaux crislaux qui m'ont ete envoyés d'Angleterre , pendant cet 
intervalle , m'a fait reconnoître une erreur considérable qui 
s'éloit glissée dans mon ancienne détermination (1). Mais les 
observations les plus décisives à cet égard, sont venues de ceux 
que renfermoit un envoi très-intéressant qui m'a été adressé de 
Wolfach, par M. Selb, premier conseiller des mines du grand 
duc de Bade, et directeur des mines du prince de Furstemberg. 
Ces cristaux, qui sont diaphanes, réunissent à un volume con- 
sidérable une forme nettement prononcée, dont toutes les faces 
sont exactement de niveau; et la satisfaction d'en être redevable 
aux bontés d’un savant si justement célèbre , a doublé le prix 
que leur donnent à mes yeux et leur perfection et l'heureuse 
influence qu'ont eue sur les résultats de mon travail les obser- 
vations dont ils ont été le sujet. 

J'ai continué d'adopter pour type de l'espèce dont il s’agit, 
l’octaèdre rectangulaire, que m'’avoit indiqué la division méca- 
nique. Mais j'en ai changé les dimensions conformément aux 


(1) Cette erreur, qui est d'environ 8d, provenoit de ce qu’à l'époque de ma 
détermination , où les cristaux de plomb sulfaté étoient ici d’une extrême rareté, 
je m'étois servi, pour mesurer les angles primitifs, d’un petit fragment où les 
joints naturels , mis à découvert par la division mécanique, avoient un tissu in 
égal, capable de faire illusion sur leurs véritables inclinaisons respectives. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 245 


nouvelles mesures prises avec tout le soin possible, à l’aide du 
goniomètre ordinaire. Soit ss! (fig. 7) l’octaèdre dont il s’agit ; 
si je mène l'axe cs de la pyramide, eusuite cr et ct , l'une per- 
pendiculaire sur Æx, l’autre sur ct, puis rs et ts, l'angle src me- 
surera la moitie de l'incidence de P sur P”' (fig. 8), et l'angle ste 
(fig. 7) la moitié de l'incidence de P" sur P’. Or, en faisant erics 
(fig. 1) comme y13:y/8,etct:cs:: 1/5: /3(1), je trouve 76112! 
pour la première incidence, et 101132 pour la seconde. Dans 
Ja même hypothèse, l'incidence de P sur P” (fig. 8)— 119151". 

Le cosinus de l’angle qui mesure l'incidence de la face 7sxæ 
(fig. 7) sur la face Ash, située dun côté opposé dans la même 
pyramide, est + du rayon, et celui de l'angle qui mesure l'in- 
cidence de Asx sur ks'x en est les Æ, en sorte que si l’on repré- 
sente le premier cosinus par #, il suflira d'ajouter une unité à 
chacun des termes de la fraction , pour avoir l'expression de 
l'autre cosinus. 

M. Phillips a trouvé pour l’inclinaison de P sur P”(fig.8) le même 
angle de 76412', que celui qui résulte de ma détermination. 
Mais il indique 101420’ au lieu de 101452/, pour l'incidence 
de P" sur P', ce qui fail une différence de 12’. Celle de P sur P”, 
qui se déduit des précédentes, seroit égale à 119%54', dont la 
différence avec celle que j'ai obtenue n'est que de 5/. Le rap- 
port entre ctet cs, qui conduit à l'incidence de P” sur P, telle 
que la donne M. Phillips, est celui de ÿ/10o à ÿ/149. Il en est 
de ce rapport comme de ceux que j'ai cités dans les deux ar- 
ticles précédens, c’est-à-dire, qu'il suflit de modifier légèrement 
un des deux termes pour avoir mon rapport. Dans le cas pré- 
sent, si l'on ajoute une unité au chiffre 9 du second rapport, 
on a ÿ/100: 150, ou ÿ/2:/3 comme dans la détermination. 

D'après le rapport ÿ/100 à ÿ/149, le cosinus de l’angle qui 
mesure l'incidence de »sx (fig. 7) sur sh est les #2 du rayon, 
au lieu d’en être le +, ce qui offre une sorte de discordance 
entre les deux rapports, qui sont liés l’un à l’autre dans ma 
détermination. Si cette dernière n’est pas la véritable , il faut 
convenir du moins qu’elle est plus satisfaisante pour l'esprit. 

Le plus volumineux des cristaux qui m'ont été envoyés. par 
M. Selb, et que représente la figure 9, offre des faces s, L, 
que je n’ai observées sur aucun des cristaux d'Angleterre; c'est 


(:) Si l’on veut mettre les deux rapports sous la forme où ils auroïent la ligne 
CS Pour terme commun, on fera cs—%/24,ct—=V16,cr—Y 33. 


246 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


ce qui m'engage à donner ici la description complète de la 
variété à laquelle appartient ce cristal, et que je nomme déci- 
sexdecimale. : 

Mais je dois prévenir que pour des raisons dont l'exposé 
m'entraineroit trop loin de mon sujet, j'ai adopté, relativement 
à toutes les formes secondaires qui ont pour noyau un oc- 
taèdre, la méthode qui se trouve indiquée dans mon Traité 
(tome I, pag. 464 et suiv.) pour celles qui dérivent de l’octaèdre 
régulier. Elle consiste à transformer l’octaèdre en parallélipipede, 
par l'addition de deux tétraèdres semblables à ceux que donne 
la division mécanique sur deux faces opposées de cet octaèdre, 
et à considérer les décroissemens d'où dépendent les faces se- 
condaires, comme ayant lieu sur les bords ou sur les angles 
du parallélipipède, par des soustractions d’une ou plusieurs rangées 
de petits parallélipipèdes de la même forme. Le parallélipipède 
substitué à l’octaèdre dans le cas présent, et que l’on voit (fig. 10), 
résulte de l’application de deux tétraèdres sur la face P' (fig. 8) 
et sur son opposé. D’après celte manière de voir, le signe 

4/4 3 L 
3 
représentatif de la variété dont il s'agit est de Cesn)a, 
[e) 

Les décroissemens qui donnent les faces /, s (fig. 9) ont entre 
eux un tel rapport, que les intersections y, 7 des premières 
avec S et P” sont exactement parallèles. 

Voici la mesure des divers angles qui résulte de ma déter- 
minatioy. 

Incidence de P sur P””, 76412’ 
\ P'sur Pétor.62 
P. sur P' 119.517 

- P sur o, 141.64 
P'sur 0, 129.14 

P sur s, 154.17 

P'sur s, 141.40 

lsur P,.165.19 

l sur s, 166.25 

l sur o, 135.55. 


Avant d'en venir aux conséquences qui découlent de tout 
ce qui précède, je dois exposer la méthode que j'ai suivie, 
pour déduire de l'observation les données qui m'ont servi à 
résoudre les problèmes relatifs à la détermination des formes 
cristallines. Les quantités composantes des formules, qui re- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE." 247 


présentent généralement les côtés des triangles que j'appelle 
mensuraleurs, éxpriment certaines lignes que l’on peut conce- 
voir tracées sur la surface des solides primitifs , ou menées dans 
leur intérieur, telles que les diagonales des faces, les axes, les 
lignes menées perpendiculairement sur ces axes, soit du centre 
des faces, soit des angles solides. Si la formule se rapporte, 
par exemple, à un rhomboïde, elle renfermera les expressions g 
et p des moitiés de la diagonale horizontale et de l'oblique de 
chaque rhombe, l'expression a de l'axe, et celle de la mesure 
du décroïssement à déterminer, ou du nombre de rangées sous- 
traites que l’on designe par 7. Cette dernière expression est 
toujours simple, ou du moins ne s'écarte de la simplicité que 
jusqu'a un degré peu reculé. A l'égard des autres expressions , 
élles sont également simples dans les formes qui ont un carac- 
ière particulier de symétrie et de régularité, où de plus, elles 
dérivent immédiatement de ces formes. Ainsi, dans le rhom- 
boïde qui représente la molécule soustractive du dodécaëdre 
rhomboïdal , le rapport entre les demi-diagonales de chaque 
rhombe est celui de 4/3 à 1; ce rapport est aussi celui qui a 
heu entre la perpendiculaire menée du milieu de chaque face 
sur l'axe, et la partie de cet axe qu’elle intercepte. Dans le 
rhomboïde que je considère comme la molécule soustractive 
de l’octaèdre régulier, le premier rapport est celui de 1 à V3, 
et le second celui de 1 à ÿ/8. Dans le cube il y a égalité entre 
les deux termes du premier rapport, et le second est celui de 
1 à 3. Le cosinus, soit du petit angle plan, soit de la plus 
petite incidence des faces, a cela de remarquable, que son rap- 
port avec le rayon est rationnel; et pour me borrer ici à celui 
de concerñe l'incidence des faces, il est la moitié du rayon 
ans le rhomboïde du grenat, il en est le tiers dans celui qui 
appartient à l'octaèdre régulier , et dans le cube il devient zéro. 
Une partie des lois de décroissemens d’où dépendent les va- 
riétés secondaires relatives aux formes dont il s’agit, sont dans 
le même cas que les rapports entre les dimensions de ces formes, 
c'est-à-dire que leur mesure est censée être donnée & priori. 
Ainsi le passige du cube au dodécaèdre rhomboïdal, que pré- 
sente l’aplome , celui du même solide à l'octaèdre régulier, qui 
a lieu dans le fer sulfuré, et celui de ce dernier solide aux 
deux précédens, dont la chaux fluatée offre des exemples, se 
font évidemment en vertu d'un décroissement par une rangée 
sur les bords ou sur les angles de la forme qui fait la fonction 
de primitive. La même considération s'applique au solide tra- 


248 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


pézoïdal, pris pour forme secondaire, soit du cube, comme 
dans l’analcime, soit de l’octaèdre régulier, comme dans l’am- 
moniaque muriatée, soit du dodécaëèdre rhomboïdal, comme 
dans le grenat. Lorsque la loi du décroissement n’est pas in- 
diquée immédiatement par l'aspect de la forme, on peut la dé- 
terminer avec certitude d’après la raison de la plus grande sim- 
plicité. Ainsi, en mesurant, à l’aide du goniomètre ordinaire, 
l'inclinaison respective des pentagones du fer sulfuré dodécaèdre, 
à la rencontre de leurs bases, je trouve qu’elle approche beau- 
coup d'être égale à 1271. De plus, le calcul m'apprend que 
dans l'hypothèse où le décroissement qui produit ces penta- 
gones, auroit lieu par deux rangées en largeur sur les bords 
du cube primitif, qui leur servent de lignes de départ, l'in- 
chuaison dont il s’agit seroit de 1261 52/ 12"; j'en conclus que 
cel angle est celui de la nature, et la théorie me donne la valeur 
exacte de celte petite différence de 7/48", que l'instrument ne 
peut saisir. 

Lorsque le célèbre Coulomb fit ses belles expériences, à 
l’aide desquelles il démontra que les forces électriques et ma- 
gnétiques suivoient la raison inverse du carré de la distance, 
les expressions numériques de ces forces, déduites des moyens 
mécaniques qu'il employoit pour les mesurer, ne représentoient 
jamais rigoureusement la loi à laquelle il supposoit que ces 
mêmes forces éloient soumises; mais elles la touchoïent de si 
près, qu'il avoit droit de rejeter la différence sur les petites 
erreurs inséparables de l'observation. Ainsi, dans une expérience 
relative au magnétisme , où la mesure des forces dépendoit du 
carré du nombre d’oscillations que faisoit en 60" une aiguille 
airmantée suspendue librement , et placée successivement à deux 
distances du centre d'action d’un barreau aimanté, dont l’une 
étoit double de l’autre, il observa que les nombres d’oscilla- 
tions correspondantes éloient l’un de 41, et l'autre de 24 et 
quelque chose. Or, pour que les carrés de ces nombres, déduction 
faite du carré de 15, qui représentoit l’action du globe sur 
l'aiguille, fussent entre eux dans le rapport inverse du carré 
des distances, il falloit supposer que l'aiguille, dans sa seconde 
position , faisoit 24 oscillations, plus #7 à très-peu près. Le 
calcul donnoit ainsi la valeur précise d’une correction que l’ob- 
servalion Jaissoit dans le vague. Telle est, en général, la marche 
des sciences physiques; et nous sommes d'autant mieux fondés 
à regarder nos expériences comme décisives, lorsqu'elles ne 
donnent que de légères différences avec les résultats de nos 


théories, 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 249 
théories, qu'on auroit plutôt lieu d'étre surpris qu'elles n'en 
donnassent aucune. £ 

Daus les espèces dont Jes formes primitives différent plus ou 
moins de celles que j'ai citées, et que l’on peut regarder comme 
les limites de toutes les autres, les rapports entre les lignes qui 
entrent comme données dans la solution des problèmes, ne 
peuvent plus être déterminés qu’à l’aide de l'observation ; mais 
il m'a semblé que ces formes s’assimiloient à leurs limites, en 
ce que les rapports dont il s'agit devoient aussi être simples, 
ou du moins approcher jusqu'a uu certain point de la simplicité. 

La methode que j'ai adoptée pour obtenir ces rapports sous 
la forme la plus avantageuse , consiste à représenter, par des 
quantités radicales, les deux termes qui les composent. Il en 
résulte que, parmi les formes primitives qui appartiennent aux 
différentes espèces, celles qui sont susceptibles d’être coupées 
dans un certain sens, de manière que la section soit un rhombe, 
participent d'une propriété remarquable, dont jouissent les so- 
lides qui ont le caractère de limite, savoir que le cosinus du 
petit angle du rhombe est un nombre rationnel. Divers prismes 
rhomboïdaux , dont la section est un parallélogramme obli- 
quangle, dans lequel les côtés ne sont égaux que deux à deux, 
partagent la même propriété, par une suite de ce que la ligne 
menée de l'extrémité supérieure de l’arête sur laquelle nait leur 
base à l'extrémité inférieure de l'arête opposée, est perpen- 
diculaire sur l’une et l'autre, ainsi que je J'ai expliqué dans 
mou Memoire sur la Loi de Symeétrie (x). 

Les rapports dont il s'agit se montrent, par intervalles, dans 
la série de ceux que donnent les divers angles qui sous-divisent 
la circonférence. Ils ont lieu aux endroits où leurs nombres 
composans sont susceptibles d’être divisés par un facteur com- 
mun, qui abaisse leurs valeurs, et les dégage de la complication 
dans laquelle elles étoient enveloppées. Les intervalles qui sé- 
parent ces rapports répondent à des différences dans les angles 
correspondans, qui varient plus ou moins, tantôt d'un quart de 
degré , tantôt d'un demi-degré ou davantage. Lorsque les cristaux 
sur lesquels on opère sont d'une forme peu prononcée, il est 
possible que l'on prenne pour le véritable rapport un de ceux 
dont il est voisin ; et c’est ce qui a dù nécessairement m'arriver 


SR —— —— ————— ——— —— ——— —— ————"————————— —————————— 


(1) Mémoires du Muséum d'Histoire naturelle, tome I, pag. 206; et Journal 
des Mines, tome XXXVWII, n° 219. 


Tome LXXXVII. OCTOBRE an 1818, Li 


230 JOURNAL DA PnYSIQUE; DE CHIMIE 

plus d’une fois, lorsque j'ai composé la partie géométrique de 
mon Traité. J’ai rectifié, ainsi que je l’ai déjà dit, une partie 
de mes anciennes délerminations , parmi lesquelles il en est 
plusieurs qui sont rélatives à des mesures d’angles, prises par 
M. Philips, dont elles se trouvent aujourd'hui beaucoup plus 
rapprochées. 

En admettant donc que je sois parvenu, à l'égard de toutes 
les autres espèces, à dés rapports où l'exactitude se concilie 
autant qu'il est possible avec la simplicité, comme il me semble 
que j'ai fait en particulier pour le quartz, l’étain oxidé et le 
plomb sulfaté , je me crois fondé à dire que ces rapports suflisent 
pour déterminer, sans aucune équivoque, les lois de décrois- 
sement d’où dépendent les formes secondaires qui appartiennent 
à chaque espèce; car la difiérence qu’entraineroit dans les in- 
clinaisons des faces la méprise qui feroit prendre une loi pour 
une autre, seroit beaucoup plus grande que celle qui pourroit 
exisler entre les angles primitifs donnés par le rapport que j'ai 
adopté, et ceux auxquels auroit conduit le goniomètre à ré- 
flexion. Il y a même dans les résullats qui dérivent des uns 
et des autres , une convergence digne d’être remarquée et très- 
favorable à la théorie. Elle consiste en ce que les différences 
entre les angles primitifs en déterminent de beaucoup plus petites 
dans les inclinaisons des faces secondaires, au point que quel- 
‘quefois elles approchent du terme où elles s’évanouiroient. Je 
prendrai pour exemple les angles du rhomhoïde primitif de la 
chaux carbonatée. Suivant les mesures de M. Wollaston et Malus, 
l'angle que forme une face quelconque de ce rhomboïde avec 
une parallèle à l’axe, est de 134437", au lieu de 1351, que j'avois 
indiqués d’après la condition que, quand l'axe du rhomboïde 
étoit situé verticalement, chacune de ses faces füt également 
inclinée à un plan vertical et à un plan horizontal. En partant 
des deux mesures précédentes, on trouve, pour le grand angle 
que forment entre elles les faces du rhomboïde, d’une part 
10515, et de l’autre 104128/, ce qui fait une différence de 57’. 
Or, cette différence s’atténue en passant dans les résultats des 
décroissemens qui produisent les formes secondaires , de manière 
que dans le dodécaèdre métastatique , elle n’est plus que de 10’ 
et 4’ pour les deux inclinaisons respectives des faces situées 
vers un même sommel. Dans un autre dodécaëdre , qui résulte 
d’un décroissement dont l’exposant est 5 sur les mêmes bords 
du rhomboïde primitif, elle se réduit à 2” et 1” 2”, et dans un 
troisième dodécaèdre produit en vertu d’un décroissement in 


&T D'HISTOIRE NATURELLE. 25 
termédiaire sur l'angle inférieur, et qui appartient à la variété 
que j'ai nommée euthétique, elle tombe à 150"et 26”, 4 

Or, ilest évident que le goniomètre ordinaire, employé à 
vérifier ces divers résultats, est d’une précision qui peut passer 
pour rigoureuse. Les angles des cristaux de quartz, d’étain oxidé 
et de plomb sulfaté, ont offert des convergences du mème genre, 
quoique un peu moins sensibles. 

J'ajoute que les formes des molécules intégrantes étant les 
types géométriques des espèces, les rapports que j'ai adoptés 
ont, par une suite de leur simplicité, l'avantage d'offrir des con- 
ceptions nettes et faciles à saisir de ce qui caractérise ces Lÿpes , 
et des lignes de démarcation qui s'en déduisent entre les diverses 
espèces, au lieu que l'esprit ne voit, pour ainsi dire, que d'une 
manière confuse, ces caractères disuinctifs à travers les grands 
nombres qui les offusquent. 

On saisit tout d’un coup et l'on conserve dans sa mémoire 
le résultat qui nous apprend que le cosinus de la plus petite 
incidence des faces, dans le rhomboïde primitif du quartz, est 
un treizième du rayon; mais cet autre résultat, d'après lequel 
il en est les -2?-, n’entre pas aisément dans l'esprit, et ne dit 
rien à la mémoire. 

J'ai avancé plus haut que les rapports entre les dimensions 
des solides primitifs , tels que je les ai adoptés , suflisoient pour 
déterminer, d'une manière non équivoque, les lois de décrois- 
sement d'où dérivent les formes secondaires. C'est ce que je 
vais rendre sensible, à l'aide d'un exemple que je tirerai des 
formes qui naissent des décroissemens sur les bords inférieurs 
D, D (fig. 11) du rhomboïde primitif de la chaux carbonatée. 
Ce décroissement donne des dodécaèdres à triangles scalènes, 
plus ou moins alongés, que je xeprésente en général par celus 
que l’on voit (fig. 12). Dans le cas de deux rangées soustraites, 
on a la variété mélastatique , où l'incidence de N sur N est de 
1443 20’ 26”, celle de N sur N' de 104128/ 40", et celle de N sur N° 
de 153%26/. Parmi les autres dodécaèdres connus, celui qui aps 

7 


proche le plus du précédent a pour signe D ; cette loi donne 


Pour l'incidence N sur N, 159152! 50”. 
Différence, 412736”. 
Pour celle de N sur N', 10611330”. f 
Différence, 1144 50", 
Et pour celle de N sur N”, 141412! 24". 
Différence, 7146" 24", £ 
La 


252 JOURNAL DA PHYSIQUE, DE CHIMIÉ 
D'où l'on voit qu'il est bien facile d'éviter la méprise qui feroit 
prendre ce dodécaëdre pour le métastatique. 

Supposons un autre dodécaèdre beaucoup plus voisin de ce 


15 


h 
dernier, et dont le signe seroit D; nous aurons pour l'incidence 
de Nsur N, 142413/22", dont les différences avec les angles 
ui leur correspondent sur les deux dodécaèdres précédens sont 
de 247'4" et de 2420'32": 


Pour l'incidence de N sur N’, 10541514". 
Différences, 36/34" et 58/16”. 

Et pour celle de N sur N’, 13745'56". 
Différences, Gl14/30" et 46/28". 


On voit qu'il reste encore une certaine latitude pour les dif- 
férences appréciables que pourroïent donner d’autres dodécaèdres 
qui se rapprocheroient de plus en plus du mélaslalique, mais 
qui ne doivent ètre regardés que comme bypothétiques, parce 
que la loi dont ils dépendroient s'écarteroit encore plus de la 
simplicité des lois ordinaires, que celle qui est représentée par 
25 
D, dont la possibilité peut déjà élre révoquée en doute. 

Je reviens aux mesures d’angles prises à l’aide du goniometre 
à réflexion. M. Phillips avoue que cet instrument est très-délicat, 
et exige une grande attention dans le choix des cristaux que 
Von se propose de soumettre à ses mesures. Il en cite un qui 
lui a donné successivement, pour l'inclinaison de deux de ses 
faces, 92455! et 93120", ou même 93425", ce qui fait un varia= 
tion de 30’. I! parle d’un autre genre de difficulté, qui provient 
des inégalités de la réflexion sur les diverses faces (1). Ayant 
entrepris de déterminer les angles des cristaux d’élain oxidé, 
il a dù avoir à sa disposition ce que le comté de Cornouailles 
offre de plus parfait en ce genre, et il a fourni lui-même la 
pierre de touche de ses résultats, en indiquant des mesures qui 
sont censées être données 4 priori, ou qui dépendent géomé- 
triquement les unes des autres. Nous avons vu que quelques-unes 
des différences qui l’avoient empêché d'être d'accord avec lui- 
mème, étoient égales à celles qui existent entre les angles pri= 
mitifs indiqués par son goniomètre, et ceux qui répondent à 
la limite que j'ai adoptée, et qu'il y en a mème une qui s’élend 
beaucoup plus loin, savoir celle quiest de 26’. 


a ———— 


(1) Ouvrage cité. Note à la page 347. 


£T D'HISTOIRE NATURELLÉ. 253 


Sans oser prétendre que les rapports simples d’où dépendent 
ces sortes de limites soient les véritables rapports de la nature, 
comme m'ont paru le présumer des savans d’un mérite distin- 
gué, je pense du moins que les résultats qui viennent d’être 
cités ne suflisent pas pour démontrer le contraire. Mais je sup- 
poserai, si l’on veut, que le goniomètre à réflexion, manié avec 
toute l’habileté qu'il exige sur des cristaux dont la perfection 
ne laisse rien à desirer, aie des différences appréciables avec 
les angles relatifs aux rapports dont je viens de parler, et que 
ces différences aillent jusqu'a un demi-degré ou au-delà. 

Pour rendre les nouveaux angles obtenus par ce moyen sus- 
ceplibles d’être employés dans les applications de la théorie, 
il faut en déduire un rapport fixe entre leurs sinus et leurs co- 
sinus. Mais d’abord les angles dont il s’agit ne peuvent étre que 
des à peu près; les mesures dont on les a conclus n’ont qu'une 
précision indéfinie. De plus, en supposant que, dans l’évalua- 
tion de ces mesures, on néglige tout ce qui est au-delà d'une 
certaine quanlité, telle que la minute ou la seconde , les nombres 
représentalifs des sinus et des cosinus offriront toujours des 
séries de décimales qui n’auront point de termes; en sorte qu'il 
faudra encore y négliger quelque chose pour les soumettre au 
calcul. Dans ma manière d'opérer , le retour à un rapport simple, 
qui s'offre comme de lui-même, indique le point fixe où il 
faut s'arrêter; en sorte que si plusieurs observateurs se dirigent 
d’après la mème règle, ils s’'accorderont sur le choix du point 
fixe dont il s’agit. Si au contraire on suppose qu'ils partent 
des mesures prises avec divers instrumers qu'ils auront entre 
les mains, ils varieront nécessairement dans le choix de la limite 
à laquelle ils devront s’en tenir. 

Ainsi les mesures d’angles qui ont été publiées, quoique pré= 
cieuses en elles-mêmes, ne sont jusqu'ici que des résultats 
d'observations pour ainsi dire isolées, qu'on ne s’est pas occupé 
de mettre sous la forme convenable, pour les faire servir à ma- 
nier la théorie. C’est aux savans qui nous ont donné ces me- 
sures à compléter leur ouvrage, en indiquant la manière d’en 
déduire des données fixes pour la solution des problèmes re- 
latifs à la Géométrie des cristaux. Mais ce que je crois pouvoir 
assurer, c'est que ces données ne feront autre chose que dé- 
placer un peu le terme d’où la théorie devra partir, et que sans 
autre secours que celui du goniomètre ordinaire, elle a des main- 
tenant tout ce qu’il lui faut pour arriver par une route également 
sûre et facile à son but principal. 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOCIQUES FAITE 


THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR 


À 


A vcompier du 1° janvier 1818, les hauteurs du Baromètrk 


= 
= Ë 0 El 
2 CENTIGRADE. BAROMÈTRE MÉTRIQUE. a E 
À = 5 
? MINIMUM, MAXIMUM, A MIDI, MAXIMUM. MINIMUM. A MIDI. tre 
heures« heurese heures- mille heurese mille mille 
1 |àiim. 9640] à5 m.+418°95| +925,60o| à midi... .759,18| à 5+m...748,85| 740,98] 2 
2 [aà3s. +o2,25| à 5m. 416,25) +o1,50| à gs... 757,19] à 5im...7b2,13| 795,96] 21,8 
9 ['àämidi. +923,50| à 5 !m. +11,75! 23,50] à 9 m....761,70l à 5 : m...760,39| 761,23 21,6 
4 |'àämidi. +925,6ol à 5 Em. +10,50| +25,60] à 9 m....761 67! NA ARENC 759,58] 760,82| 21, 
5 | à5s. +98,00| à 5 1m, 16,26 27,60] à7m....759,80| à 9 +5....704,50| 757,05] 24,4 
6 |'aroïm.+07,75| à 5 1m. 16,00! 97,40 àg21s...:7b3,98| à midi. ..751,6q9| 751,69! 24,4 
7 |à5s H2o,00 à5}s. —ir,90o| +18,b0] àgs..…...755,95| à 51m...755,61| 704,32] 22, 
8 là midi. +18,25| à 51m. 8,75] 18,25] à 9 m... .756,60| à 1015...754,98| 756,34] 21,1 
9 J'aiosm.+18,10| à im. + 8,95] 17,50] à b = m...752,04!| à gs..... 745,84 749,85 195 
10 Là midi. +15,75| àa£s. + 9,75] +15,75| à 9s....7b3,81| à 5 }m...74b,29 748,80 19, 
11 Fà midi. 14,50] à 54m. + 7,50] +14,50| à gs..... 757,07| à 51 m..:754,9è| 7bb,42] 18,, 
12 l'ämidi. H17,00| à5£m. Æ 9,75] 17,00 à 105 ..760,15| à 5£m...757,84| 758,97] 19, 
19 | à midi, 18,00! à5 1m, + 8,10] +18,00| à g2s.,..763,79| à 5 + m...760,71 761,43] 18, 
14 | à5s +18,75| à 55m. + 8,60 17,90] à gm....766,69| àg s..... 763,08 766,59 19; 
19 [à3s. —+o0,85| à5 Em, + 7,60] +20,6c| à 5 3 m...759,66| à gs..... 751,93/ 757:50| 19, 
16 là midi, 18,95] as. +1,75] 18,95] à 9s.....759,69| à 10m. ..751,53| 751,09] 19, 
17 là3s. +5,25 à5%m. + 8,75] +15,00 àg3s,...764,25| à5 3 m,..754,54 760,24 18, 
10 f43s. +18,5o à5 mm. + 5,7b| 17,40) à 9 m.:..764,11] à gs... ,.761,57) 765,22 18, 
19 1à5%s. 19,50] à 5°m.+10,75| +17,00! à 9m..,.759,87| à9s.,...754,65| 758,15] 17, 
20 | a8s, 1,50) 25% m. +, 8,50] 20,00! à 52 m...751,6c| à 105....749,88| 750,00| 18, 
21 | à midi. Æ94,00| à 5 3m. 14,25] +24,00| à 105.,.,.751,20| à 5 © m...746,58 74704 19, 
22 | àroëm.+15,oc| àgs +12,95 14,90! à 9s.,.. 753,10] à midi. ..7bo,56| 750,5 18, 
29 las. 10,50] à 6m. + 9,75] 19,10] à 9 m....758,61| à5s .751,09 752,61 19, 
24 Va midi, 18,90 à 6m. “+14,00| H18,g0| à midi. .751,49| à 105....749,92| 751,49| 18, 
29 | à8s. 19,95] à6m. —+13,50| 17,00! à gm,....749,07| àBs..... 743,49] 747:92| 18; 
26 | à3s. +17,50| à6m. “12,25 +17,10| à midi. ..792,90| à 65...... 748,74] 752,20 18, 
27 | à5s. —o0,00| à 6m. “+H11,00| 19,40] à g m....750,82| à 5s..... 748,78| 749:93| 184 
28 | 23s. +0,60! à 6m. 19,75] 19,60! à 9 m....750,08| à 10 +5...748,17 74956 194 
29 | à8s. <+02,60| à6m. “12,40 +1,25) à midi... .747,84| à 10,5....746,54| 747,84| 19) 
90 | à midi. H2o,10| àgs. 13,50] +0,10] à gs... 746,94] à 6m....74b,99 74545) 29 
Moyennes. +20, 14] Hi,98l +9,61 755,58] 753,89 754,061 19 
RECAPITULATION, | 
Millim. : 
Plus grande élévation du mercure... .. 76495 le 17 
Moindre élévation du mercure. ....... 743,49 le 25 
Plus grand degré de chaleur... ......, —28°00 le 5 
Moindre degré de chaleur........... + 5,75 le 18 
Nombre de jours beaux.....:.. 14 
decouYerts .-Le" 11 
de pluie.....:...... 16 
delvent "Per te 3a 
dexselée- Lente o 
defonnerre.. tue. a 
de 11 


SEPTEMBRE 1818. 


N.L.à5h57/m. 


JBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. 


Sont réduites à la température de zéro du T'hermomètre. 


Couv.,b.,quelq.g.d’ea.|Couvert. 


Couvert. Pluie, tonnerres à 1%, |[Couvert. 
Couvert, brouillard.  |Pluiecontinuelle. Nuageux. 
Lune apogée. Nuageux. Légers nuages. Idem. 


Pluie fine par interval. 


Idem Idem, brouillard. |Pluie abondante. 
Très-nuageux, Nuageux. Pluie. 

Idem. Idem. Quelques éclaircis. 
Nuageux. Idem. Nuageux. 

Idem. Idem. Couvert, brouillard. 


Idem, pl. ay.lejour.| T'rès-nuageux. 


RÉCAPITULATION. 

NS. PAL 

NE... RL NR TO 

Hésesshorecss o 

Jours dont le vent a souflé du SE: RÉ EET TES E 
SOS 5 8 

OLFRIMRETS 6 

NEOPAARUIRE 5 


le 1°", 129,086 
centigrades. 


Légers nuages. 


© |HvyG. POINTS YARIATIONS DE L'ATMOSPHERE. | 
É VENTS. | 
& (à midi. LUNAIRES. | 
F F LE MATIN. LE SOIR. | A MIDI. 
1 0: | Pluie, tonnerre, éclairs|Frès-nuageux, Nuageux. 
140) 0. Couvert. Nuageux. Idem. 
3. —O. Très-nuageux. Idem. Idem. 
4 Nuageux, brouillard. | {dem. Couvert. 
m5 S:-E. Idem. * JLègers nuages. Nuageux. 
» 6 .—0. Idem. Quelques éclaircis. Pluie depuis 3° à 7". 
7 .N. P.Q.àSh18s. Couvert, brouillard. |Nuageux. Couvert. 
L 8 Nuageux. Très-nuag., pl. à 15. Nuageux. 
-9 Lune périgée. | Idem. Très-nuageux. Pluie toute la nuit. 
Pluie fine. Nuageux. Nuageux. 
Couvert, pluie à 10. |Très-nuageux, pl. à 1”.Couvert. 
Couvert. Très-couvert. Nuageux. 
Nuageux. Nuageux. Beau ciel. 
P.L.àa4h24/s.]Beau ciel. Idem. Légères vapeurs. 
Légers nuages, brouill.|Légers nuages. Nuageux. 
Pluieabondante. Couvert. 1dem. 
Couvert, Nuageux. Idem. 
Nuageux, brouillard. |[Couvert. Couvert. 
Couv., pl.à 8}, brouil.| Idem. Nuageux. 
Nuageux. Légers nuages. Idem. 
D. Q.iol6's. 


le 16, 12°,086 | 


dans la cour. ...... 58m 87 — 2 p. 2 lig: 
me 


sur l'Observatoire... 55"®,21 — 2 TL 


Thermomètre des cayes 


Eau de pluie tombée $ 


si ; Den 


x 


256 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


MÉMOIRE 


Sur la Chaleur produite par les rayons du Soleil, et sur 
l'influence du vent sur cette Chaleur; 


Par H. FLAUGERGUES. 


Prusirurs physiciens météorologistes ont essayé de déter= 
miner la chaleur que produisent les rayons du soleil, par la 
différence des températures que marquent deux thermomètres 
semblables , dont l’un est à ombre, et l’autre exposé aux rayons 
directs de cet astre; mais leur travail s’est réduit à faire quelques 
observations isolées, pour lesquelles ils n’ont pas même pris 
les précautions nécessaires. On peut citer pour exemple, M. Bon, 
de la Société royale des Sciences de Montpellier, qui s'est oc 
cupé, à différentes époques, de ce sujet intéressant; pour cela, 
il placoit tout bonnement un thermomètre de Réaumur enchässé 
dans sa monture, contre une muraille au midi, exposé aux rayons 
du soleil, et un thermomètre semblable étoit suspendu à l'ombre 
contre le mur opposé de sa maison; il trouvoit ordinairement 
en été Fe le degré marqué par le thermomètre au soleil, 
étoit le double de celui que marquoit le thermomètre à l'ombre, 
en sorte que la différence entre les degrés désignés par ces deux 
instrumens , étoit quelquefois de 27 et 28 degrés (1). IL y a 
plus, le 30 juillet 1805, M. Bon observa un thermomètre d’es- 
prit-de-vin, construit suivant les principes de M. Amontons, à 
l'ombre à 58-451, qui répondent, suivant la Table du Dr 
Martine (2), à 51 degrés du thermomètre de M. de Réaumur; 
il observa ensuite un autre thermomètre de même construction, 
exposé au soleil à 73 pouces qui répondent à 80° de Réaumur(3); 
ce qui fait 49° de différence. S'il ne s'est pas glissé quelque 
erreur dans cette observation, il faut que le second thermomètre 
de M. Bon ait été placé de manière qu'indépendamment de la 


= ———_—_—_—_—_—_——_—_—_————_—————) 


(1) Assemblée publique de la Société royale des Sciences de Montpellier, du 
2 décembre 1745, pag. 41 et suivantes. Ÿ 

(2) Dissertation sur la Chaleur, par M. Martine, traduite de l'anglois. 
Paris, 1751. 

(5) Mémoires de la Société royale des Sciences de Montpellier, t. I, p. 87- 


chaleur 


FT D'HISTOIRE NATURELLE. 257 


chaleur produite par les rayons directs du soleil ; il rèeut encore 
une grande chaleur par la réverbération ou le rayonnement des 
corps environnans, et l'échauffement de sa monture; car si la 
chaleur seule des rayons du soleil se füt élevée à ce degré, 
comment les voyageurs, les ouvriers, les animaux qui se trou- 
voient ce jour-là dans les champs , auroïent-ils pu supporter une 
chaleur égale à celle de l’eau bouillante. On ne peut donc tirer 
des conclusions légitimes des observations de M. Bon, non plus 
que de celles des physiciens qui après lui s’étoient proposé le 
même but, parce qu'ils ont également négligé deux conditions 
essentielles pour reussir, celle d'employer des thermomètres à 
boules isolées, placés en plein air, et celle de métire ces ther- 
momètres à l’abri, autant que possible, de la réverbération des 
rayons du soleil par le sol et les corps voisins. Une auire pré- 
caution essentielle , et qu’ils ont aussi négligée , est celle de faire 
tomber les rayons solaires perpendiculairement sur la monture 
du thermomètre, de manière qu'une moitié de la surface de 
la boule soit éclairée et échauffée par ces rayons, et que l'autre 
moitié soit dans l'ombre, ce qui n’a pas lieu lorsque le ther- 
momèlre est suspendu verticalement (1), ainsi que le plaçoient 
les physiciens cités. Toutes ces conditions se trouvent remplies 
dans l'appareil que je vais décrire, qui est très-simple, et que 
j'ai employé pour les expériences suivantes. 

AB (pl. 2, fig. 1) est une tige carrée de bois portée sur un 
pied à quatre branches AF, AG, AE, AH; cette tige est di- 
visée en deux parties, la première AD est fixée sur le pied, 
Ja seconde BD se termine en bas par une partie cylindrique DC, 
qui entre dans un trou pareillement cylindrique percé dans la 
tige AD, de manière que cette partie CBD de la tige, peut 
tourner horizontalement sur une portée 1, et on peut la fixer 
dans l’azimut que l’on veut au moyen de la vis de pression J. 


(1) On sait bien que de quelque manière qu'une sphère soit exposée aux rayons 
du soleil, la moitié de la surface de cette sphère, et même un peu plus, sera 
éclairée par ces rayons; mais il faut observer que la boule d’un thermomètre 
n’est pas une sphère isolée; cette boule est jointe à un tube cylindrique qui 
couvre une partie considérable de sa surface (surtout lorsque cette boule est fort 
petite, comme dans les thermomètres que j'ai employés), ce tube projette une 
ombre sur cette boule lorsque le thermomètre est dans une situation verticale; 
il falloit donc incliner le thermomètre comme je lai fait, afin que la moitié de 
Ja boule füt éclairée par les rayons du soleil, et qu’elle reçût toute la chaleur 
que ces rayons pouyoient produire ou occasionner. 


Tome LXXXVII. OCTOBRE an 1818. Kk 


258 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIÉ 

A la hauteur d'environ quatre pieds deux pouces au-dessus 
du sol, est fixée sur la partie CDB de la tige AB, une pièce 
de bois L au moyen d’une vis de pression K. La partie an= 
iérieure de cette pièce est évidée, et forme deux bras M et N; 
entre ces bras, peut tourner avec frottement, un eadre rectan< 
gulaire de bois OPQR de treize pouces de largeur, et de seize 
pouces de hauteur, retenu par deux clous à vis S, S’ qui lui 
servent d’axe. Dans ce “Cadre, représenté vu de face dans la 
figure 2, sont suspendus à des espaces égaux, chacun au tiers 
de la largeur du cadre, deux thermomètres semblables T et U; 
ces thermomètres sont arrêtés à des crochets vissés à la traverse 
supérieure, et ils sont fixés vers le milieu de leur longueur 
sur une traverse trèsmince , qui parlage le cadre vers le tiers 
en descendant de sa hauteur. Sur la traverse inférieure de ce 
cadre, sont fixés perpendiculairement sur sa face antérieure deux 
portans X et X’ longs de deux pouces dix lignes, qui sont percés 
à leur extrémité d’un trou cylindrique, destiné à recevoir la 
queue d'un double écran Y, qui doit successivement ombrager 
un des deux thermomètres; cet écran est représenté vu de face 
(lig. 5), et de profil (fig. 4); il est composé de deux lames 
rectangulaires de carton mince, de longueur et de largeur suf- 
fisante pour que son ombre puisse couvrir un des thermomètres; 
ces lames sont séparées parun intervalle vide, de huit lignes ; elles 
sont assemblées sur une pièce de bois également évidée, ter 
iminée par une queue cylindrique du diamètre du trou des por- 
ians; ces lames sont recouvertes de feuilles de papier argenté: 
toutes ces précautions sont prises pour que la chaleur commu 
niquée à cet écran par les rayons du soleil, ne puisse être trans" 
mise au thermomètre qui se trouve dans son ombre. 


Enfin Z est un grand carton circulaire peint en noir, soutenw 
en dessous par une croix de bois mince, et enfilé sur latige AB 
où il est fixé horizontalement à la hauteur convenable au moyen 
d’une vis de pression : l’usage de ce carton est d'arrêter les rayons 
réfléchis par le sol et par les corps voisins , el les empêcher d’ar- 
river jusqu'aux thermomètres. 

Tout l’appareil est peint en noir mat; et les boules des ther- 
momètres, dont le diamètre n’est que de troislignes, sont noircies 
d'une couche d’encre de la Chine; la marche de ces deux ther- 
momètres, construits par le célèbre Paul, de Genève, est sensi- 
blement la même, et j'ai corrigé quelques différences qui pro- 
venoient d'erreurs dans la gradualion , au moyen d'une table 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 259 
le réduclion calculée d’après une comparaison exacte de ces 
thermomètres. 

Un peu avant midi, je place cet appareil au soleil au milieu 
d'un jardin assez spacieux; je tourne la partie supérieure DB de 
la tige, de manière que le cadre etles deux thermomètres soient 
directement vis-à-vis du soleil, je pose l'écran devant un de ces 
thermomètres, en faisant entrer la queue dans le portant qui 
est au-dessous, et j'incline le cadre de manière que les rayons 
du soleil tombent sur la moitié antérieure de la surface de la 
boule du thermomètre, qui n’est pas dans l'ombre de l'écran, 
ce qui a lieu lorsque les portans qui sont placés d’équerre sur 
la traverse inférieure, ne font ombre d’aucun côté. Après avoir 
attendu un temps suflisant pour que les deux thermomeètres aient 
acquis respectivement les températures qu'ils doivent indiquer, 
je note le degré marqué par le thermomètre au soleil, et tout 
de suite, le degré que marque le thermomètre à l'ombre de 
l'écran. Je répète ces observations au moins dix fois avant midi, 
et dix fois un peu après; mais pour cette seconde suite d'ob- 
servalions, je place l’écran au second portant, en sorte que le 
thermomètre qui, dans la première suite d'observations, étoit 
exposé au soleil, est dans l’ombre pendant la seconde suite, 
et celui qui étoit à l'ombre se trouve au soleil. J'additionne 
ensuite les vingt observations du thermomètre au soleil, et 
les vingt observations du thermomètre à l'ombre, et en divisant 
les sommes par 20, les quotiens sont les chaleurs moyennes 
indiquées par ces deux thermomètres; je prends ensuite la 
différence de ces quotiens qui exprime la chaleur produite 
par les rayons du soleil. Il est nécessaire d’en agir ainsi, et de 
ne pas se borner à une seule observation conjuguée, parce que 
d'un moment à l’autre, on observe des variations dans les degrés 
marqués par les deux thermomètres sans cause apparente; ces va- 
riations sont souvent de plus d’un degré, et ont lieu quelquefois 
en sens opposé dans ces deux instrumens. \ 

Je commencai ces observations le 12 décembre 1814; je 
croyois alors qu’un petit nombre sufliroit pour donner la dif- 
férence exacte de la température à l’ombre et au soleil, ou la 
valeur de la chaleur produite par les rayons solaires ; mais quelle 
fat ma surprise, lorsque je vis cette différence varier tous les 
jours, tantôt n'être que de deux ou trois degrés, communé- 
ment de quatre ou cinq, et d’autres fois s’elever à huit ou 
neuf degrés! Je compris alors que des causes inconnues in- 
fluoient sur la production de la chaleur solaire; j'évitai de 


: Kk 2 


26a JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


former la dessus des hypothèses, et je me bornai à observer 
avec assiduité, et à noter toutes les circonstances qui avoient 
lieu dans chaque observation; mais pour éviler les causes évi- 
dentes de variation, j'eus grande attention de n’observer la 
chaleur solaire que les jours où le soleil étoit parfaitement clair 
et serein, du moins dans la partie où étoit le soleil, et pen- 
dant tout le temps de l'observation; c’est une condition com 
mune à toutes les observations que je vais rapporter. 

Ces observations ont fini contre mon gré, le 29 janvier 1818. 
Le 1° février suivant, un coup de vent fit casser le tube d’un 
des thermomètres (1). Dans cet intervalle d'environ trois ans, 
J'ai réussi à observer 243 fois la chaleur solaire dans des cir- 
conslances favorables, La Table suivante renferme les moyennes 
déduites chacune, de quarante observations diurnes, c’est-à-dire 
que dans le fond, cette Table présente les résultats de 9720 
observations particulières. J'ai réduit les degrés des deux ther- 
momètres à des degrés égaux de chaleur, ou en degrés du 
thermomètre équidifférentiel, au moyen de la Table que j'ai 


publiée dans le Journal de Physique (2). 
TABLE 


De la température au soleil et de la température à l'ombre observées 
simultanément, et de leurs différences. 


Date des observations. me ren Différence. Remarques. 

12 décemb.1814. 13°4 9°6 38 | S. médiocre. 

14 13,3 10,9 2,4 | IN. assez fort. 

15 _ 10,3 6,7 3,6 | S. moyen. , 

17 11,3 9° 2,3 |. fort. 

29 8,9 7,4 2 N. très-fort. 

31 12,9 8,3 4,6 | N.-E. foible. 
1janyier 1815. 7,7 6,0 157 | N. fort. 

2 6,9 5,1 1,8 1 NE. fort. 

9 2,4 1,1 1,3 | Idem, ciel léger. voilé. 
12 6,2 4,0 2,2 | N. ciel vaporeux. 
13 4,0 AVE 1,5 |N.-E. fort. 

22 — H — 3,9 2,0 | E. moyen. 
23 | — < — 453 | 1,7 | N.-E. fort. 


() J'ai réparé depuis cet accident ayec unthermomètre , et j'ai repris ces ob= 
servations sur un nouveau plan. 


C2) Journal de Physique, tome LXXXUIT, page 212, 


A4 


Date des observations. 


26 janvier 1815. 
1°" février, 


18 
C1 
— 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE, 


AR EC D PRE EEE PTT NL TE DELA 7 CIDRE 


Température | Tem 


pérature |D;fférence 


au soleil, à ombre. 

1°0 — 15 2°5 
É 1,8 8,4 3,4 
11,9 8,2 3,7 
10,4 751 3;3 
11,5 8,1 3,2 
10,4 7:9 2,5 
12,2 9,9 2,3 
LE 99 | 2,7 
14; 7; ;1 
180 10,8 2 
14,9 10,8 | 451 
1 5,4 11 »4 4,0 
18,6 10,5 8,1 
16,5 10,5 6,0 
12,0 9,3 27 
174 11,5 5,9 
» 7 1,7 
LS Ule  Léniste 
18,2 13,2 5,0 
17,6 12,8 | 4,8 
20,5 16,3 4,2 
15,4 10,6 4,8 
19,8 13,3 6,5 
26,5 18,7 7,8 
21,4 16,0 5,4 
292,4 17,1 5,5 
22,9 18,1 | 48 

21, 17, » 
23,3 a Gr 
22,9 16,7 | 6,2 
23,2 15,8 7,4 
20,2 12,6 7,6 
20,4 13,4 79 
21,4 16,6 4,8 
21,4 17,1 4,3 
23,7 15,2 8,5 
25,0 19,1 5,9 
28,9 20,6 8,5 
22,0 17,4 4,6 
23,9 19,4 4,5 
26,2 | 20,7 5,5 
20,8 | 15,9 4,9 
27,0 21,7 5,3 
26,4 | 21,5 4,9 
26,2 21,8 4,4 


: 
; 
E 


Remarques. 


2 


261 


N. moyen, ciel vaporeux, 


S.-O. moyen. 


N.-O. léger. nuageux. 


F moyen. 
N.-E. foible, 
S. fort. 
N.-E. assez fort, 
N. assez Fi 


CALME. 

S. très-foible. 

S. très-fort. 

S. très-foible. 

S. très-fort. 

N.-O. foible. ‘ 
N.-E. foible. 

S. moyen. 

N.-E. moyen. 

N.-O. foible. 


N.-O. à peinesensible, 


CALME. 

S.-O. foible. 

S. très-foible, 

N.-E. foible, 

S. moyen. 

S. très-foible, 
Idem. 

CALME. 
Idem. 
Idem. 

S. foible. 

S. moyen. 

CALME. 

S. très-foible. 

CALME. 

E. assez 5, 


NE. foibl e. 


N. à peine sensible. 


N.-E. foible. 
N. moyen, 


262 SOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Date des observations. HOpRAIUE de Différence. Remarques. 
Re ———— — PR, ne SAS CREER 
12 juin 1815. 275 22°%9 46 |S. foible. 
14 20,8 17,9 2,9 | S.-O. très-fort. 
18 27,2 20,0 7,2 | CALME, 
22 20,2 16,4 3,8 | N. fort. 
25 24,6 19,5 5,3 | N.foible. 
28 20,6 17,0 3,6 | N.-E. moyen. 
29 23,5 19,1 4,4 Idem. 
1 juillet, 26,8 29,2 4,6 | N. fort. 
2 28,1 23,1 bo | O. foible. 
5 30,7 22,5 8,2 | CALME. 
6 31,7 23,0 8,7 Idem. 
8 18,0 14,4 3,6 | N. fort. 
10 22,3 18,1 4,2 | IN. foible. 
E 26,5 20,9 5,6 | N.-E. peu sensible, 
15 27,1 21,8 5,3 |E.très-foible. 
15 34,2 25,7 8,5 | CALME. 
30 25,5 20,4 5,1 | N.-E. foible. 
2 août, 23,7 19,8 3,9 | N.-E. fort. 
23,0 18,6 4,4 Idem. 
21,9 17,1 4,8 | N.-E. foible. 
14 22,8 18,6 3,7 | N.fort. 
3b 25,8 21,2 4,6 | N. foible. 
16 29,1 25,7 b,4 | S. peusensible, 
17 27,8 29,4 5,4 | N.foible. 
21 26,3 21,9 4,4 | N. moyen. 
23 34,7 27,0 7,7 | CALME. 
24 26,4 21,8 4,6 |IN.-E. foible. 
26 26,6 21,7 4,9 Idem. 
27 32,4 25,0 7,4 | CALME. 
31 28,5 21,9 6,6 | Presque calme, 
3 septembre. 30,8 23,2 7,6 | CALME. 
28,5 23,7 4,8 | NN. foible. 
6 29,7 19,0 3,7 | N.fort. 
9 22,9 17,3 4,9 | NE. foible. 
10 27,7 20,5 ,2 | CALME. 
un 26,9 21,8 F 1 | N.peusensible, 
20 27,5 20,1 7,4 | CALME. 
24 20,1 16,1 4,0 | N. moyen. 
25 26,8 18,1 8,7 | CALME. 
28 23,7 18,3 5,4 | N.-E. très-foible, 
#4 octobre, 21,7 15,3 6,4 Idem. 
7. 23,4 16,9 6,5 S. très-foible. 
8 19, 15,3 40 | IN. assez fort. 
è 19,3 14,3 5,o | N.moyen. 
4 39,1 14,8 43 | N. assez fort, 


ÉT D'HISTOIRE NATURELLE. 263 


as: 


Date des observations. | L sol Foupéstire Différence. Remarques. 
18 octobre 1815. 17°5 140 3°5. | NN. violent, ciel lég. nuag. 
19 20,5 15,0 5,5 | S.tr.-foib., ciel lég. nuag. 
1° noyembres 12,0 8,5 3,5 | N. assez fort. 
2 10,0 7,1 2,9 | N. très-fort. 
ON 8,5 ba | 3,3 |1N.fort. 
6 8,2 5,2 3,0 | N.-E. trèsfort. 
8 11,1 7,9 3,2 | N.-O. fort. 
26 e 5,3 2,7 2,6 | N. très-fort. 
7 décembre. 7,5 4,9 2,6 | N.-E. très-fort, 
9 3,1 | 1,0 2,1 | N:très-fort. 
1i Û ip — 3,2 1,5 N.-E., tempête. 
12 — 0,6 — 2,4 1,8 Idem. 
28 7,1 5,0 2,1 | N.très-fort. 
15janvier 1816. 14,1 6,4 PA CALME. 
1% 4. 5,2 7,4 Idem. 
22 6,3 3,6 | N.fort. 
27 073 6,5 1,4 | S.très-fort,cielyaporenx, 
31 o, à — 2,8 2,2 | N.très-fort. 
A février. HAS 0,6 7,7 | CALME. 
9,9 6,2 8,7 | S. fort. 
15,9 10,5 3,0 Idem 
# + 0,8 — 1,4 2,2 | N.-E violent. 
91 12,7 6,9 5,8 | N.-E.foible. 
25 14,3 10,2 ljt Idem. 
24 Marss 12,5 9,P 3,0 | N.-E. fort. 
27 12, 9,2 3,3 |. fort. 
28 10,5 7,0 5,5 | N.-E. médiocre: 
51 , 10,5 5,1 3,4 Idem. 
15 avril 9,9 6,0 3,9 N. fort. 
20 18,0 15,6 44 | E. foible. 
27 21,6 15,7 5,a | N.-O. très-foible; 
28 20,3 15,7 4,6 |E.foible. 
SON 23,6 17, 6,6 | S. à peine sensible. 
2 mai. 20, 1 15,5 4,6 | N. assez fort. 
5 18,3 15,8 2,5 | N. médiocre, soleil pâle: 
8 25,7 18,0 7,7 | CALME. 
15 20,6 16,2 4,4 ‘| N. fort. 
16 247 18,2 6,5 | S. foible. 
26 21,8 17,7 451 N. assez fort. 
26 19,0 16,0 3,0 | N.très-fort. b 
30 de 19,3 16,0 3,5 Idem. 
1fr juin 21,3 17,9 3,4 | N:très-fort, soleil pâle. 
2 20,8 17,7 3,1 Idem. 
3 | 23,1 20,1 3,0 Idem. 
39 18,6 : 16,2 | 2,4 | N., tempête, soleil pâle, 


864 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


RCIP ENS CENT LE SE EE SEE EEE 


Date des observations. Température | Température |D;firence. 


au soleil. à l'ombre, Remarques: 
nas nd — | ——— | —— mm 
20 juin 1816, 21°9 18°2 3°7 | N.-E. médiocre. 
22 24,6 20,6 4,9 | E. foible. 
36 29,1 18,2 8,9 | S.moyen. 
2q 19,9 16,4 8,5 |N.-E. médiocre. 
20 25,1 18,9 4,2 Idem. 
4juillet, 20,4. 16,2 ,2 Idem. 
6 24,3 18,8 5,5 | N.-E. très-foible, 
13 20,3 16,6 3,7 | N.-E. fort. 
14 21,9 16,6 5,3 | N.très-foible. 
18 26,9 19,2 7,7 | CALME. 
20 27,9 29,1 5,8 | S.-O.très-foible, 
21 32,5 24,2 8,3 | CALME. 
22 24,6 21,1 3,5 |N. moyen. 
25 27,4 19,7 7,7 | CALME. 
27 22, 18,1 4,4 | S. moyen. 
#août 29,7 22,7 7,0 | CALME. 
A 24,9 19,6 5,3 -| N. très-foible, 
8 29,3 21, 7,4 | CALME. 
11 21,5 17, 4, N. fort. | 
12 26,0 20,4 DE N. à peine sensible, 
22 19,1 15,4 3,7 | N.-E. fort, 
26 19,5 15,6 3,9 Idem. 
29 294 21,0 8,4 | CALME. 
8 septembre. 26,3 19,6 6,7 | Presque calme, 
14 21,7 16,9 4,8 | N. foible, 
15 28,5 20,1 8,4 | CALME. 
18 27,7 20,5 7,2 Idem. 
25 20,0 16,6 3,4 | N.-E. fort. 
28 16,5 13,5 3,4 Idem. 
29 23,7 15,7 8,0 | CALME. 
3 octobre. 22,7 17,8 4,9 | N.-E. foible. 
5 23,5 17,7 5,8 | S.très-foible. 
10 25,7 16,6 9,1 CALME. 
12 20,8 16,0 4,8 | N.-E. très-foible, 
13 19,9 14,5 5,4 | N. à peine sensible, 
14 24,2 15,7 8,5 CALME. 
20 16,1 19,2 5,9 |N.assezfort. 
24 15,7 9,9 5,8 | N.très-foible. 
10 noyembre, 14,3 10,1 4,2 | O. foible. 
13 14,3 10,4 3,9 }j N. fort. 
27 7,b 5,1 2,4 | N.-E. très-fort. 
2 décembre. 4, 2,0 2,7 |E.très-fort. 
21 se o,6 1,9 | N.-E., tempête. 
25 10,0 6,4 3,6 7} N.-E. fort. 
e8 8,7 6,0 C7 | N.-E. très-fort. 


Date 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 265 


Date des observations. | Température | Température |Difrérence. Remarques. 
au soleil. à l'ombre. 
ane dj rene LT rte nd 

29 décemb.181 6:]| # 1377 6°1 76 | CALME: 

5 janvier 1817. 14,2 8,7 5,5 | S.très-foible. 

8 5,5 3,3 2,2 | NE. très-fort. 
16 9,2 6,4 2,8 Idem. 

25 13,8 10,3 3,5 | N. fort. 

27 11,2 8,2 3,0 Idem. 

3 février. 1 6,2 2,9 N.très-fort. 

6 10,8 8,1 2,7 Idem. 

9 1157 8,3 3,4 | S.foible, 

19 10,3 7,0 3,3 4|LS. fort. 

20 19,5 10,8 8,7 | CALME. 

2 mars. 16,4 11,9 4,5 | N. foible, 

15 20,7 12,9 7,8 CALME. 

90 17,7 14,1 3,6 N. fort. 

6 ayril 18,4 14,4 4,9 | O.foible: 

4 mai 16,2 13,0 5,2 | S.-O. fort. 

20,2 16,5 3,7 | S. médiocre. 

12 20,6 14,2 6,4 | Presque calme. 

21 29,3 16,2 6,1 Idem. 

81 ; 21,0 16,1 4,9 | S:très-foible. 
1°’ juin, 20,5 16,5 4,0 Idem, 

2 20,6 16,4 4,2 | N.foible. 

4 25,1 21,0 4,1 Idem. 

5 23,3 18,8 4,5 | S. foible. 

19 23,5 19,2 4,3 | S. moyen. 

29 27,4 22,4 6,0: {|"O: peu sensible, 
2 juillet. 29,2 23,5 5,7 | N.très-foible. 
7 28,0 21,6 6,4 | Presque calme. 
1 août. 24,7 21,0 3,7 N. médiocre. 

29 octobre. 16,0 11,3 4,7 | N. foible. 

1% novembre. 19,3 16,1 4,2 | S. foible. 

9 22,3 15,2 9,1 CALME. n 
10 15,9 11,1 4,8 | IN. médiocre. 
19 15,4 12,3 SRMIENS Or 
20 ID 8,6 2,9 | N:très-fort. 

23 9,8 6,9 2,9 Idem. 

24 15,6 6,8 8,8 | CALME. 

9 15,3 6,5 8,8 Idem. 

1° décembre, 14,0 8,8 5,2 | N.foible. 

10 7,2 4,7 2,5 | N.très-fort. 

13 5,9 2,4 3,5 N. moyen. 

28 8,7 3,0 5,7 s très-foible. 
8 janvier 1818. 9,2 bi 3,5 | N. médiocre, 

10 10,4 7,2 S;a Idem. 

11 11,9 7:8 | 3,1 | N. foible, 


Tome LXXXVII, OCTOBRE an 1818 LI 


266 JOURNAL DPF PHYSIQUE, DE CHIMIE 
D oo 


Date des observations. FORPRRntE FÉDRÉRURS Différence. Remarques, 
eo Et a 0 LE er AU) pie 
12 Janvier, 1817. 10°4 7°9 2°5 | N.très-fort, 
14 11,0 7,1 3,9 | N. moyen. , : 
15 14,9 8,4 6,5 N. à peine sensible. 
22 12 6 86 | :4o | S:foible. 
29 13,5 8,0 | 5,5 | N. foible. 


Cororrarres. 1°. Il suflit de parcourir cette Table, pour re- 
connoîlre tout de suite que la différence entre la température 
indiquée par le thermomètre exposé aux rayons du soleil, et 
la température indiquée par le thermomètre à l'ombre, diffé- 
rence qui exprime la chaleur produite par les rayons solaires, 
est en raison inverse de la force ou de la vitesse du vent. Ainsi, 
lorsque le vent est extrêmement violent, cette différence est 
seulement de un à deux degrés; si le vent n’a qu’une vitesse 
médiocre ou moyenne, cette différence sera de trois ou quatre 
degrés; si le vent est foible, elle s’élevera de cinq à six degrés, 
enfin si l'air est absolument calme, cette différence est de sept 
à huit degrés, et peut même s'élever à neuf degrés dans des 
circonstances rares. 

2°. Ces différences sont sensiblement les mêmes (toutes choses 
égales d’ailleurs), quelle que soit la direction du vent , soit 
que celle direction conspire avec celle des rayons venus du 
soleil, soit qu’elle lui soit opposée ou transversale; on observe 
encore que les mêmes différences ont lieu dans toutes les saisons 
de l'année avec les mêmes vitesses du vent. 

. 3°. Si l'on additionne les différences observées lorsque l'air 
étoit parfaitement calme, et qu’on divise la somme 309°,4 par 39, 
nombre de ces observations, on aura 7°,93 pour la différence 
moyenne entre le thermomètre exposé au soleil et le thermo- 
mètre à l'ombre. Pour déterminer, d’après cette différence 
moyenne, la chaleur que les rayons solaires peuvent produire, 
on observera que ces rayons ne tombant que sur une moilié 
de la boule du thermomètre, et l’autre moitié confinant à de 
l'air qui n’a que la température indiquée par le thermomètre 
à l'ombre , la moitié de cette boule est échauffée par les rayons 
du soleil, et l’autre moitié est refroidie par l'air ambiant; donc 
pour que celte boule conserve une température constante, il 
faut qu’elle perde à chaque instant, par sa partie qui est dans 
l'ombre, autant de chaleur qu'elle en reçoit par sa partie ex- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 267 


posée au soleil; cela posé , nommons x la chaleur que les rayons 
solaires sont capables de produire , à la température du mercure 
dans la boule , lorsque cette température est parvenue à un état 
constant, elclatempératurede l'air ambiant. D'aprèsles expériences 
très-précises de M. le comte de Rumfort, le pouvoir conductif du 
mercure pour le calorique estau pouvoir conductifde l'air, dansson 
état et sa densité ordinaires, comme 1000est à 80,41 (1); représen- 
tons ces pouvoirs conduclifs par ces nombres ; il est d’abord évi- 
dent que la température qui a lieu contre la moitié de la boule du 
thermomètre exposé aux rayons du soleil, est égale à x +c; 
et comme le calorique tend continuellement à se mettre en 
équilibre, sa tendance pour entrer ou pour sortir des corps, 
est proportionnelle à la différence entre la température de ces 
corps et celle du milieu environnant, et de plus, cette ten- 
dance doit produire d'autant plus d'effet dans le même temps, 
que le pouvoir conductif du corps ou du milieu qui doit rece- 
voir le calorique, est plus grand; d’après cela, la quantité 
1000 (x + c— b) exprimera la quantité de calorique qui entre 
dans la boule du thermomètre, par la moitié de cette boule 
exposée au soleil dans un temps très-court, et 80,41 (b—c), 
celle qui en sort dans le même temps par la moitié opposée 
qui est à l'ombre; or, puisque la température de la boule est 
supposée parvenue à un état conslant, on aura, à cause de 
l'égalité entre la quantité de calorique recue et la quantité perdue 
à chaque instant, l'équation 1000 (x + ce — b)— 80,41 (b—c), 


d'où l’on tire x = “2:41 (b— c); et en mettant pour ?—c sa 


valeur 7°,95 , que nous venons de trouver, on aura x ou la cha- 


leur que peuvent produire les rayons solaires à la surface de 
la terre, égale à 8°,57 (2). 


QG) Cité par M. Du Buat, Principes d'Hydraulique et de Pyrodynamique, 
tome III, pag. 204 et 205, édition de Paris, 1816. 

(2) Cette théorie a été confirmée par l'expérience suivante. Le 29 sept. 1816, 
le ciel étant très-serein et l’air parfaitement calme, le thermomètre à l'ombre 
marquoit 50,7, et celui qui étoit exposé au soleil 239,7 (ainsi que nous l’avons vu 
dans la Table), j'ai placé derrière la boule de ce thermomètre , un tube de 
verre plein d’eau à la température de 15°7, de telle manière que la moitié de 
la boule, qui étoit à l'ombre, plongeoit dans cette eau, l’autre moitié étant 
toujours à l'air exposée aux rayons du soleil. Le thermomètre est descendu 
tout de suite à 29°, où il a resté stationnaire pendant un espace de temps 
assez long. Examinons à présent ce qui résulte de cette expérience. L’équation 
= EE (79,93), se résout en cette proportion, 1080,41:1000::x:7°,93, dont 
les deux premiers termes sont 1°., la somme des pouvoirs conductifs du mer- 


LI 2 


268 JOURNAL DE PHYSPQUE, DE CHIMIE 


Dans l'examen que j'ai fait de l'hypothèse de Newton sur fx 
formation de la queue des Comètes (1), j'ai supposé, d'après 
mes premières observations, la chaleur des rayons solaires à 
la surface de la terre, de 8°, cette chaleur étant de 8,57, la 
chaleur qu’a dû éprouver la comète de 1680 en passant au pé- 
rihélie, a été: plus forte d’un quatorzième environ que suivant 
mon évaluation ; mais cette augmentation de chaleur est trop 
peu considérable pour infirmer les objections que nous avons 
faites dans le Mémoire cité contre cette hypothèse. 

. 4. Si l’on recueille les observations de la chaleur produite 
par les rayons solaires, faites lorsque Fair étoit parfaitement 
calme et comprises entre le 21 novembre et le 21 janvier, c’est- 
à-dire un mois avant et.un mois après le solstice d'hiver, qu'on 
additionne les différences observées ,etqu’on divise la somme par le 
nombre des observations qui est cinq, on aura 8°06 pourla diffé+ 
rence moyenne ; et si l'on additionne de même les différences ob+ 
servées lorsque l'air éloit parfaitement calme, un mois avant et 
un mois apres le solstice d'été, c'est-à-dire du:21 mai au 21 


——————————_]_—_—__—_—_—— 


cure et de l'air, et 2°. le pouvoir condnctif dn mercure. Par le même rai- 
sonnement qui nous a conduit à cette équation, on trouvera que si le milieu 
qui confine à la partie postérieure de la boule est de l’eau, on aura également 
une proportion dont les deux premiers termes seront la somme des pouvoirs 
conductifs du mercure et de l'eau, et le pouvoir conductif du mercure; le 
troisième terme sera la chaleur que pouvoient produire les rayons du soleil ; 
et le quatrième, la différence qu'on deyoit observer dans ce cas, entre le 
degré marqué par le thermomètre exposé au soleil et plongé dans l'eau par 
sa partie postérieure, et le degré marqué par le thermomètre à l'ombre dans 
l'expérience du 29 septembre, lequel exprimoit également la température de 
l'eau. Nommons x’ et y ces deux termes, et comme, d'après les expériences de 
M. le comte de Rumfort (/oco citato), le pouvoir conductif de l’eau est exprimé 
par 515, celui du mercure étant toujours représenté par +000; on aura dansl'expé- 
riences du 29 septemb., la proportion 1313:1000 :: x’ :y; mais puisque, dans cette 
expérience, la différence entre Les degrés marqués par le thermomètre avant 
l'application de l’eau, est-de 8°, Ja chaleur que les rayons solaires étoient 
capables de produire, ne devoit pas différer sensiblement de celle que nous 
avons déterminée d’après la différence moyenne 7°,93 ; donc x’ est sensible 
ment égal à æ, ou à 8,57; les termes moyens des deux proportions... 
1080,41:1000::æ:7°,93 et 1313:1000!:7 :y étant donc égaux, les termes 
extrêmes sont proportionnels; c'est-à-dire qu'on a la proportion... ... 
1313: 1080, 4r :: 7°,93 : y =6°,52; c’est la différence qu'il devoit y avoir, sui- 
vant la théorie, entre la température marquée par le thermomètre exposé au 
soleil, et la température de l'eau appliquée derrière la boule de ce thermo- 
mètre : dans l'expérience du 29 septembre, ceite différence a été trouyée 
de 6°,3, ce qui en diffère peu et confirme notre théorie. 
(1) Journal de Physique, tome LXXXVI, pag. 106. 


ET D'HISTOIRE NATUR£ÉLLE. 26ÿ 


juillet, et qu’on divise la somme par six, nombre des obser- 
valions , on aura 8°,10 pour la différence moyenne; d'où l'on 
conclura , d’après ce que nous avons dit dans l'article précédent, 
que la chaleur que peuvent produire les rayons du soleil dans 
le premier cas, est de 8°,71, et sa méme chaleur dans le second 
cas, est de 8°,75; d'où il suit que la chaleur que les rayons 
du soleil sont capables de produire, est à peu près la même 
en hiver et en été, ce qui est réellement bien surprenant, car 
la hauteur méridienne moyenne du soleil, pendant le mois qui 
précède et le mois qui suit le solstice d'hiver est, à Viviers, 
de 23° 48/, et la hauteur méridienne moyenne du soleil pendant 
le mois qui précède et le mois qui suit le solstice d'été, est 
de G7°11'; or, d'après la Table de M. Bouguer (1), la force 
de la lumière qui arrive d’un astre à la terre, après avoir tra- 
versé l’atmosphère sous une inclinaison de 23° 48°, ou ce qui 
reste de 10000 rayons, est exprimée par 5977, et pareillement, 
la force de la lumière, ou ce qui reste de 10000 rayons, après 
avoir traversé l'atmosphère sous une inclinaison de 67° 11, est 
exprimé par 7981. Mais il faut observer que le soleil étant plus 
proche de la terre l'hiver que l’été, ses rayons sont plus denses 
en raison inverse des carrés de sa distance à la terre (2) dans 
ces deux saisons, c’est-à-dire comme 10538 à 9667; mullipliant 
donc les nombres précédens par cette raison, ils deviennent 
6179 et 7715 respectivement : ces deux nombres expriment le 
rapport du nombre des rayons incidens sur la boule du ther- 
momètre en hiver et en été ; ils sont à peu près entre eux comme 
4 à 5; la chaleur produite par les rayons du soleil en hiver, 
sembleroit, d'après cela, devoir êlre moindre d'un cinquième 
que la chaleur produite par les rayons du soleil en été, et ce- 
pendant nous avons trouvé par l'expérience, que cette chaleur 
produite par les rayons du soleil aux environs du solstice d'hiver, 
est à peine d’une deux-cenlième partie moindre que la chaleur pro- 
duite par les mêmes rayons aux environs du solstice d'été. Il faut 
donc qu'un plus long trajet de la lumière du soleil dans l’at- 
mosphère, augmente et favorise la production de la chaleur, 
de manière à compenser la diminution que doit nécessairement 
produire dans cette chaleur, la perte des rayons éteints dans ce 


(1) Traité d'Optique sur la dégradation de la lumière, ouvrage posthume de 
M. Bouguer, livre 11, section 5, pag. 332. 

(2) Cette raison inverse est celle de 10338 à 9687 d’après les Tables astro 
nomiques de M. le baron de Zach (Tabulæ motuum Solis, etc; Gothæ, 1804). 


276 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


trajet; car on observe dans les éclipses de soleil, qu'un ther- 
momètre exposé aux rayons de cet astre, baisse à mesure que 
l'éclipse augmente, et remonte ensuite lorsqu'elle diminue (1), 
celte remarque est favorable à l'hypothèse admise par M. Deluc (2), 
et par plusieurs physiciens célèbres, qui croient que les rayons 
du soleil ne sont pas chauds par eux-mêmes, et qu'ils sont seu- 
lement la cause ou l’occasion du développement du calorique 
contenu dans l'atmosphère, ce que les observations précédentes 
rendent très-vraisemblables ; en effet, si les rayons de soleil 
éloient chauds par eux-mêmes, le vent ne pourroit diminuer 
la chaleur qu'ils produiroient, car les rayons du soleil ne sont 
pas plus déviés ou repoussés par l’air agité que par l'air en 
repos ; tombant donc en même quantité sur le thermomètre dans 
le calme et dans la tempête ils échaufferoient également le 
mercure de cet instrument dans les deux cas, ce qui est con- 
iraire à ce que nous avons observé. 

La diminution dans la chaleur produite par les rayons du soleil, 
occasionnée par le vent, explique un fait météorologique dont 
on n'a pas encore donné de bonnes raisons; supposons qu'un 
jour l'air soit très-calme, le ciel serein, et que le thermomètre 
d'observation à l'air et à l'ombre, marque un certain degré de 
chaleur. Supposons encore que le lendemain le thermomètre 


(1) Mémoires sur la Météorologie, par le P. Cotte, tome I, pag. 487 et suiv, 
J'ai observé cette diminution de la chaleur solaire et l'augmentation ensuite, 
suivant le progrès et le déclin dans plusieurs éclipses de soleil, notamment 
celle du 3 juin 1788; durant cette éclipse, le ciel fut parfaitement serein et 
l'air très-calme; j’observai le commencement à 19*26’ 36" temps apparent , 
la fin à 214 95° 45"; le milieu ou la plus grande phase , vers 20! 27 Voici la 


marche d'un thermomètre au mercure, exposé directement aux rayons du 
soleil pendant cette éclipse. 


A 19}30..96° | Aocot19"..93° | A 90 49".. 


23:10 Aï20! 570 Lab? 

19.57. ..95 20.97. ..929 à 20:45. ..23 > 21, 7...2D% 
20. 2..,24X 20.28. ..922 20-47-23 % 21.10..420 + 
20. 5...94 20.32...92 + 20.b2...04 21,12...926 © 
20. 7.,.29 20437 Nan 20.53. .:24 + 21.17...27 0 
21.27..,.98 + 


On voit, par ce Tableau, que la descension et l'ascension du thermomètre 
ont suivi fort exactement le progrès et la diminution de l’éclipse. 

(2) Lettres physiques et morales sur l'Histoire de la T'erre etsur l'Homme, etc., 
par M. Deluc, tome Y, partie XI, lettre 142. 


De 
ET D'HISTOIRE NATURELLE 271 


d'observation, marque le même degré de chaleur, que le ciel 
soit également serein, mais qu'il fassé un grand vent; l’obser- 
vateur météorologiste se fiant à l'indication de son thermomètre, 
regardera la température de ces deux jours comme parfaitement 
égale, et la notera ainsi dans son journal; mais celui qui aura 
élé à la campagne pendant ces deux jours, soutiendra, d'après 
ses sensations, qu'il a fait plus de froid le second jour que le 
prete et il auraraison; car il est possible que l'excès de 
a chaleur des rayons solaires sur la température à l'ombre, 
fût le premier jour de huit degrés, et le second de deux degrés 
seulement, en sorte qu’en plein air au soleil, on éprouvoit ce 
dernier jour six degrés de moins de chaleur que le premier jour, 
quoique la température fût la même à l'ombre (1). 

On pourroit peut-être soupconner que la dinunution de Ha 
chaleur solaire, lorsque l'air est agité, ne vient pas de ce que 
les rayons du soleil, dans cette circonstance, produisent moins 
de chaleur, mais de ceque l'air, continuellemeut renouvelé, enlève 
plus de calorique au thermomètre, c’est-à-dire, en d’autres termes, 
que l'air par son agitation, devient un meilleur conducteur du ca- 
lorique que lorsqu'il est en repos; mais ce soupçon paroilra 
bien peu fondé, si l’on fait attention que pour réduire Ja dit- 
férence moyenne, de 7°,95 entre les degrés marqués par le ther- 
momèlre exposé au soleil et le thermomètre à l'ombre, lorsque 
l'air est calme, à deux degrés (et même à moins) que devient 
celte différence lorsque le vent souflle violemment , il faudroit 
que le pouvoir conductif de l'air qui, dans l’état de repos, est 
plus de douze fois moindre que le pouvoir conductif du mer- 
cure, s’élevàt par le fait seul de son agitation à 5284 , ou qu'il 
devint 2lus de trois fois et un quart plus grand que le pouvoir 
conductif du mercure, c’est-à-dire quarante-une fois plus grand 
que le pouvoir conductif de ce même air dans l’état de repos, 
ce qui est absolument improbable. 

De plus, le vent, par son action mécanique, au lieu de faire 
descendre la liqueur du thermomètre, tend au contraire à la 
faire monter; car M. l'abbé Teinturier a découvert, en 1710 
(et chacun peut le vérifier aisément), qu’en souflant avec un 
soufllet ordinaire contre la boule d’un thermomètre fixé contre un 


() Ne seroit-il pas à propos, d’après cette remarque , de joindre aux ob- 
servations météorologiques diurnes ordinaires , celle de la chaleur produite par 


les rayons du soleil sur un thermomètre exposé en plein air directement à ces 
rayons ? 


272 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE 


supportimmobile, on faitmonterlaliqueur d'un degréou d'un degré 
et demi (1). J'ai pareillement observé avec deux thermomètres dont 
la marche éloit parfaitement la même, et que j'avois fixés à une 
petite distance contre les deux faces d’un disque de bois porté 
sur un pied, et placé en plein air à l'ombre , de manière qu'un 
de ces thermomètres füt directement exposé au vent, qui étoit 
très-fort, et l’autre abrité du vent par un disque, j'ai observé, 
dis-je, que le thermomètre exposé au vent, éloit toujours un 
peu plus élevé que celui qui étoit à l'abri du vent; cette as- 
cension du thermomètre par le vent, n’a rien de surprenant, 
non plus que celle observée par l'abbé Teinturier, car c’est 
évidemment la suite de la compression de l'air contre la boule 
du thermomètre, et cet effet représente très en petit celui du 
briquet pneumatique, Ÿ 

J'ai vérifié encore d'une manière directe, que l'air par son 
agilation ne devient pas un meilleur conducteur du calorique 
que lorsqu'il est en repos. Pour cela, j'ai échauffé par lappli- 
cation des mains, les boules des deux thermomètrès fixés contre 
le disque de chaque côté, jusqu'à ce que la liqueur fut élevée 
dans chacun , de quinze degrés au-dessus de la température de 
l'air commune aux deux thermomètres; ayant retiré les mains 
en même temps, j'ai observé que la liqueur de ces deux ther- 
momètres, dont lun, comme il a été dit, étoit exposé au vent 
et l’autre à l'abri, est descendue de dix degrés dans chacun dans 
le même espace de temps. 

D'après ces considérations , il est évident (quelque surprenant 
que cela puisse paroître) que c’est par une modification parti- 
culière que l'agitation de l'air occasionne dans l’action des rayons 
du soleil productive de la chaleur, que ces rayons ne produisent 
pas autant de chaleur lorsque l'air est en mouvement que 
lorsque ce fluide est en repos; à l'égard de la cause de cet 
effet singulier , je n’ai pas fait encore assez d'expériences pour 
me permeltre seulement de la soupconner. 


(1) Mémoires de l’Académie des Sciences , année 1710, pe 


NOUVEAU 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 273 


NOUVEAU CATALOGUE 


Des chutes de Pierres et de Fér, de Poussière ou de Sub1 
stances molles, sèches ou humides, suivant lordre 
chronologique; 


Par E. F. F. CHLADNI, 


NN. B. J'ai réuni dans ce nouveau Catalogue , autant qu’il m'a 
été possible, les chutes constatées de pierres et de fer; les 
dates sont corrigées d’après les meilleures notices que j'ai pu 
obtenir. Les évènemens qui, à ce qu'il paroit, n’étoient que des 
chutes de grêle, sont relranchés, et dans quelques autres le 
signe (?) exprime l'incertitude. Je réserve les citations plus 
exactes, comme aussi les détails des évènemens et les consé- 
quences, pour un ouvrage sur cet objet auquel je travaille main- 
tenant. Les chutes de poussière, et en général de substances 
molles, sèches ou humides, termineront ce Catalogue, 


S L Cuures pe Pierres ET DE FER (1). 


I. Avant le commencent de notre ëre: 
À. Celles que l’on peut rapporter à peu près à une époque. 


21478 ans avant notre ère, en Crète, la pierre de foudre dont 
Mälchus parle , probablement regardée comme symbole de Cy- 
bèle. Chronique de Paros, lign. 18 et 19. nv 

(La pluie de pierres rapportée par J'osué, n’étoit peut-étre 
qu'une gréle.) 
1200. Pierres conservées à Onhomenos. Pausanias, 

21168. Une masse pe rer sur le Mont Ida en Crète. Chronique 
de Paros, ligne 22. 

? 705 ou 704. L'Ancyle, PROBABLEMENT UNE MASSE DE FER, à 
peu près de là même forme que celles du Gap et d'Agram. 
Plutarque. 

654. Pierres sur le Mort Alban. Lis, 1, 30. 
644. En Chine, De Guignes. 


(1) Les chutes de fer sont indiquées en petites capitales. 


Tome LXXXVII. OCTOBRE an 1818. Mm 


274 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIÉ 
465. À Ægopotamos. Plutarque, Pline et autres. 
Une pierre près de Thèbes. Scholiaste de Pindare. 
211. En Chine. De Guignes et Hist. génér. de la Chine. 
205 ou 206. Pierres ignées. Plutarque, Fab. Max. c. 2. 
192. En Chine. De Guignes. 
176. Une pierre dans le lac de Mars. Liv. xrr, 3. 
90 ou 80. Lateribus coctis pluit. Pline et Jul. Obs. 
89. Eu Chine. De Guignes. 
56 ou 52. FER spoNciEux en Lucanie, Pline. 
2? 46. Pierres à Acilla. Cesar. 
38, 29, 22, 19, 12, 9, 6. Chutes de pierres en Chine. De 
Guignes. 


B. Pierres dont l'époque de la chute ne peut pas étre déterminée. 


La mère des dieux tombée à Pessinus. 

L'Elagabal, à Emisa en Syrie. 

La pierre conservée à Abydos, et celle à Cassandria. Pline. 
2? La pierre noire et encore une autre dans la Caaba de la Mecque. 
?Peut-être la pierre conservée dans le siége de couronnement 
des rois d'Angleterre. 


Il. Après le commencement de notre ère. 


Une pierre dans le pays des Vocontins. Pline. 
L'an 452, rois grandes pierres en Thrace. Cedrenus et Mar- 
cellinus. 
VI: siècle. Pierres sur le Mont Liban, et près Emisa en 
Syrie. Damascius. 
? 57o (à peu près). Pierres près Beuder en Arabie. Le Coran, 
VIL, 16, et CV, 5 et 4, et les Commentateurs. 
? 648. Une pierre ignée à Constantinople. Quelques chroniques. 
852, en juillet ou août. Une pierre dans le Tabaristan. De 
Sacy et Quatremère. 
856, en décembre. Cinq pierres en Égypte. Les mêmes. 
897. À Ahmed-Dad. Quatremère. Suivant le Chron. Syr.; 
en 802. 
die Une pierre à Augsbourg (pas en Italie). 4/6. Stad. 
et autres. 
998. Pierres à Magdebourg. Cosmas et Spangenberg. 
1009. Un peu de temps après, masse De FER dans le Djordjan. 
‘Avicennes. (On a estropié le nom en Zurgea'et Cordova.) 
1021, entre le 24 juillet et le 21 août. Pierres en Afrique. 
De Sacy. s 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 275 


1112. Pierres ou rer près Aquileja. F’alvasor. 

1155 ou 1136. Une pierre à Oldisleben. Spangenberg et autres. 

1164. A la fête de Pantecôte, Fer en Misnie. Geog. Fabricius. 

1249, 26 juillet. Pierres à Quedlinbourg, etc. Spangenberg et 
Rivander. 

?XII° siècle. Une pierre à Wurzbourg. Schotti, phys. cur. 

Entre 1251 et 1563. Pierres à Welixoi-Ussing en Russie. 
‘Ann. de Gilbert, tome XXXV. 

21280. Une pierre à Alexandrie en Égypte. De Sacr. 

1304, 1* octobre. Pierres à Friedland ou Friedberg. Kaanz 
et Spangenberg. 

1528, 9 janvier. Dans le Mortahiah et Dakhaliah. Quatremère. 

21568. Dans le pays d'Oldembourg UNE masse pe FER. Siebrand 
Meyer. 
1579, 26 mai. À Minde en Hanovre. Zerbecius. 
21438. Picrres spongieuses à Roa. Proust. 
? Une pierre près Lucerne. Cysat. 

1491, 22 mars. Pierre près de Crema, Simoneta. 

1492, 7 novembre. À Ensisheim. 

1496, 26 ou 28 janvier. Pierres à Cesena, etc. Buriel et 
Sabellicus, 

1511, vers le milieu de septembre. Grande chute de pierres 
à Créma. Giovanni del Prato et autres. 

1520, en mai. Pierres en Arragon. Diego de Sayas. 

21540, 28 avril. Une pierre dans le Limousin. Bonav. de St. 
‘Amable. 

1540 à 1550. Masse DE FER dans la forêt de Naunhof. #/binus 
Meisnische Bergchronik (c'est-à-dire, Chronique des Mines de 
Misnie). 

— Fer en Piémont. Mercati et Scaliger. 

1552, 19 mai. Pierres en Thuringe. Spangenberg. 

1559. Pierres à Miskolz en Hongrie. Sthuanfi. 

1561, 17 mai. À Torgau et Eilenbourg (exprimé par Arcem 
Julian). Gesner et de Boot. 

(La relation d’une chute, 1564, entre Malines et Bruxelles ; 
ne paroit être qu’une plaisanterie.) 

1580, 27 mai. Pierres près Gottingue. Bange. 

1581, 26 juillet. Pierre en Thuringe. Binhard, Oleartus. p. 

1585 , 9 janvier. À Castrovillari. Casto, Mercati et Imperat, 

1583, 2 mars. En Piémont. Wercati. 

1596, 1* mars. Pierres à Crevalcose. Mitarelli. 


Mu 2 


276 SouRNAL DË PHYSIQUE; DE CHIMIE + 


Dans le même siècle (pas 1605), une pierre dans le royaume 
de Valence. Cæsius et les Jesuites de Coimbra. 
1618, en août. Grande chute de pierres en Stirie. Fundgnce- 
bender Orients (Mines de l'Orient), par M. de Stammes. 
1618. Masse mérarriqur en Bohème. Kronland. 
1621, 17 avril. Masse pe FER près Lahore. Jehan Guir. 
1622, 10 janvier. Pierre en Devonshire. Rumph. 
1628, 9 avril. Près Hatford en Berkshire. Gentlem. Magaz, 
1634, 27 octobre. Pierres en Charollois. Morinus. 
21635, 7 juillet. Pierre à Calce. F'alisnieri. 
1656, 6 mars. en Silesie. Lucas et Cluverius. 
1637 (pas 1627), 29 novembre. En Provence. Gassendi. 
1642, 4 août. En Suffolk. Gentlem. Magaz. 
21643 ou 1644. Pierres en mer. Wuofbrain. 
1647, 18 février. Une pierre près Fwicxau. Schmid. 
1647, en août. Pierres en Westphalie, Ann. de Gilbert. 
Entre 1647 et 1654. Une masse en mer. #illmann. 
1650, 6 août. Une pierre à Dordrecht. Senguesd. 
1654, 30 mars. Pierres dans l’île de Fune. Bartholinus. 
À Varsovie, une grande pierre. Petr. Borellus. 
A Milan, une petite pierre qui a tué un Franciscain. Museums 
Septalianum. 
(La relation de pierres tombées en 1667 à Schiras, paroit fa- 
buleuse.) 
1668, 19 ou 21 juin. Grande chute de pierres à Véronne. 
Valisnieri, Montanan, Fr. Carli. 
1671, 27 février. Pierres en Suabe. Ænnales de Gilbert, 
tome XXXIIT. 
1674, 6 octobre. Pierres près Glaris. Scheuchzer. 
?Entre 1675 et 1677. Pierre près Copinsha. Wallace et Gent- 
lem. Magaz., juillet 1806. 
1677, 28 mai. Pierres à Ermendorf, qui probablement con- 
tenoient du cuivre. Misi, nat. cur.,-1677, app. 
1680, 18 mai. Pierres à Londres. King. 
1697,:13 janvier. Près Sienne. Soldant d'après Gabrieli. 
1698, 19 mai. Pierre à Walhing. Scheuchzer. 
1706, 7 Juin. Pierre à Larisse. Paul Lucus. 
1722, 5 juin. Pierres près Schefilas en Freisinge. Mer- 
chelbeck. 
1725, 22 juin. À Plescowitz. Rost et Stepling. 
(La prétendue chute de métal, 17931, à Lessay, n’éloit qu'une 
phosphorescence électrique des gouttes de pluie, car dom Stalley 


- 


* 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 277 


ne dit pas : il tomboit des gouttes de métal embrasé et fondu, 
mais, il tomboit comme des gouttes, elc. 
1727, 22 juillet. Chute près de Lilaschitz en Bohème. Ste- 
ling. 
À 1558, 18 août. Près Carpentras. Castillon. 
1740, 25 octobre. Pierres à Rasgrad. Annales de Gilbert , 
tome L. 
1740 à 1741, en hiver. Une grande pierre en Groenland. 
gede. 
Va743. Pierres à Liboschitz. Stepling. (Peut-être le même 
que 1723.) 
1750, 1° octobre. Pierre près Coutances (1). Huard et Lalande. 
1751, 26 mai. Fer à Stradschina, prés Apam. 
1753, 3 juillet. Pierres à Tabor. Stepling et Mayer. 
1755, en septembre. A Laponas. Lalande et Richard. 
1755, en juillet. Pierre en Calabre. Domin. Tata. 
1766, en Juillet. A Alboreto. Troilr. 
21766, 15 août. A Novellara. Zroili. (Peut-être une pierre 
fondue par la foudre.) 
1768, 13 sepiembre. Pierre à Lucé. Mém. de l'Acad. 
Une pierre à Aire. Mém. de L Acad. 
1768, 20 novembre. Pierre à Maurkirchen. Imhof. 
1773, 17 novembre. Pierre à Séna en Arragon. Proust. 
1775, 19 septembre. Près Rodach en Cobourg. Annales de 
Gilbert, tome XXIII. 
1775 ou 1776. Pierres à Obruteza en Volhynie, Annales de 
Gilbert, tome XXXI. 
1776 ou 1777, en janvier ou février. Près Fabbriano. Sofani 
et Æmoretti. * 
1779. Pierres à Pettiswood en Irlande. Gentlém. Magaz. 
1780, 1*° avril. Près Beeston en Angleterre. Lloyds Eve- 
ming Post, 
1782. Pierre près Turin. Tata et Amoretti, 


M RE ge ER ARS ES, RL ne ECO + 0 5e) 


(1). On m'a reproché une fausse citation quand j'ai nommé un mercure (quel- 
conque), comme garant d'une chute qui n'a pas eu lieu, près Constance. Mais 
je n'ai pas cité le Mercure de France, ne sachant pas même qu'il existoit déjà 
dans ce temps-là. L'erreur a été causée par So/dani qui dit : Jl mercurio di 1751 
parla di una pietra caduta presso Costanza. Or, il y avoit des mercures dans 
cinq différens pays, et Costanza ne signifie pas ordinairement Coutances , mais 
CPE Dans les Annales de Gilbert tome L,, pag: 258, j'ai ajouté, quel 
mercure 


278 
1785, 
1787, 

Ann. de 
17905 
1791; 
1791; 
1794; 
1795, 
1799; 
1796, 

Gilbert, 
1796, 
1708, 
1708, 
1801. 
1802, 

octobre 
1803, 
1803, 
1803, 
1805, 
1804, 
1804. 
1805, 

Gilbert, 
1805, 
1806, 
1806, 
1807, 
1807, 
1808, 
1808, 
1808, 

21809, 

Medical 

1810, 


JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIX 

19 février. Pierres à Eichstaedt. Pickel et Stalz. 

1 octobre. Dans la province de Charkow en Russie, 
Gilbert, tome XXXI, 

24 juillet. Grande chute à Barbotan, etc. 

17 mai. Pierres à Cassel-Berardenga. Soldani. 
20 octobre, À Menabilly en Cornwallis. Xing. 

16 juin. Aux environs de Sienne. 

13 avril. A Ceylan. Le Beck. 

15 décembre. Pierre en Yorkshire. 

4 janvier. Près Belaja Ferkwa en Russie. 4nnales de 
tome XXXV. 

19 février. En Portugal. Soulhery, 

8 ou 12 mars. À Sales. De Drée, etc, 

19 décembre. Pierres au Bengale. Hoivard, Valentia, p; 
Sur l'ile des Tonneliers, Bory de Saint-Vincent. 
ce septembre, Pierres en Ecosse. Monthly Magasin, 
1802. 

26 avril. Pierres aux environs de l’Aigle. 

4 juillet. À East-Norton. Phil. Mag. et Bibl, Brut, 

8 octobre. Une pierre près d'Apt. 

13 décembre. Près Eggenfelde. Zmhof. 

5 avril. Près Glasgow, Phil. Mag. et Bibl. Brit. 
--1807. À Dordrecht. /’an Beek-Calkoen. 

25. mars. Pierres à Doroninsk en Sibérie. Annales de 
tom. XXIX et XXXI. 

en juin. Pierres à Constantinople. Kougas-Ingigian, 
15 mars. A Alais. 

17 mai. Pierre en Hantshire. Monthly Mag. 

13 mars. Près Fimochin en Russie. 4nn. de Gilbert, 
14 décembre. Pierres près Weston en Connecticut. 
19 avril. À Borgo San-Donino. Guidotti et Sgagnont, 
22 mai. Près Stannern en Moravie. 

3 septembre. À Lissa en Bohême. De Schreibers, 

17 juin. En mer près de l'Amérique septentrionale, 
reposit. et Bibl. Brit. 

50 janvier. Dans Caswell en Amérique. Phil. Mag. et 


Med. reposit. 
1810, en juillet. Une grande pierre à Shabad dans l'Inde. Le 


mé'téore 
2810, 
1811, 


a causé de grands dégats. Phil. Mag., tome XXX VII. 
23 novembre. Pierres à Charsonville, près d'Orléans. 
12—13% mars. Une pierre dans la province de Pobtawa 


en Russie. Ann. de Gilbert, tome XXXVII, 


fT D'HISTOIRE NATURELLE, ‘279 


1811, 8 juillet. Pierres à Berlanguillas. 

1812, 10 avril. Près Toulouse. 

1812, 15 avril. Une pierre à Erxleben. Ænnales de Gilbert, 
tom. XL et XLI. 

1812, 5 août. À Chantonay. Brochant. 

1813, 14 mars. Pierres à Cutro en Calabre, du temps d’une 
grande chute de poussière rouge. Bibl. Brit., octobre 1815. 

1813, 10 septembre. Pierres près Limerick en Irlande. PAil. 
Mag. et Gentlem. Mag. 

1814, 3 février. Pierre près Bacharut en Russie. Ænn. de 

: Gilbert, lome L. 

1814, 5 septembre. Pierre près Agen. 

1814, 5 novembre. Dans Doab aux Indes. Puil. Mag... Bibl. 
PBrit., Journal of Sciences. 

1815, 3 octobre. À Chassigny, près de Langres. Pistollet. 
1816. Pierre À Glastonbury en Sommersesthire. Phil. Mug. 
21817, entre le 2 et le 3 mai. Probablement des masses sont 
tombées dans la mer Baltique, parce qu'après l'apparition d'un 
grand météore à Gothenbourg, elc., on a vu à Odensée des- 
cendre lrès-rapidement une pluie de feu en S-E., d'après les 

Journaux danois. 

1815, 15 février. Une grande pierre paroît être tombée à Li- 
moges , dans un jardin situé au sud de la ville, parce qu'après 
l'explosion d'un grand météore, une partie tombée a fait une 
excavalion dans la terre d’un volume égal à celui d’une grande 
futaille. Gazette de France et Journal du Commerce, du 25 


février 1818. Il auroit fallu, et il faut encore, déterrer la masse 
tombée. 


II. Masses de fer auxquelles on peut attribuer une origine 
méléorique. 


Les masses de fer probablement météoriques, se distinguent 
par la présence du nickel , par leur tissu, par leur malléabilité 
et par leur gisement isolé, Ces masses sont : ; 

A. Spongieuses ou cellulaires, où les cavités sont remplies 
d’une substance pierreuse semblable au péridot. 

La masse trouvée par Pallas en Sibérie, dont les Tartares 
connoissoient l'origine météorique. 

?Un morceau trouvé entre Eibenstoch et Johanngeorgenstadt. 

Un morceau dans le cabinet impérial de Vienne, peut-être 
de la Norwège. | 


280 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Une petite masse pesant quelques livres , qui se trouve main- 
tenant à Gotha. | 

B. (1) Solides où le fer consiste en rhomboïdes ou en oc- 
taèdres, composés de couches ou feuilles parallèles. 

La seule chute connue de ce genre est celle à Agram en 1751! 
Quelques autres masses semblables ont été trouvées. 

Sur la rive droite du Sénégal. Compagnon, Forster, Golberry. 

Au cap de Bonne-Espérance. Fan Marum et de Dankelmann. 

Au Mexique dans diflérens endroits, Sonneschmidt, de Hum- 
boldt et Gazeta de Mexico, tom. I et V, 

Au Brésil, dans la province de Bahia. Mornay et Wollaston. 

Dans la juridiction de San-lago del Estero. Rubin de Celis. 

A Elbogen en Bohème. Ann. de Gilbert, tom. XLII et XLIV. 

Près de Lénarto en Hongrie. {nn. de Gilbert, tome XLIX. 

Quelques masses sont d'une origine problématique; parce qu’elles 
ne contiennent pas de nickel, et parce que le tissu n’est pas 
comme dans les précédentes. 

? Une masse trouvée près de la rivière Rouge et envoyée de 
la Nouvelle-Orléans à New-York. Journal des Mines, 1812. 

Une masse à Aix-la-Chapelle(pas à Aken, d’après Monheim) 
qui contient de l’arsenic. Ann. de Gilbert, tome XLVIHH, etc. 

Une masse trouvée dans le Milanois sur la colline de Brianza, 
dont j'ai publié la notice dans les 4an. de Gilbert, tome L, 
pag. 275. 

La masse trouvée à Groskamsdorf, contenant , d'après Kla- 
proth, un peu de plomb et de cuivre. Il paroît qu'on l’a fondue, 
et que les morceaux conservés à Freiberg et à Dresde, ne sont 
que de l'acier fondu qu'on a substitué à cette masse. 


$ IL Chutes de Poussière ou de Substances molles, sèches ou 
humides. 


Tout ce qu'on a observé dans ces chutes, nous fait présumer 
qu’elles ne diffèrent pas essentiellement des chutes de pierres. 
Quelquefois des chutes de poussière ont élé accumpagnées d'une 
chute de pierres, comme aussi d'un méléore de feu, et la pous- 
sière paroît contenir à peu près les mêmes substances que les 
pierres météoriques. Il paroît qu'il n'y a d'autre différence que 
dans la plus où moins grande rapidité avec laquelle ces amas 
de matière chaotique dispersée dans l’espace de l'univers , ar- 


(1) Une masse sous le payé d’Aken, près Magdebourg. Zoebe. 
rivent 


XT D'HISTOIRE NATURELLE 2B1 


rivent dans notre atmosphère, de manière que ces Substances 
subissent un plus ou moins grand changement par la chaleur 
que la compression de l'air développe. Probablement dans la 
poussière rouge et noire, l'oxide de fer est la principale ma- 
tière colorante, et dans la poussière noire on trouvera sans 
doute aussi du carbone. Je regarde les pierres noires et tres- 
friables tombées à Alais en 1806, comme faisant le passage de 
la poussière noire aux météorolithes ordinaires , la chaleur n'ayant 
pas été suffisante pour brüler le carbone et pour fondre les 
autres substances. ' AUS 

L'an 472 de notre ère (suivant la Chronologie de Calvisius, 
Plaifair, etc.), 5 ou 6 novembre, grande chute de poussière 
noire (probablement aux environs de Constantinople) ; le ciel 
sembloit brüler. Procope et Marcellin Y'ont attribuée au Vésuve. 
Menœa, Menolog. Græc. Jonaras, Cedrenus, T'heophanes. 

652. À Constantinople, pluie de poussière rouge. T'heophanes, 
Cedrenus, Mathieu Eretz. ‘ ; 
743. Un météore et poussière dans différens endroits. Théo- 
phanes. | eo 

Au milieu du IX° siècle. Poussière rouge et matière Sem 
blable au sang coagulé. Continuat. du Georg. Monachus, Kaz- 
svini, Elmazen. 

929. À Bagdad, rougeur du ciel et chute de sable rouge. 
Quatremtre. 

1056. En Arménie, neige rouge. Matth. Eretz. 

1110. En Arménie, dans la province de Vaspouragan, chute 
d'un corps enflammé dans le lac de Van, en hiver, dans une 
nuit obscure. L'eau devint de couleur de sang, et la terre 
étoit fendue dans différens endroits (probablement pas des pierres 
tombées). Matthieu Eretz (Notices et extraits de la Biblioth., 
tome IX ). 

1416. Pluie rouge en Bohème. Spangenberg. 

? Dans le même siècle, à Lucerne , chute d’une pierre et d’une 
masse comme du sang coagulé, avee apparition d'un dragon 
igné (ou météore de feu). Cysat. 

1501. Pluie de sang dans différens endroits, suivant quelques 
chroniques. ) 

1548, 6 novembre. (Probablement en Thuringe.) Chute d'un 
globe de feu avec beaucoup de fracas, où l’on a trouvé une 
substance Re semblable au sang coagulé. Spangenberg. 

1560 , jour de Pentecôte. Pluie rouge à Emden et à Louvain, etc. 
Æromond. 


Tome LXXXVII. OCTOBRE an 1818. Na 


282 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


1560, 24 décembre. A Lillebonne , météore de feu et plaie 
rouge. ÎNatalis Comes, 

1586, 3 décembre, À Verde (en Hanovre), chute de beau- 
coup de matière rouge et noirätre, dont des planches ont été 
brülées, avec éclairs et tonnerre (météore de feu et fracas ). 
Manuscrit de Salomon , sénateur à Brême. 

159t. A Orléans , àla Madeleine , pluie de sang. Lemaire.(Ln.) 

1618, en août. Chute de pierres, météore de feu et pluie de 
sang en Stürie, De Hammer. 

1657, 6 décembre. Chute de beaucoup de poussière noire 
dans Je golfe de Volo eten Syrie. Phil. Transact., L 1, p. 377. 

1658. Pluie ronge à Tournay. 

1045, 25 où 24 janvier. A Bois-le-Duc. 

1640, 6 octobre. Pluie rouge à Bruxelles. Xronland et en- 
delinus. À 

1689. Poussière rouge à Venise, etc. V’alisnieri. 

1711, D et 6 mai. Pluie à Orsion en Suède. Act. lu, 
Succiæ, 1731. 

1718, 24 mars. Chute d’un globe de feu dans l'ile de Léthy 
aux Indes où l’on a trouvé une matière gélatineuse. Barcherrutz. 

1719. Chute de sable dans la mer Atlantique (lat. sept 45°, 
longit. 322° 45") avec un météore lumineux. Mém. de l Acad. des 
-Saiences\, 4710, hist, pag. 25. Il auroit fallu examiner ce sable 
avec plus d'attention. 

1744. Pluie rouge à Saint-Pierre d'Aréna, près de Génes. 
Richard. 

1755, 20 octobre. Sur l'ile de Getland , une des Orcades, 
es noire qui n’étoit pas venue de l’Hécla. Phil. Transact,, 
vol. TE: 

1755; 13 novembre. Rougeur du ciel et pluie ronge dans dif- 
férens pays. Nov. Act. Nat. Cur., tome Il. 

1765, 9 octobre. Pluie rouge à Clève, à Utrecht, etc. Mer- 
“eurio historico y politico (de Madrid), octobre 1764. 

1765, 14 novembre. Pluie rouge en Picardie. Richard. 

1781. En Sicile. Poussière blanche qui n’étoit pas volcanique. 
Gioeni, Philos. Transact., tome LXXH, App., pag: 1. 

1796, 8 mars. On a trouvé après la chute d'un globle de 
feu en Lusace, uie matière visqueuse (1): nn. de Gilbert , 
tome LV, pag. 


(x) J'en possède une petite portion dont la consistance , la couleur et l'odeur 
xessemblent à un vernis brunâtre fort desséché, Je crois qu’elle consiste surtout 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 283 


1803, 5 et 6 mars. En Italie. Chute de poussière rouge, 
sèche et humide, Opuscoli Scelti, tome XXH; Journ. de Phys., 
avril 1804. 

1815, 13 et 14 mars. En Calabre, Toscane et Frioul. Grande 
chute de poussière rouge et neige rouge, avec beaucoup de 
bruit; en même temps lombèrent des pierres à Cutro en Ca- 
labre. Bibl. Brit., octobre 1813 et avril 1814. Annals of Philo- 
sophy, 1818, pag. 466. Sémentint a trouvé dans la poussière, 
silice, 55; alumine, 154; chaux, 114; fer, 1423; chrome, 1 ; 
carbone, 9. La perte étoit 15. Il paroït qu'il n’a pas cherché 
la magnésie et le nickel. 

1814, 3 et 4 juillet. Grande chute de poussière noire en 
Canada, avec apparition de fen. L’évènement étoit très-sem- 
blabe à celui de 472. Tilloch’s Phil. Mag., vol. XELV, p. 91. 

1814, 5 novembre, On a trouvé dans le Doab aux Indes, 
chaque pierre tombée dans un petit amas de poussière. Plul. 
Mag., Bibl. Brit. 

1815. Vers la fin de septembre, la mer au sud des Indes étoit 
couverte de poussière à une lrès-grande étendue, probablement 
à la suite d’une pareille chute. Phil. Mag., juillet 1816, p. 75. 


SUR UNÉ ANOMALIE REMARQUABLE 
DU MODE DE FÉCONDATION 
DANS LA CAMPANULE A FEUILLES RONDES; 
Par M. HENRI CASSINI. 


Devoirs que Linné a confirmé par d'ingénieuses éxpériences, 
et accrédilé par l'autorité de son nom, l’ancienne découverte 
des sexes dans les végétaux, presque tous les botanistes ont 
admise comme ane lot solidement etablie et exempte d'excep- 
tions, au moins dans les plantes dites Phanérogames; et il a 
été fait peu de recherches sur les anomalies qu’elle pouvoit pré- 
senter dans cette classe immense. | 


en soufre et carbone. Guiton-Morveau et Blumenbach. en ayoient aussi nne 
portion. 


Nn 2 


284 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


On sait pourtant que Spallanzani a fait, sur plusieurs plantes 
Phanérogames, des expériences, desquelles il fait résulter que, 
parmi ces plantes, les unes ont besoin du concours des sexes 
pour être fécondes , tandis que les aulres peuvent s’en dis- 
penser. M. Desvaux va bien plus loin, car il nie absolument 
l'existence des sexes dans le règne végétal. 

L'opinion de ce dernier ne me semble pas soutenable; et 
celle de Spallanzani, quoiqu’infiniment plus sage, n’est peut- 
être pas suflisimment démontrée. Il seroit à desirer que de 
nouvelles expériences fussent faites avec tous les soins qu’elles 
exigent, pour résoudre complètement cet important problème. 
De simples observations sur les anomalies du mode de fécon- 
dation , dans plusieurs plantes phanérogames, contribueroïient 
aussi à éclaircir la question, et feroient au moins connoîlre des 
particularités fort curieuses. 

. L'observation que j'ai l'honneur de soumettre à Ja Société (1), 
naura peut-être pas cet avantage, parce qu'elle est isolée. Je 
regrelle que mes occupations ne m'aient pas laissé le temps de 
vérifier sur d’autres espèces de Campanules, et sur d’autres 
genres de Campanulacées, si le fait que j'ai remarqué dans la 
Campanula rotundifolia, se répétoit ou non chez les plantes 
analogues ; ou s’il y étoit modifié de manière à offrir l'explication 
de l’anomalie que je vais décrire. 

Le style de la Campanule, très-analogue à celui des Lac- 
tucées, consiste en une tige cylindrique, divisée supérieurement 
en trois branches prismatiques , à trois faces, et arrondies au 
sommet ; chaque branche offre une face extérieure convexe , 
violette, hérissée, ainsi que la partie supérieure de la tige, de 
longs poils caducs , et deux faces intérieures planes, blanchätres, 
couvertes de papilles stigmatiques très-apparentes, très- dis- 
tinctes, en forme de filets cylindriques, transparens, perpen- 
diculaires au plan qui les porte, et très-serrés les uns près 
des autres. 

Si l’on observe l’état des organes sexuels, avant l’époque où 
la corolle, doit s'épanouir, on reconnoit que les trois branches 
du style sont rapprochées en un faisceau; qu'elles sont étror- 
tement unies et presque cohérentes par leurs faces intérieures, 
sur lesquelles les papilles stigmatiques sont déjà manifestes ; 


QG) Ce Mémoire a été lu à la Société Philomathique, le 16 mai 1818; et le 
25 mai, M. Aubert du Petit-Thouars a présente sur le même sujet d’autres ob- 
acrvations par lesquelles il prétend expliquer l'anomalie dont il s’agit. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 585 


et que les tinq anthères forment, par leur rapprochement, une 
sorle de tube qui engaine exactement le faisceau des branches 
du style, ainsi que la partie supérieure de la tige, qui est he- 
rissée de poils comme les branches. 


Un peu plus tard, mais toujours avant l'épanouissement de 
la corolle, les anthères s'ouvrent sur leur face intérieure; au 
moment de leur déhiscence, elles semblent devenir cohérentes 
par l'effet d’une sorte d'agglulination peu solide et peu durable; 
en même temps, tout le pollen des cinq anthères s'attache à 
la surface hérissée de poils, des branches du style et de la 
partie supérieure de sa tige, de manière que cette surface se 
trouve entièrement couverte d'une couche très-épaisse de pollen. 


Bientôt après, la corolle s'épanouit; en cet instant, les an- 
thères déjà vides se courbent, se séparent, se roulent, aban- 
donnant la couche épaisse de pollen, qui adhère fortement à 
la surface hispide du style, et qui y persiste très-long-temps. 


Enfin, lorsque la fleur est très-avancée en âge, la couche 
de pollen se détache et disparoit, en même temps que les poils 
qui la retenoient, et dont il ne reste d’autres vesliges sur Île 
style que de petites aspérités. C'est alors seulement que les 
trois branches du style, qui depuis l'épanouissement de la co- 
rolle n’étoient presque plus cohérentes, s'écartent lune de 
l'autre, divergent, se courbent en dehors, se roulent en spirale, 
et étalent les papilles qui constituent le stigmate. 


Si je me suis bien fait comprendre dans la description des 
organes sexuels et de leur disposition respective aux différentes 
époques, on concoil qu'a aucun instant 1l n’a pu s'établir une 
communication directe entre le stigmate et le pollen. Comment 
donc s'opère la fécondation dans la plante dont il s’agit? On 
peut essayer de répondre à cette question , en proposant quatre 
bypothèses différentes. s4pt 

D'abord on peut croire que le vrai stigmate n'est pas con- 
stitué, comme je le suppose, par les papilles qui tapissent les 
faces intérieures des I-ranches du style, mais bien par les poils 
dont leur face extérieure est hérissée. Cette solution me semble 
inadmissible : l’analogie du style des Campanules avec celui des 
Lactucées, prouve suflisamment que, dans les Campanules, les 
papilles sont le stigmate, et que les poils sont ce que j'ai nommé 
les collecteurs, dont la fonction est de recueillir le pollen. D'ail- 
leurs tous les caractères que présentent les papilles dont il s'agit, 
déterminent leur nature d’une manière si peu équivoque, quau- 


286 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


cun botaniste exercé à ces sortes d'observations ne pourra hé- 
siter à y reconnoitre le vrai stigmate, 

Une autre manière d’expliquer le fait, seroit de dire que dans 
la plante en question, les fleurs qui s’'épanouissent les premières 
sont fécondées par le pollen des fleurs qui s’épanouissent plus 
tard. Mais cette explication n’est pas meilleure que la précédente, 
car dès avant la fleuraison, les fleurs deviennent pendantes, 
et elles ne se redressent plus, de sorte que le pollen qui tombe 
d'une fleur ne peut jamais s'introduire dans une autre fleur, 
et alleindre son stigmate qui se trouve garanti de ce contact 
par la corolle en forme de cloche renversée. 

En troisième lieu, on pourra, en adoptant le système de Spal- 
Janzani, supposer-que notre Campanule est du nombre des 
plantes phanérogames, dont l'organe femelle peut-être fécond 
sans le concours de l'organe mäle. Je ne rejette pas entière- 
nent cette solution; mais il me semble qu'on ne doit june 
l'admettre que dans les cas où il est absolument impossible d'en 
trouver une autre. 

Une dernière hypothèse, à laquelle je donne la préférence, 
est que la fécondation peut quelquefois s'opérer par la com- 
municalion du pollen avec une partie quelconque du style, et 
sans qu'il soit nécessaire que cette communication s’élablisse 
par le stigmate. Cette opinion est conforme à une idée de Spal- 
lanzani et de Bonnet, qui croyoient qu’on pourroit tenter de 
féconder le pistil, en faisant toucher le pollen, soit à la surface 
non sligmatique du style, soit même aux pétales, aux feuilles, 
aux racines. Malgré tout le respect dû à Bonnet et à Spallanzani, 
je me permeltrai de dire que la fécondation sexuelle sur les 
racines, les feuilles ou les pétales, me paroïît une absurdité. Mais 
il n’est pas également absurde, selon moi, de présumer que 
la fécondation peut quelquefois s'opérer à la surface d'une partie 
quelconque du style, presqu'aussi facilement qu'à la surface du 
stigmate lui-même. 

in effet, le style et son stigmate sont, en général, com- 
posés l'un et l’autre, d’un tissu cellulaire presque homogène et 
continu dans toutes ses parties; le sligmate, qui occupe une 
partie déterminée de la surface du style, ne diffère ordinaire- 
ment du reste de celte surface , que parce que les cellules qui 
le constituent sont plus développées, plus dilatées, et formées 
de membranes plus tendres, plus poreuses, plus pénétrables ; 
de sorte que l'introduction du fluide spermatique dans l'intérieur 
du tissu, est plus facile sur cette partie de la surface du style 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 587 


que sur toute autre. Mais il n’y a de différence que du plus au 
moins; et si lon considère que l'homogénéité du tissu végétal 
permet très-souvent qu’une partie remplisse les fonctions d'une 
autre, et que la continuité de ce tissu facilite à l'intérieur la 
communication des fluides en divers sens, on concevra qu'il 
n'est pas impossible que, chez certaines plantes, les cellules de 
la surface non stigmatique du style soient perméables au fluide 
spermatique, et que ce fluide introduit ainsi par une voie in- 
solite dans l’intérieur du style, parvienne indirectement aux con- 
duits destinés à charrier ce fluide du stigmate aux ovules. 


SUR LE CADMIUM. 
LETTRE DU PROFESSEUR STROMEYER 


AU DOCTEUR SCHW EIGER. 
Gottingue, le 26 avril 1818. 


Vous avez eu la bonté de m'envoyer, et j'ai recu hier le 
dernier cahier de votre excellent Journal, lequel, parmi plu- 
sieurs découvertes et recherches intéressantes, nous annonce un 
nouveau métal trouvé par M. Berzelius ; c'est pour moi un devoir 
de vous communiquer, pour votre Journal, la découverte que 
j'ai faite d’un autre nouveau métal, dans le courant de cet hiver. 

Pendant l'automne dernier , en ma qualité d'Inspecteur gé- 
néral des Pharmacies du royaume, je visitois celles de la prin- 
cipaulé d'Hildesheim ; je ne trouvai dans la plupart d'entre 
elles, au lieu de zmc proprement dit, que l’oxide de zinc car- 
bonaté, lequel avoit été tiré presque totalement en cet état, 
des fabriques chimiques de Salzgïtter. Cet oxide de zinc car- 
bonaté avoit une couleur d’un blanc éblouissant; mais quand 
on le faisoit rougir , il prenoit une teinte jaunâtre, ou qui lour- 
noit au jaune orange, quoiqu'il n'offrit aucune trace sensible 
de fer ou dé plomb. 

En continuant ma tournée , j'eus occasion de visiter cette fa- 
brique de produits chimiques, d’où venoit cet oxide de zinc 
carbonaté; comme je marquois mon étonnement de ce qu'on 
y vendoit du zinc carbonaté au lieu de zinc oxidé, M. Jost, 


288 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


qui dirige les travaux chimico-pharmaceutiques de cette fa 
brique, me répondit qu'ils le faisoient ainsi, parce que leur 
Zinc Carbonaté prenoit loujours une teinte jaunâtre, quand on 
le faisoit rougir, et que d’après cela, le zinc oxidé préparé 
de cette manière, passoit pour contenir du fer, malgré le soin 
qu'ils avoient de purifier le zinc auparavant pour en séparer 
le fer, et quoiqu'ensuite ils ne pussent découvrir un atome 
de fer dans le zinc carbonique qu'ils en retiroient. 

Cette circonstance me donna occasion d'examiner cet oxide 
de Zinc avec plus d’exactitude, et je trouvaï, non sans une grande 
surprise, que celte couleur si singulière provenoit du mélange 
d'un oxide métallique tout particulier, auquel on n’avoit point 
fait attention jusqu'alors. Je réussis, par une opération très- 
simple, à le séparer de l’oxide de zinc et même à en réduire 
le métal parfaitement. Au reste, j'ai trouvé aussi ce même corps 
dans la T'uthie et dans différens autres oxides de zinc; et, comme 
on devoit s'y attendre, il s’est pareillement rencontré dans le 
zinc mélallique même; cependant il est contenu en très-pelite 
quantité dans toutes ces substances, et ce qu'on y découvre, 
s'élève à peine d'un millième à un centième. : 

Les propriétés par lesquelles ce nouveau métal se distingue, 
sont les suivantes : il a une couleur d’un blanc clair qui tire 
un peu sur le gris, et qui approche beaucoup de celle du 
platine. Il a un éclat métallique très-vif, et il prend un très- 
beau poli. Son grain est parfaitement serré et sa cassure non unie, 
I possède aussi une pesanteur spécifique assez considérable, elle 
est égale à 8,75, quand il a été fondu. En outre, il est très- 
ductile, et il se laisse aplatir en feuilles très-minces, sans se 
casser, cela tant à chaud qu’à froid. 1] paroit de même avoir 
une cohésion assez grande et surpasser beaucoup l’étain sous 
ce rapport. I] appartient aux métaux qui sont aisément fusibles ; 
il fond même avant d'être rouge, et on peut en opérer la fu- 
sion, en le tenant sur la flamme d’une lampe à esprit-de-vin 
avec un fil de fer chauffé jusqu'au rouge naissant, Il est pa- 
reillement très-volatil, et il se transforme en vapeurs même 
à une température quine paroit pas s'élever beaucoup au-dessus 
de celle à laquelle le mercure se volatlise. Cette vapeur se con- 
dense en goultes aussi facilement que celle du mercure; cesgouttes, 
par l'aspect de leur surface, présentent une disposition évidente 
pour cristalliser. 

Ce métal est permanent à l'air; mais si on le chauffe, il brüle 
très-facilement, et se change en un oxide coloré en jaune, 


qui 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 289 


qui se sublime en très-grande partie sous la forme d'une fumée 
eu vapeur jaune brunätre. Les corps qui s'y trouvent exposés, 
se recouvrent d'an dépôt de couleur jaune. Fait-on cette expé- 
rience à la flamme d’un chalumeau, il se couvre pareillement 
d'une couche colorée en jaune tirant sur le brun. Au reste, ce 
métal ne répand, en brülant, aucune odeur sensible; il se 
dissout facilement dans l’acide nitrique, avec dégagement de 
vapeurs nitreuses. Les acides sulfurique et muriatique (hydro- 
chlorique) l’attaquent aussi et le dissolvent, en abandonnant 
du gaz hydrogèue. Cependant l’action de ces acides sur ce métal, 
ne s'exerce que très-lentement. Ces dissolutions sout toutes in- 
colores et ne sont point précipitées par l’eau. 

Ce métal paroïit ne former qu’une seule combinaison avec l’oxi- 
gène, L'oxide qui en provient a une couleur jauue verdàtre qui, 
par une forte chaleur rouge, prend une teinte jaure orange, 
et devient presque brunâtre, si l’on prolonge plus long-temps 
cette chaleur rouge. Comme l’oxide orangé et l’oxide brunätre 
sont dissous par les acides sans dégagement de gaz aussi bien 
que l'oxide jaune verdätre, et qu'ils forment avec eux des dis- 
solutions qui ne sont point différentes de celles de cet oxide 
jaune verdàtre, ces changemens de couleur ne paroiïssent dé- 
pendre que de l'état d'aggrégalion, et non pas avoir leur prin- 
cipe dans une différence d'oxigénation. Au reste, cet oxide est 
iout-à-fait réfractaire au feu , et on ne peut en opérer la fusion, 
même en le chauffant jusqu'au blanc dans un creuset de pla= 
tine, garni de son couvercle, à la lampe du Dr Marcet. On le 
réduit très-facilement en le chauffant jusqu’au rouge avec du 
charbon ou avec des substances qui contiennent du charbon, 
et la réduction a lieu même au rouge naïssant. Il ne communique 
point de couleur au borax; il ne se dissout point dans les al- 
calis fixes, mais il ést attaqué un peu par l’ammoniaque. Il 
se comporte avec les acides comme une base salifiable, Les 
sels qu'il forme sont presque tous colorés'en blanc. Ceux qui 
ont lieu avec les acides sulfurique, nitrique, muriatique et acé= 
tique cristallisent aisément et sont très-solubles; au contraire, 
ceux qui se font avec les acides phosphorique, carbonique et 
oxalique sont insolubles. Il est précipité des dissolutions des 
premiers acides, en blanc, par les alcalis fixes, sans que ce 
précipité se dissolve de nouveau par un excès du précipitantsz 
au contraire, il est bien d’abord précipité en blanc par l'am- 
moniaque, mais il est redissous par cet alcali, si l’on en met 
en excès. Les alcalis fixes carbonatés le précipitent en blane 


Tome LXXXV II. OCTOBRE an 1818. Oo 


290 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


à l'état de carbonate, sans le redissoudre si on les emploie avec 
excès. Le carbonate d'ammoniaque qui le précipite aussi comme 
un carbonate, le redissout en très-grande partie, si l'on ajoute 
une quantité considérable de ce précipitant. Cependant si l'on 
expose le liquide à l'air, le carbonate déjà dissous ne tarde pas 
à se précipiter de nouveau presqu'en totalité, en sorte qu'on 
peut se servir avec avantage du carbonate d'ammoniaque pour 
en séparer un resfe de zinc ou de cuivre qui pourroil encore 
s’y trouver. ; 

Ce métal est précipité de ses dissolutions acides, en blanc, 
par la lessive du sang (blutlangensaliz), et en jaune par l'acide 
hydro-sulfurique, ainsi que par les hydro-sulfates. Ce dernier 
précipité qui, desséché, possède une belle couleur jaune orange, 
est pareil à son mélange avec le sulfure d’or, el comme celui-ci 
est un hydro-sulfate. A cause de sa couleur, et de la maniere 
dont il se comporte, ce même précipité, faute d’une attention 
convenable , peut être confondu avec l’orpiment; mais il en 
diffère déja par la propriété d’être plus pulvérulent, et surtout 
par sa manière d’être au chalumeau et par sa grande solubilité 
dans les acides, en donnant lieu à une forte effervescence de 
gaz hydrogène sulfuré. A en juger d’après quelques essais, cette 
combinaison de l'acide hydro-sulfurique avec l’oxide du nouveau 
métal, peut devenir tres-utile pour la peinture, soit à l'eau, 
soit à l'huile; elle fournit un jaune qui couvre 1rès-bien, est 
durable et sous le rapport de la beauté, ne paroil pas inférieur 
au chrome. Au‘surplus, ce métal dissous dans les acides , est 
réductible parle zinc; en ce cas, il se sépare sous forme de 
dendrites. Au contraire, il précipite, à l’état de régule, le cuivre, 
le plomb, l'argent et l'or dissous dans l'acide nitrique ou dans 
l'acide muriatique.! ri 
: Je n'ai pu encore examiner suffisamment les combinaisons 
de ee métal avec le soufre, le phosphore, l’iode et les autres 
métaux; cependant il paroit s'unir très-facilement avec plusieurs 
de ces substances ; par exemple, on peut très-bien le fondre 
avec le platine, et il forme avec le mercure un amalgame 
solide et cristallisé. Je n'ai point réussi à le combiner avec le 
cuivre. 

- Telles sont les expériences que j'ai faites jusqu'à présent sur ce 
métal; quoiqu’elles soient encore imparfaités, je ne me fais 
aucun scrupule de regarder ce métal comme réellement nou- 
veau, et comme. différent essentiéllement de tous les autres. 
Comme je l'ai d'abord trouvé dans l'oxide de zinc, je prends 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 291 


de là occasion de le nommer Cadmium. (Autrefois le nom de 
cadmiz étoit un des noms plus ou moins singuliers qu'on donnoit 
à l’oxide de zinc. Voyez Macquer.) 

A cause de la très-petite quantité dans laquelle le Cadmium 
se rencontre dans l’oxide de zinc et dans le zinc métallique, 
soumis à mes recherches, j'ai élé jusqu'a présent hors d'état de. 
faire des expériences sur la proportion quantitative de ses com- 
binaisons, sur la forme de ses cristallisations salines, sur l'action 
de ses oxides et de ses sels dans l’organisation animale, etc.; 
car la totalité de ce corps, mise à ma disposition dans les re- 
cherches auxquelles je me suis livré jusqu’à ce jour, s’est élevée 
à peine à trois grammes. Je me félicite donc de pouvoir vous 
mander* que, grâce à M. l'administrateur Hermann de Scho- 
nabeck , et à M. le Dr Roloff de Magdebourg, conseiller et 
médecin du Gouvernement, lesquels, comme vous devez l’avoir 
entendu dire de votre côté, ont remarqué aussi ce métal, j'ai 
eu occasion de poursuivre ultérieurement mes recherches sur 
ce même corps. - 

Commé on visitoit, il y a quelque temps, les pharmacies de 
Magdebourg, on confisqua dans plusieurs pharmacies , comme 
contenant de l’arsenic, un oxide de zinc provenant de la pré- 
paration du zinc en Silésie , et tiré de la fabrique de M. Her- 
mann de Schonebeck ; on en agit ainsi, parce ne cet oxide 
dissous dans les acides , présentoit avec l'acide hÿdro-sulfurique 
un précipité jaune, qu'on prenoit pour de l’orpiment véritable, 
sur la foi du réacuf chimique employé à ‘cet effet. Comme 
cette chose ne pouvoit demeurer indifférente à M. Hermann 
pour la répulation de sa fabrique, d'autant plus que M. 1e Dr 
Roloff, qui avoit pris part aux visiles des pharmacies, avoit déjà 
écrit la-dessus à M. le conseiller d'Etat Hufeland, à Berlin ; 
lequel avoit consigné celle nouvelle dans le Cahier de février, 
dé sou Journal de Médecine pratique, M. Hermann, dis-je, 
soumit cet oxide de zinc à une analyse rigoureuse; mais i] n° 
trouva point d’arsenic. Il pria, d'apres cela , M. le Dr Roloff de 
répéter encore une fois les expériences avec cet oxide; ce que 
fit ce savant avec tout l’empressement imaginable. 1] se con- 
vainquit en même temps que le précipité pris d'abord par lui 
pour de véritable orpiment n'en étoit nullement, mais qu'il 
venoit d'un autre métal qui sembloit se confondre avec l’ar- 
senic, tandis qu'il éloit probablement nouveau. Cependant pour 
oblenir une conviction entière à cet égard, ces deux Messieurs 
se sont adressés à moi, et m'ont fail ces jours derniers un 


-Oo 2 


202 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE 


envoi de cet oxide de zinc de Silésie, aussi bien qué de ce 
précipité confondu avec l’orpiment, et du métal qu'ils en ont 
retiré , le lout avec prière de soumettre ces substances à une 
analyse exacte, et d'examiner si elles contenoient quelque atome 
d’arsenic. 

Déjà, d’après les circonstances alléguées, je conjeclurois que 
cet oxide de zinc silésien contenoit aussi le métal que j'avois 
découvert, et que comme il donnoit avec l'acide hydro-sulfu- 
rique un précipité pareil, en couleur, à l'orpiment, il étoit 
Cause qu'ou avoit regardé cet oxide de zinc comme contenant 
de l’arsenic. Quélques essais entrepris à celle occasion ont plei- 
nement ;confirmé ces conjectures. Je viens de mettre M. Her- 
mann pärfaitement au courant de tout cela, etje ne manquerai 
pas d'en instruire aussi M. le Dr Roloff, dont je n'ai recu la 
lettre qu'avant-hier. : 

Comme cet oxide de zinc silésien contient une beaucoup plus 
grande quantité de Cadmium, que l’oxide soumis à mes re- 
cherches, et que, suivant les expériences de M. Hermann, ce 
-qu'il en renferme peut monter à trois pour cent, j'espère , d'après 
cela, avoir occasion de me procurer, une quantité suflisante 
-de ce! métal, et, par ce: moyen, êlre en élat de :fournir une 
analyse complète sur cet objet. J'ai en conséquence prié M: Her- 
mann de vouloir bien m'envoyer pour cela par la poste, une 
quantité suflisante de cet oxide. x: 

(Foyes aussi 59 Cahier 1818, Annales de Chimie de Gilbert, 
et Cahier-de juin 1818 du Museum d'Hermbstaedt.) 


OBSERVATIONS 


Sur la Germination des graines de Raphanus et d’autres 
Crucifères ; 


Par M. Hevn CASSINI (1). 


On, sait que M. Richard, dans un opuscule tres-remarquable 
intitulé Analyse du Fruit ,'a voulu substituer à la fameuse di- 
vision des végétaux sexifères en Monocotylédons et Dicotylédons, 


QG) Ce Mémoire a été lu à la Société Philomathique ; le 18 juillet 1818. 


L 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 293 


une autre division tout-à-fait semblable quant à la composition 
des deux groupes, mais très-différente quant aux dénominations 
el aux Caractères qui leur sont attribués. 

Dans le système de M. Richard, les monocotylédons sont 
nommés Ændorhizes, et au lieu d’être caractérises par la pré- 
sence d'un seul cotylédon, ils le sont par la radicule, qui dans 
la germination, rompt son écorce, et se produit au dehors pour 
former la racine de la jeune plante. 

Au contraire, chez les Exorhizes, qui correspondent aux Di- 
colylédons , la radicule en croissant forme la racine de la plante, 
sans crever son écorce, qui croit en mème temps qu’elle, et 
continue à l’envelopper. 

Cette innovation :rr lieu à une discussion très-animée entre 

M. Richard et M. Mirbel. Celui-ci soutint que la nouvelle di- 
vision des végétaux sexifères en Endorhizes et Exorhizes, que 
proposoit M. Richard, contrarioit souvent les rapports naturels; 
qu’elle étoit, sous ce point de vue, beaucoup plus fautive que 
l'ancienne division en Monacotylédons et Dicotylédons; que 
d’ailleurs il s’en falloit bien qu'elle füt aussi commode dans la 
pratique, et qu’enfin elle n’étoit point féconde en résultats im- 
porlans, comme la savante division fondée sur l’organisation 
interne des tiges. 
- M. Decandolle n'a pas non plus adopté les dénominations 
d'Endorhizes et d'Exorhizes, et 1l a proposé celles d'Endogènes 
et d'Exogènes, qui expriment des caractères très-différens. Tou- 
tefois il ne rejette pas entièrement les caractères donnés par 
M. Richard, mais il ne les adnret que comme auxiliaires ou 
secondaires. 

Cette manière de voir est assurément la plus sage. Dans l’é- 
numération des caractères plus on moins constans qui distinguent 
en général les deux grandes classes des végétaux sexifères, on 
auroit tort d'omettre ceux qui sont dus aux recherches de 
M. Richard; mais on seroit encore plus répréhensible de les 
mettre au premier rang, et de leur accorder sur les caractères 
ancieanemeut établis ; une: prééminence qui ne leur appartient 
réellement point. 

Eu effet, il est maintenant bien connu que la Capucine, le 
Gui et le Zoranthus sont Endorhizes , quoique Dicotylédons, 
tandis que le Dattier, et beaucoup d’autres Monocotylédons , 
sont Exorbizes. 

L'objet de ce Mémaire est de faire connoître quelques autres 
excepuons à la loi trop généralisée par M. Richard. L'un des 


294 | JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


exemples de Dicotylédons endorhizes que je vais présenter, est 
tellement manifeste , et s'offre si habituellement à tous les 
yeux, que j'ai peine à comprendre qu'il n'ait pas encorc été re- 
connu. 

Il n’est personne peul-êlre qui n'ait remarqué sur les raves 
et radis que l’on sert sur nos tables , deux appendices en forme 
de rubans, qui rampent sur deux côtés opposés de cette ra- 
cine, depnis son sommet jusques vers son milieu. Il éloit bien 
facile de deviner que ces appendices étoient les restes d’une 
coléorhize qui s’étoit ouverte en deux valves; et que par con- 
séquent le Raphanus salivus étoit endorhize, quoique Dicoty- 
lédon. Mais je voulus m’en assurer en observant la germination 


des graines de cette plante, et les premiers développemens de 
la plantule. 


Je semai donc des graines de petit Radis rose, et lorsque 
la germination eut fait des progrès notables, je déterrai une 
arlie des plantules qui avoient déjà près de deux pouces de 
ong. À celle époque, je n’aperçus encore aucune trace des 
deux appendices ; mais j'observai qu'a une cerlaine distance de 
l'origine des cotylédons, il y avoit une sorte d’articulation ou 
de nœud, c’est-à-dire une transition brusque, ou changement 
subit, quoique très-léger, de substance, et quelquefois de gros- 
seur, de forme, de direction, de coloration. Je pus juger dès- 
lors que la partie comprise entre les cotylédons et cette sorte 
d'articulalion, étoit un caudex descendant, lequel formeroil en 
grossissant celte lubérosité arrondie et charnue qui est l’un de 
nos alimens; que ce caudex se dépouilleroit en même temps 
de bas en haut de son écorce, dont l’accroissement seroit beau- 
coup plus lent que celui de la partie qu’elle recouvre; et que 
cette écorce divisée en deux lanières longitlinales, demeu- 
reroit fixée au sommet du caudex, et formeroit ainsi les deux 
appendices rubannaires qu'on doit considérer comme une coléo- 
rhize bivalve. 


Mes coujectures n’ont pas tardé à se vérifier. Au bout d'uu 
certain temps, les plantules que j'avois laissées croître étant 
devenues suflisamment grandes, je les déterrai, et je fis les 
remarques suivantes, 


Plusieurs individus, dont le caudex avoit un peu grossi vers 
sa parlie moyenne seulement, offroient une coleorhize bivalve, 
ui couvroit tout le caudex, c'est-à-dire toute la partie com- 
à ï ; : } Ê 
prise entre Jes cotylédons et les vraies racines; les deux valves 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 295 


de celte coléorhize correspondoient exaëlement aux deux co- 
tylédons, et n’étoient séparées que vers le milieu de la hau- 
teur du caudex, seul point où il avoit grossi. La coeléorhize 
éloit encore indivise et adhérente au caudex vers le haut et vers 
Je bas, et il étoit clair qu’elle x'étoit que l'écorce même de 
ce caudex.. 

Chez d’autres individus , dont le caudex n’avoit point da tout 
grossi, la coléorhize ne s’étoit détachée spontanément et divisée 
en deux valves , qu'à la base du caudex, ou à la naïssance des 
racines ; plus haut, la coléorhize éloit mdivise, et adhérente 
au caudex comme une écorce; néanmoins comme son adhérence 
étoit foible , je l'ai facilement détachée avec un instrument. J'ai 
reconnu que la racine principale ou pivotante , et les racines 
secondaires ou latérales, étoient sorties de cette coléorhize. 


Enfin, chez tous les individus dont le caudex avoit en gros- 
sissant pris la forme ordinaire au Radis, la coléorhize étoit 
presque entièrement détachée du caudex , et divisée jusqu’au 
sommet en deux valves ou lanières toujours exactement corres- 
pondantes aux cotylédons , ce qui est très-remarquable. 


Après avoir fait ces observations sur le Radis ordinaire, ainsi 
que sur la Rave qui n'en est qu'une variété, j'ai voulu con- 
noïlre si la même chose avoit lieu sur le Radis noir, que 
M. Mérat sépare avec raison du précédent, pour -en faire une 
espèce dislincte sous le nom de fiaphanus niger. ‘ 


Les graines de celte plante que j'ai semées, m'ont donné des 
plantules que j'ai laissées croître pendant un assez long-temps, 
après lequel j'ai reconnu qu'il y avoit, comme dans l'espèce 
précédente, une sorte d’arliculation à l'extrémité inférieure du 
caudex; mais que la coléorhize, quoique très-manifeste, ne s’ou- 
vroit et ne se délachoit qu'à celte extrémilé inférieure seule- 
ment: Je n'ai pas suivi plus long-temps la croissance de mes 
Radis noirs; cependant je soupconne que dans celle espèce, 
la décorticalion ne s'opère pas au-dessus de la base du caudex, 
et je suppose que l'écorce de ce caudex se prête au prodigieux 
grossissement qu'il éprouve , de manière qu’elle n’est point forcée 
de s'ouvrir ni de se détacher, et qu’elle continue toujours à 
le couvrir et à lui adbérer. 

Le Raphanus raphanistrum, dont plusieurs botanistes font un 
pr particulier, m'a offert aussi constamment une coléorhize 
bivalve semblable à celle du Radis ordinaire et située de même, 
c'est-à-dire que les deux lanières correspondoient aux deux co- 


206 JOURNAL DEA PHYSIQUE, DE CHIMIE. , 
tylédons, et qu’elles ‘étoient séparées l’une de l’autre jusqu'au 
sommet du caudex; mais ces lanières étoient restées adhérentes 
au caudex dans toute leur étenduc. be 

J'ai observé à peu près la même chose sur quelques indi- 
vidus de Sinapis arvensis et de Sinapis alba. 

J'ai cru aussi apercevoir des vestiges d’une coléorhize sur le 
caudex du Chou. - 

Quand la Giroflée de Mahon est déjà grande et près de fleurir, 
on reconnoil presque toujours, sur la partie analogue au caudex 
du Raphanus, à quelque distance au-dessous des cotylédons , 
les traces plus ou moins manifestes d’une décortication ordi- 
nairement incomplète et unilatérale. f 

Le Cresson alénois parvenu au même âge, ne semble offrir 
ancune apparence de coléorhize. Cependant je suis tenté d'y 
admettre une décorlication insensible, manifestée par la pre- 
sence de lambeaux filamenteux d’épiderme à demi-pourri, que 
j'ai remarqués sur lé caudex. 

Le résultat de toutes ces observations est, 1°. que le Æa- 
phanus sativus, quoique Dicotylédon, est évidemment endo- 
rhize, et constamment pourvu d'une coléorhize bivalve; 2°. que 
celte coléorhize n’est autre chose que l'écorce même du caudex, 
laquelle ne se continue point sur les racines proprement dites, 
mais_s’arrête et s'ouvre à la base du caudex, et se détache 
ensuile depuis cette base jusqu'au sommet, en se divisant en 
déux lanières longitudinales très-régulières , et qui correspondent 
constamment aux deux cotylédons; 3°. que plusieurs autres 
Crucifères plus ou moins voisines de la précédente, sont aussi 
endorhizes ou coléorhizées , mais d’une manière moins mani- 
feste , moins constante et moins régulière ; 4°. qu'il y a des Cru- 
ciferes qui ne sont point endorhizes au moins sensiblement. 

Il faut bien en conclure que les caractères proposés par 
M. Richard pour la division primaire des végétaux sexiferes, 
sont beaucoup moins importans qu'il ne l'a prétendu. 


THE 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 207 
Lo mn mn Com gén 
THE ZOOLOGICAL MISCELLANY, #rc., 
C'EST-A-DIRE, 


MÉLANGES DE ZOOLOGIE, 


Ou Description d’espèces nouvelles et intéressantes 
d’Animaux ; 


Par M. Wircram Errorp LEACH, 


D.M., Membre de la Société royale de Londres, de la Société Linnéenne, de 
la Société Philomathique de Paris, etc. , 


Avec des Figures coloriées d'après nature, par R. P. NODDER , vol. III. 


Le D: Shaw, l'un des Conservateurs du Muséum Britannique; 
publia pendant un assez grand nombre d'années, sous le même 
titre, un ouvrage fort ulile par la grande quantité d'espèces 
nouvelles d'animaux qu’il ÿ fait conuoître, mais malheureusement, 
plutôt par les figures que par ses descriptions, qui sont autant 
superficielles que possible. Il les décrivit les unes après les 
autres, à mesure qu'il les trouvoit dans les collections de Londres. 
M. le Dr Leach en succédant à Shaw dans sa place au Muséum 
Britannique, s’est proposé de continuer aussi son ouvrage, en 
faisant connoître aux zoologistes les espèces d'animaux nou- 
velles où mal connues, que sa posilion extrêmement heureuse 
le met à portée d'observer. Dans les deux premiers volumes 
qu'il a publiés, il a absolument suivi le même plan que son 
prédécesseur; mais daus le troisième , dont nous nous proposons 
de donner ici un extrait, il ne s’est pas borné à cela, et dans 
un assez grand nombre de cas, il a publié des Monographies, 
et surtout dans le type des Entomozoaires dont il s’est spécia- 
lement occupé jusqu'ici. Ainsi je passerai presque sous silence 
les articles qui ont trait aux animaux vertébrés, puisqu'il na 
s'agit que de deux espèces européennes du genre ARE 
des caractères du genre Ælanus , oiseau fort rapproché des Milans; 
d'une note sur une variété du Cormoran ordinaire, qui avoit la 
racine de lamandibule , une partie du cou et des cuisses, blanches, 
couleurs qu'il a perdues au bout de deux ans de captivité; d'une 


Tome LXXXV II. OCTOBRE an 1818. Pp 


208 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CIIMIE 


autre nole sur les caractères el la variété de la Vipère com 
mune, à laquelle il rapporte , comme l'avoit fait précédemment 
M. Breton, le C. chersea, aspis, prester de Linnæus, Cœruleus 
de Schepp. ( Trans. Linh. Soc. 7, 56), et rufescens ou rufus des 
collections d'Angleterre ; d'une notice sur le Crapaud géant, dont 
Pennant a donné l’histoire dans son Voyage aux îles Hébrides, 
et qui n’est qu'une variété du Crapaud commun; enfin d’un 
très-court article et d’une bonne figure sur le genre Leptocé- 
phale de Gronovius. Mais je donnerai plus de détails sur les ar- 
ticles qui ont rapport aux Entomozoaires, ou A. articulés, et 
surtout aux Décapodes, ou Crustacés, partie de la Zoologie 
jusqu'ici assez négligée, et dans laquelle M. Leach jouit dejà 
d'une réputation européenne. 

Dans son article sur le genre Matuta des auteurs modernes, 
genre de Décapodes macroures qui estessentiellementremarquable 
par les longues pointes dont le corcelet est armé de chaque côté, 
et par laplatissement considérable des paires de pieds posté- 
rieures, Ce qui fail supposer que ce sont des animaux fort 
bons nageurs, comme nos Ltrilles, après avoir donné d'une 
manière complète les caractères de ce genre, il en décrit quatre 
espèces nouvelles, dont deux sont des preuves de la générosité 
ordinaire de M. de Lamarck, car elles proviennent de la col- 
lection du Muséum. Ces qualre espèces sont : 


1°. ML. lunaris, Lank., Leach, Zool. miscell., tab. 127, fig. 3-5, 
dont le disque du têt a six tubercules sur trois lignes, deux à la 
première, trois à la seconde et une à la troisième; les deux 
médiaires les plus grands ; les mains tuberculeuses en dessus et 
en dehors; le pouce a une ligne élevée, polie, striée très-fine- 
ment en travers; enfin, le dernier article des troisième et qua- 
trième paires de pattes a une double carène. 

Elle est très-commune sur les rivages de l'Ile-de-France. 

2°. La M. de Péron, M. Peronit. Leach, Zool. nuscell., 
tab. 127, fig. 1-2. 

Le tèt a le même nombre de tubercules disposés de même; 
mais les deux antérieurs sont presque nuls. Les mains égale- 
ment tuberculeuses en dessus, sont épineuses à leur bord; le 
pouce est simple, et des troisième et quatrième paires de pieds, 
le premier article de celle-ci n’a qu’une carène. 

3°. La M. de Lesueur, A7. Lesueurii. Leach, Zool. miscell., p. 14. 

Le disque du têt a quatre tubercules, trois en avant, un plus 
gros en arrière. Les mains et la troisième et la quatrième paires 


‘ET D'HISTOIRE NATURELLE. 299 


de pieds comme dans l’espèce précédente. Le pouce avec une 


ligne élevée, polie, très-fortement rayée transversalement. 
Des mers de l’Australasie. 


4. La M. de Bancks, M. Bancksiü. Leach, Zool. miscell., 
tome III, pag. 14. 

Le tét a six tubercules égaux deux, trois, un; les mains comme 
dans les deux espèces précédentes ; la ligne élevée et lisse du 
pouce rayée foiblement seulement au sommet ; le premier ar- 
ticle des troisième et quatrième paires de pieds bicaréné en 
dessus , la carène postérieure dans ceux-ci à peine visible. 

Il paroït qu'on ignore sa patrie. 

L'article suivant est consacré à l'établissement d'un genre 
nouveau dans la famille des Décapodes macroures oxyrhynques. 
M. Leach le désigne sous le nom de Micippa. Son caractère 
principal me paroîl consister dans la manière dont le tét, tou- 
jours tuberculé ou un peu épineux comme dans tout ce petit 
groupe, paroit comme tronqué antérieurement par l'inflexion 
subite du rostre qui est alongé et sub-carré. M. de Lamarck 
fait des deux espèces que M. Leach range dans ce genre, autant 
d'espèce de Maia. L'une est le Maia crustata que M. Leach 
nomme ÂMicippa crustata, Zool. miscell., tom. IE, tab. 128, et 
à laquelle il donne pour caractère spécifique, d'avoir le têt et 
les orbites épineux ; des épines ainsi rangées Ho trois,un, quatre 
et six sur le dos. Le rosire très-courtement échancré et épineux 
de chaque côté, tandis que la seconde, qu'il appelle M. phy- 
lira, Cancer phylira de Herbst, tab. 58, fig. 4, a son tèt irré- 
gulièrement épineux sur les côtés; les mains glabres, et le 
rostre fendu comme däns la première, et pourvu de chaque 
côté d’une épine recourbée. Elle vient de la mer des Indes. 


Le IX° article de l’ouvrage que nous analysons , est consacré 
à une Monographie des genres et des espèces de la famille des 
Leucosidées, genre Leucosis de Fabricius que M. Leach, pour 
faciliter sans doute la connoïissance des espèces, quoiqu’assez 
peu nombreuses, subdivise en dix genres, formant quatre sous- 
familles, etc., qu'il nomme Swrps. Ce groupe de Décapodes 
amacroures est composé d'espèces remarquables par leur peti- 
tesse , la dureté, la convexité et l’état ordinairement lisse de 
leur tèt, qui est plus éténdu en travers qu’en longueur, la pe- 
titesse des yeux et des antennes extérieures, placées à leur 
angle interne , par la foiblesse de leurs pattes propres à marcher, 
et dont la première est en pince, et enfin par la forme ge- 


Pp 2 


300 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


nérale de leur queue très-étroile dans le mâle, et au côntrair® 
- fort large et arrondie dans la femelle. 

C'est de la forme générale du têt et de la proportion de la 
première paire de pattes, que M. Leach tire les caractères de 
ses quatre sous-familles, ou sérps. PAS 

Sous-Fam. 1. La première, qui a le tétrhomboïdal, la première 
paire de pattes déprimée et beaucoup plus grande que les autres , en 
même temps que les doigts défléchis, ne contient que deux 
genres : 1°. Ebalia, et 2». Nursia, qui ont l'un et l'autre le têt 
prolongé en avant; mais le premier a les côtés entiers, les 
doigts sub-défléchis , les branches externes du dernier appen- 
dice buccal linéaire, et le dernier article de l'abdomen du màle 
pourvu à sa base d'une apophyse dentiforme, tandis que le 
second a les côtés du têt dentelés, les doigts très-défléchis } 
la branche externe du dernier appendice buccal dilaté, et enfin 
l'apophyse dentiforme du dernier article de l'abdomen du mäle 
est près de sa pointe. 

Le genre Ebalia ne contient que trois espèces : 1°. F. pen- 
nantit ,,2°. E. Cranchii, 3°. F. Bryerii, qui toutes les trois ont 
été figurées et décrites par M. le Dr Leach, dans son Histoire 
naturelle des Crustacés d'Angleterre. 

Le genre Vursia n'en contient qu'une provenant des mers des 
Iudes , et dédiée à M. Hardwick sous le nom de N. Hardsvickii. 

La seconde sous-famille a son tét rond ou globuleux, la paire de 
pieds antérieure beaucoup plus grosse que les autres, dont les 
ongles et l'avant dernier article sont comprimés. Les genres 
qu’elle comprend sont les suivans. 

Leucosia, dont le front se prolonge en une sorte de pointe 
plus longue que le bouclier, les côtés profondément canaliculés 
au-dessus des pieds antérieurs. La branche interne du dernier 
appendice buccal s’appointissant peu à peu, et l’externe linéaire 
et plus large. 

Ce genre ainsi circonscrit , ne contient plus que deux espèces, 
L. craniolaris , Cancer craniolaris de Herbst, et 2°. L. urania, 
Cancer urania, Herbst. 

Phylira , dont le tét'arrondi, déprimé avec un front un peu 
prolongé, mais plus court que le bouclier; la branche interne 
du dernier appendice buccal appointie, l’externe très-large et 
ovale ; il ne contient également que deux espèces toutes connues 
précédemment sous le nom de Leucosia scabriuscula et de L. glo- 
bosa dans Fabricius. 

Persephona. Le tèt est comme dans le genre précédent; le 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. Soi 


front est un peu alongé , mais n’est pas plus long que le bouclier; 
les deux branches du dernier appendice buccal sont appointies 
graduellement, le sommet de l'externe étant très-obtus. 

Les trois espèces qui constituent ce genre paroissent enlieë- 
rement nouvelles. Les deux premières, assez peu différentes , ont 
le tèt également granuleux et très-épineux, recourbé en arrière; 
mais l’une, dédiée à M. Latreille sous le nom de Latreillii, a 
les angles antérieurs du tét dilatés peu à peu, tandis que dans 
l'autre, désignée sous le nom de P. Lamarcki, ces dilatations 
sont sub - anguleuses. La première a en outre ses bras tuber- 
culeux, tandis que la seconde les a seulement granuleux. Quant 
à la troisième espèce, le P. LicAtensteinii, le têt un peu aplati, 
a ses angles antérieurs prolongés brusquement en tubercule. Les 
trois épines postérieures sont à peine recourbées, et les bras 
sont couverts de tubercules scabreux , ou comme décomposés. 
11 paroit que M. Leach ignore entièrement la patrie de ces trois 
espèces ; il suppose cependant qu'il se pourroit que le Leu- 
eosia mediterranea de Lichenstein appartint à ce genre. 

La troisième sous-famille a le têt oval ou globuleux, avec 
le front un peu prolongé; la première paire de pieds à pinces 
filiformes, très-alongées, un peu plus grosses que les autres; 
les doigts sub-filiformes. 


Le genre Myra, qui a le tét ovale, la branche externe du 
dernier appendice buccal, saillante et arquée au côté externe, 
ne contient qu'une seule espèce , le Leucosia fugax de Fa- 
bricius, etc. 

Le genre Zlia n'en contient également qu'une, le Zeucosia 
nucleus de Fabricius. Il a pour caractère, d'avoir le têt sub= 
globuleux, la branche externe du dernier appendice buccal se 
rétrécissant peu à peu jusqu'au sommet, qui est arrondi. 


Le genre Arcania a le têt globuleux, maïs très -epineux, 
la branche externe de l’appendice buccal postérieur , linéaire, 
tronquée et échancrée à son bord interne au sommet , et l’ex- 
terne peu à peu acuminé. 

Il est établi sur le Zeucosia erinaceus de Fabricius, qui est le 
Cancer erinaceus, Herbst, 1, 158, tab. 20, fig. 3. ; 

Enfin le dernier genre de cette sous-famille, le geure 2phis, 
qui a pour Caractères un tét sub-rhomboïdal , pourvu de chaque 
côté d’une épine alongée, et la branche externe du dernier ap- 
pendice buccal se rétrécissant peu à peu vers le sommet, ne 
renferme également qu'une seule ‘espèce , le Zeucosia septem- 


302 JOURNAL DE PUYSIQUE:, DE CHIMIF 


spinosa de Fabricius , Cancer 7 spinosus, Herbst, 1, 256, tab. 20; 
fig. 112. 

La quatrième sous-famille, qui ne contient qu'un seul genre 
Jxa, se distingue, parce que son tèt est transversalement pro- 
Jongé, en une sorte de cylindre de chique côté; du reste, les 
pieds sont également filiformes, la première paire à peine plus 
grande que les autres, et les doigts sont filiformes. Des deux 
espèces qui conslitnent ce genre, l’une est déjà connue, c’est le 
Leucosia cylindrus de Fabricius, dont M. le D° Leach donné 
une figure, tab. 129, fig. 1, sous le nom d’/xa canaliculata, 
Quant à la secoude, Z. inermis, même planche, fig. 2, elle est 
nouvelle et se distingue aisément, parce que les prolongemens. 
latéraux ne sont pas terminés par une pointe, comme dans la 
première, et qu'en outre elle a en arrière deux tubercules for- 
tement granulés, 

Dans son X€ article, M. le D' Leach donne les caractères 
très-détaillés du genre T'halassina établi par M. Latreille, mais 
qu'il paroît maintenant confondre avec le genre Cebia. Et en 
effet, les deux genres ont également les pieds antérieurs ter- 
,Minés par une sorte de rudiment de pince; mais dans les Thalas- 
sina Yabdomen est fort long et fort étroit, et les appendices 
doubles de son avant dernier article, sont extrêmement grèles 
et élroils, ce qui fait supposer que les animaux de ce genre 
doivent nager difficilement, et peut-être pas du tout ; en sorle 
que le caractère joint à Ja figure assez anomalé de ces animaux, 
nous paroissent bien suffisans pour l'établissement d’un genre 
distinct, puisque d’une. modification visible dans l’organisa- 
tion , il en résulte des mœurs et habitudes différentes; quoi- 
qu’il en soit, M. Leach donne une excellente figure, pl. 130, 
d'un individu mäle de la seule espèce qu'il possède, le 7%, 
scorpionides, Cancer astacus anomalus de Herbst; ét 1l ajoute 
qu'il a dans ses porte-feuilles, le dessin d’une autre espèce 
également de l'Inde, et que lui a donné le col. Hardwicke. 

Le XIe article est consacré à l'établissement d'un génre en- 
tièrement nouveau, pour une seule espèce de Décapode ma- 
croure de la famille des Salicoques, c'est-à-dire dans laquelle 
le second article de l'abdomen élargi à ses extrémités, imbrique 
fortement le premier et le troisième, Les caractères principaux 
de ce genre, que M. Leach nomme Atya, consistent essentiel- 
lement dans la forme tout-à-fait singulière des deux premières 
paires de pattes, qui sont les plus petites, égales, avec l’avant-der- 
nier article très: court, et le dernier partage longitudinalement en 


ET. D'HISTOIRE, NATURELLE, 303 
deux parties égales et pourvues de longues soies ; la troisième 
paire, la plus grande, est inégale et terminée par un ongle 
très-court. Les deux autres. paires, plus petites , en ont un me- 
diocre. M. Leach ne connoît encore dans ce genre, qu'une 
seule espèce, dont la patrie est inconnue; c'est l’4. rude, S. sçabra, 
pl. 151; son roslre caréné est divisé en trois dents, dont la mé- 
diaire est longue; les trois pairesde pieds postérieurs sonl scabres, 


(La suite au Cahier prochain.) 


TT 


NOUVELLES SCIENTIFIQUES. 
PHYSIQUE. 


Sur la Compression de l'Eau, par M. le professeur ŒRrSTED. 


Je me suis occupé dans ces derniers temps, dit le professeur 
Œrsted dans une Lettre écrite, le 28 avril 1818, au D'Schweiger, 
de la compression de l'Eau. L'ouvrage de ‘Zimmermann sur 
ce sujet, est rempli d'erreurs de calculs fort singulières; mais 
lorsqu'on les corrige, on trouve entre les résultats des expé- 
riences, beaucoup plus d'harmonie qu'on ne l’avoit cru. 

J'en ai cependant fait de toutes nouvelles sur ce sujet, des- 
quelles il résulte que la compression de l’eau est properlion- 
nelle aux forces comprimantes, comme Canton l'afirme, appuyé 
sur des expériences peu nombreuses, et ce que contredisent 
celles de Zimmermann , du moins d’après les résultats admis 
jusqu'ici, J'ai trouvé que la compression , telle que Canton 
l'admet, est presque trois fois trop petite, Ce qui esl remar- 
quablé , c’est que, d’après M. de Laplace, la vitesse du son 
dans l’eau peut être calculée de cette compression. D'après les 
résultats de Canton sur la base de ses calculs, on voit que le 
son conserve dans l’eau une vitesse qui approche de celle qui 
a lieu dans les métaux ; d’après mes résultats, elle seroit trois 
fois moindre. J'ai encore travaillé sur un autre sujet important, 
savoir, sur la compression de l’eäu par une pression plus forte 
que celle-de l'atmosphère et exactement mesurée. Sans trop de 
vanilé, je me crois assez assuré qu'a 14° Réaumur, elle doit 


tomber entre 0,00012 et 0,00014. (Journ. fur Chim. und Phrys., 
von Schweiger, band. 21, hest. 3.) 


304 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Sur la température des mines de Cornouailles ; parM.TnomaAs LÉan. 


M. Léan fut requis en 1815, par un Membre de la Société 
géologique de Cornouailles, de faire quelques observations sur 
la température de l'air dans la mine de Wheal Abraham. Cette 
mine est creusée à la profondeur de 200 fathoms (366 mètres), 
et produit beaucoup de minérai de cuivre. La veine dans laquelle 
on trouve le cuivre (sulfure de cuivre), contient quelquefois une 
petite quantité d’étain, de zinc, de plomb, de fer. Les minerais 
métalliques sont en couches dans le qnartz et le feld-spath. Ce 
fut le 9 de juin qu'il fit les premières observations. Elles furent 
faites dans un puits traversé par un courant d'air ascendant qui 
vient de la mine. Le thermomètre 23° centigrades au soleil et 
15° à l'ombre. Voici ce qu'il marqua dans la mine à différentes 
profondeurs : 


À 3 fathoms ( 5",487)le thermomètre setintà 18°+ 
OEM DCE HART OR CT EC PES 
ve Gior 40 pe ou LUE 1 20E 
( ) : Here 20 

: Des roll et ea m203 
2201 ue ic ES Véranda enr he 298 
FAO ER (230 SR Mn amie 
- see Er lie ObN au 2 2 
ol Potro a ar 


Cette dernière profondeur étoit alors le fond de la mine. 

Dans les différentes stations où il se placa avec le thermo- 
mètre, un courant d’eau traverse la veine et est conduit aux 
pompes. En y plongeant le thermomètre, voici quelle fut la 
température observée : ° 


À 183": 20° dans le réservoir où l'eau de ce niveau est mélée 
avec celle du fond de la mine. 
185.,.17,7 dans le courant qui sort à ce niveau. 
205...18,3 idem. 
219...20 idem. ' 
256...25 dans le courant qui sort à ce niveau, d’une veine 
3 riche en cuivre. 
293...23,3 idem. 
329...23,3 idem. 
348..,23,3 idem, 
M, 


£T D'HISTOIRE NATURELLE. 305 


M. Léan se disposa ensuite à déterminer la température dans 
Îes endroits de la mine où les ouvriers éloient à travailler ; 
c'est à une distance de 15 à 30 fathoms (274 à 55 mètres), de 
tout courant d'air ou de tous puits servant à l'exploitation. Voici 


les résultats obtenus : 


À 165% 23°3, veine sèche, mais riche en minerai. 


10 De AIN 


201.4422,2, ————— 
210-209 ————— 


238...23,5, 
256:..24,4, 


27444025,5, ————— 
293...20,6, ————— 


LANDE 


mais pauvre. 

idem. 

idem. 

idem. 

idem. 

idem. 

riche en cuivre et en autres minerais. 
mais pauvre. 


329...25,5, beaucoup d’eau tombant en gouttes du toit de 
l'ouvrage, et sorlant des autres parties de la veine qui est 
riche en minerai de cuivre. 


Il répéta ses expériences le 13 décembre 18:15, et eut les 


resultats suivans : 


A la surface, en plein air.. . . . . 10° 
A - 5" au-dessous de la surface. . . 11,1 


LATE MO 
DANCE UNE 
366 a 


haute température de l’eau 


zine, septembre 1818.) 


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.  . . 25,5, ce qui éloit la plus 


à cet instant. (Philosophical Maga- 


Tome LXXXVII. OCTOBRE an 1818, Qq 


306 JOURNAL DE PHYSIQUE; DE CHIMIE 


CHIMIE. 
Lettre de M. J.-B. Virxon au Rédacteur du Journal de Physique, 


sur le Lithium, le Carbonite neutre d Ether , le Sirium , la préei- 
pitation ce à l'état métallique de l'Etain et du Plomb, 
l’Alun de Soude, l'Indigo, etc. 


Monsieur, 

Vous saurez qu’en Allemagne comme en Angleterre, on a 
réduit le Lithium par le moyen de la pile; c’est un vrai métal 
d’alcali blanc, éclatant et pas tout-à-fait aussi persistant que le 
Sodium, car il brûle aussitôt qu’il est souslrait à l'influence de 
la pile. L’amalgame de Lithium décompose aussitôt l’eau. 

Le muriate de Lithium, quoique cristallisable , est aussi dé 
liquescent à l'air que le muriate de chaux; converti en chlorure 
par l’expulsion de l'eau, il échange au feu le chlore contre de 
l'oxigène, et reste démuriaté. 

Le nitrate de Lithium se décompose au feu avec les mêmes 
phénomènes que le nitrate de potasse. 

M. Banhof en distillant, à quelques reprises, de l’alcool sur 
de l’acide oxalique effleuri ,.a substitué une portion d’éther, 36,5, 
à une portion d'eau. Le carbonite neutre d’éther qui est ainsi 
obtenu , est sous forme d'huile ; et lorsqu'on le sature de gaz 
ammoniacal, il est converti en une poudre blanche, insoluble 
dans l’eau , et qui se laisse sublimer sans altération, lorsqu'elle 
est exempte d'humidité. Cependant , l’éther oxalique lui-même, 
étant traité au feu, avec de l’eau, laisse échapper l'alçool et 
se régénère en acide oxalique; une proportion d'acide carboneux, 
54,5, ou 21 d'acide carbonique et 15,5 d'oxide de carbone , 
et une proportion d’éther, 22,5, ou 14 de carbone hydrogéné, 
et 8,5 d'eau, sont ses principes constituans. 

Le Sirium est toujours considéré comme un mélal particulier, 
H n'est réductible qu’en alliage avec un autre métal, et surtout 
avec l’arsenic. Ses oxides sont blancs, ne s’altèrent pas à l'air, 
et souliennent, sans se fondre , une chaleur de 150o° de Wedg- 
wood. Ses sels sont également blancs. 

Les dissolutions de Sirium, sont précipitées en blanc par le 
prussiate de potasse, en blanchâtre par l’infusion de noix de 
galle, et en noir par l'hydrogène sulfuré; ce dernier précipité 
se dissout aisément dans les acides. 

M. Fischer a fait de très-jolies expériences sur la précipi- 
tation réciproque et à l’état métallique, de l’étain et du plomb. De 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 307 


l'acélate acidule de l’un de ces métaux, est en partie décomposé 

ar l’autre. L'étain ne précipite le plomb qu’en partie, mais 
fe plomb précipite entièrement l’étain. Lorsque les acctates sont 
neutres, il n'y a point d'action; cependant pour l’étain, l’action 
continue à l'etat neutre lorsqu'elle a commencé à l'état acidule. 
Le plomb décompose le muriate d’étain et s’oxidule avec rapi- 
dité; mais le même sel et oxide n’en est que lentement attaqué, 
malgré laflinité si supérieure de l’oxidule d’un métal sur son 
oxide. La cause de cet effet est exposée dans mes Principes; 
un mélange de Jlimaille d’étain et de plomb, est dissous dans 
les deux métaux par le vinaigre; un alliage des deux mêmes 
mélaux ne l'est pas. Cet alliage n’est dissous que dans l'étain, 
par l'acide muriatique. 

M. Zellner a découvert un sulfate de soude et d’alumine qui 
cristallise très-bien , s’eflleurit légèrement à l'air et se dissout 
dans le double de son poids d’eau froide; il l'appelle lun de 
Soude. Ce sel consiste en une demi-proportion, 16,5, d'alu- 
mine; une troisième proportion, 0,85, de soude, et une pro- 
portion 37,5 d'acide sulfurique, dont, par conséquent, deux 
sixièmes proportions sont en excès ; puis six proportions, 5,1 d’eau, 

Bucholz, que la science vient de perdre, sans rien connoitre 
du travail de vos chimistes , a trouvé dans l'ipécacuanha, les 
mémes principes qu'eux, 

Léopold Gmelin trouve que le procédé le plus expéditif de 
se procurer de l'hydrogène sulfuré, est de le degager j ce qu'il 
appelle Sulfure de Magnésie, et qui probablement est de l'oxi- 
sulfure , au moyen d'un acide. Il se procure le sulfure en traitant 
J'oxide de manganèse désuroxidé au feu, avec un quart de son 
poids de soufre, et un sixième de charbon, dans un creuset, 
jusqu'a l'ignition ; il reste une masse brune, verdätre. L’oxide 
de manganèse et l’oxidule de fer semblent avoir assez d'énergie 
pour que leurs oxisulfures se partagent par l’eau, en hydro- 
sulfure et sulfite sulfuré. 

M. Sertucrner a trouvé que les acides énergiques acidifient 
les combustibles les plus indifférens, et que les acides ainsi pro- 
duits, se salifient tres-bien avec les oxides. C’est ainsi, dit-il, 
d l'acide sulfurique forme avec l'alcool, trois acides différens 

e celle espèce, et qui par la chaux sont conversibles en sels; 
M. Sertuerner peut avoir pris le sous-sulfate d’éther pour un acide 
particulier. 

Doebereiner s’est assuré que l'indigo , dans son état de grande 
pureté, consiste en carbone et en azote, dans le rapport du charbon 


Qq 2 


308 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


animal (36 du premier combustible et 15,5 du second) avec dé 
l'hydrogène et de l'oxigène, dans des proportions qu'il n’a pas 
encore déterminées. Lorsque l’indigo est traité avec l’oxidule 
de fer, la chaux et l’eau, 1l n’abandonne point d'oxigène, mais 
reprend de l'hydrogène et forme un hydracide que M. Doebe- 
reiner nomme acide isatinique, hydrogène indigore , acide hydro- 
indigoique. Cet acide est incolore et se trouve combiné avec la 
chaux dans la cuve d'indigo, dont la matière colorante passe 
si aisément au bleu, à l'air, par la perte de l'hydrogène. 
Grotthus a publié un très-beau travail sur l’acide sulfochya- 
zique de Porret, dont je pourrai vous donner une traduction. 
Il a trouvé que cet acide, qu'il appelle Ænthrazothionique, con- 
siste en une proportion 6 de carbone, une proportion 15,35 
d'azote, trois proportions 4,5 de soufre, et trois proportions 3 
d'hydrogène. L'acide hydro-cyanique y échange, par conséquent, 
une proporlion de carbone contre trois proportions de soufre 
et deux proportions d'hydrogène, et il contient les élémens de 
trois proportions 48 d'hydrogène sulfuré, comme d’une pro- 
portion 1,5 d'ammoniaque. Le premier gaz seroit uni à une 
proportion 19,5 d'azote carboné, et le second à une propor- 
tion 51 de soufre carboné. Get acide colore en rouge foncé 
l'oxide de fer. L’Anthrazothionate de potasse se forme en gros 
cristaux prismatiques blancs. Agréez ma parfaite estime. 


Louvain, 17 septembre 1818. J.-B. Vircon. 


Sur la combinaison de l'Alcool au moyen de la lampe sans 
Jlamme, par Joun Darrow. 


En considérant le phènomène de la lampe sans flamme qui 
continue la combustion de l’Alcool, au moyen d'un fil de pla- 
tine roulé en spirale, M. Dalton fut frappé de l’idée qu'on pour- 
roit desirer de savoir si les produits de cette combustion sont 
les mêmes que ceux de la combustion ordinaire. Il étoit dis- 
posé à penser qu’une combustion imparfaile ou une demi-com- 
bustion du charbon, en étoit peut-être le résultat, et que si une 
masse d’air isolée étoit soumise à celle opération, on y trou- 
veroit plutôt de l’oxide de carbone que de l'acide carbonique. 

Il suggéra, il y a environ trois mois, cette conjecture au 
D: Henri, et ils ont fait brüler immédiatement cette lampe 
sous une cloche de verre. Après en avoir extrait une portion 
de l'air, ils furent bientôt convaincus, par les réactifs ordi- 
uaires , qu'il contenoit de l’acide carbonique. Peu de jours après, 


La 


£T D'HISTOIRE NATURELLE. 509 


en répétant l’expérience, dans la vue de trouver si l'oxide de 
carbone étoit mêlé avec cet acide, on fit brüler la lampe sous 
une cloche de verre de 120 pouces cubiques, jusqu’à ce que 
le fil cessät de paroiître rouge dans l'obscurité; alors on rem- 
plit un flacon de l'air de la cloche, pour l'examiner; on n'eut 
pas plutôt enlevé la cloche, que le fil redevint rouge comme 
auparavant; Ce qui montroit que la combustion n’avoit pas cessé. 
En examinant l’air sur le mercure, à la manière ordinaire, on 
trouva qu'il contenoit 14+ pour cent d’oxigène , et environ quatre 
pour cent d'acide carbonique; mais on ne put découvrir un 
atome d’acide carbonique de plus, en enflammant le résidu 
avec un mélange d'hydrogène et d’oxigène. 

Ainsi la conjecture par rapport à la production de l’oxide de 
carbone, ne fut pas confirmée par l’expérience. Cette espèce 
de combustion paroissoit plutôt supérieure qu’inférieure en 
énergie à la combustion ordinaire, puisque l’oxigène se trouvoit 

: beaucoup plus diminué qu'il ne l’auroit été par la combustion 
ordinaire prolongée jusqu’à extinction. 

Afin d'examiner ce dernier point plus complètement , M. Dalton 
laissa brüler la lampe avec flamme sous la même cloche remplie 
d'air atmosphérique , jusqu’à ce qu’elle s’éteignit spontanément, 
Le gaz restant se trouva composé de 16% pour cent d'oxigènge 
et de trois d'acide carbonique. On ralluma de nouveau la lampe 
sans flamme sous la même cloche et dans les mêmes circon- 
stances; elle s’éteignit au bout de 40 minutes; le résidu de l'air 
ayant élé analysé, on n'y trouva que 8 pour cent d’oxigène, 
avec presque la même quantité d'acide carbonique. 

M. Dalton dit avoir trouvé fréquemment dans des occasions 
précédentes, que la combustion de l'huile, de la cire, du suif, etc., 
diminuoit l'oxigène presqu'au même degré, avant que la com- 
bustion cessàt , savoir, de 4, 5 ou 6 pour cent, l’oxigène mon- 
tant à 21 pour cent au commencement. Voila donc , selon lui, 
un fait très-singulier et très-remarquable, c'est que cette espèce 
de combustion sergit capable de diminuer l’oxigène d’une si 
grande quantité, ou bien de s’entretenir dans des circonstances 
où la combustiou ordinaire cesse entièrement. (Annals of Phi- 
losophy, oct. 1818.) 

ZOOLOGIE. 


Sur le Poison des poissons; par le D' Diksow. Extrait d'un Mémoire 
lu à la Société Linnéenne , en Angleterre, le 7 et le 21 avril 1818. 


Le Dr Dikson entend par le Poison des poissons, non les conr 


310 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


séquences sérieuses et quelquefois fatales, qui accompagnent les 
blessures faites par les aiguillons de la Raie ou par ceux des 
autres espèces de poisson, mais les accidens qu'on éprouve 
pour avoir mangé cerlains poissons ou certaines parlies de pois- 
son. Les journaux de plusieurs voyages nous offrent des exemples 
de personnes qui, pour avoir mangé certain poisson, ont été 
plus ou moins dangereusement malades, ont eu le corps gonflé 
et la peau couverte d’éruptions irritantes. Souvent la qualité mal- 
faisante semble résider dans une partie du poisson en parti- 
culier, spécialement dans le foie et dans les intestins, comme 
il paroït résulter de ce que parmi l'équipage d'un vaisseau, il 
n’y a eu d'incommodés que ceux qui ont mangé de ces parties, 
C’est une observation commune, que tout poisson esl une nour- 
riture plus saine et plus agreable avant d’avoir frayé qu'après; 
le poisson, dans le premier cas, étant plein de santé et de vi- 
gucur, tandis que dans le second , il est malade, maigri, et que 
Ja fibre musculaire en devient molle d'une manière remarquable, 
La différence entre ces deux états qui, dans les climats tem- 
pérés de l'Europe, ne va guère qu'a rendre moins savoureux 
le poisson considéré comme objet d'aliment, est souvent cause, 
sous Îles tropiques, que la même espèce devient un aliment 
sain dans un cas et un aliment dangereux dans un autre. De 
plus, on observe que certaines espèces, spécialement aux Indes 
occidentales , sont saines pendant la même saison , dans certaines 
siluations , et sont tout le contraire dans d’autres. Ainsi, on assure 
que tous les poissons, sur les côtes des Barbades, sont une 
nourriture saine, même ceux qui, le long des côtes des autres 
Îles, sont dangereux à manger. On cite des exemples d’un vais- 
seau qui, un jour, tomba au milieu d’une multitude de pois- 
sons parfaitement bons à manger et qui, le lendemain, arriva 
au milieu d'une autre troupe de poissons de la même espèce, 
lesquels se trouvèrent capables d'empoisonner. 

Il n’est pas très-aise de déterminer la cause de ces différences. 
Le moyen ordinaire parmi les marins pour savoir s’il y a sûreté 
ou risque à manger d’un poisson suspect ou inconnu, c'est de 
mettre une piece d'argent dans le vase où l’on fait cuivre le 
poisson; si l'argent acquiert une couleur de cuivre, le poisson 
est considéré comme malfaisant; sa couleur de cuivre ou plutôt 
de bronze, développée en cette circonstance a été probable- 
ment la raison pour laquelle la saveur du poisson dans cet 
état, a été attribuée au cuivre, dont on supposoit que le poisson 
s'éloit infecté, en cherchant sa nourrilure sur des rivages con- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 5t1 


tenant des mines de cuivre; mais la décoloration de l'argent 
est probablement due à l'hydrogène sulfuré , et c’est un fait bien 
connu, que les écoulemens d'une mine de cuivre sont si par- 
ticulièrement préjudiciables au poisson, que plusieurs lacs qui 
en étoient d'abord pourvus abondamment, en ont été entière- 
ment dépeuplés par cette même circonstance. Des poisons vé- 
gélaux avalés par les poissons dont la voracité ne distingue rien, 
ont élé considérés comme la cause de la qualité malfaisante 
de leur chair, et le Dr Dickson, tout bien examiné, est porté 
à adopter celte opinion. (Ænnals of Philosophy, juin, 1818.) 


Sur le Serpent de la mer de l'Amérique du nord. 


Une Lettre de New-York, du 11 septembre, a apporté à 
Londres la nouvelle que le fameux Serpent américaiu , dont 
nous avons eu deja plusieurs fois l’occasion d'entretenir nos 
lecteurs, a été pris. C'est le capitaine Rich, dit la Lettre, qui 
l'a tué et qui l'a apporté à Boston. Suivant quelques journaux, 
ce Capitaine assure que c’est bien le même animal qu’il avoit 
déja harponné, la blessure qu'il lui fit à cette époque n'étant 
pas encore guérie ; et quoiqu'il lui parüt alors qu'il avoit 70 pieds 
de long, il se trouve qu'il n’en a plus que 10 sur 7 de cir- 
conférence. Mais d'après un autre recit , l'animal pris par le ca- 
pilaine Rich, n’est pas du tout celui qu'il avoit poursuivi et at- 
teint d'un coup de harpon, mais simplement une pelite Baleine 
à bosse, B. gibbosa: en sorte que cet immense animal dont 
les journaux américains nous parlent si longuement, et d’une 
manière si extraordinaire depuis près de deux ans, pourroit 
bien n'être autre chose qu’une colonne de jeunes Baleines à 
bosses, dont on n’auroit aperçu au-dessus du nivau de la mer, 
que leélévation qui dans cette espèce remplace la nageoire dor- 
sale. C’estce que nous ne larderons pas sans doute àsavoir, M. Le- 
sueur nous ayant annoncé qu'il se propose d'éclaircir ce point, 
comme il l’a déja fait pour le Scoliophis , qu'il a montré n'être 
qu’un individu monstrueux par ecolent d'une espèce de Serpent 
du pays. 
EE 

PRIX PROPOSÉ 


Par l’Académie royale des Sciences, Inscriptions et Belles-Lettres 
de Toulouse, pour les années 1819, 1820, 1821. 


Pour 1819, la mème question qu’elle avoit proposée pour 1816; 


\ 


312 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, elc. 


déterminer les effets produits sur un cours d’eau par la con- 
struction d’un barrage moins élevé que les bords de son lit, et 
donner des formules qui expriment ces effets, etc. La valeur 
du prix, 1000 fr. 

Pour 1820 : Quel a été l’état des Sciences, des Lettres et 
des Beaux-Arts, depuis le commencement du VII‘ siècle jusqu’à 
la fin du XVIII, dans les contrées méridionales de la France. 
La valeur du prix, 5oo fr. 

Enfin, elle propose pour sujet du prix qu’elle doit adjuger 
en 1821, les questions suivantes sur la stratification ou division 
en couches de masses minérales, ou systèmes de masses miné- 
rales, dont l’ensemble constitue la partie solide du globe ter- 
reslre qui nous est connue. 

1°. Faire connoître les circonstances particulières que la stra- 
tification de chaque sorte de masses minérales peut présenter, 
tant sous le rapport de la forme des couches, que sous celui 
de leur direction et de leur inclinaison. 

2°. Déterminer les lois , soit générales , soit particulières, aux: 
quelles la stratification des masses minérales peut être soumise; 
celte détermination doit être basée sur des faits positifs et bien 
conslatés. 

3°. Indiquer, d’après les principes généralement admis en 
Physique et en Histoire naturelle, la cause de la stralfication 
et de ses lois. 

L'Académie prévient que cette dernière demande n’est qu’ac- 
cessoire, et que la question mise au concours est la détermi- 
nation des lois de la straclification. La valeur du prix est de 
5oo fr. 

Les ouvrages, écrits en françois ou en laün, doivent être en- 
voyés, avec les formalités d'usage, à M, le baron Picot de la 
Peyrouse, Secrétaire perpétuel de l’Académie, et ils ne seront 


reçus que jusqu’au 1° mai de chacune des années pour lesquelles 
le concours est ouvert. 


ERBATUM, Pag. 237, lig. 4, (fig. 1, pl. II), lisez (fig, 1; 
pl. 1). 


De l'Imprimerie de M: V° COURCIER , rue du Jardinet, n° 12, 


TE de Phur . Octob° 148. PL I 


MESURE DES ANGLES DES CRISTAUX. 
Lig.2. 


WE. Porareae. Jef 


ël lu, tie 


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N 
4 


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oi 


ont de: Lrprique, celobre 188 . : c VE) 


JOURNAL 


DE PHYSIQUE, 
DE CHIMIE 
ET D'HISTOIRE NATURELLE. 


NOVEMBRE an 1818. 


RECHERCHES 


SUR 


LA MESURE DES TEMPÉRATURES 


ET SUR LES LOIS DE LA COMMUNICATION DE LA CHALEUR; 


Par MM. DULONG #er PETIT (1). 


INTRODUCTION. 


Dès l'origine de la Physique expérimentale, on a senti que, 
parmi tous les effets produits par la chaleur, les variations 
qu’éprouvent les corps dans leur volume devoient être préférées 
à tous les autres phénomènes dus à la mème cause, pour mesurer 
ses vicissitudes naturelles ou artificielles. Toutefois il y avoit 
loin de cè premier apercu aux connoissances nécessaires pour 
assujétir la construction des thermomètres à des procédés in- 
variables qui pussent rendre leurs indications comparables entre 
elles. Mais le fréquent emploi de ces instrumens, et l'utilité des 


(1) Ce Mémoire a obtenu le prix de Physique décerné par l'Académie des 
Sciences, dans sa séance publique du 16 mars 1818. 


Tome LXXXVII. NOVEMBRE an 1818. Rr 


314 JOURNAL DE PHYSIQUE, DÉ CHIMIE 


données qu’ils fournissent , ayant ramené souvent l'attention des 
physiciens sur toutes les circonstances qui péuvent modifier leur 
marche, toutes les particularités de leur construction ont été 
étudiées avec tant de soin et d’une manière si détaillée, qu'il 
ne reste presque plus rien à desirer sur cet objet. 

Il étoit indispensable, sans doute, d'apporter, dans les obser- 
valions thermométriques, une grande précision ; mais cela ne 
suflit pas pour conduire à une connoissance approfondie de la 
théorie de la chaleur. On pourroit, à la vérité, rapporter la 
marche de tous les phénomènes à une échelle arbitraire de tem- 
pérature, et chercher des formules empiriques qui représentent 
exactement les observations ; mais on ne peutespérer de découvrir 
les propriétés les plus générales, ou, si l’on veut, les lois les 
plus simples de la chaleur, que lorsqu'on aura confronté les 
thermometres construits avec des substances prises dans les trois 
états dont la matière est susceptible, et lorsqu'on aura déterminé 
les rapports qui existent entre les indications de ces instrumens et 
les quantités de chaleur ajoutées ou soustraites pour produire 
des variations déterminées de température. 

Quoique ce sujet de recherche ait dû naturellement se pré- 
senter à l'esprit de presque tous les physiciens, on doit con- 
venir qu'il n’a pas encore été traité avec tout le soin et tout le 
développement que son importance exige. Les essais de Deluc 
et de Crawford n'embrassent qu'une étendue trop limitée de 
l'échelle thermométrique , pour qu’il soit permis d'en déduire 
aucune conséquence générale. C’est, au reste , un défaut commun 
à presque tous les travaux relatifs à la théorie de la chaleur, 
et qui est devenu la source de tant d'inductions erronées. On 
conçoit facilemeut, en effet, que des phénomènes assujétis à 
des lois fort différentes , peuvent avoir une marche en apparence 
identique dans un certain intervalle de température, et que, 
si l'on se contente de les observer entre les limites où leur di- 
vergence est presque insensible, on sera porté à attribuer leurs 
foibles écarts aux erreurs d'observation, et l'on manquera des 
donnéesnécessaires pour remonter à leur véritable cause. Plusieurs 
fois, dans le cours de ce Mémoire, on aura l’occasion de sentir 
la justesse de cette réflexion. 

M. Dalton, en considérant la même question sous un point 
de vue beaucoup plus élevé, a essayé d'établir des lois géné- 
rales applicables à la mesure de loutes les températures. Ces 
lois, il faut en convenir, forment un ensemble imposant par 
leur régularité et leur simplicité. Malheureusement cet habile 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 315 
physicien s’est trop empressé de généraliser des aperçus fort 
ingénieux, il est vrai, mais qui ne reposoient que sur des éva- 
luations incertaines. Aussi n'est-il presque aucune de ses asser- 
tions qui ne se trouve contredite par les résultats des recherches 
que nous allons faire connoitre. ta 

Ces recherches ont pour objet principal les lois du refroidis- 
sement des corps plongés dans un fluide élastique d'une nature, 
d'une densité et d’une température quelconques. Avant de nous 
livrer à l'étude de cette classe de phénomenes , il étoit indis- 
pensable de suppléer d'abord au défaut complet de notions exactes 
sur la mesure des températures élevées. C’est donc par l'examen 
de celte question accessoire, mais d’un haut intérêt par elle- 
même, que nous ayons commencé notre travail : C'est aussi 
par-là que nous en commencerons l’exposilion. 

Ce Mémoire se composera ainsi de deux parties très-distinctes : 
l'une aura pour objet tout ce qui est relatif à la mesure des 
températures ; la deuxième comprendra les lois genérales du re- 
froidissement, 


PREMIÈRE PARTIE. 


DE LA MESURE DES TEMPÉRATURES. 


S'il existoit un corps dont les dilatations fussent soumises à 
une loi assez régulière et assez simple pour que les additions 
successives de quantités égales de chaleur y produisissent con- 
stamment un même accroissement de volume, ce corps réu- 
niroit toutes les qualités que les physiciens ont crues nécessaires 
et suffisantes pour constituer un thermomètre parfait. 

Un tel instrument pourroit cependant ne pas offrir tous les 
avantages qu'il paroîit d'abord promettre. En effet, s'il arrivoit, 
par exemple, que le calorique spécifique de toutes les autres 
substances, rapporté à ce thermomètre, fût variable et inéga- 
lement variable dans chacune d'elles, il est bien évident que 
l'on ne pourroit rien conclure, à& priori, des indications de 
cet instrument relativement aux quantités de chaleur acquises 
ou perdues par une variation déterminée de température. 

On voit donc que le premier pas à faire dans cette recherche 
doit être de constater si les capacités d’un grand nombre de 
corps, prises avee une même échelle , varient de la même ma- 
nière; et si les dilatations des substances qui diffèrent le plus 
par leur nature sont soumises aux mêmes lois. Cette dernière 
comparaison, par laquelle nous commencerons, étant susceptible 
d'une plus grande exactitude que la première, nous lui avons 


Rire 


LA 
3516 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


donné beaucoup plus d'extension , et nous croyons n'avoir rien 
négligé de ce qui pouvoit contribuer à l'exactitude des résultats. 


De la dilatation des Gaz. 


Quand on a simplement pour but d'établir une comparaison 
générale entre les dilatations de tous les corps, la substance 
thermométrique à laquelle on rapporte toutes les mesures, peut 
être prise d’une manière arbitraire. La construction plus facile 
et l'usage plus commode du thermomètre à mercure, nous ont 
déterminés à l’employer dans presque toutes nos expériences. 

La comparaison de ce thermomètre avec le thermomètre à 
air, a été faite depuis long-temps par M. Gay-Lussac, entre les 
limites de la glace fondante et de l’eau bouillante. Il résulte des 
expériences de ce célèbre physicien, que la marche des deux 
instrumens ne présente pas de divergence sensible dans cet in- 
tervalle de température. 

M. Dalton pense, au contraire, que le thermomètre à mer- 
cure seroit en avance de 1° environ sur le thermomètre à air, 
vers le milieu de l'échelle où l'écart devroit évidemment être 
le plus grand , puisque les deux instrumens s'accordent à 0° et 
à 100°. 

On voit, d’après cela, que s’il existe réellement une diffé- 
rence entre les dilatabilités du mercure et de l'air, elle doit être 
très-foible entre les limites de la glace fondante et de l’eau 
bouillante. 

Nous avons d’abord poursuivi cette cor#paraison dans les tem- 
pératures inférieures. Par une première expérience faite à — 20°, 
nous avons encore trouvé une identité parfaite entre les indi- 
cations des deux instrumens; et, par un grand nombre d’ob- 
servalions faites de — 50° à — 36°, nous avons remarqué des dif- 
férences légères, mais tantôt positives et tantôt négatives, de 
manière que la moyenne de toutes les mesures prises simul- 
tanément sur les deux instrumens, se trouve être la même pour 
chacun d’eux (1). Ainsi, dans une étendue de plus de 130’, 


1) Afin de faire jnger du peu d'écart des déterminations partielles, nons- 
Le 5 P Abe ie P ? 
rapportons ici quelques-unes de celles qui ont été prises entre — 36° et —30o°. 


THERMOMÈTRE  THERMOMÈTRE À AIR CORRIGÉ 
à mercure. de la dilatation du verre. 
— 56°,29 — 36°,18 
DIT] 34 72 ET 34 »84 


ÈT D'HISTOIRE NATÜRELLÉ. 317 


l'écart des deux échelles que nous comparons est assez foible 
pour se confondre avec les erreurs d'observations. 

Rien n’est plus facile que ce genre d'expériences , tant qu'on 
ne va pas au-delà du point d’ébullition de l’eau; mais lorsqu'on 
veut suivre cet examen dans les températures élevées, on ren- 
contre d'assez grandes difficultés qui obligent d’avoir recours 
à des procédés plus longs et plus compliqués. Ceux que nous 
avons adoptés et que nous allons décrire, nous paroissent com- 
porter toute la précision dont les recherches de cette nature 
sont susceptibles. 

Notre appareil se compose d’une cuve rectangulaire de cuiyre 
rouge, de sept décimètres de longueur, d'un décimètre de 
largeur et d’un décimètre de profondeur. Cette cuve porte sur 
‘une de ses petites faces latérales deux douilles, dont l’une 
sert à introduire dans une situation horizontale un thermomètre 
à mercure, et dont l’autre retient l'extrémité ouverte d’un tube 
qu’on place horizontalement à la même hauteur que le ther- 
momètre. Ce tube est parfaitement desséché et contient de l'air 
pareillement sec. 

La cuve repose sur un fourneau construit de manière qu'il 
puisse chauffer également de toutes parts : on la remplit d’une 
huile fixe, qui peut, comme on le sait, supporter une température 
de plus de trois cents degrés sans bouillir. 

Le tube qui renferme l'air, se termine, du côté de la douille, 
par un tube court et d'un diamètre très-petit qui sort en partie 
de la cuve. La quantité d'air contenu dans la portion extérieure 
de ce tube, et qui ne participe pas à l’échauffement du reste, 
est tout-àa-fait négligeable : nous nous sommes assurés qu’elle 
n’excédoit jamais un demi-millième de la masse totale, et nous 
avions d'ailleurs la précaution de l’échauffer pendant chaque ex- 
périence , afin d’atténuer l'erreur qui pouvoit en résulter. 

La cuve est fermée par un couvercle percé de plusieurs ou- 
vertures : les unes sont traversées par des thermomètres ver- 
ticaux qui servent à indiquer si les différentes parties de la 


— 33°,31 — 33°,40 
— 32 ,27 — 32 ,13 
— 31,63 — 31,54 
— 31 ,26 — 31 ,04 
— 30 ,46 — 30 ,5q 
— 29 ,68 — 29 ,64 


Moyenne —— 32°,452 Moyenne —— 32°,420 


318 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


masse liquide sont à la même température ; les autres portent 
des tiges armées de volans, dont la rotation produit dans le 
liquide une agitation assez vive qui a pour objet d'établir l'uni- 
formilé de température, 

Voici maintenant la marche qu'on a suivie dans chaque ex- 
périence : on échauffoit d’abord la cuve jusqu’à une température 
peu distante de celle qu’on vouloit atteindre, et l’on fermoit alors 
touies les ouvertures du fourneau. La chaleur tendant à se mettre 
en équilibre dans tout l'appareil, la température de l'huile s éle- 
voil encore de quelques degrés, et parvenoit bientôt à son 
maximun , où elle devenoit quelque temps stationnaire, et par 
conséquent facile à mesurer avec précision. Elle étoit alors in- 
diquée par le thermomètre horizontal, qu'on avoit soin d’en- 
foncer assez avant dans l'huile pour que toute la colonne de 
mercure y plongeät : au même instant, on fermoit au chalu- 
meau la pointe eflilée de la partie extérieure du tube à air, et 
Jon notoit la hauteur barométrique. Cela fait, on retiroit le tube 
et on le ‘lransportoit dans une chambre séparée dont la tempe- 
rature étoit à peu près invariable; on le placoit verticalement, 
el de manière que sa pointe plongeàt dans un bain de mercure 
parfaitemient sec. En cassant cette pointe, le mercure remontoit 
jusqu’à ce que l'équilibre füt établi avec la pression extérieure : on 
laissoit alors le tube dans cette situation pendant un temps suf- 
fisant pour qu'il prit exactement la température de la chambre, 
qu'indiquoit ua thermomètre très-sensible suspendu à peu de 
distance. Lorsque cet équilibre de température s’étoit produit , 
on mesuroit, à l’aide d’une échelle verticale armée d'un vernier, 
la hauteur de la colonne souleyée dans le tube. On observoit 
en même temps la hauteur barométrique, et la différence de 
ces hauteurs faisoit connoître l’élasticité de l'air froid : on re- 
tiroit alors le tube en prenant toutes les précautions nécessaires 
pour y relenir le mercure dont se composoit la colonne qui 
avoit été soulevée. On pesoit le tube et le mercure qu'il con- 
tenoil; on pesoit ensuite ce même tube successivement vide et 
enlièrement plein de mercure; retranchant du résultat de cette 
dernière pesée ceux des deux premières, on avoit les poids de 
deux volumes de mercure égaux, l’un au volume de l'air chaud, 
l'autre au volume de l'air froid; et de ces poids on concluoit 
les volumes eux-mêmes, qu'on ramenoit ensuite à ce qu'ils au- 
roient été sous la même pression , puisqu'on connoissoit l’élas- 
ticité de l'air froid qui avoit été mesurée comme nous l'avons 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 519 
indiqué, ét celle de l'air chaud, qui étoit égale à la pression de 
l'atmosphère à l'instant où l'on avoit fermé le tube (r). 

Afin de faire mieux apprécier le degré de confiance que mé- 
ritent les résultats auxquels nous avons été conduits, il ne sera 
pas inutile de donner quelques détails relatifs aux précautions 
que nous ayons prises dans chaque expérience. 


L’un des plus grands obstacles que l’on rencontre dans ce 
genie de recherches, provient de la difficulté d’établir une unt- 
ormilé parfaite de température dans une grande masse liquide 
de deux ou trois cents degrés plus chaude que l'air ambiant. 
Cette condition peut être rigoureusement satisfaite, lorsque la 
température à laquelle on opère est, par exemple, celle de l'ébul- 
lition du liquide qu'on emploie; car alors cette température est 
nécessairement fixe; mais dans tout autre cas, la marche plus 
ou moinsrapide de l’échauffement ou du refroidissement des divers 
points de la masse, s'oppose à ce que l'uniformité nécessaire ait 
lieu. Cependant nous croyons que la disposition de notre ap- 
pareil remédie en grande partie à ce genre d’inconvénient; et 
cela tient, d'une part, à ce que la cuve de cuivre étant enfoncée 
dans le fourneau, compose avec lui une masse assez considérable 
qui se refroidit lentement, surtout lorsqu'elle est près de son 
maximum de température; et, en second lieu, à ce que le liquide 
étant continuellement agité, la chaleur doit s'y distribuer plus 
également. Au reste, pour lever tous les doutes que l'on auroit 
pu conserver à cet égard, nous avons plongé dans celle cuve 


D 


(1) Toutes les expériences faites d’après la méthode que nous venons d'in- 
diquer , ont été calculées au moyen de la formule suivante : 

Appelant P le poids de la masse de mercure dont le volume est égal à celui 
de l'air chaud ; Ê la température de cet air, comptée sur le thermomètre à 
mercure ; H son élasticité; P’, T°, H' les quantités analogues pour l'air froid. 
Désignons par V ce que devient un volume d'air, égal à l’unité, à la tem- 
pérature o°, et qui se dilate sans changer de pression jusqu'à la température dE 
et représentant enfin par d la dilatation moyenne du verre entre T° et T°, on a 


2 PHO1 + d(T —T)] (G + 0,003575 T”). 
GE PH 7 
on conclut facilement de là qu'un thermomètre à air, dont les indications se 
roient corrigées de la dilatation du verre, marqueroit pour une température E 
du thermomètre à mercure , un nombre de degrés égal à 
PH 
P'x 


11 


C1 + d(T —"1)](66,67 + T') — 266,67. 


520 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


deux thermomètres situés horizontalement à la même hauteur; 
et, en opérant d’ailleurs comme dans nos expériences ordinaires , 
DOUS n'avons jamais observé plus de deux ou trois dixièmes-de 
degré d'écart entre les deux instrumens. 

. Du reste, en supposant même que tousles points de la couche 
liquide qui environne le tube à air, ne fussent pas exactement 
à la même température, l'erreur ne seroit pas aussi grande 
qu'on pourroit le croire d’abord; car, par suite de la disposition 
de l'appareil, la boule du thermomètre répond à peu près au 
milieu de la longueur du tube, et, par conséquent, cet instru- 
ment doit, dans tous les cas, indiquer une température peu 
éloignée de la moyenne de celles des différentes parties du 
tube. C’est même cette considération qui nous a délerminés à 
prendre un tube cylindrique, de préférence à tout autre vase 
de forme différente. Nous rappellerons de plus, à l’occasion de 
ce que nous venons de dire, la nécessité où l’on est, pour 
connoître les véritables indications du thermomètre, de l’enfoncer 
dans le liquide de manière que la colonne de mercure y plonge 
entièrement. Cette précaution , qui paroït minulieuse dans les 
basses températures, ne doit pas être omise lorsqu'il s’agit de 
températures élevées; car alors la colonne de mercure contenue 
dans la tige, éprouve un accroissement de longueur très-sen- 
éible, Ainsi nous avons remarqué qu’à la température de 300°, 
par exemple, il y avoit souvent plus de 12° de différence entre 
les indications d'un même thermomètre, selon que l'instrument 
tout entier, ou la boule seulement, plongeoit dans le liquide. 
On pourroit, à la vérité, d’après la connoissance de la dila- 
tation du mercure, estimer l'erreur _que l’on commet en ne 
plongeant le thermomètre qu’en partie; mais l'impossibilité de 
juger exactement la température de la tige, entraïinant dans des 
erreurs d'autant plus graves que la correction porte sur des 
nombres plus grands, il nous a toujours paru préférable de placer 
les thermomètres horizontalement. 

Quoique les expériences exécutées selon le procédé que nous 
venons de décrire, aient loujours offert un accord remarquable 
dans leurs résultats, nous avons cherché à les vérifier d’une 
autre manière. 

Dans ces nouvelles expériences, on s’est servi d’un tube à 
air d’une beaucoup plus grande capacité que dans les premières, 
et placé de la même manière; seulement le tube très-étroit qui 
Jui étoit soudé se recourboit à sa sortie de la cuve, et se pro- 
longeoit verticalement dans une longueur d'environ cinq dé- 


cimètres : 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 527 


eïmètres; on chauffoit en prenant toutes les précautions dont 
nous avons parlé; et lorsqu'on avoit atteint la température sta- 
‘tionnaire, et qu’ou avoit noté la hauteur barométrique , on por- 
toit sous l'extrémité inférieure du tube vertical une capsule pleine 
de mercure bien sec; on laissoit refroidir le tube jusqu'à ce que 
l'huile eût à peu près repris la température de l'air : pendant 
toute la durée de ce refroidissement, le mercure montoit dans 
le tube vertical, et ne s’arrétoit que lorsque l'air intérieur étoit 
complètement refroidi. La force élastique de cet air étoit alors 
égale à la pression extérieure de l'atmosphère, diminuée de la 
hauteur de la colonne soulevée; celle de l'air chaud étoit égale 
à la hauteur barométrique observée à l'instant où la température 
éloil stationnaire ; on pouvoit donc calculer, au moyen de la loi 
de Mariotte, quelle auroit été la dilatation de l'air s’il eùt tour 
jours conservé la même élasticité. 


Pour rendre ce procédé complètement exact, il a fallu d’abord 
tenir compte de la dépression capillaire que le mercure éprouve 
dans le tube très-étroit où il s'élève; cette dépression avoit 
été mesurée d'avance, et l'on avoit eu soin de faire choix 
d'un tube assez bien calibré pour qu'elle ne variàt pas sen- 
siblement. 


En second lieu, le volume de l'air ne restoit pas exacte- 
ment le même; la portion comprise dans le tube vertical ren- 
troit en partie dans le grand lube, à mesure que la colonne 
de mercure s’élevoit, et cette portion d'air ne changeoïit pas 
sensiblement de température. Nous avons dû calculer l'influence 
de ces deux causes, et faire subir à nos observations la cor- 
rection qui y étoit relative. Cette correction, qui dépend du 
rapport de la capacité du grand tube à celle du petit, se déduit 
d’ailleurs d’un calcul trop simple, pour qu’il soit nécessaire de 


l'indiquer (1). 


(:) Nous nous bornerons encore à rapporter la formule qui a servi à calculer 
ces nouvelles expériences. 

H y représente la hauteur du baromètre extérieur qui sert à mesurer la 
force élastique de l'air chaud; T la température de cet air, indiquée par le 
thermomètre à mercure; T’ celle de l'air froid ; H’ la hauteur de la colonne 
soulevée après le refroidissement, cette hauteur étant corrigée de la dépression 
capillaire; A la hauteur totale du tube vertical; r le rapport entre la capacité 
de ce tube et celle du grand tube horizontal; d la dilatation moyenne du 
verre entre T'° et T°; V désigne encore ce que devient un volume d'air égal à 
Funité à la température o°, et se dilatant , sans changer de pression, jusqu’à le 


Tome LXXXVII. NOVEMBRE an 1818. Ss 


322 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Non-seulement les expériences faites d’après ce nouveau pro- 
cédé ont confirmé tous les résultats que le premier nous avoit 
fournis, mais elles nous ont encore appris que la loi de Mariotte 
se vérifie à toutes les températures , en sorte que les changemens 
d’élasticité que la chaleur produit dans un gaz dont le volume 
reste constant, sont assujélis aux mêmes lois que les change- 
mens de volume de ce fluide, quand sa pression ne varie pas. 

Nous allons maintenant rapporter les déterminations moyennes 
déduites d’un très-grand nombre d'expériences faites par chacune 
des deux méthodes. Ces déterminations se trouvent rassemblées 
dans le tableau suivant, qui comprend l'échelle complète du 
mercure depuis sa congélation jusqu’à son ébullition, c’est-à-dire, 
un intervalle d'environ quatre cents degrés, 


TABLEAU N° I. 
RENE RTE OR RE CT EE VS EE TS QUE NP ONE TUE ISLE EVE TROIE AREAS GC LP RENE EEE ETES 


EL PERTE LÉ PNEUS DE (des indi Se EE NS à air 
indiquées par le thermomètre d’une ) | A cor rés AAA 
à mercure. même masse d’air. ” du verre. 
En APR AE PTT PSTEUT ER CHERE ———— | — — —  —— - —— 
— 36° | 0,8650 — 36°. 
© 1,0000 a 
100 1,3750 100 
150 1,5576 148,70 
200 1,7589 197,05 
250 1,9189 | 245,05 
: 300 | 2,0976 292,70 
Ébullition du mercure 560 | 2,5125 | 350,00 


Les nombres contenus dans la seconde et la troisième co- 
lonne, ont été corrigés de la dilatation du verre, que nous 
ferons bientôt connoître (1). 


température T° :ona 
y DS DES: DORE (1H 0,00575.1). 


—H(s ne — —"# 


on en conclut aussi qu'à Ja température T° du thermomètre à mercure, le 
thermomètre à air, corrigé de la dilatation du verre, indiqueroit- un nombre 
de degrés égal à ; 

H D(T — T”)] ‘266,67 + T” 
nee = A — 266,67. 
(= #)(: +) 7H 


(1) La crainte de donner à ce Mémoire une trop grande étendue, ne nous 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 323 


Il existe une très-grande discordance entre les nombres in- 
diqués par divers physiciens , pour le point d’ébullition du mer- 
cure sur sa propre échelle. Gela vient en partie du soin plus 
ou moins grand que chaque observateur a mis dans la con- 
struction de ses instrumens, et surtout de l’inexactitude de la 
correction qu'on est obligé de faire pour la partie de Ja tige 
qui n'est pas plongée dans le liquide. Le moyen dont nous 
avons fait usage et qui nous a fourni le résultat rapporté dans 
le tableau précédent, dispense de cette correction. Au lieu de 
mesurer immédiatement l'augmentation de volame d’une masse 
constante de matière , comme on le fait dans les thermomètres 
ordinaires , nous avons déterminé la perte de poids qu'épreuve 
une masse de mercure capable de remplir un vase de verre 
à o°, lorsque ce vase est complètement submergé dans le mer- 
cure bouillant. Connoissant d’ailleurs la dilatation apparente du 
mercure dans le verre pour les 100 premiers degrés, on peut, 
par un Calcul très-simple, trouver la température correspon- 
dante sur le thermomètre à mercure dont la tige seroit à Ja méme 
température que la boule (1). Pour empêcher le liquide contenu 
dans le vase d'entrer en ébullition, on avoit eu la précaution 
de le terminer par un tube vertical très-étroit, de 6 centimètres 
de longueur. La colonne liquide qu’il contenoit ne faisoit pas 
la dix-millième partie de la masse totale; mais par la pression 
qu'elle exercoit dans l’intérieur du vase, elle s’opposoit com- 
plètement à la formation des vapeurs, Il est presque. inutile de 
dire qu'on avoit pris toutes les précautions nécessaires pour ex- 
pulser complètement la moindre trace d'air ou d’hunudité. 

La température correspondante du thermomètre à air a été 
calculée par un moyen analogue à celui que nous avons con- 
slamment employé dans nos expériences sur la dilatation des 
gaz. Le nombre rapporté dans le tableau précédent, est la moyenne 
de quatre résultats qui ne diffèrent pas entre eux d’un degré. 

D'après la belle observation de M. Gay-Lussac, que tous les 


permet pas d'entrer dans les détails relatifs à chaque expérience particulière. 
Nous nous contenterons donc , dans l'exposition de notre travail, de faire con- 
noître les résultats définitifs, en supprimant les déterminations partielles et les 
calculs intermédiaires qui y conduisent. 

(1) Soit P le poids du mercure qui remplit le vase à o°; p le poids de la 
portion de ce liquide qui sort du vase quand on le porte de 0° à {°; on a 


Ss 2 


524 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


fluides élastiques se dilatent précisément de la même quaniité 
entre o° et 100°, il étoit bien probable que la même uniformité 
s’observeroit dans les températures élevées ; el que les nombres 
rapportés précédemment pour l'air conviendroient à tous les gaz; 
cependant, pour ne rien laisser d’incertain dans une matière 
aussi importante, nous avons fait une expérience sur le gaz 
hydrogène, qui, comme l’on sait, diffère le plus des autres 
dans quelques-unes de ses propriétés physiques. Le résultat 
s’est trouvé compris entre les extrêmes de ceux que nous avions 
obtenus pour l'air (1). On peut donc établir en principe que tous 
les gaz se dilatent absolument de la même manière et de la 
même quantité pour des changemens égaux de température. 
Les déterminations que nous venons de rapporter sufliroient, 
s'il ne s’agissoit que de connoître le volume d’un gaz à une 
température quelconque comptée sur le thermomètre à mercure, 
ou réciproquement ; mais le but que nous nous étions proposé, 
de comparer la marche des dilatations du mercure et de l'air, ne 
se lrouve pas encore complètementatteint. En effet , tous lesther- 
momèlres à liquides n’indiquent que la différence d'expansion 
du fluide et du vase qui le contient; or, ces différences ne 
penses être proportionnelles aux expansions absolues de ce 
iquide , que dans le seul cas où les accroissemens de volume 
des deux corps suivroient idenliquement la même loi. Si, par 
exemple, la matière de l'enveloppe se dilatoit suivant une loi 
moins rapide que le fluide qu’elle renferme , il est évident que 
Ja marche du thermomètre paroitroit croissante, lors même que 
celle du liquide seroit uniforme. Dans le cas contraire, il s’éta- 
bliroit une compensation partielle et inégale, qui troubleroit en- 
core l'exactitude des comparaisons. Il étoit donc indispensable 
de chercher à connoiïtre les variations que subissent , dans les 
températures élevées, les dilatations absolues de l’un des deux 
corps qui entrent dans la construction du thermomètre à mercure. 
Lorsque l’on considère toutes les difficultés inhérentes à la 
mesure de l’expansion des solides, quand on ne dépasse même 
pas le terme de l’eau bouillante, on est effrayé des obstacles 
bien autrement multipliés qui accompagneroïient indubitablement 
cette même détermination dans les hautes températures. Après 


(1) Le volume de l'hydrogène étoit 1 à zéro, nous l’avons trouvé égal à 
2,1003, à la température de 30° sur le thermomètre à mercure. Les valeurs 
extrêmes du volume occupé par l'air dans les mêmes circonstances sont 2,0948 
Æi 2,1027. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 325 


un mûr examen de toutes les ressources expérimentales que 
lon pouvoit espérer de trouver, l'incertitude d’un succès tel 
que nous le desirions, et l'énorme complication des appareils 
qu’il auroit fallu employer , nous ont déterminés pour la mesure 
directe des dilatations absolues du mercure. C’est l'objet du cha- 
-pitre suivant. 


De la Dilatation absolue du Mercure. 


La connoissance de la dilatation absolue du mercure est de- 
venue d’une nécessité indispensable, depuis que l’on a senti la 
possibilité de mesurer exactement les hauteurs par le moyen 
du baromètre. Cette donnée n’est pas moins utile dans un grand 
nombre d'expériences physiques : aussi est-il bien peu de dé- 
terminations de ce genre qui aient douné lieu à tant de re- 
cherches; mais, malgré toutes les précautions que les observa- 
teurs ont dù prendre pour apporter, dans cette mesure, l'exaç= 
titude dont ils sentoient toute l'importance, on trouve peu 
d'exemples d’une plus grande discordance dans les résultats : en 
voici quelques-uns. 


Dilatations absolues du Mercure. 


De 0° à 100°. 


Dalton sad ee Deluere el es LEE 
Lord Charles Cavendisb, + !| Le général Roy. . . . . + 
Shuckburgh. . . + : .- 5; | Lalande et Delisle.. . .: = 

57 


Laplace et Lavoisier (1). . # | Dom. Casbois,, . . . . 
Haellstroem.. + : . - «+ => | 


La plupart de ces déterminations ont été calculées, en ajou- 
tant à la dilatation apparente du mercure dans le verre, la di- 
latation propre de ce dernier; et comme on a été pendant long- 


(1) Cette détermination dont on fait usage en France depuis plusieurs années, 
est généralement attribuée à MM. Lavoisier et Laplace. Nous nous étions bien 
aperçus qu’elle ne s'accorde point avec le nombre que Lavoisier rapporte dans 
ses Mémoires, tome I, pag. 310, pour la dilatation apparente du mercure dans 
le verre; mais nous avions pensé qu’elle resultoit d'un travail postérieur et 
inédit. Depuis la rédaction de notre Mémoire, rous avons appris que ces il 
lustres savans n'ont point entrepris de nouvelles expériences sur cet objet, 
mais quil s’est glissé une erreur dans le calcul des 6bseryations; de sorte que 
le véritable coefficient déduit de leurs mesures est 2 au lieu de —2— ; il 
s'éloigne alors très-peu de celui que nous rapportons à Ja fin de ce chapitre, 
Cet accord est une nouvelle garantie de l'exactitude de nos observations, 


526 JOURNAL DE PHYSIQUE, DÉ CHIMIE 


temps dans une grande incertitude sur cette dilatation , les 
résultats précédens devoient nécessairement s’en ressentir. 
Deluc, Gasbois et le général Roy, ont essaye de mesurer di- 
rectement la dilatation réelle du mercure par l’alongement de 
la colonne barométrique , produit par une variation connue de 
température. Les résultats obtenus par ce procédé sont beaucoup 
plus inexacts encore. Il seroit facile d'en assigner les raisons, 
en discutant les méthodes employées par chacun dés physiciens 
que nous venons de citer; mais pour cela il faudroit entrer 
dans des détails qui pourroient devenir fastidieux : d’ailleurs, 
les travaux que nous venons de rappeler ne sont relatifs qu'à 
des températures au-dessous de +00°; et c'est précisément au- 
delà de ce terme que nous avions besoin de connoître la di- 
latation réelle du mercure. Il devenoit donc nécessaire d’avoir 
recours à de nouveaux procédés : celui que nous allons faire 
connoître nous paroit susceptible de toute la précision desirable. 


Il est fondé sur ce principe incontestable d'hydrostatique, que 
lorsque deux masses liquides communiquent entre elles par un 
tube latéral, les hauteurs verticales de leurs surfaces sont pré 
cisément en raison inverse de leurs densités. Si donc on pouvoit 
parvenir à mesurer exactement les hauteurs de deux colonnes 
de mercure contenues dans les branches d'un siphon de verre 
renversé, en en supposant l’une entourée de glace fondante, par 
exemple, tandis que l’autre seroit portée à une température 
quelconque bien connue, on en déduiroit facilement les dila- 
tations cherchées. 

En effet, si À et L! désignent les hauteurs verticales de ces 
deux colonnes produisant des pressions égales aux températures 
t et l', on devra avoir, en appelant d et d' les densités corres- 
pondantes , 

kd= h'd'; 


or, d et d' sont en raison inverse des volumes v et s’ qu'occu- 
peroit une même masse du liquide, en la portant successive- 
ment aux températures £# et {'; on a donc 


/ 
if 


p —=V % H 
d'où l'on tire enfin, pour le coeflicient moyen de la dilatation 
entre & et £”°, 
h—h . 
hÇE —t) 


ÈŸ D'HISTOIRE NATURELLE. 327 


Tout se réduit donc à la mesure exacte des tempéralures et 
des hauteurs des colonnes; et il est presque inutile de dire qu'on 
obtient ainsi la dilatation absolue du liquide, puisque la forme 
des vases n'influant en rien sur Ja pression des liquides qui y 
sont contenus, leurs dilatations ne peuvent pas l’affecter da- 
vautage. 

Boyle est le premier qui ait indiqué l'usage qu'on pourroit 
faire de ce principe pour comparer entre elles les densités des 
liquides. Plusieurs physiciens ont pensé depuis à l'appliquer à 
la mesure des dilatations, et il est probable que cette mé- 
thode très-rigoureuse seroit d'un emploi facile dans les basses 
tempéralures; mais quand on veut la mettre en pratique pour 
les températures de 500° et au-delà, elle ne laisse pas d'être 
très-laborieuse. 

Afin de rendre plus elaire l'explication de l'appareil que nous 
avons employé, nous en avons dessiné une perspective (pl. 1, 
fig. 1), dans laquelle on ne voit que les pièces essentielles, 
le reste pouvant être facilement suppléé. 

Le tube recourbé qui contient le mercure se compose de 
deux branches verticales AB et AB, communiquant ensemble 
par un tube horizontal BB’ exactement dressé, et conservant, 
dans toute son étendue, la même épaisseur de verre et le même 
diamètre intérieur. On avoit eu soin de constater par un essai 
préliminaire , que la pression se transmettoit sans aucun obstacle 
d’une des colonnes à l’autre par le tube horizontal, et que le 
frottement du mercure contre ses parois n’empêchoit pas le niveau 
de se rétablir lorsque l'équilibre avoit été troublé. 

Chacune des deux branches verticales est formée, ainsi qu’on 
le voit sur la figure, par l'assemblage de deux tubes de calibres 
très-différens soudés l’un à l’autre. En donnant au tube infé- 
rieur un petit diamètre, on diminue beaucoup la masse totale 
du mercure; et en le terminant par un tube plus large , on se 
garantit de l'erreur que pourroit occasionner l’inégalite de l'effet 
capillaire due à la différence de température des deux colonnes. 

Le tube horizontal repose, dans toute sa longueur, sur une 
forte barre de fer MN, en forme de T, qui est elle-même ap- 
puyée solidement par ses trois pieds sur une table de bois très- 
épaisse. La face supérieure de la barre a été dressée avec soin, 
<t porte deux niveaux à angle droit qu'on règle à l’aide des vis 
situées aux quatre angles de la table. 

Près de chacun des tubes verticaux s'élève un montant de 
fer portant un anneau à clavette qui enveloppe le tube, etle 


328 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


retient ainsi dans une position fixe. (Afin de ne pas surcharger 
la figure, on s’est contenté d'indiquer le montant situé à côté 
du tube AB. Il est terminé, comme on le voit, par une petite 
pièce arquée de fer, dont la pointe R est destinée à servir de 
repère.) 

Le tube recourbé étant assujéti dans toutes ses parties, il 
resloit à disposer l’appareil de manière à communiquer à chacune 
des deux colonnes la température convenable. Rien n’étoit plus 
simple pour la colonne AB, qu'on vouloit entretenir à zéro. 
On y est parvenu en l’entourant d’un large cylindre de fer- 
blanc mastiqué dans le bas autour de la barre de fer, et qu’on 
remplissoit de glace pilée jusqu'à la hauteur du mercure dans 
le tube. On avoit seulement ménagé dans ce cylindre une petite 
fenétre F, qu'on ouvroit pour dégager un peu de glace, afin 
d’apercevoir le sommet de la colonne de mercure au moment 
de l'observation. Des thermomètres très-exacts, plongés à dif- 
férentes époques dans cette colonne , nous ont prouvé qu'elle 
toit toujours rigoureusement à zéro. 

La partie de l'appareil qui devoit contenir le bain destiné à 
échaufler la colonne A'B/ présentoit, au contraire, de grandes 
difficultés d'exécution. Une boîte dont le fond auroit fait corps 
avec les parois ne pouvoit pas être employée, puisqu'il n’y 
auroit pas eu de moyen d'y introduire la colonne A'B’. Il falloit 
de plus, que la barre MN püt traverser celte boîte, et qu'on 
püt remplir avec un lut imperméable les petits intervalles que 
Ja barre laisseroit entre elle et les parois échancrées. Pour sa- 
tisfaire à toutes ces conditions , nous avons fait construire un 
cylindre de cuivre rouge, dont le fond peut s’enlever à volonté : 
il est terminé, dans le haut, par un rebord sur lequel s’ap- 
plique le couvercle; il porte en outre vers sa base deux ap- 
pendices opposés RR', SS/, ayant tous deux la forme: de 
demi-cylindres horizontaux, dans l’intérieur desquels passe la 
barre MN. On prendra une idée exacte de la forme de l’auge 
dans la figure 2, qui en représente la section faite par un plan 
vertical parallele à la direction des appendices. La forme du 
fond est indiquée à part dans la figure 3; il se réunit au corps 
de la boîte, à l’aide d’un grand nombre de vis d’acier serrées 
avec la plus grande force. Une semblable pression ne suflisant 
pas encore pour empêcher l'écoulement du liquide, on a in- 
terposé entre les surfaces contiguës des lames minces de carton. 

L'avantage des appendices est de permettre de luter à une 

assez grande distance du feu, Malgré cette précaution, le lut 


s'échaufle 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 329 


s'échauffe encore , et finiroit par se détacher si l'on ne prenoit 
pas le soin de le refroidir par un courant d’eau. 

La boite ainsi construite a été établie solidement dans un 
fourneau en la maintenant de toutes parts avec des traverses de 
fer. C’est ce fourneau qui, dans la perspective, est censé coupé 
par le milieu, afin qu'on puisse voir les pièces situées dans 
son intérieur. 

Nous terminerons cette description préliminaire ‘en disant que 
le cylindre de cuivre est rempli d’une huile fixe qu’on échauffe 
peu à peu jusqu’à la température à laquelle on veut faire l'ob- 
servation, On ferme ensuite toutes les issues du fourneau. La 
chaleur se répand alors uniformément dans toute la masse, et 
la température demeure stationnaire pendant un temps suflisant 
pour prendre toutes les mesures dont on a besoin; mais pour 
que rien n'altère l'exactitude de ces déterminations, il est né- 
cessaire que la boîte de cuivre soit ioujours entièrement pleine 
d'huile, et que la colonne chaude de mercure se termine à 
une hauteur très-petite au-dessus du couvercle. On remplissoit 
aisément celle seconde condition en ajoutant ou en retirant , à 
l'aide d’une pipette, une quantité convenable de mercure, quel- 
ques instans ayant l'observation. Quant à la première, elle se 
trouve satisfaite en remplissant l’auge à froid, et en ménageant, 
dans le haut du vase, un tuyau LQ, dont l’orifice Q est de 
niveau avec la face inférieure du couvercle, et par lequel l'huile 
peut s’écouler en se dilatant. 

Passons maintenant à la mesure des températures et des hau- 
teurs des colonnes. 

Le bain d'huile contient deux thermomètres , l’un à mercure, 
analogue à celui que nous avons déjà eu occasion de décrire, 
et dans lequel la température se calcule en comparant le poids 
du mercure sorti de l'instrument , à celui qui le remplit à zéro. 
Telle est la sensibilité de celui dont nous nous sommes servis, 
qu'un échauffement d’un degré faisoit sortir environ un déci- 
gramme de mercure. Son réservoir DE, partout de même dia- 
mètre, et s’enfoncant dans le bain à la même profondeur que 
la colonne A'B', indiquoit exactement la température moyenne 
de cette colonne. 

Le second est un thermomètre à air dont le réservoir cy- 
lindrique D'E’, placé comme celui du précédent, est terminé 
par un tube très-fin E'G'H, recourbé horizontalement en 
dehors du fourneau. Ce tube se réunit en H' à un tube ver- 
ical H'K' un peu plus large et bien calibré , qui plonge dans 


Tome LXXXVII. NOVEMBRE an 1818. TE 


330 | JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


un bain de mercure K/. Pour régler ce thermomètre, on a 
d’abord chauffé le bain presque à lébullition de l'huile, en 
laissant ouverte l'extrémité K’ du tube. Lorsque tout l'air ex- 
cédant a été chassé par la dilatation , on a plongé l'orifice K'’ 
dans une cuvette pleine de mercure sec. Par le refroidissement 
de l'huile, le mercure est peu à peu remonté dans le tube. C’est 
en mesurant au zzaximum de température la hauteur de cette 
colonne et celle du baromètre, que l’on connoissoit l’augmen- 
tation d'élasticité de l'air, d’où par un calcul très-simple, on 
déduisoit la température du thermomètre à air. 1l est à peine 
nécessaire d'ajouter que le tube avoit été desséché avec soin, 
et que, dans chaque mesure , on faisoit la correction relative à 
la dépression capillaire. 

Les indications de ce thermomètre n’ajoutent rien à la pré- 
cision de celles qui sont fournies par le thermomètre à mercure; 
mais nous n'avons pas laissé échapper cette occasion de com- 
parer encore la marche de ces deux instrumens. Les résultats 
déduits de cette comparaison sont entrés dans la détermination 
des moyennes inscrites dans le tableau n° 1. 

Il nous reste maintenant à faire connoitre l'espèce de micro- 
mètre dont nous nous sommes servis pour mesurer la hauteur 
des colonnes. Cet instrument (fig. 4) se compose d'une règle 
épaisse de cuivre AB, le long de laquelle glisse à frottement 
doux une pièce de même métal MNPRS, portant, à ses deux 
extrémilés R et S, deux collets dans lesquels tourne une lu- 
nette micrométrique OO’, munie, à son foyer, d'un fil hori- 
zontal. A la lunette est suspendu un niveau très-sensible à bulle 
d’air, dont le tube gradué sert à régler l'axe optique. Cette pièce 
de cuivre MNPRS, est susceplible de deux mouvemens, l'un 
rapide en desserrant la vis latérale C; l'autre très-doux, produit 
par la vis de rappel D. Tout l'instrument tourne enfin autour 
d'un axe vertical qui repose sur un plan triangulaire de cuivre 
épais, muni d'une vis à chacun de ses sommets. 

La construction de cet instrument permet, comme on le voit, 
de mesurer la différence de hauteur de deux points qui ne sont 
pas silués dans la même verticale. Il faut, pour cela, après 
avoir dirigé la lunette sur l’un des points, faire tourner l’axe 
pour la ramener dans l’azimuth de l’autre point. Ou la descend 
alors, ou on la monte d’une quantité convenable qui se mesure 
sur une échelle tracée sur la face opposée de la regle AB, à 
l'aide d’un vernier mu par la pièce MNPRS. L'emploi d’une 
vis micrométrique auroit peut-être été préférable, sans la promp: 


ET D'HISTOIRE NATURFELLF. 331 


ütude d'exécution qu’exigeoient nos expériences. Du reste, le 
vernier nous permeltoit d'apprécier les cinquantièmes de milli- 
mètre, et celle précision a paru suflisante. 

Pour donner à cet instrument toute l'exactitude desirable, il 
falloit que les plus petites différences de niveau fussent appré- 
Ciables, et que, dans le passage d’une observation à l’autre, 
la lunette conservät som horizontalité , ou du moins qu’on püt 
tenir compte de ses dérangemens. On a satisfait à la première 
condition en donnant un grossissement suflisant à la lunette; 
quant à la seconde, le soin particulier avec lequel le micro- 
mètre a été fait, et la solidité de l'appui sur lequel il reposoit 
et qui étoit independant du reste de l'appareil, auroiïent pu la 
faire regarder comme remplie : néanmoins, on avoit mesuré 
d'avance, pour la distance à laquelle pointe la lunette, à quelle 
différence de hauteur répondoit un changement d’inclinaison 
égal à une partie du niveau. Cette donnée suflisoit pour corriger 
les observations dans lesquelles le niveau se dérangeoit. 

Les procédés dont on se sert pour régler de semblables ins- 
trumens, sont trop connus pour qu'il soit nécessaire de les 
rappeler. On sait que, par des retournemens convenables de 
la lunette, tant sur elle-même que sur ses collets, et par des 
observations dans les différens azimuths où on peut la placer 
en tournant l'axe de l'instrument, on parvient à rendre cet 
axe vertical, et l’axe optique de la lunette horizontal. 

Revenons maintenant à l’appareil de la dilatation : le micro- 
mètre étoit placé sur un plan de marbre T, porté par un massif 
de maçonnerie, L/axe de l'instrument se trouvoit à égale distance 
des centres des tubes AB et A'B', et du repère R; on pouvoit 
donc mesurer immédiatement les excès de hauteur de ce point 
au-dessus des sommets des colonnes de mercure, c’est-à-dire 
les hauteurs r—} etr—}/, en appelant r la hauteur absolue du 
repère. Afin de nous assurer que-la réfraction au travers des 
tubes ne produisoit aucune déviation dans le sens vertical, nous 
avons placé, au centre de chacun d'eux, des mires sur lesquelles 
nous avons dirigé la lunette de notre micromètre, et nous 
avons reconnu que la coïncidence du fil n’étoit nullement trou- 
blée, soit qu'on enlevât le tube, soit qu'on le retournät. 

Il ne restoit plus alors qu’à connoiître r. Or, cette hauteur 
restoit constante dans toutes les expériences, puisque la tige 
qui porte le repère étoit toujours entourée de glace, On s’est 
servi, pour la mesurer, d’une règle verticale graduée, dont le 
gro étoit placé sur la barre de fer MN. Cette règle, construite 


Et 


352 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIT 


pour un autre usage, avec un très-grand soin, a donné Îes 
hauteurs dont il s’agit, à un dixième de millimètre près ; mais 
les hauteurs mesurées au - dessus de la barre MN, sont trop 
grandés; cär L, k et r doivent être comptées à partir de l’axe 
da tube horizontal ; il faut donc retrancher de la hauteur in- 
diquée par la règle, la moitié de l'épaisseur totale du tube. 

Pouf faire juger du degré d’exactitude que comportetit ces 
diverses opérations, rapportons une des mesures prises à 100°. 
La hauteur du repère au-dessus de l’axe du tube horizontal étoit 
de 0",58250 ; les hauteurs r—h, r=—h', étoient respectivement 
de 0”,03855, et de 0",02875; ainsi k=0,54305 et X'—hk=0",00980; 
et par suite le coeflicient moÿen de la dilatation absolue du 
mercure .entre 0° et 100=-%: On voit par-là qu’une erreur 
de deux on trois dixièmes de millimètre sur la mesure de r 
ne produiroit qu’une incertitude de deux ou trois unités sur le 
dénominateur de la fraction précédente. Ainsi, par un effet 
particulier de la disposition de notre appareil, celle des mesures 
qui comporte le moins de précision ne pouvoit jamais occa- 
sionner que des erreurs tout-à-fait négligeables; la barre de fer 
se seroit même un peu dérangée par l'action du feu (quoiqu’on 
eût soin de la rendre toujours horizontale par ses niveaux), que 
cet effet n’auroit eu encore que très-peu d'influence sur le ré- 
sultat final. 

C’est par là que notre appareil l'emporte de beaucoup en 
exactitude et en simplicité sur les appareils de dilatation des 
solides. En effet, dans ceux-ci, le moindre dérangement du point 
fixe, dans la durée très-longue d’une expérience, n'affecte pas 
seulement la longueur totale de la règle; la dilatation elle-même 
s'en trouve augmentée ou diminuée, ce qui entraine dans les 
erreurs les plus graves. On voit, au contraire, que lors même 
que, dans nos expériences, les hauteurs et ' se trouveroient 
affectées par l'effet dont nous parlons, la différence h— }! qui 
mesuré la dilatation ne le seroit pas; car il seroit trop invrai- 
semblable de supposer que l'instrument se dérange pendant le 
temps très-court qui s'écoule entre les observations successives 
de la colonne chaude et de la colonne froide. 

Nous avons rassemblé, dans le tableau suivant, les résultats 
moyens d’un grand nombre d'observations faites à l’aide du pro- 
cédé que nous venons de décrire. La première colonne contient 
les températures telles qu'on les déduit de la dilatation de l'air; 
la seconde renferme les dilatations moyennes absolues du mer- 
cure entre la glace fondante etchacune dés températures indiquées 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 333 


dans la première colonne; enfin, la troisième comprend les 
températures qu'on obliendroit en supposant uniforme la dila- 
tation du mercure, ou, en d’autres termes, celles qu'indiqueroit 
un thermomètre construit avec ce liquide, en le renfermant dans 
un vase dont l'expansion suivroit la même loi que la sienne. 


TABLEAU N° 2. 
TEE Sd 


TEMPÉRATURES DILATATIONS MOYENNES | TEMPÉRATURES INDIQUÉES 
déduites de da dilatation absolues par la dilatation du mercure 
de l'air. du mercure, | supposée uniforme. 
CRE T Ro 
o? o o° 
1 

Le 555° 100 

300 | 535 | 204,61 

309 5 314,15 


De la Dilatation des Solides. 


Si l’on rapproche les résultats du tableau précédent de ceux que 
nous avons donnés dans le tableau n° 1, on apercevra facilement 
que les doutes que nous avions élevés sur la marche du ther= 
momètre à mercure n’éloient pas sans fondement, et que les 
lois de dilatation de l’enveloppe de cet instrument et du liquide 
qui y est renfermé sont très-nolablement différentes , quand on 
considère un grand intervalle de température. Lorsque le ther- 
momètre à air marque 300° sur son échelle, le mercure pris 
isolément indiqueroit 314°,15 sur la sienne , tandis que le ther- 
momètre ordinaire en accuse seulement 307,64. 

Les délerminalions précédentes offrent d'autant plus d'intérêt, 
qu’elles peuvent conduire à une connoissance très-exacte de la 
dilatation absolue de plusieurs corps solides. Il suflira, en effet, 
pour y parvenir, de mesurer la différence d’expansion du mercure 
et de chacun de ces corps. 

C’est d’abord ce qu'on peut pratiquer très-aisément sur le 
verre : Car la différence dont il s’agit n’est autre chose que la 
dilatation apparente du mercure dans un vase fait avec cette 
substance. Quoique celte dilatation ait déja été l’objet d’un assez 
grand nombre de déterminations , nous avons cru nécessaire 
de la prendre nous-mêmes, en y apportant tous les soins qu’exigent 
les expériences de ce genre. Nous nous sommes servis pour cela 
d’un tube d’environ 6 décimètres de longueur, et pouvant con- 
tenir à peu près 708 grammes de mercure. Ce tube étoit fermé 
à l'une de ses extrémités, et se lerminoit à l’autre par un tube 


334 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE. 
capillaire dont la capacité n’étoit qu’une fraction entièrement 
végligeable de celle du tube principal. g 

Tout l'appareil étant rempli de mercure et rigoureusement 
purgé d'air et d'humidité par des ébullitions réitérées, nous 
avons déterminé le poids du mercure qui en sortoit, en le 
portant de la température de la glace fondante à celle de l’eau 
bouillante. On appréciera toute l'exactitude de ce procédé, si 
l'on remarque que la portion de la masse qui ne participe pas 
à l’échaufflement est insensible, et que la position horizontale 
du tube permet de faire, à la température de l’ébullition de l'eau, 
la correction dépendante de la pression barométrique. 

Cette expérience, répétée cinq fois sur des masses différentes, 
nous a donné, pour la dilatation cherchée, des valeurs presque 
identiques dont la moyenne est rapportée ci-dessous. Nous 
n'avons trouvé aucune différence sensible entre les effets ob- 
servés dans les tubes de verre ordinaire lirés de diverses fa- 
briques, quels que fussent d’ailleurs leur calibre intérieur et 
l'épaisseur de leurs parois. 

Les valeurs de la dilatation apparente à 200° et à 300°, in- 
scriles dans le même tableau, ont élé déduites de la compa- 
raison précédemment faite des échelles du thermomètre à mer- 
cure et du thermomètre à air, 


TABLEAU N° 3. 
CR EE PEL SGEN CLONE NN CRE EE 


TEMPÉRATURES DILATATIONS MOYENNES | DILATATIONS | A 
déduites a s bsolue . . déduites 
ne ais RPParente à du verre, de la dilatation du verre, 
de la dilatation de l’air.| du mercure dans le verre. en volume. supposée uniforme. 

e | Re | 1 o 
100 6489 33700 100 

30e | 5378 36300 213,2 

so 6318 1 3290 352,9 


Les deux premières colonnes de ce tableau n’ont besoin d’au- 
cune explication. On y remarque une dilatation apparente du 
mercure dans le verre, entre o° et 100°, un peu moindre que 
celle de MM. Lavoisier et Laplace, qui l’ont trouvée de =. 
Nous nous attendions à une différence dans le sens où elle a 
lieu ; car, dans l’ouvrage même où cette dernière détermination 
est rapportée, les auteurs ont eu soin de prévenir qu'ils la 
croyoient irop forte, parce qu'ils n’avoient pas fait bouillir le 
mercure dans le vase dont ils s’éloient servis. La dilatation ab. 
solue du mercure qu'ils en avoient déduite devoit donc être trop: 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 355 


forte aussi, et c’est ce que confirme le résultat inscrit dans le 
tableau n° 2. La troisième colonne comprend les dilatations du 
verre obtenues par le moyen indiqué plus haut. Cette dilatation 
est croissante; mais on lui trouve entre 0° et 100° la valeur que 
MM. Lavoisier et Laplace lui ont reconnue par des mesures di- 
rectes. Enfin, la dernière colonne contient les indications cor- 
respondantes d’un thermomètre formé d’une simple lame de 
verre. On voit, par l’écart qui a deja lieu à 300°, combien la 
dilatation du verre s'éloigne d'être uniforme. 

Le même procédé paroitroït devoir servir pour la mesure de 
l'expansion du fer, en renfermant le mercure daus un vase 
de ce métal; des essais de ce genre ne nous ayant pas com- 
plètement réussi, nous avons eu recours au moyen suivant. Pans 
un tube de verre de 18 millimètres de diametre et de 6 dé- 
cimètres de longueur, et fermé par une de ses extrémités, nous 
avons introduit une baguette cylindrique de fer doux qui se 
irouvoit contenue dans l'axe du tube par quatre petites traverses 
d’une longueur presque égale à son diamètre. Après avoir soudé, 
à l'extrémité de cé tube, un autre tube capillaire, nous l'avons 
rempli entièrement de mercure que l'on a fait bouillir pendant 
un lemps suflisant pour chasser complètement l'air et l’humidité. 
En l’exposant ensuite à diverses températures et déterminant 
les poids de mercure qui en sortent, il est aisé d’en déduire 
la dilaiation du fer; car le volume sorti représente évidemment 
la somme des dilatations du mercure et du métal diminuée de 
la dilatation du verre. Pour faire le calcul, il est nécessaire de 
connoitre les volumes de ces trois corps à la température de 
la glace fondante : or, celui du fer s'obtient en divisant son 
poids par sa densité prise à zéro. On déduit de la même manière 
le volume du verre du poids du mercure qui le remplit à la 
même température : enfin celui du mercure est évidemment la 
différence des deux premiers. 

Le procédé que nous venons d'indiquer peut s'appliquer à 
d’autres métaux, en prenant seulement la précaution d’en oxider 
la Surface pour empècher l’action dissolvante du mercure. On 
concoit d’ailleurs que la couche d'oxide qui se forme ainsi est 
d’une épaisseur si petite qu’elle ne peut rien changer au résultat. 
Ce moyen nous a très-bien réussi pour le cuivre; et nous nous 
serions certainement décidés à l'essayer sur d'autres métaux, 
si le desir de vérifier nos résult:1s ne nous avoit pas déterminés 
à tenter l'emploi d'un procédé difiérent de celui que nous venons 
‘de décrire. 


336 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


On sait que la grande complication des appareils qui servent 
à la mesure de la dilatation des corps solides, provient de la 
nécessité où l'on est de rendre une partie du système abso- 
solument fixe; mais quand on connoiît avec précision l'expansion 
d'un de ces corps, on peut en déduire très-exactement celle 
de tous les autres, en étudiant la marche d’un pyromètre formé 
par l’assemblage de deux règles qu'il suflit alors de réunir in- 
variablement par une de leurs extrémités, condition qui peut 
être remplie avec une grande facilité, 

Des appareils de ce genre ont déjà été employés par Borda 
et par Deluc. Mais le premier n'ayant suivi la marche de son 
pyromètre que pour des variations de température peu étendues 
(ce qui suflisoit d’ailleurs pour l’objet qu'il avoit en vue), on 
ne peutrien conclure de ses expériences relativement à la question 
qui nous occupe. Quant à celles de Deluc, elles nous paroissent 
renfermer une cause d'erreur qui doit faire naître des doutes 
très-fondés sur l'exactitude des résultats auxquelsil est parvenu. 

L'instrument dont il s’est servi se compose de deux règles 
verticales, l’une de verre, l’autre de laiton , liées invariablement 
par leurs extrémités inférieures. On donne à ces règles des lon- 
gueurs réciproquement proportionnelles aux dilatabilités respec- 
tives des substances dont elles sont formées; la plus longue, 
qui est celle de verre, est retenue fixement par sa partie su- 
périeure; l'extrémité la plus élevée de la règle de cuivre est 
entièrement libre, et il résulte du rapport des dimensions des 
deux règles, que celte extrémité ne doit éprouver aucun dé- 
placement, à quelque température que le système soit exposé, 
si les dilatabilités du verre et du cuivre varient proportionnel 
lement. Or, Deluc a observé que, lorsqu'il avoit établi la com: 
pensalion pour un cerlain changement de température, elle 
n’avoit plus lieu pour des variations plus grandes ou plus petites. 

Mais il est aisé de remarquer que le bain d’eau, dans lequel 
les règles étoient plongées verticalement , ayant une grande pro- 
fondeur, les couches inférieures devoient toujours être plus 
froides que les couches supérieures , quelque soin qu’on prit 
d’agiter le liquide; et comme la règle de cuivre occupoit la 
moitié inférieure du vase, tandis que celle de verre le traversoit 
dans toute sa hauteur, on peut attribuer la dilatation croissante 
que le verre a présentée, à ce que la règle de cuivre s’est tou- 
jours trouvée à une température plus basse que l’autre, et que 
la différence a dû augmenter avec l’échauffement. On auroit pu, 
à la vérité, dissiper toute incertitude en répétant les mêmes 


expériences , 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 337 


expériences, les règles étant placées horizontalement, ou bien 
encore en renversant la position du système ; mais Deluc, n'ayant 
point fait attention à l'inconvénient que nous venons de signaler, 
n’a tenté aucun moyen de vérification. 


Les appareils à compensation, tel que celui de Deluc, n’of- 
frant aucun avantage réel dans les basses températures, et de- 
venant d'un emploi très-diflicile dans les températures élevées, 
nous avons dû adopter une disposition différente, que nous allons 
faire connoître. Ù 


Les règles dont nous nous sommes servis ont toutes 12 dé- 
cimètres de longueur, 25 millimètres de largeur, et 4 millimètres 
d'épaisseur. Lorsqu'on veut comparer les dilatabilités de deux 
d'entre elles, on les réunit d'une manière inyariable par une 
de leurs extrémités, au moyen d'une traverse en fer, sur laquelle 
elles sont fixées par de fortes vis. Chaque règle porte à son 
autre extrémité une tige de laiton qui s'élève d’abord vertica- 
lement, et se recourbe ensuite horizontalement. Les branches 
horizontales de ces deux montaus sont munies , l’une d’une 
échelle divisée en cinquièmes de millimètre, et l’autre d’un ver- 
nier qui marque les vingtièmes de division de l'échelle, ce qui 
permet d'apprécier les centièmes de millimètre, ou les cent 
vingt millièmes de la longueur des règles. Cette fraction ré- 
pondoit, dans la plupart de nos expériences, à un changement 
de température d'environ un degré; et comme il est impossible 
de se tromper d’une partie du vernier, pour peu que l'on soit 
exercé à lire les divisions, on voit que chaque détermination 
partielle, même dans les plus hautes températures , n’a jamais 
dù être affectée d’une erreur d’un degré. Cette précision nous 
a paru suflisante dans le genre de recherches qui nous occupe. 
D'ailleurs, pour donner plus de sensibilité à notre appareil, 
il auroit fallu en augmenter les dimensions ; et alors la difficulté 
d'établir une température uniforme auroit pu jeter plus d’incer- 
titude sur les véritables dilatations. 


Les deux règles reposent sur quatre rouleaux de cuivre as- 
sujétis à une barre de fer. Tout le système est placé dans une 
auge en cuivre rouge de 14 décimètres de longueur, de 15 cen- 
timètres de profondeur, et de 10 centimètres de largeur. On 
s'est servi d'huile fixe dans ces nouvelles expériences, comme 
dans celles qui ont été faites sur les gaz; et on a eu recours 
aux mêmes moyens pour rendre la température stationnaire pen- 
dant un temps suflisant pour que les règles pussent se mettre 


Tome LXX XVII. NOVEMBRE an 1818, Vy 


338 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


en équilibre de chaleur avec le liquide. Il y avoit aussi, de 
chaque côté du bain, des systèmes de plaques métalliques que 
l'on pouvoit mettre en mouvement de manière à mélanger les 
différentes couches de la masse liquide, et à établir partout une 
température uniforme sans craindre le dérangement des règles. 
Enfin l’auge de cuivre étoit fermée par un couvercle portant 
quatre douilles, dans lesquelles se trouvoient des thermomètres 
qui servoient à indiquer les différences de température qui au- 
roient pu s'établir dans les diverses parties de la masse. Un 
thermomètre placé horizontalement entre les barres, indiquoit 
la véritable température du liquide. 


Pour point de départ, nous avons toujours pris l’état des règles 
dans le bain d'huile qu'on avoit laissé plusieurs jours dans une 
chambre dont la température ne varioit pas sensiblement. Ce 
procédé nous a paru préférable à l'emploi de la glace, qui n'offre 
une température réellement fixe qu’autant qu'on peut l’agiter 
continuellement , surtout quand l’air environnant est à 15 ou 20° 
au-dessus de zéro. 


On échauffoit ensuite le bain jusqu'à une température voisine 
de celle qu’on vouloit produire , et l’on fermoit toutes les issues 
du fourneau. La masse totale étant ici très-considérable, le 
maximum de température se maintenoit pendant un temps bien 
suffisant pour que les regles se missent en équilibre de chaleur 
avec l'huile, si l'on considère surtout que l'agitation du liquide 
renouveloit à chaque instant les surfaces de contact. On acquéroit 
d'ailleurs la preuve que cette condition étoit remplie par l'in- 
variabilité des indications du vernier. 


Telle est la marche que nous avons constamment suivie dans 
toutes les expériences faites par ce nouveau procédé. Les pré- 
cautions variées auxquelles elles obligent, nous ont empéchés 
de les répéter sur beaucoup de substances ; mais du moins, 
les résultats que nous présentons ont été déduits de détermi- 
nations partielles assez nombreuses pour qu’il ne nous reste aucun 
doute sur leur exactitude. 


Dans une première série de mesures, nous avons combiné 
une règle de platine avec une règle de cuivre. La dilatation de 
ce dernier corps nous étant déjà connue pour tous les degrés 
du thermomètre à mercure , les observations du pyromètre nous 
ont fourni le moyen de calculer avec une grande précision celle 
du platine, tant dans les basses températures que dans les tem- 
pératures élevées. Dans une seconde série d'expériences, nous 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 359 


avons associé à la règle de cuivre une règle de verre de même 
longueur. Ce système, composé de deux corps dont les dilata- 
tions nous éloient connues, nous offroit le moyen de vérifier 
les déterminations que nous avions déduites de notre premier 
procédé; aussi n’avons - nous rien négligé de ce qui pouvoit 
concourir à l’exactitude de cette comparaison; mais nous avons 
été long-temps arrêtés par une dificulté que l’on ne rencontre 
pas lorsqu'on n'opère que sur des métaux. Les règles devant 
être maintenues: dans une position invariable l’une à l’égard de 
l'autre, on ne peut y parvenir que par le moyen de vis : or, 
tout le monde sait qu'il est impossible de serrer avec force une 
plaque métallique épaisse contre le verre sans le faire éclater, 
quelque soin qu’on ait pris pour dresser les surfaces de con- 
tact. Nous avons employé d’abord pour corps intermédiaire 
une feuille de papier que l’on avoit portée préalablement à une 
température de 300°, en ayant soin de la comprimer fortement 
dans un étau. Malgré cette précaution, la regle de verre ne 
paroissoit pas assez solidement fixée après l'expérience pour 
ne laisser aucun soupcon d’erreur. Nous avons alors substitué 
au papier des lames très-minces d’argent fin; pour cette fois, 
l'immobilité de la règle et de son prolongement a été complète, 
et les données fournies par l'observation de ce nouveau pyro- 
mètre, out pleinement confirmé nos premières mesures rela- 
tives à l'expansion du verre et du cuivre. 


Nous avons rassemblé dans le tableau suivant, les résultals 
conclus de ces diverses recherches. On y trouve les dilatations 
moyennes du fer, du cuivre et du platine, prises d’abord entre 
o° et 100°, et ensuite entre o° et 300°. Nous n'avons rapporté 
aucune détermination intermédiaire, parce que le seul objet que 
nous ayons pour le moment en vue est d’assigner le sens dans 
lequel les différentes échelles thermométriques s’écartent les unes 
des autres. Mais afin de mettre les résultats plus en évidence, 
nous avons joint à chaque dilatation la température qui s’en 
déduit en supposant l'expansion du corps uniforme. Ces tem- 


pératures sont celles qu'indiqueroient des thermomètres construits 
avec chacun de ces corps. 


340 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIÉ 


TABLEAU N° 4. 
EE AC A, OT ALI SIC 09 277 CT CE LE VORENC MRC ES 


à ilatations| ! fre ilatations| ‘L Éri { i : 
Températures D s er et Dilatations RSS Dilatations Températures 
#luite Er RE ’indi roit 
déduites | moyennes | indiquées par | moyennes| indiquées par | moyennes | 4 indiquer 
1 pe Y d 11 3 un thermomètre 
de un thermomèt. un thermomèt. Len e 
la dilatation | 2bsolues formé J absolues sonEnn: : absolues | pre règle 
CRE aune reg, e avec une reg; e E "4 ae 
de Pair. dufer. | de fer. du cuivre. | decuivre. [du platine. de platine. 
| 9 
me — ———— a | —— —— = 
Q 1 o ’ 0 Carr o 
100 TEE | 100 = | 100 st | 100 
DIE" 1 Lr4 1 
300 Ms 372,6 17700 328,8 36300 311,6 


Ces résultats, rapprochés de ceux que nous avons déjà ob-- 
tenus pour le verre, prouvent, contre l'opinion généralement 
recue , que la dilatabilité des solides rapportée au thermomètre 
à air est croissante , et qu’elle l’est inégalement dans chacun d’eux. 

Nous croyons avoir atteint, dans ce qui précède, le plus haut 
degré d’exactitude que comportent des mesures aussi délicates ; 
et c’est ce dont on peut d’ailleurs s’assurer, en comparant les 
nombres que nous donnons, pour les cent premiers degrés, 
avec ceux qu'ont obtenus MM. Lavoisier et Laplace. Nous n’ajou- 
lerons qu’une seule observation : dans les mesures directes de 
dilatation des solides , l'incertitude se trouve triplée en passant 
de l’expansion linéaire à l'expansion en volume. Nos détermi- 
nations donnant immédiatement cette dernière , l'erreur commise 
ne s’y trouve pas multipliée. 


Du Calorique spécifique des Solides à diverses températures. 


D’après les résultats des recherches précédentes, on voit qu’en 
rapportant la marche d’une série de phénomènes quelconques 
à un thermomètre pris successivement parmi les gaz, les liquides 
ou les solides, même les plus réfractaires, chaque espèce d’ins- 
trument conduiroit à une loi particulière. Il ne seroit donc pas 
indifférent de choisir tel ou tel thermomètre pour parvenir à 
la loi la plus simple, ou, si l'on veut, pour représenter les phé- 
nomènes par des mesures qui aient les relations les plus directes 
avec eux. Mais, pour se déterminer à cet égard , il faut encore 
savoir comment varient les capacités de tous lés corps dans 
chacune des échelles thermométriques que nous avons fait con- 
naître. 

Depuis l’époque où Black établit la notion des capacités, plu- 
sieurs physiciens se sont efforcés de perfectionner les méthodes 
expérimentales propres à faire connoitre cet élément important 


ET D'HISTOIRE NATURELVE. 54 


de la théorie de la chaleur, et d'appliquer ces méthodes à un 
rand nombre de substances. Les travaux de Wilke, de Craw- 
ord, de Meyer, et surtout de MM. Laplace et Lavoisier, sont, 
comme l’on sait, les plus remarquables de tous ceux qui ont 
été publiés sur cette matière. Deluc et Crawford, supposant 
un thermomètre idéal dans lequel les capacités seroient con- 
slantes, comparèrent ses indications avec celles du thermomètre 
à mercure, pour juger de l’exactitude de celui-ci. Presque toutes 
leurs expériences se réduisent à des mélanges de liquides dont 
la température n’a jamais dépassé celle de l’eau bouillante. On 
voit qu'en renversant la question, cela revient à chercher si les 
capacités de ces liquides restent constantes lorsqu'on mesure les 
températures par le thermomètre à mercure. Les résultats de 
ces deux physiciens sont différens : d’après le premier, il y auroit 
une légère variation dans la capacité de l’eau , dans l'intervalle des 
cent premiers degrés; le second admet, au contraire, que les 
Capacités sont constantes. Cetle discordance mème prouve que 
entre les limites où les expériences ont été faites, la variation 
de capacité des corps, si elle existe, doit être très-foible; mais 
de pareils essais sont beaucoup trop bornés pour permettre d’en 
conclure avec Crawford que le même principe s'étend à toutes 
les températures. 

M. Dalton, qui a abordé cette question dans l’ingenieux ou 
vrage que nous avons déjà cité, prétend que la capacité d’une 
même masse de matière ne reste pas constante, par la raison 
qu'une partie de la chaleur est employée à produire la dilata- 
lion; mais qu’elle resteroit invariable si l’on considéroit un même 
volume. 

Cette asserlion de M. Dalton n'est fondée sur aucune expé- 
rience directe, et peut être considérée comme une simple con- 
jecture qui se lie avec ses autres idées relatives à la mesure 
des températures, et sur lesquelles nous reviendrons bientôt , en 
discutant les principes qui servent de base à toute sa théorie. 

Toutefois nous reproduirons ici le même argument que pour 
les dilatations; c’est qu'on ne peut espérer de résoudre le pro- 
blème qui nous occupe, qu’en embrassant une partie de l'échelle 
thermométrique beaucoup plus considérable que celle qu'on a 
prise jusqu’à présent. Aussi les expériences que nous allons rap- 
porter ont-elles loutes été faites dans uu intervalle de 300 et 
même de 350°. 

La saison dans laquelle nous avons été obligés de nous livrer 
à cette partie de nos recherches, ne nous permettant pas d'em- 


542 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIF 


ployer convenablement la fusion de la glace, nous avons con- 
stamment fait usage de la méthode des mélanges, mais avec toutes 
les précautions convenables pour en assurer l'exactitude. 

Les corps dont nous avons déterminé les capacités devoient 
nécessairement être choisis parmi les métaux les plus difficiles 
à fondre. L’homogénéité et la conductibilité plus parfaite de 
ces substances, les rendoient plus propres qu'aucune autre au 
but que nous nous proposions (1). 

L'une des plus grandes diflicultés que présente ce genre d'ex- 
périences , c’est l'évaluation exacte des températures. Nous avons 
employé, dans tous les cas, l’eau bouillante pour avoir la ca- 
pacité au-dessous de ce terme ; et, pour l'obtenir dans les tem- 
péralures supérieures, quand la nature des corps permettoit de 
les laisser plongés dans le mercure bouillant, nous nous sommes 
servis de ce second terme, aussi fixe que le premier, et qui 
avoit été déterminé avec le plus grand soin , comme nous l'avons 
dit précédemment. 

Mais lorsque la substance étoit attaquable par le mercure, nous 
l'échauflions dans un bain d'huile qui, par la disposition même 
de notre appareil, pouvoit conserver une température slation- 
naire pendant un quart d'heure environ. 

Enfin, pour éviter l'erreur qu’auroit pu occasionner l'inégale 
température des différens points de la masse, on brassoit con- 
tinucllement le liquide au moment du maximum; et, par un 
thermomètre à volume constant, on avoit exactement la tem- 
pérature moyenne, qui devoit être aussi celle du corps. Les huiles 
fixes acquérant, comme on sait, une très-grande fluidité lors- 
qu'elles sont très-chaudes, la couche qui reste attachée aux 
corps que l’on y a plongés est extrêmement mince : toutefois 
nous n’avons pas négligé de tenir compte de la chaleur pro- 
venant de cette addition de matière, quoique, dans la plupart 
des cas, la correction n'ait porté que sur de bien petites quan- 
tités (2). 


Lorsque le corps soumis à l'expérience avoit été porté à une 


(1) Afin d'augmenter l'étendue de la surface des corps sur lesquels on opé- 
roit, on leur a donné la forme d'anneaux très-aplatis. Leur poids étoit d’un 
à trois kilosrammes. 

(2) Cette correction se déduisoit du poids d'huile entraîné par l'anneau : pour 
le connoître , il nous a fallu, dans chaque cas, faire une expérience préalable 
dans laquelle nous déterminions l'augmentation de poids de l'anneau à sa sortie 
du bain d'huile, A 300°, cette augmentation n’a jamais excédé 3 à 4 décigr, 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 343 


certaine lempérature mesurée par l'un des moyens que nous 
venons d'indiquer, on le plongeoit aussi rapidement que pos- 
sible dans une grande masse d’eau, et l’on observoit le réchauf- 
fement de ce liquide quand l'équilibre s’éloit établi. C'est dans 
la mesure de ce réchauffement qu'il faut apporter la plus grande 
précision pour pouvoir compter sur les résultats obtenus par 
ce procédé. Nous avons toujours employé une masse d’eau telle, 
que la variation de température n’allät jamais au-delà de 5 à 6 
degrés centigrades ; mais on se servoit, pour la déterminer, 
d’un thermomètre dont les divisions répondoient à des inter- 
valles de température assez petits pour qu’on püt évaluer exac- 
tement les centièmes de degré. L'eau éloit contenue dans un 
vase de fer-blanc très-mince , isolé sur un support à trois pointes. 
Ce vase participoit, dans chaque cas, à l’échauflement; mais 
comme-son poids et sa chaleur spécifique étoient exactement 
connus , on pouvoit , dans tous les calculs, tenir compte de l'effet 
qu'il produisoit. 

Dans la plupart des expériences, on refroidissoit d’avance 
l'eau d'un nombre de degrés tel, qu'après l'immersion du corps 
elle se trouvät à la température de l'air environnant; dans 
d'autres cas , le réchauffement commencoit à partir de cette der- 
nière température. La première méthode nous a généralement 
paru plus exacte el n’exige aucune correction. En effet, l’eau, 
immédiatement après que le corps y est plongé, acquérant une 
température très-peu différente de celle qui a lieu quand l’équi- 
libre est établi, l'air extérieur ne doit exercer qu'une influence 
inappréciable. Dans la seconde méthode, au contraire, il est 
nécessaire de tenir compte de la perte de chaleur que la masse 
éprouve à raison de l'excès de la température et de la durée de 
l'expérience. Cette correction pouvoit être déterminée avec une 
précision suflisante par une observation subséquente sur le re- 
froidissement de l’eau qui avoit été employée. Du reste, la masse 
des corps sur lesquels nous avons opéré, les circonstances va- 
riées dans lesquelles chaque détermination a été prise, et la 
précision reconnue du thermomètre dont nous nous sommes 
servis, tout nous paroit avoir concouru à l’exaclitude des résultats 
que nous allons rapporter. 


La grande capacité du fer (relativement aux autres métaux), 
et la possibilité de le plonger dans le mercure bouillant, nous 
ont décidés à commencer sur cette substance les comparaisons 
que nous nous proposions de faire. Les déterminations suivantes 


544. JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


sont déduites d'un grand nombre de mesures qui ne présentent 
que de très-foibles discordances : 


Capacité moyenne du fer de o°à 100°— 0,1098 (1) 
La de o à 200 = 0,1150 
Lee Pi — de o à 300 = 0,1218 
_ — de o à 550 — 0,1255. 


Le résultat indiqué par le sens dans lequel varient ces nombres 
se trouve vérifié dans le tableau suivant pour d’autres métaux; 
on s’est borné à y insé-er les mesures prises à 100° et à 300°. 


CAPACITÉS MOYENNES | CAPACITÉS MOYENNES 


entre o* et 1000. entre o° et 300°. 
Mercure... ne 0,0330 | 0,05bo 
Zinc. are Us ae 0,0927 0,1015 ; 
Antimojne..,.... 0,0207 | 0, 0549 
TON COCO ENENE 0,0b57 o,0611 
GHIVEEN SRE CCE | .  0,0949 0,1013 
Platines ae 0,033h 0,0355 
Verrerie AA) | 0,177 ] 0,0190 


en est donc des capacités des corps solides comme de leurs 
dilatabilités ; elles croissent avec les températures mesurées sur 
le thermomètre à air; elles croitroient méme encore, contre 
l'opinion de Crawford, en employant le thermomètre à mer- 
cure. Si celle observation avoit été faite sur des corps d'un vo- 
lume invariable, il ne resteroit aucun doute sur ses conséquences; 
mais l’élat gazeux est le seul qui permette de satisfaire à cette 
condition , et, dans ce cas, l’expérience présenteroit des diffi- 
cultés insurmontables. Toutefois, si la dilatation des solides étoit 
uniforme, on ne pourroit point attribuer l'accroissement des 
Capacités à la quantité de chaleur qui produit l'augmentation 
de volume ; car cette quantité restant alors proportionnelle aux 
températures , elle ne sauroit affecter le rapport des capacités. 
Il n’en est pas de même dans le cas où les dilatabilités sont 
croissantes; 1l est indubitable que, dans cette circonstance, les 
capacités prises à des hauteurs différentes dans l’échelle ther- 
mométrique doivent se ressentir de l'irrégularité de la loi de 
dilatation. Nous ne pouvons former aucune conjecture sur les 


GE ca Braun 5 a ee AE Au en pe tan “AU ARR PTE es 
(1) La capacité de l’eau est prise pour unité, 
effets 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 345 


effets dus à cette cause accidentelle; mais ce qui tendroit à faire 
croire qu'ils ne sont pas négligeables, et que l'accroissement 
de capacité que nous avons observé en dépend, au moins en 
partie, c’est que les métaux dont l'expansion suit la loi plus 
rapide sont en même temps ceux dont la capacité subit les plus 
grandes variations. Du reste, cette question ne peut étre décidée 
que par des observations qui embrasseroiïent un intervalle de 
température plus grand encore que celui dans lequel nos ex- 
périences ont été faites; nous espérons être bientôt en état 
d'éclaireir ce doute. 

Nous avons fail voir, en parlant de la dilatation des solides, 
qu'en construisant des thermomètres avec les métaux les plus 
infusibles , et en les supposant réglés comge à l'ordinaire par 
les termes fixes de la glace fondante et de l’eau bouillante, les 
températures accusées par chacun de ces instrumens seroient 
très-différentes. La même discordance doit s’observer évidem- 
ment, d’après ce qui précède, lorsqu'on évalue les tempéra- 
iures, comme plusieurs physiciens l'ont proposé, par les rap- 
ports des quantités de chaleur qu'un même corps abandonne 
en se refroidissant jusqu’à une température déterminée ; car cette 
évaluation est évidemment fondée sur la supposition que les ca- 
pacités sont constantes, ou du moins qu’elles croissent de la 
méme manière dans tous les corps. Or, ces deux suppositions 
sont également fausses. Nous avons rassemblé, dans le tableau 
suivant, les températures qui se déduiroient de ce procédé en 
employant les substances inscrites dans le tableau précédent. Il 
faut supposer qu’elles ont toutes été placées dans un même bain 
liquide, à 300° du thermomètre à air. 


Here SNL Mae ee A EURE Se 
Angentie si MULTI Mae 20 
TRACE NS UE ON LS OMET 208, 5 
Antimoime Hate eNe CR 150 
Metro. 0 ME 52 20T 
CUITE NE NES 55 0;0 
Mercure. 4-10 0-02: 00.2000—OntO ia 
Platine VER NE 51.0. ES R7,0; 


RÉFLEXIONS GÉNÉRALES ET CONCLUSION. 


Maïntenant que nous avons conslalé par l'observation, entre 
des limites suffisamment distantes, la marche relative des phé- 
nomènes qui peuvent être employés à la mesure des tempé- 


Tome LXXXVII. NOVEMBRE an 1818. Xx 


846 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIÉ 


ratures, nous sommes en élat de décider si l'échelle thermo- 
métrique proposée par M. Dalton, jouit réellement de tous les 
avantages qu'il lui attribue. En mesurant les températures sur 
cette echelle, on trouve selon ce physicien : 

1°. Que le mercure et tous les autres liquides se dilatent pro- 
portionnellement aux carrés des tempéralures , à partir du maxi- 
mun de densité de chacun d'eux; 

2°. Que les gaz se dilatent en progression géométrique pour 
des accroissemens de température en progression arithmétique; 

3°. Que la capacité des corps reste constante sous le mème 
volume ; 

4. Enfin, que, pendant toute la durée du refroidissement 
des corps dans l’air, les températures décroissent en progres- 
sion géométrique lorsque les temps suivent une progression 
arithmétique. 

La manière dont M. Dalton a présenté le principe sur lequel 
repose la formation de son échelle, ne permet pas de le con- 
sidérer autrement que comme une hypothèse qui auroit l’avan- 
tage de lier un grand nombre de phénomènes par des relations 
très-simples. Cet avantage, s’il existoit, seroit assez important, 
sans doute, pour faire admettre une idée si féconde , lors même 
qu’elle ne seroit point établie par des moyens rigoureux. Aussi 
ne chercherons-nous point à discuter la valeur des observations 
particülières qui paroissent avoir dirigé ce célèbre physicien, 
et nous bornerons-nous à examiner si les déterminations rap- 
portées dans ce Mémoire s'accordent avec les lois dont il s’agit. 

Dans le rapprochement que nous allons faire, nous considé- 
rerons , comme une échelle arbitraire, celle du thermomètre 
à air dont les degres sont tous égaux à la centième partie de 
l'intervalle compris entre la glace fondante et l’eau bouillante; 
et sans nous embarrasser d’abord des relations qui peuvent 
exister eutre les indications de cet instrument et les quantités 
de chaleur correspondantes, nous ne nous en servirons que 
comme d'une mesure commune pour passer d’une échelle à 
une autre. 

Au lieu de rechercher si, en mesurant les températures sur 
le thermomètre de M. Dalton, les dilatations du mercure et de 
l'air suivroient réellement les lois qu'il indique, il sera plus 
simple de calculer les températures qui correspondroient, dans 
son échelle thermométrique, à des dilatations déterminées de 
chacune de ces deux substances, en partant de la supposition 
que les lois dont il s’agit sont exactes, et de comparer ensuite 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 347 


les résultats obtenus pour l’une et pour l’autre. Le tableau sui- 
vant montre la correspondance de plusieurs termes calculés de 
celte manière. 


SC 


Températures indiquées Températ. correspondantes con- 
clues de la dilatation réelle d’un 
fluide élastique, dans la nues 
sition que cette dilatation se fait 
en progression géométrique ; les 
températures croissant en pro- 
gression arithmétique. 


Températures correspondantes 
_ conclues 
P : de la dilatation du mercure, 
c dans la supposition 
n thermomètre à air . SUPE : 
Le £ ? [que cette dilatation est proportionn. 
aux carrés des températures. 


dont l’échelle est uniforme. 


ons Sa — —— LENS CU MATRA EN PRSANR LP 2 
— _40° | — 1148 | — 52% 
o o o 
50 | 57,4 | 53,9 
100 100 100 
2co 169,1 | 175,7 
300 226,7 236,8 
550 251,1 | 263,2 


En parcourant la 2° et la 5° colonne de ce tableau, on voit 

ue les températures conclues des dilatalions du mercure et 
de l'air sont bien éloignées de s'accorder, comme elles devroient 
le faire, si la théorie de M. Dalton étoit fondée. Toutefois, la 
divergence qu’elles présentent dans les degrés supérieurs ne pa- 
roit pas, à beaucoup près , aussi grande qu’elle l’est réellement. 
En effet, comme les échelles relatives au mercure et à l’air ont 
deux termes communs, savoir, ceux de la fusion de la glace 
et de l’ébullition de l’eau, l'erreur énorme qui se manifeste dans 
Ja partie inférieure n’a aucune influence sur la détermination 
des températures élevées. C’est donc comme si les deux échelles 
avoient des points de départ différens; mais en les ramenant 
à une méme origine, la discordance des premiers termes se 
feroit sentir dans tous les autres. Ainsi, lors même qu’on me- 
sureroit les températures sur la nouvelle échelle de M. Dallon, 
les deux premières lois que nous venons de rapporter ne repré- 
senteroient nullement les phénomènes. 

Maintenant, si l'on veut comprendre dans cette discussion 
la troisième loi relative aux capacités des corps pour la chaleur, 
on verra que le thermomètre de M. Dalton s’éloigne encore plus, 
sous ce rapport, de la perfection qu'il lui suppose. 

En comparant les nombres de la première colonne du tableau 
ci-dessus à ceux qui leur correspondent dans la 2° et la 3° co 
Jonne , on voit qu'a l'exception des termes 0° et 100° où la coïn- 
cidence est établie par le fait, les indications du thermomètre 


Xx 2 


348 JOURNAL DE PHYSIQUE, DFE CHIMIE 


à air ordinaire, sont constamment supérieures à celles des deux 
autres. Or, nous avons trouvé que, même dans celte échelle, 
les capacités des corps solides croissent plus rapidement que 
leurs volumes ; à plus forte raison ne resteroient-elles pas con- 
stantes, si les températures étoient rapportées à une échelle 
moins rapide. 

Enfin, pour prouver en deux mots que la quatrième pro- 
position de M. Dalton est encore contredite par l'expérience , 
il nous suffira de dire que la loi du refroidissement dans l'air 
n’est pas la mème pour tous les corps, et qu’ainsi aucune échelle 
thermométrique ne peut satisfaire à la condition de rendre pour 
tous les corps les pertes de chaleur proportionnelles aux excès 
de température. À 

Quoique les propositions que nous venons de discuter n'at- 
teignent pas au but que s’éloit proposé M. Dalton, elles prouvent 
du moins que depuis long-temps l'insuflisance des doctrines 
généralement admises n’avoit point échappé à la pénétration de 
ce célèbre physicien. La plupart des phénomènes dont il avoit 
aperçu l'irrégularité varient en effet dans le sens qu'il a indiqué; 
mais il manquoit des données nécessaires pour vérifier son in- 
géuieuse théorie. Les recherches que nous venons d'exposer nous 
permettent de présenter des notions beaucoup plus certaines 
sur la mesure des températures, et de résoudre plusieurs diili- 
cultés qui ont été élevées à ce sujet. Il est évident, par ce que 
nous avons dit sur la variation des capacités, qu'aucune échelle 
thermométrique ne peut indiquer immédiatement les accrois- 
semens de chaleur correspondans à une élévation déterminée 
de température; car, en supposant qu'on en trouvät une qui 
jouit de cette propriété relativement à une substance en parti- 
culier , elle ne pourroit point être appliquée à d’autres, puisque 
les capacités de tous les corps ne varient pas de la même 
manière. 

En comparant entre elles toutes les échelles thermométriques, 
on peut pareillement s'assurer qu'il n’en existe aucune dans laquelle 
les dilatations de tous les corps se laissent exprimer par des 
lois simples. Ces lois varieroïient d’ailleurs suivant l'échelle que 
lon adopteroit. Ainsi, en prenant pour type Je thermomètre à 
air, les lois de dilatation de tous les corps seroïent croissantes ; 
en choisissant le fer pour la substance thermométrique, tous les 
autres corps suivroient alors des lois de dilatation décroissantes ; 
enfin, si l'on admettoit le thermomètre à mercure, corrigé de 
la complication que son enveloppe apporte à sa marche, le fer 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 349 


et le cuivre auroient une dilatabilité croissante, tandis que le 
platine et les gaz en auroient une continuellement décroissante. 

Encore bien que, dans l’état où la question se trouve main- 
tenant réduite, on ne puisse alléguer aucune raison péremp- 
toire pour adopter exclusivement une de ces échelles, nous 
devons dire cependant que luniformité bien connue dans les 
principales propriétés physiques de tous les gaz, et surtout 
l'identité parfaite de leurs lois de dilatation, rendent très-vrai- 
semblable que, dans cette classe de corps, les causes pertur- 
batrices n’ont plus la même influence que dans les solides et 
les liquides; et que, par conséquent, les changemens de vo- 
lume produits par l’action de la chaleur y sont dans une dé- 
pendance plus immédiate de la force qui les produit, Il est 
donc très-probable que le plus grand nombre des phénomènes 
relatifs à la chaleur se présenteront sous une forme plus simple, 
en mesurant les températures sur le thermomètre à air. C’est 
du moins par ces considérations que nous avons été déterminés 
à employer constamment cette échelle dans les recherches qui 
font l'objet de la seconde partie de ce Mémoire : le succès 
que nous avons obtenu peut être donné comme un motif de 
plus en faveur de l’opinion que nous venons d’énoncer. Nous 
ne prétendons pas, au reste, qu'il faille exclure les autres 
échelles dans toutes les circonstances. Il seroit possible, par 
exemple , que cerlains phénomènes se présentassent d’une 
maniere plus simple, en comptant les températures sur les 
échelles thermométriques déduites de la dilatation de chacun 
des corps qui feroient le sujet de l'observation; c’est même ce 
qui nous a engagés à suivre avec tant de persévérance les com 
paraisons de toutes les échelles thermométriques. 


(La suite au Cahier prochain.) 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITE® 


A compter du 1° janvier 1818, les hauteurs du Baromètre 


… | THERMOMÈTRE EXTÉRIEUR à : a 

= HR ne BAROMETRE MÉTRIQUE. a | 

[= < 2 

# Eh 

? MINIMUM. MAXIMUM. A MIDI. MAXIMUM. 7 2 
heurese heures* heures* mille heurese mille mille : 

1 | àämidi, H19°20| à 6 mm. +11°85| H19,10| à 98..... 746,51| à 3s.....745,49| 745,95) 18°7 

2 [a3s. <+H18,10| à 6 Em. +H12,75| +17,79] àgs......7b1,20| à 6 5 m...747,78| 748,21| 18,0 

$ àios. 17,75) àgm. + 9,90] H15,50| à 10m...752,13| à 105....750,56! 751,73| 17,414 

4 |a3s. +19 00 àgs. <H13,00| H17,85] à gs... 751,36| à 35..... 750,17| 751,06| 18,1|k 

5 | à3s, +775] à 6m. +u1,50| 17,00] à 6 : m...760,58| à gs... .,746,26| 749,21| 18,0] 

6 a midi. +15,40 àgzs. SE 8,75 +15,40 à midi,...744,b1 à5s Dre e 744,14 74451 17,5 j 

7 là midi. +13,40| à 6m. + 6,00! +13,40) à gs..... 747,04] à 6+m...74b,51| 746,78] 16,1] 

8 |à3s. +15,00| à 6! m. + 8,00] +14,00| à g!s....7b2,45| à 6 : m.. 748,79] 749,94| 15,9 

9 [a3s. +1b,00| à 61m. + 8,00] H14,00! à94s....7b3,99| à 6 4m...752,06| 7b5,12| 15,9| 

10 [à3s. +16,25] à 61m. + 4,25] H15,00| à 9 m....753,68| à51s....752,a1| 7b2,91| 16,0 

11 | à midi. H18,co| à 6 1m. +19,60| +18,00| à 10 1m..752,54| à 35..... 751,75] 752,19] 17,0) 

12 | à midi. 18,50! àgs. —<+i11,50| 18,50 à gs..... 757,33] à 6 +m...754,69| 755,92] 17,6 


18 | à3s. 19,75] à 61m. + 7,50] +18,75| à 105... .759,10| à 8m.,..757,40| 757,49| 17,61 
14 | à3s. 18,60! à6!m. + 9,00| H18,10| à 9 m....760,49| à 5+s....755,68| 758,91| 17,6] 
15 | à3s. —oo,oc| à 6 1m. + 8,00] H16,85| à 102m..759,00| à 35... ..758,05| 759,88] 17,9|M 
16 | à5s. 19,75] à61m. — 9,75] H19,50| à 10Lm..759,77| à 6 £m...758,89| 759,28] 17,B 


17 | a3s. +19,50| à 6 im. + 9,10| +17,40] à 10 m...759,81| à 9s..... 758,0b| 729,45 17,6 
18 | à midi. +H12,0c à 62m. + 8,00] +12,00| à g Ls....758,18| à 6? m...757,42| 757,74] 16,2 
19 là8s. 19,95] à6Ÿm. + 6,25] +11,75] à 9m....758,00| à 35..... 756,48| 757,24] 16,1 
20 la3s. +i200| à8m. + 2,25] Hio,4o| à gs. ...762,05| à 6 £ m...759,14| 760,69] 15,11 
21 Tà3s. <+12,95| àgs. “Æ 1,75] H11,00| à 8 m....761,91| àgs..... 758,12] 760,40] 14,5] 
22 | à3s. +Hi1B,00| àbÈs. + 3,75] H12,10| à 6 2m...756,46| à3s..... 754,88| 755,84] 14,6 
25 là8s. +13,75| à 6m. + 5,40] +1,75] à 9 Às....756,66| à 6 £ m...755,6o| 755,98] 14,9] 
24 Vas. +12,75 à 63m. + 6,75] 11,95] à 105....758,95| à 6 £m...757,27| 758,14] 15,b} 
25 | à 35. | +16, à 6m. + 7,25] +14,90| à 101m..759,57| à 65 m...758,55| 759,44 15,1]. 
26 | à3s. +7,60 à 6 2m. + 9,25] +16,95| à g91s....760,97| à 6 m...758,40| 760,51| 15,61 
27 | à 3s. +6,95 àzm. + 6,25] +13,50 à9+s....763,18| à 7 m....761,b7 762,17] 15,1 
28 | à5s. +Hab,5c| à 7m. + 2,00| 413,00 à 95... 764,25| à 7 m....763,89| 764,31] 15,1]M 


29 | à5s. 14,60! à 7m. + 2,10] H19,00| à midi. ..767,04| à 7 m....765,82| 767,04| 14,1]M 
90 | à3s. +H14,95| àios. + 6,25] H11,10| à 9 m. ...766,72| à 10 5... .764,72| 766,08] 14,4] 


S1/à8s <i10,50| à7m. + 2,75] + 9,50] à 7m....762,77| àg s..... 759,61| 762,00| 13,01 
Moyennes. 15,67 + 7,461 +14,76 757,02 755,19| 726,261 16/2 le 
A D 
RECAPITULATION, 
Millim. 
Plus grande élévation du mercure... .. 767°04 le 29 
Moïndre élévation du mercure..,..... 744,04 le 6 
Plus grand degré de chaleur.......... —+20°00 le 15 
Moindre degré de chaleur........... + 1,75 le 21 
Nombre de jours beaux....,.... 22 
de couverts. ...... fait 0) 
16 puede énascess 9 
AB VENTEre cet 31 
defpelée/-erercertt 3 
de tonnerre. ......... o 
de brouillard. ........ 28 
dé neise ei ER vRRUE o 
dengréle A rNAenERe o 
EE ——— A 


L L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS. 


ont réduites à la température de zéro du Thermomètre. 
1818. 


OCTOBRE 


HYG. POINTS VARIATIONS DE L'ATMOSPHERC. 
VENTS. 
à midi. LUNAIRES. 
LE MATIN. À MIDI. | LE SOIR. 
7x |S. Couvert. Couv.,b.,quelq.g.d'ea.|Couvert, plure à 8h. 
75 | Idem. Idem, brouillard. Idem. Nuageux. 
92 | Idem. Idem Pluie fine. Pluie par intervalles. 
ë1 Idem. |Lune périgée. | Pluie. Couvert. Idem. 
69 |S.-O. fort. Très-nuageux, p/. à 8”.\ T'rès-nuageux. Pluie abond. dans lan. 
65 |S.-O. Nuageux. Idem. Très-nuageux. 
80 |O. P.Q.àzh1ÿm| dem, brouillard. |Couvert, brouillard, | Idem. 
68 |N.—E. Couvert, léger brouil.|Ciel trouble et nuag. [Quelques gout. d’eau. 
63 | Idem. Nuageux. Légers nuages. Lézers nuages. 
75 |S.-O. Couvert, brouillard. |Quelques éclaircis.  |Couv., p/. dans la nuit. 
74 | Idem. Couvert, plue fine. Idem. Idem. 
67 | dem. Nuageux. Très-nuageux. Beau ciel. 
71 |S.-E, Idem, br. épais.  [Nuageux. Idem. 
66 |. Zdem. |P.L.à5h38/m.[Beau ciel, brouillard. [Beau ciel. Idem. 
73 | Idem. Nuageux, brouillard. [Nuageux. Idem. 
64 | Idem. Idem. Item. Idem. 
80 | Idem, Idem. Idem. Idem. 
go | Jdem. Brouil. épais et humid.|Brouillard épais. Brouillard épais. 
56 | Jdem. Idem. Nuageux. Couvert. 
75 | Idem. Nuageux, brouil. ép. [Beau ciel, léger br. |Beau ciel. 
52 LE. Lune apogée. [Beau ciel, br., gel. bl.|Beau ciel. Idem. 
67 | Idem. |D.Q.a7h3ÿm|Beau ciel ,légerbrouil.| dem. Idem. 
74 |S.-E. Nuageux, brouillard. [Nuageux. Idem. 
92 | Jdem. Couvert, brouillard. |Petite pluie, brouill. |Couvert. 
70 | Idem. Nuazeux, brouillard. Nuageux. Très-nuageux. 
66 |E.-S.-E, Idem. Idem. Idem. 
63 |S.E. Idem. Idem. Beau ciel. 
76 | Idem Brouillard épais. Beau ciel, léger br. Idem. ) 
99 | dem N.L.à5h36/s. Nuageux, br. , gel. bl.ICouvert, brouillard. |Couvert, brouillard. 
90 [E. Brouillard épais. Ciel voilé par interyal. Beau ciel. 
87 |S.E Idem. Brouillard épais. Couvert, pluie à 10}. 
Moyen 74 ; 
RECAPITULATION. 
INF en Oo 
NÉS UN UNE 2 
Doboedododac 4 
Jours dont le vent a soufflé du STE A FE sn + 
GATE See b 
(Oécsodcosobe 
INFO EEE -re 0 


Thermomètre des caves 


Eau de pluie tombée $ 


le 1°, 12°,080 


le 16, 12°,086 
dans la cour...... 
sur l'Observatoire. 


-- mr 
OR CN RER 


; centigrades. 


. 160,95 — op. 7 lig. . 


AT Gb 00 


L 


JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


[2] 
Ut 
D 


RAPPORT 


Fait à la Société royale des Sciences, Lettres, Arts et 
Agriculture de Nancy, sur les Eboulemens qui ont eu 
lieu à Norroy, près de Pont-à-Mousson, département de 
la Meurthe ; 


Par M. ne HALDAT, SECRÉTAIRE DE CETTE Société. 


Les éboulemens qui ont eu lieu sur le territoire de la com- 
mune de Norroy, dans la nuit du 11 au 12 mars, ont tant 
excité la curiosité du public de cette ville, qu'il n’est personne 
qui n'en ait entendu parler; mais les récits sur cet évènement 
désastreux ont tellement varié, et les causes auxquelles plusieurs 
personnes les ont rapportés, ont dû paroître si singulières, que 
J'ai pensé qu'il seroit agréable à la Société d'en entendre le 
récit, d'apres les observations réunies de deux de ses Membres, 
envoyés sur les lieux par ordre de M. le Préfet, d'après le rap- 
port du Maire de celte commune, et celui d’une Commission 
chargée de constater et d'estimer les pertes éprouvées par les 
propriétaires. 

La commune de Norroy est située à trois quarts de lieue et 
au nord de Pont-à-Mousson. Son sol est généralement calcaire, 
il est même célèbre par des carrières très-anciennement ex= 
ploitées, et qui ont fourni à la construction de plusieurs édi- 
fices importans de ce pays, les cathédrales de Metz et de Toul. 
La partie de son territoire qu’occupent ces carrières, est com 
posée de grandes masses calcaires fortement unies entre elles, 
et par là même, à l'abri des bouleversemens qui vont nous oc- 
cuper; le terrain dans lequel ils se sont manifestés, est bien plus 
voisin du village, et forme un coteau planté de vignes qui 
s'étend au nord-est. La composition de son sol est tout-à-fait 
différente; les couches profondes sont formées d'argile bleuitre, 
dont l'épaisseur varie, selon le rapport des habitans, depuis 4 
jusqu’à 25 pieds ; la surface est formée d'une couche de terre 
végétale composée d'humus et d'argile, dont l'épaisseur varie de 
2 à 4 pieds; ce coteau est couronné par des masses calcaires 


considérables qui se montrent à la surface du sol; on observe 
eufin 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 353 


enfin que ces masses calcaires qui semblent avoir appartenu 
aux roches supérieures dont elles se seroient détachées, reposent 
sur l'argile ou sur une espèce de pierre poreuse très-friable. 

La forme du coteau n’est pas moins remarquable que sa com- 
position minérale; il est disposé en trois plans distincts, dont 
l'élévation totale est de Co à 70 mètres à partir de la base; la 
partie Ja plus élevée forme un plan incliné de 30 à 40 degrés, 
la partie moyenne, un plan qui se rapproche de l'horizontale, 
et enfin la portion inférieure, un troisième plan dont l'incli- 
naison varie de 25 à 30°; c'est dans cette troisième parlie que 
les éboulemens ont eu lieu. Ces éboulemens , dont on a si diver- 
sement parlé , s’observent dans une étendue de 1200 mètres sur 
200 ‘de largeur, et occupent la face orientale du coteau et son 
relour vers le nord. Dans cette étendue, le terrain a éprouvé 
dans sa forme et dans la situation de ses parties, des change- 
mens qu’on peut classer ainsi : divisions en séparations, dépla- 
cemens, enfoncemens et élévations ou exhaussemens. Les di- 
visions en séparations se composent d’arrachemens et de fentes 
ou fissures. Les arrachemens sont bien moins nombreux que 
les fentes, et il n’y a même que deux endroits où la séparation 
des parlies du terrain soit assez grande pour mériter ce nom; 
mais les phénomènes en sont si remarquables, qu'on peut en 
comparer l'aspect à celui que présente un terrain bouleversé 
par l’explosion d’une mine; cet endroit offre des vignes bou- 
leversées, des arbres transportés avec le sol qu'ils occupoient, 
des roches reuversées, enfin un désordre complet. Les fentes 
ou fissures sont au contraire très-nombreuses, elles forment 
des lignes continues qui ont quelquefois 5o à 60 mètres sans 
interruption ; plusieurs de ces fentes s’étendoient à une pro- 
fondeur de plusieurs mètres, d’autres n’éloient que superficielles. 
On doit remarquer en général que ces phénomènes de sépa- 
ration w’occupent que les parties les plus élevées, et que le 
plus grand nombre s’observe au sommet du troisième plan dont 
se forme notre coteau. 

Les phénomènes de déplacement sont nombreux et très-sen- 
sibles; en effet, toute la surface du terrain compris dans les 
limites que nous avons assignées , a subi un véritable dépla- 
cement qui en a dirigé les parties vers le bas du coteau. Des plans 
de vigne, dans quelques endroits, ont passé du lieu qu'ils oc- 
cupoient dans la propriété d'un voisin, siluée de 5 à 10 mètres 
au-dessous; de grands arbres ont voyagé avec le terrain qui 
recoit leurs racines, les uns sans changement dans leurs di- 


Tome LXXXVII, NOVEMBRE an 1818, Yy 


554 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


rection, d’autres en s’inclinant plus ou moins vers le sol. Une 
des transpositions les plus remarquables, est celle d’un cerisier 
de 5 à 4 décimètres de diamètre, et de plus de 10 mètres 
d'élévalion, qui est tombé de la hauteur qu'il occupoit à 14 
mètres au-dessous sans avoir éprouvé aucun dérangement dans 
sa direction, tellement qu'il semble avoir cru dans le lieu qu'il 
occupe maintenant; mais de toutes les parties du sol qui ont 
subi le déplacement , celles où le phénomène est le plus facile 
a apercevoir, sont les sentiers et chemins d'exploitation. Des 
portions assez étendues de l’une de ces voies de communica- 
tion placées dans la partie supérieure du coteau , ont été déplacées 
de 10 à 15 mètres; elles forment des courbes dont la convexité 
dirigée vers le bas du coteau, indique la cause du phénomène, 
ct assez exactement l'étendue du déplacement du terrain auquel 
elles correspondent. 

Les déformations ne sont pas moins nombreuses que les dé- 
placemens; dans quelques endroits le sol s’est abaïssé, dans 
d’autres il s'est élevé ; le plus ordinairement le terrain déformé 
est en même temps déplacé, mais il y en a aussi dans lesquels 
la déformalion est sans déplacement. Nous avons observé uu af: 
faissement que les habitans estiment à 5 mètres au-dessous du 
niveau qu'avoit le terrain avant les éboulemens : la plupart, ce- 
pendant, sont bien moins considérables. Parmi les nombreuses 
élévations qui correspondent aux affaissemens, il en est une 
qui a fixé particulièrement l'attention du public, à raison du 
merveilleux qu’il croyoit y trouver. Elle est placée dans la partie 
la plus base du terrain, et correspond aux plus grands affais- 
semens et à l’arrachement remarquable dont nous avons plus 
haut donné la description. Le chemin qui conduit au village, 
et qui étoil enfoncé de 2 à 5 mètres, se trouve élevé au-dessus 
de ses bords anciens, de plus de 2 mètres; les murs qui le 
bordoiïent, ont été déplacés ou renversés; mais ce qui a sur- 
tout beaucoup occupé le public, c’est l’élévation d’un point 
qu'il a supposée considérable, mais qui n’est réellement com- 
posée que de trois pierres de taille d'un mètre environ de lon- 
gueur, qui ont été soulevées avec le terrain sur lequel elles 
reposoient. Il y a encore d’autres élévations moins remarquables, 
mais cependant importantes. 

Les bouleversemens que je viens de décrire, ont été annoncés 
comme ayant eu lieu dans la nuit du 11 au 12 mars. C’est en 
effet après une nuit très-orageuse , qu’on s’aperçut des altéra- 
tions éprouvées par le sol; mais elles ne se fixèrent pas le jour 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 555 


même où elles furent observées; elles duroient encore le 13, 
lorsque le Maire de la commune les annonça à M. le Préfet, 
et ils n’ont atteint leur maximum que vers le 15, quatre jours 
après leur commencement. Il y a même lieu de penser qu'ils 
avoient commencé, mais d'une manière insensible, avant le 12. 
Nous ne devons pas omettre de rapporter que ces évènemens 
ne sont ni nouveaux, ni inconnus dans la commune de Norroy. 
Dans l’année précédente, plusieurs éboulemens partiels avoient 
eu lieu vers la partie du coteau la plus éloignée du village, 
près du territoire de Vandière, et plusieurs communes voisines 
avoient déjà offert des exemples d'éboulemens partiels, à la vé- 
rité moins considérables, mais semblables pour les phénomènes 
principaux. 

Après avoir ainsi exposé les bouleversemens survenus dans 
la commune de Norroy, il ne nous reste plus qu’à en rechercher 
la cause. Nous ne croyons pas devoir occuper la Société de 
plusieurs hypothèses proposées par des personnes trop peu exer- 
cées dans ces sortes de matières, pour mériter aucune discussion 
sérieuse. Les phénomènes observés ne s'accordent ni avec la sup- 
position d’une éruption volcanique dont le terrain n'offre pas la 
moindre trace, niavec celle de tremblemens deterre, heureusement 
étrangers à ces contrées : d’ailleurs un tremblement de terre ne se 
seroit pas borné à un seul coteau, mais se seroit étendu à d'autres 
territoires, et n’auroit pas, comme par enchantement, épargné 
le village qui n’est éloigné des parties éboulées que de 50 à 6a 
mètres. Quelle sera donc la cause des phénomènes observés ? 
Elle s’est naturellement offerte à M. Mengin et à moi, dès que 
nous eûmes parcouru une partie du terrain bouleversé; et les 
personnes qui nous accompagnoient dans notre examen, sont 
convenues qu’elle satisfaisoit à tous les phénomènes. Ce sont les 
pluies presque continues, qui ayant délayé le fond d'argile sur 
lequel repose la couche de terre végétale, a permis à celle-ci 
de glisser le long du plan incliné qui la supporte, et de s'écouler, 
pour ainsi dire, vers le bas du coteau. Telle est la cause que 
nous avons assignée à ces phénomènes. 

Retracer à l'Académie les lois de la stabilité des corps à la 
surface de la terre; lui exposer que les couches superficielles 
d’un terrain incliné ont une tendance à se porter vers le bas 
du plan, et qu’elles n’en sont empèchées que par leur adhérence 
mutuelle et leur liaison avec les couches profondes; que ces 
couches devront se porter vers le bas du plan, dès que les 
liaisons qui les retiennent seront détruites ou considérablemeut 


VA 


356 JOURNAL DÉ PHYSIQUE, DE CHIMIE 


dimmuées ; énoncer des vérités aussi connues, ce seroit abuser 
de sa complaisance à nous écouter ; nous nous contenterons 
donc de lui présenter l'application de ces principes à l’explica- 
tion des phénomènes, pour satisfaire à la fois sa curiosité et 
lui prouver l'exactitude de notre explication. Avant d'entrer en 
matière, si nous voulons prouver le ramollissement des ar- 
giles , base de notre explication, nous pourrons en fournir des 
preuves nombreuses. Dans tousles endroits où le sol les a montrées 
à nu, nous les avons trouvées dans un état päteux , variable 
depuis la consistance d’une pâte ferme jusqu’à celle d'une pâte 
liquide, qui, dans beaucoup d'endroits, ne pouvoit supporter le 
poids du corps, et qui, dans quelques autres, alloit même jusqu’à 
la fluidité. 

On sait, en général, que l’argile une fois pénétrée d’eau, 
la quitte difficilement ; humectée par les pluies continues des 
années précédentes, elle n’avoit pu jusqu'alors se dessécher et 
reprendre sa consistance, jusqu'a ce que les pluies longues et 
abondantes de cet hiver, venant ajouter leur influence à celles 
des années précédentes, l’aient réduite à l’état de mollesse où 
nous l'avons trouvée. La disposition du plan incliné qui domine 
le coteau où les éboulemens ont eu lieu, a dù singulièrement 
favoriser leur action. Recueillies sur cette surface assez étendue, 
elles se sont portées vers le lieu déclive, où elles ont rencontré 
le bord supérieur de la couche argileuse, qu’elles ont succes- 
sivement pénétrée jusqu’à l’'amener au degré de mollesse observé. 
Les bancs d’argiles sont propres à conduire les eaux lorsqu'ils 
n’en sont que médiocrement pénétrés; mais lorsque leur amol- 
lissement passe certains degrés, elles s’en pénètrent au point 
de devenir fluides. Cette pénétration profonde des argiles par 
l'eau et leur influence sur les phénomènes observés, est encore 
prouvée par les suintemens nombreux que nous avons remarqués 
vers le bas du coteau, et sur diverses parties de sa surface. 
Maintenant , si nous considérons la couche de terre végétale 
placée sur l'argile amollie, comme un tissu étendu sur un plan 
incliné , où le frottement et l'adhésion ne sont pas suflisans pour 
le retenir, nous parviendrons à l'explication de tous les phéno- 
mènes. Ce tissu, et l’on ne peut se refuser à l’analogie établie 
entre un tissu et une couche terreuse, dont les parties sont 
assez liées pour s'entraîner mutuellement, et se transporter sans 
se rompre dans une étendue de plusieurs toises, ce tissu, dis-je, 
déterminé vers le bas du plan par la pesanteur, se déchirera 
dans les parties qui résisteront le plis au mouvement général 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 357 


de la masse, dès que sa force de gravitation l'emportera sur 
la cohésion, et ce point de rupture sera nécessairement celui 
où la pente du terrain , après avoir atteint son maximum d'in- 
clinaison, se rapprochera du plan horizontal ; c’est ce que nous 
présente le sommet du plan inférieur du coteau. La déchirure 
sera d’autant plus étendue, que la pente du terrain aura favorisé 
davantage le transport de la couche superficielle ; c’est encore 
ce que nous observons. Le point de rupture où la déchirare 
est plus considérable, est précisément le point le plus élevé, 
le sommet du coteau vis-à-vis l’une des pentes les plus rapides. 
Notre terrain , considéré comme un tissu, marchera donc vers 
le bas du plan, jusqu'à ce que quelque obstacle détruise sa 
tendance. Il rencontrera des obstacles à la surface du terrain 
qu'il parcourt , soit dans l’adhésion plus forte des couches, soit 
dans la moindre mollesse des argiles, soit dans la diminution 
de la pente, et il en trouvera nécessairement un dans la partie 
la plus basse du coteau, dans le point où le terrain redevenu 
horizontal, tend à reprendre une marche ascendante vers le 
coteau opposé; c'est donc dans cette partie que le bord inférieur 
de la couche superficielle arrêtée, devra se replier sur elle-même, 
soulever les obstacles qui s'opposent à sa marche, et cela avec 
une force d'autant plus grande, qu’elle supporte elle-même la 
pression de toutes les parties qui sont au-dessus. Telles sont 
les causes qui ont donné lieu aux divers exhaussemens, et par- 
ticulièrement à celui qui occupe le chemin de communication 
du village avec la route, exhaussement dans lequel on a cru 
trouver du merveilleux; il est plus considérable, parce qu'il 
se trouve vis-à-vis du plas grand arrachement, et que la sé- 
paralion plus étendue a fourni à cet endroit, une plus grande 
quantité de matière exubérante. î 
L’accumulation des couches terreuses vers le bas s'oppose 
nécessairement à leur diminution dans les parties supérieures, 
et par conséquent des affaissemens correspondans. Les abaïs- 
semens s'expliquent donc avec la plus grande facilité; et si 
l’on combine les causes diverses que nous avons fait intervenir, 
on expliquera de même toutes les altérations observées, soit 
dans la forme, soit dans la texture du terrain. Ainsi, les ébou- 
lemens désastreux arrivés à Norroy, sont l'effet naturel de la 
gravité, dont l’action a été favorisée par l’amollissement des 
glaises, ce qui peut se rencontrer dans les terrains semblables, 
et en effet üs ont ex lieu dans les environs de Pont-à-Mousson. 
Il ne seroil pas impossible que l’ébranlement communiqué au 


558 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


sol par les arbres tourmentés par les vents violens survenus 
dans les jours qui ont précédé le bouleversement, et la nuit 
mème où il a eu lieu, n’ait contribué à déterminer l’éboulement ; 
mais les pluies doivent être considérées comme la cause prin- 
cipale, vu qu’elles ont produit la liquéfaction, condition sans 
laquelle aucun déplacement ne pouvoit avoir lieu, et qui même 
pour devenir eflicace, demandoit la continuité de plusieurs 
aunées humides terminées par des pluies immodérées et con- 
tinues. Le terrain ayant acquis une pente moins rapide, il est 
évident qu'il faudroil maintenant une augmentation considérable 
dans la fluidité des argiles, pour reproduire de seniblables ébou- 
lemens; et comme il y a peu à redouter ce concours de cir- 
conslances extraordinaires, on doit être rassuré pour l'avenir ; 
au reste, on pourroit y trouver un remède, comme M. Mengin 
l'a indiqué, dans les moyens propres à donner issue aux eaux 
de la partie supérieure par des tranchées et canaux appropriés. 


Naney, ce mars 1818. 


NOTE 


Sur plusieurs espèces nouvelles de Rosiers des environs 
de Paris, et sur une nouvelle Méthode de décrire les 
espèces du genre Rosa; 


Par M. LÉMAN. 
Lue à la Société Philomathique , le 9 mai 1818. 


ON remarque généralement en Histoire naturelle, que plus 
un genre est naturel, plus les espèces qui le composent sont 
difficiles à caractériser ; l'explication en est bien simple : un 
genre ne peut être bien naturel, qu’autant qu’on observe dans 
ses espèces beaucoup de rapports qui les lient, ou bien que ses 
espèces étant fort nombreuses, présentent toutes les transitions 
des unes aux autres. La Botanique, plus qu'aucune autre branche 
de l'Histoire naturelle, en présente de nombreux exemples; et 
parmi cesexemples, nous citerons les Saules, les Pins, les Achillea, 
les Polypodes, les Liserons, les Campanules , les Bromes, les 
Paturins, les Centaurées, les Agarics, les Œillets, les Sainfoins 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 359 


et les Rosiers. Mais dans ces exemples, je ne crois pas qu'on 
puisse citer deux genres dont les espèces soient plus difliciles 
à caractériser que celles des genres Saule et Rosier. Les Saules 
sont dioïques, croissent avec promptitude, beaucoup sont cul- 
tivés, et souvent les individus mâles d'une espèce fécondent 
les pieds femelles d’une autre espèce; il en résulte des métis 
ou des hybrides que le naturaliste ne peut reconnoitre, el dès- 
lors il s'établit des liaisons entre les espèces qui détruisent les 
limites qu’on avoit cru pouvoir établir entre elles. 

Les Rosiers présentent les mêmes causes de variations. Nous 
devons à une culture ancienne et variée, les nombreuses va- 
riétés que nous en conuoissons et qui font l’ornement de nos 
Jardins : on rapporte ces variétés à plusieurs espèces ou lypes, 
et le plus souvent nous ne connoiïissons pas Ces espèces à l’état 
Sauvage ; nous ignorons leur patrie ; c’est ce qui arrive pour presque 
tous les végétaux cultivés dès les temps les plus anciens. Nous 
ne connoissons point la patrie de la Rose dite de Hollande (Rosa 
maxima, Desf.), de la Rose des quatre saisons (/?. semperflo- 
rens), de la cent-feuilles (R. centifolia), de la Rose à gros cul 
(R. francofurtensis, Desf.), qui sont les Roses les plus vulgaires 
et en même temps les plus belles. La nature paroït avoir mul- 
üplié avec autant de profusion les espèces et variétés de Roses 
Sauvages; ce sont celles que nous avons trouvées indignes de 
décorer nos parterres, ou qui servent seulement aux habitans 
de la campagne pour clore leurs propriétés. Linnæus a fait voir 
le premier, d'une manière évidente, qu’en Botanique les meilleurs 
caractères des genres sont ceux déduits des organes de la fruc- 

-üification. Quant aux espèces, il a cru devoir faire comme ses 
devanciers , prendre les caractères sur toutes les parties du vé- 
gétal. Il en usa de même pour les coupes qu'il se vit forcé d'établir 
dans les grands genres. Lorsqu'il publia la dernière édition de 
son Systema vegetabilium , les coupes qu’il avoit établies dans cer- 
tains genres étoient fort bonnes alors, parce qu'il ne connois- 
soil qu’un très-pelit nombre d'espèces dans chacun de ces genres. 
Par exemple, Linnæus partagea les Saules, dont il ne connois- 
soit que trente espèces, en Saules à feuilles glabres et dentées, 
en Saules à feuilles glabres entières , en Saules à feuilles velues 
entières, et en Saules à feuilles velues et dentées : ces quatre 
divisions ont été adoptées par les successeurs de Linnæus. Ac- 
tuellement que l'on connoîit plus de 150 espèces de Saules, 
cette manière de les diviser nepeut pas étre adoptée, car à chaque 
instant on en voit les défauts. Jusqu'ici personne n’a été tenté 


560 ” JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


de classer les Saules d’après une autre méthode, si ce n’est. 
M. Decandolle, qui croit que les meilleures coupes à établir 
dans ce genre, doivent être déduites de considérations tirées 
des fruits de ces plantes. 

Ainsi donc, un genre qui devient nombreux en espèces , 
doit voir affoiblir les caractères donnés à ses espèces, et une 
nouvelle étude est alors nésessaire pour rétablir ou modifier 
les caractères. 

Le genre Rosier est dans ce cas. Linnæus n’a connu que 18 
espèces de Rosiers, Willdenow en décrit 39, et M. Persoon 45, 
et nous avons lieu de croire que ce nombre pourra s'élever 
à près de 80. Quoique le nombre des Rosiers décrits dans le 
Species Planiarum ne soit pas considérable , l’on peut dire qu'il 
n'y a pas de genre où les espèces soient plus ambiguës. Cela 
vient de ce que Linnæus a mal saisi les caractères de ces vé- 
gélaux , et qu'il a accordé trop d'importance à plusieursd’entre eux. 

Lionæus crut d’abord que la présence et l'absence des aiguillons 
étoient de très-bons caractères; mais il suflit d'étudier même 
légèrement les espèces de ce genre, pour voir combien ces ca- 
ractères sont iuexacts. Les folioles calicinales, soit entières, 
soit découpées, étoient chez lui des caractères de premier ordre, 
et cependant ils ne sont rien moins que cela d’après mes ob- 
servalions. Quant aux pétioles aiguillonnés ou inermes, c’est un 
caractère qu'il faut abandonner comme trèes-inexact. Linnæus 
prit ensuile les caractères dans la forme de l'ovaire, ou, pour 
parler plus exactement, dans la forme du tube calicinal qui 
contient l'ovaire dans les Rosiers, et dans la présence des 
épines qui garnissent dans bien des espèces les ovaires et leur 
pédoucule. Les caractères déduits de ces considérations ont 
paru d’une grande importance aux botanistes, et ici nous ne 
sommes pas complètement de leur avis, l'observation nous ayant 
démontré le vice de cette méthode. 

On divise généralement les Roses en celles qui ont l'o- 
vaire sphérique, et en celles qui ont l'ovaire oblong ou ovale. 
Mais ces deux divisions ne peuvent être admises, parce que 
dans une même espèce de Rosiers, l'ovaire, considéré dès 
l'instant de l'épanouissement de la fleur jusqu’à la maturité du 
fruit , passe par diverses formes qui rendent les épithètes de sphé- 
rique et d'oyale fort difficiles à appliquer; ajoutez encore que 
les botanistes ne sont point convenus de läge auquel on doit 
prendre l'ovaire pour indiquer sa forme; observez encore que 
dans les espèces qui ont des fleurs simples et des fleurs doubles, 


l'ovaire 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 361 


Fovaire est tellement changé dans sa forme, qu'en suivant le 
principe linnéen on s'expose à faire alors deux espèces au lieu 
d'une seule. L'ovaire et le pédoncule hérissés ou glabres , 
donnent de meilleurs caractères ; mais ils ne sont pas encore 
de premier ordre, et voici sur quoi je fonde mon opinion. 
J'ai vu qu’un ovaire hérissé dans sa jeunesse, pouvoit devenir 
glabre par la maturité; j'ai vu que dans uue même espèce il 
pouvoit y avoir des ovaires glabres ou hérissés, en considérant, 
bien entendu, des ovaires du mème äge; j'ai vu que les pédon- 
cules hérissés pouvoient soutenir des ovaires glabres ou hérissés ; 
mais je n'ai pas d'exemple d’un ovaire hérissé porté sur un 
pédoncule glabre. 11 suit de la, qu'un pédoncule hérissé est 
uu caractère plus important que celui offert par un ovaire hé- 
rissé. J'ai observé qu’un pédoucule garni de poils glanduleux , ou 
d'épines, ne perdoit presque jamais toutes ces épines, el qu'il 
en restoit toujours des traces ou quelques-unes sur le pédon- 
cule même le plus aucien , et après la chute du fruit. Ainsi donc, 
les caractères déduits du pédoncule, selon qu'il est glanduleux, 
épineux ou glabres , sontimportans surtout lorsqu'on a l'attention 
de preudre ces caractères dans la fleur lors de son épanouis- 
sement. 

Le nombre des folioles des feuilles est encore un caractère 
spécifique très-employé par les botanistes , mais nous avouerons 
que, à l'exception de quelques espèces qui sont tres-bien carac- 
térisées par ce moyen, en général il est mauvais. ‘ 

On conçoit d'après cela, combien les espèces de Roses doivent 
être mal caractérisées, et la nécessité de chercher un nouveau 
mode d'établir les caractères de ces belles plantes. 

H y a 7 ans que M. Mérat se proposant de publier une nou- 
velle Flore de Paris, me pria de lui faire part des espèces nou- 
velles de plantes que j'aurois pu découvrir autour de Paris. Je 
lui montrai alors uu travail ébauché depuis deux ans, que j'avois 
fait sur les Roses qui croissent naturellement aux environs de 
Paris; je lui confirmai l'existence de quelques-unes des espèces 
nouvelles de Roses qu'il a fait connoitre, mais je ne voulus 
point que mon travail fut publié alors, parce que je me pro- 
posois de suivre et d'étudier particulièremeut nos espèces de 
Roses jardinières. A présent que j'ai pu réunir un bou nombre 
d'observations, je crois pouvoir donner l’esquisse de la nouvelle 
méthode que je propose pour diviser et caractériser les Rosiers. 

Pour parvenir à établir cette méthode, j'ai dù étudier et com- 
parer entre elles les diverses parties des espèces. J'ai dû nv'as- 


Tome LXXXVII. NOVEMBRE an 1816. La 


362 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


surer de l'influence de la culture sur les Rosiers, j'ai dû les 
étudier à diverses époques, et j'ai dû chercher mes caractères 
dans les parties qui s'observent dans presque tout le temps de 
la végétation annuelle. Je ne prétends pas cependant être par- 
venu à donner une méthode exempte de critique, mais je crois 
en donner une meilleure que celle suivie jusqu'ici par les bo- 
tanistes. Je me bornerai pour le moment à faire connoilre 
seulement les principes et les bases de ma méthode, et je ter- 
minerai par l'indication de quelques espèces nouvelles de nos 
environs, déterminées d’après cette méthode , et par la liste 
de tous les Rosiers que j'ai observés, distribuée également dans 
le même esprit. 


La première idée que j'eus de chercher à caractériser les 
Roses mieux qu'on ne l'avoit fait, me vint en 1808, lorsque 
M. Batard, professeur de Botanique et directeur du Jardin des 
Plantes d'Angers, et que vous avez admis au nombre de vos 
Correspondans, n'invita à lui donner mon avis sur un grand 
nombre de plantes de Anjou, qui devoient ètre décrites dans 
la Flore de Maine-et-Loire, qu'il se proposoit alors de publier, 
et qu'il a en effet publiée ensuite. Parmi les plantes que ce botaniste 
m'avoit envoyées , il y avoit plusieurs Rosiers donnés pour des 
variétés du Rosa canina, etc.; mais je m’apercus bientôt que 
plusieurs espèces étoient confondues sous ce nom; j'en écrivis 
à M. Batard, en lui communiquant mon sentiment, et quelque 
temps après, l'une de ces espèces que j'avois signalée fut 
publice dans la Flore de Maine-et-Loire, sous le nom de Ro- 
ster d'Anjou ( Rosa Andegavensis). Les. botanistes se sont em- 
pressés d'adopter cette espèce. Le caractère le plus frappant de 
celle espèce, est d'avoir les dentelures des folioles entières; et 
ce caractère me parut alors tellement distinctif et remarquable, 
que je voulus m'assurer de sa valeur en étudiant nos espèces 
de Rosiers sauvages; je reconnus bientôt , qu'il pouvoit 
être employé avec avantage. Un botaniste, correspondant de 
celle Société, à qui j'avois communiqué mes observations, tout 
en les critiquant dans un Journal dont il étoit le Rédacteur, 
donne, à la suite de sa crilique , l'indication de plusieurs nou- 
velles espèces de Roses , et il a employé pour les caractériser, 
la méthode que je lui avois indiquée, et qu'il trouvoit de- 
fectueuse. 

J'ai observé que les folioles des Rosiers sont toujours dentées et 
que les dentelures sont de trois sortes, 1°. entières; 2°. Sur- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE.+. 363 


dentées vers le bord qui regarde le bas de la foliole ; 3°. sur- 
dentées on glanduleuses sur les deux bords à la fois. Je n’en 
ai point observé qui fussent seulement dentées sur le bord an- 
térieur. Les anomalies qu'on observe sont rares et ne détruisent 
pas la valeur que j'attache à ces distinctions. : 

Non-seulement j'ai pu me servir avec avantage de ces trois 
divisions pour les Rosiers des environs de Paris, mais encore 
pour grouper les espèces habituellement cultivées chez nous; 
et j'ai des raisons de croire qu’il en sera de même pour les 
espèces que je n’ai pu observer, et que je ne cite pas, parce 
que les figures et les descriptions qu'on en a données, n'in- 
diquent point la forme des dentelures des folioles. Je dois même 
faire observer que quelques espèces de Roses très-faciles à re= 
connoïlre, el qui ont les dentelures des folioles surdentées, 
sont représentées avec des dents simples dans tous les ou- 
vrages de Botanique. ; 

J'ai donc pris pour premier point de départ de la classifi- 
cation des Rosiers, les trois sortes de dentelures que présentent 
ces vegelaux. 

Un second caractère est donné par les pédoncules qui penvent 
être garnis de glandes, de poils ou d'épines, ou mème être 
parfaitement glabres et nus, et nous avons montré plus haut 
que ce Caractère étoit très-bon. 

Les feuilles glabres, velues, ou glanduleuses sont des carac- 
tères d’un ordre inférieur qui ne sont pas à négliger. 

Enfin , la forme de l'ovaire, celle des découpures du calice, 
ne sont que des caractères très-inférieurs qui ne deviennent de 
quelque importance que dans les espèces très-rapprochées. 

J'ai cherché, comme l’on voit, à donner des caractères faciles 
à vérifier, en les prenant sur des parties qui sont très-apparentes 
sur le végétal, et que lon y observe dans presque tout le 
temps de l’année qu'il est garni de sa verdure. Pour donner 
plus de valeur à ces caractères , je préviens que je les at tou- 
jours pris sur les branches floriferes, dédaignant de les prendre 
sur ce qu'on nomme les branches gourmandes, chez lesquels ils 
sont généralement aliérés. : 

Je ne doute pas que les considérations anatomiques de la 
fleur ne puissent donner des caractères quelquefois très-hons; 
mais outre que je n’ai pu en découvrir par le petit nombre 
d'observations que j'ai faites dans ce but, de quelle importance 
pourront-ils être dans des végétaux ornés de fleurs qui doublent 
si aisément par la culture. Citons cependant celui fournit par 


FDF AND) 


4 Le 
364 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


les styles lorsqu'ils sont réunis; ce caractère n’a encore été bien 
observé que dans le Rosa arvensis, et ses nombreuses variétés, 
et dans une ou deux autres espèces. 

Je terminerai cetle note par le tableau ci-joint, qui vous 
présentera 21 espèces de Rosiers sauvages aux environs de Paris, 
et dans ce nombre il s’en trouve sept que je crois nouvelles; 
et 2°., par une liste des Rosiers que j'ai observés dans nos jardins 
et à la campagne, classés d’après la nouvelle méthode que je 
propose. Je dois dire ici que M. Swartz, botaniste suédois très- 
célèbre, auquel j'avois communiqué mes idées, a essayé le même 
travail sur les Rosiers de la Suède; et sans nous influencer mu- 
tuellement, il a été conduit à établir la plupart des espèces que j'ai 
découvertes dans nos environs. 


Tableau synoptique de 21 espèces de Rosiers qui croissent nalu= 
rellement aux environs de Paris. 


I. Foliolis simpliciter dentatis. 
A. Stylis coalitis. . . . . . (1. R. arvensis, Linn.) 
B, Stylis liberis. 


a. Pedunculis glabris nudisve. 
+ Foliis glabris. 
* Germinibus subglobosis. 
(2. R. pimpinellifolia, Linn.) 
** Germinibus ovato-oblongis. 

(5. R. lutetiana, Nob.) 
+ Folis villosis.. . (4. À. dumetorum, Thuil.) 
+++ Petiolis villosis. (5. À. urbica, Nob.) 


&. Pedunculis hispidis. 
—+Foliis villosis.. . . (6. À. rustica, Nob.) 
++ Foliis glabris. 
* Germinibus ovato-oblongis. 
(7. R. andegavensis, Bat.) 
x* Germinibus globosis. 
(8. À. spinosissima, Linn.) 


I. Dentibus foliolorum margine inferiore serralis. 


a. Pedunculis hispidis. 
—Foliis margine nudis. 
(9. R. verticillacantha, Mér.) 
++ Folüis margine glandulosis. 
(10. À. pumila , Jacq.) 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 365 


B, Pedunculis glabris nudisve. 
+ Foliis margine glandulosis. 
(11. R. bisserrata, Mér.) 
++ Folüs glabris, 
.* Germinibus globosis. 
12. R. eglanteria, Linn.) 
** Germinibus ovato-oblongis. 
13. À. canina, Linn.) 
+++ Foliis pubescentibus. 
(14. R. tomentella, Nob.) 


HT. Dentibus foliolorum utrinque margine serralis glandulosisve. 
a. Pedunculis hispidis. 
+ Foliis eglandulosis, subtüs villosis. 
(15. R. pubescens, Nob.) 
+ Foliis eglandulosis , utrinque villosis. 
(16. R. villosa, Linn.) 
+++ Foliis glandulosis. 
* Germinibus globosis. 
(17. R. tenuiglandulosa, Mér.) 
** Germimibus ellipticis. 
(18. R. rubiginosa, Linn.) 
*** Germinibus elongatis. 
(19. R. histrix, Nob.) 
+++ + Foliis glabris.(20. R. nemoralis, Nob.) 
b. Pedunculis glabris nudisve. 
+ Folis glandulosis. . (21. R. sepium, Thuil.) 


Tableau des espèces de Rosiers cultivées dans les jardins de Paris, 
ou sauvages autour de cette ville. 
A. Forts simPLiciBus. 
1, Rosa berberidifolia, Pall. 
B. Forris PINNATIS. 
I Foliolis simpliciter dentatis. 


+ Pedunculis villosis. 
2. R. bracteata, Nent,—5. R. multiflora, Thunb. —4. R. mos- 
chata, Linn, 


L4 : 


6G JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
++ Pedunculis nudis glabrisve. 


a. Foliolis villosis. | 
5. R. Dumetorum, Thuïl.— 6, R. kamschatica, Vent. —7.R. ci- 
namomea, Linn.—8. À. subvillosa, Nob. 


b. Foliolis glabris. ! 
a. Lacinis calicinis pinnaüfidis foliaceisque. 
9. R. sulphurea, Wild. — 10. R. glauca, H. P. P.— 11. À. 
cymbifolia, Nob. sir: 
B. Laciniis calicinis simplicibus brevissimis. 
12. R. scotica, H. P. P.— 15. R. pimpinellifolia, Linn.— 14. R. 
Jolosa, Nob.— 15. R. ambigua, Nob. 0 
+++ Pedunculis hispido-glandulosis vel subhispidis. 


a. Laciniis calicinis simplicibus brevibus. 
æ. Stylis liberis. 


et 


$ Germinibus glabris. 


16. R. spinosissima, Linn.—:17. À. poterium, Nob.—18. R. 
strica (1), Hortulan.— 19. R. bengalensis, Andr. 


SS Germinibus subhispidis. 


20. R. chinensis, Hort. 

B. Stylis coalitis. 

21. À. balearica , H. P. P.— 22. RL. sempervirens, Linn.— 23. R. 
arvensis , Linn. (//üc Rosa stylosa, Desv., wt et R. prostrata, 
Decand. À. sylvestris, Roth.) 

b. Laciniis calicinis pinnatifidis, foliaceis, vel caudatis. 
a. Germinibus glabris. 

24. R. leucochroa; Desv.— 25. R. rubrifolia, Will. — 26. R. 
lutetiana , Nob.— 27. R. urbica, Nob. 

B. Germinibus hispidis subhispidisve. 

28. R. rustica, Nob. — 29. RÀ. andegavensis, Batard. — 30 R lu- 
cida. — 31. R. carolina, Linn. — 52. R. evrartina, Bosc. — 
35. Ji. alba, Linn.—534. R. carnea, Hort. (Damascæna, Linn.) 
— 35. R. semperflorens, H: P. P.—56. R. tomentosa, Nob. 
(vulgo l'argentée.)—57. R. turgida, Dum. de Cours. (T'urneps.) 
— 58. R. francofurtensis , Desf. — 39. À. rhemensis , H. P.P. 

7. Germinibus villosis. 


(1) Cette espèce est la seule quiait des aiguillons sur les côtes quiue- 
versent les folioles dans leur milieu. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 367 
40. R. Celsi, Nob. (Bifera, Hortul.)— 41. R. eriocarpa , Nob. 


IL Æoliolis dentatis : dentibus margine inferiore serralis. 


+ Pedunculis hispidis. | 

41. R. maxima , Desf. — 42. R. centifolia, Linn.— 43. R. mus = 
cosa, Linn. — 44. R. gallica, Linn. — 45. R. pumila , Jacq.— 
46. R. burgundiaca, M. P.P.— 47. R. verticillacantha, Mérat. 
—48. R. pyrrenaica, Linn. — 49. R. alpina, Linn.— 5o. À. pen- 
dulina, Linn.— 51. R. parvifolia , Nob. 

++ Pedunculis glabris. 
a. Foliolis glabris. 

52. R. ancistrum, Nob.— 53. R. neglecta, Nob. — 54. R. eglan- 
teria, Lion. — 55. R. biserrata, Mér.— 56. Rosa canina, 
Linn. 

b. Foliis pubescentibus. 

57. R. tomentella, Nob. 


HT. Æoliolis dentatis : dentibus utrinque margine serralis aut 
glandulosis. 


— Pedunculis hispidis. 
a. Foliis eglandulosis villosis. 
58. R. pubescens, Nob.— 59. R. villosa, Linn. 
b. Foliis glandulosis. s 
Go. R. tenuiglandulosa , Mér.— 61. R. rubiginosa, Linn.—62. R. 
histrix , Nob.—63. R. myriacantha, Decand. 
c. Foliis glabris. 
64. R. nemoralis, Nob. 
Pedunculis giabris nudis. 


65. R. sepium , Thuil. 


En tout 65 espèces dont 16 inédites. 


368 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


MÉMOIRE 


Sur quelques Gastéropodes nouveaux, Nudibranches et 
Tectibranches observés dans la mer de Nice Gs 


Par RISSO, 
Correspondant de la Société Philomathique. 


Doris, Cuv. Doris, Lin. 


Les mœurs et les habitudes des Doris ont beaucoup d’ana- 
logie avec celles des Limaces terrestres ; leurs mouvemens sont 
lents. Elles étendent leurs branchies et leurs tentacules pour se 
trainer sur les plantes marines, ressèrent leur pied quand ils 
veulent s’y fixer; au moindre danger elles rétractent tous ces or- 
ganes et se laissent tomber au fond de l’eau; la diversité qu’on 
remarquera dans la description de la Doris bordée de nos côtes, 
avec celle qu'en a donnée le célèbre auteur de lAnatèmie com= 
parée, n’est due sans doute qu'a la différence de localité, ou à 
la variété des teintes qu’elle présente dans les divers ages de 
Sa vie. Les trois espèces que je nomme Doris rouge, jaune ; 
bleue , n’ont été mentionnées par aucun auteur. Ces animaux 
se tiennent pour l'ordinaire de 4 à 6 mètres de profondeur , 
et se laissent voir fort rarement. La Doris marbrée répand 
souvent une humeur laiteuse quand on la touche, se traine avec 
plus de vitesse que toutes les autres espèces dans le moment de 
crainte, et se tient presque toujours cachée sous les cailloux 
couverts de plantes et de zoophytes. L'espèce à qui j'ai donné 
le nom de F’ilefranche, se wouve souvent renversée à la surface 
de l’eau; elle fraie dans le printemps, et préfère les endroits 
tranquilles à l’abri des vagues de la mer; la testudinaire, enfin, 
Prouvera aux naturalistes la parfaite ressemblance que cet ani- 
mal a avec la tortue. Ces Gastéropodes ont leurs organes gé- 
nérateurs sur le bord droit, leur estomac est membraneux , 
une glande entrelacée avec le foie verse une liqueur presque 


EE  S 


. (1) Extrait de l'Histoire naturelle manuscrite des Molluiques vivans et fos- 
siles des environs de Nice. 


particulière 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 369 
particulière à chaqüé espèce, par un trou percé près de l'anus ; 
leur frai est en forme de bandes gélatineuses répandues sous 
les pierres et enveloppant les fncus; ils se nourrissent des dé- 
trimens d'animaux marins, présentent tous de petites dimen- 
tions, et ne sont communs sur aucun rivage de la Méditerranee 
boréale. : 

1. D. bordée. D: dimbatla, Cuw. | 

D. corpore oblongo virescente, nigro guttato; branchiis septem, 
palmatis, dentatis. Cuv., Ann. du Mus.; L.., p. 11, fig. 5. 

Corps alongé, arrondi, bombé, lisse; manteau verdätre, par- 
semé de traits irréguliers, noirs , garni d’un large rebord froncé, 
jaunâtre. Tentacules brun-obscur. Branchies au nombre de sept, 
palmées, dentées, incisées, d'un vert pâle, tachées de noir 
et blanches au sommet. Dessous du corps et pied d'un vert 
jaunâtre pointillé de noir, liseré de jaune sur son pourtour. 

Longueur, 0040—0045; lärg.,0014—0016. Apparition, avril, 
mai. Sejour, sous les pierres. 

2. D. rouge. D, rubra, N. 

D. corpore oblongo, rotundato , rubro ; branchiis septem, pin- 
natis, N. f 

Corps oblong, bombé, arrondi, lisse. Manteau d’un ronge 
cerise couvert de très’- pelits ‘orifices comme pustulés. Tenta- 
cules bruns, pointillés de gris. Branchiés au nombre de sept, 
rougeätres , simplement pinnées. Dessous du corpset pied d'un 
rouge pale. : est 

Long., 0025—0030;larg., oo10—0012. Appar., juillet. Séjour, 
sur les fucus. i 3 : | 

3. D. jaune. D. lutea, N. 

D. corpore ovato , oblongo, convexo ; luteo, tubéreulato; bran- 
chiis septem, dentatis, N. RY AREA e 

Corps ovale, oblong , convexe, d'un jaune doré; couvert sur 
toute sa surface supérieuré de tubércules rapprochés assez -re- 
levés , qui le rendent un peu rude au toucher. Tentacules courts. 
Branchies petites, dentées, au nombre de sept. Dessous du corps 
et pied d’un beau jaune. ; 

Long., o018—0020 ; larg: 0006—0007. Appar:, avril. Séjour, 
dans les’ anses abritées: L 31 Ï hs 

4. D. marbrée. D. marmorata, N. es 

D corpore ovato, oblongo, griseo obscuro ; rubro' punctato. 
Lateribus tuberculatis: branchiis sex pinnulatis , Noa 


Tome LXXXVII. NOVEMBRE an 1818. Aaa 


370 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Corps ovale, oblong, un peu bombé, lisse au milieu, garni 
sur son pourtour de trois rangées de lubércules assez, distans 
les uns des autres. Manteau grisâtrel, zoné d'obscur, pointillé 
de rouge-brun. Branchies au nombre de six, pinnulées vers le 
sommet. Tentaculeés un peu coniques. Tout le dessous du corps 
d'un beau blanc ; pied blanc tacheté de rouge. 

Long., 0024—0026; larg., 0006—0008. Appar., mars. Séjour, 
sous:.les cailloux. 


5. D, bleue. D. cœrulea. 

D. corpore elongato, cœruleo, lineis albis, longitudinalibus 
transversis; branchis quinque, pinnato, dentatis, N. 

Corps alongé, arrondi, lisse. Manteau d’un bleu céleste, tra- 
versé longitudinalement par trois lignes blanches, droites. Ten- 
tacules longs, un peu scabreux. Branchies pinnées, dentées, 
au nombre de cinq, d'un bleu tendre. Dessous du corps et pied 
d'un bleu foncé, liseré de blanchâtre. 

Ë 7 SE à ;. 

Long. , 0010-0012; larg. , 0003—0004. Appar., juin. Séjour, 
sur les ulves. 

6. D. de Villefranche: D. Villafranca, N. 

D. corpore elongato, glauco, lineis ovatis, tranversis, lon- 
gitudinalibus ; branchiis novem, eiliatis, N. 


Corps alongé,sub-cylindrique, convexe, glabre. Manteau d’une 
teinte glauque, borde derjaune,, traversé longitudinalement sur 
là partie supérieure de trois doubles lignes sinueuses, inégales , 
d'un beau jaune doré, entremêlées ensemble et se bifurquant 
vers l’anus. Tentacules longs. Branchies ciliées, d’un bleu tendre 
au nombre de neuf. Dessous du corps d’un bleu clair, ainsi que 
le pied qui termine postérieurement en pointe. 

. Long., 6010—0020; larg., 0003—0006. Appar., mars, août. 
Séjour, sur l’ulva flabéliforme. 

7: D. testudinaire. D. testudinaria. 

D. corpore ovato, supra convexo, tuberculato , obscure fuseo , 
lilürisflavescentibus, in areolis polyedris divisis, subtus aurantiaco; 
branchiis quinque , pinnatis, N. à 

Corps ovale, convexe en dessus, recouvert d’un large man- 
ieau qui déborde de chaque-côté,,tuberculé et noïiràtre au mi- 
lieu, d’un brun foncé vers les parties latérales, où il est varié 
par des traits et des lignes d’un jaune päle, formant des petits 
polyèdres réguliers. T'entacules sub-cylindriques, jaunätres. Bran- 
chies au nombre de ciuq, pinnatfides, deutées., d’une couleur 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 371 


violàtre avec des lignes jaunes pales. Dessous du corps et pied 
d'une belle teinte orange foncé. Organe de la génération long, 
cylindrique , terminé par un petit prolongement aigu, situé 
Presque an milieu du côté latéral droit. 

Long.,0070—0076; larg., 0045—0048. Appar., février. Séjour, 
dans les pierres. 


TRiTONIE. TriTonNr1, Font. 


Les Tritonies sont des petits animaux marins qui s’approchent, 
dans le temps d'amour, du bord dela mer; c'est alors qu'on les voit 
renversés à la surface de l’eau ; se laissant flotter au gré des vagues ; 
leurs habitudes sont à peu près comme celles des Doris et des Eo- 
lides; mais elles demeurent plus long-temps cachées sous, les 
cailloux ou sous l'ombrage touffu des Cryplogames marines. 


1. T. de Blainville. 7. Blainvillea, N. 
T. corpore virescente , albo punctato ; dorso subplano ; branchiis 
lateralibus, in seriebus octo dispositis, N. 


Corps oblong, quadrangulaire , lisse, garni d'une membrane 
festonnée vers la partie antérieure, terminé en pointe poste-. 
rieurement. Dos.et côtés latéraux, d’un vert mêlé de rougeûtre, 
relevé par une infinité de pelites taches blanches, disposées en 
groupes réguliers. Les arêtes qui.séparent le dos des flancs, 
sont ornées de huit rangées de branchies alternes, colorées de 
rouge. Bouche petite. l'entacules jaunes , leur tube divisé en 
plusieurs languettes réunies en faisceaux. Pied alongé, d’un blanc 
verdàtre nuancé de rouge lavé. 

Long., 0040—00//4; larg., 0008—0009. Appar., avril, mai. 
Séjour, sous les cailloux. 


2. T. bossue. 7”. gibbosa, N. 
T. corpore albo, lutescente, dorso gibboso ; branchiis latera- 
libus, in seriebus sex dispositis, N. 


Corps renflé , oblong, pointu postérieurement, d’un blanc 
jaunâtre, bombé.en dessus, avec une espèce de bosse denti- 
culée au milieu du dos. Côtés latéraux garnis de six rangées 
de touffes de tubercules durs, irréguliers. Expansion membra- 
neuse du dessous dela bouche arrondie. Tentacules blancs, 
leur tube divisé au sommet en trois languettes simples. Pied 
étroit, canaliculé, blanchätre, pointillé de brun. 

Long.,o0o12—0014; larg., 0005—0004. Appar., mars, avril. 
Séjour, parmi les coralines. ; 


Aaa 2 


372 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
Tercives. T'ErcIPESs, Cuvier. 


L'abbé Dicquemare a fait connoître, sous le nom de pellicule 
animée, un Gastéropode qui prend place, par ses caractères, 
parmi les Nudibranches de M. Cuvier, et que je place avec 
quelque doute dans son genre T'ersipes. C’est ainsi que ce savant 
abbé s'exprime sur: ces animaux singuliers : « La pellicule 
» animée n’a guère d'autre air que celui d’une pellicule, quel- 
» quefois elle ressemble un peu à une graine d’orme dans ses 
» membranes. Quand il se met en marche, il prénd un peu l'air 
» d'une Limace, mais ses mouvemens sont béaucoup plus vifs, 
» etil est si mince, qu'il ne peut Jui être comparé à cet égard; 
» on apercoit des points noirs sur le dessus de sa partie an- 
» térieure; ce sont peut-être quelques organes extérieurs de 
» l'animal, On remarque de plus, un centre composé de vis- 
» cères d'où partent des Canaux tendant à la circonférence comme 
» les nervures d’une feuille , et qui tendent tout l’intérieur vascu- 
» leux ; le dessous est uni, etc., etc. » Tous cés caractères con- 
Viennent parfaitement aux deux espèces que j'ai trouvées sur 
nos bords; toutes les deux sont si minces et si aplaties, qu’elles 
laissent apercevoir à travers Jeurs corps, le canal intestinal en- 
tortillé qui vient aboutir à l'anus situé en dessous de la partie 
inférieure. Près de cet organe se développe, dans le temps 
d'amour , un long tube blanchâtre qui paroit être l’organe gé- 
nérateur; tous les deux ont les organes de la respiration ou bran- 
chies en forme de petits orifices ; ou suçoir sur le dos ; tous les 
deux ont des mouvemens fort vifs, et se lrainent en relevant 
et courbant leurs corps ; s'ils rencontrent quelques surfaces unies, 
ils s’y atlachent en contractant leurs corps, el s'y glissent, comme 
dit Dicquemare, avec un mouvement quelquefois si doux, qu'il 
ressemble à une goutte d'huile extravasée qui coule. Ces ani- 
maux prennent à chaque moment toute sorte de forme , comme 
le Caméléon réfléchit tous les tons des couleurs ; ils rétrécissent 
leurs corps en contractant tous les petits nérfs qui se ramifient 
vers la circonférence ; ils se gonflent ou s’amincissent en se di- 
latant; ils rampent avec vitesse, et restent immobiles au pre- 
mier mouvement qu'on fait pour les saisir; et quoiquils ne 
quittent jamais l'eau, ils vivent à l'air libre jusqu'a ce que l’es- 
pèce de gluten qu'ils répandent ait obstrué leurs branchies. Les 
deux espèces que je vais décrire, rappelleront aux naturalistes 
1e nom de deux grands observateurs des productions marines. 


7 COŸ 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 373 


5. T. Dicquemare. 7. Dicquemari. | 
T. Corpore oblongo albo, lutescente , dorso glaberrimo, N. 


Corps oblong, très-aplati, d'un blauc jaunätre , parfaitement 
lisse et uni, couvert sur le dos d’une infinité de petits orifices 
sessiles en forme de sucoirs , servant d'organes respiratoires. Tête 
déprimée , se dilatant sur le devant au gré de l'animal, se pliant 
en spirale pour former deux espèces de tentacules auriformes. 
Yeux très-petits , noirätres Bouche inférieure arrondie. Pied lisse, 
grisätre. Canal intestinal d’un blanc rougeûtre. 

Long. ,0025—0055; larg., 0004—0010. Appar., au printemps. 
Séjour, sous les galets. 


2. T. Brochi. 7. Brochi. 
T'. Corpore ovato, oblongo; bruneo violaceo ; dorso tuber- 
culato, N. 


Corps ovale, oblong, déprimé, d'un brun violet, couvert 
sur le dos d’une infinité de petits tubes ou tubercules, poin- 
üllés de blanc chacun, terminé au sommet par un peiit orifice 
ef forme de sucoir servant de branchies. Tête aplatie se di- 
latant sur le devant au gré de l’animal, se contournant en ten- 
tacules auriformes. Yeux très-petits, noirs. Bouche inférieure, 
arrondie, blanchätre. Pied lisse, tres-large, transparent. 

Long., o010—0040; larg., 0005—0015. Appar., en hiver. 
Séjour, sous les cailloux. 


PLEUROBRANCHE. ÂPLEUROBRANCHUS, Cuv. 


C’est encore aux travaux de M. G. Cuvier , que la science 
doit la connoïssance de ce genre intéressant, dont la seule 
espèce avoit été rapportée par mon ami Péron, de son voyage 
aux mers australes. Les Pleurobranches que j'ai trouvés sur 
nos côtes depuis bien long-temps, different de celui de la mer 
des Indes par les bords du manteau arrondi sur le devant, par 
sa superficie glabre et unie, sans aucune ride ni strie en ar- 
rière; par son pied très-large et par ses deux longs tentacules 
coniques. Le pelit voile qui s'étend antérieurement pour former 
la tête, s’alonge, se contracte, se plie et prend toutes sortes de 
formes au gré de l'animal. Les tentacules qui se trouvent au- 
dessus de cet organe, se retirent en dedans quand on les touche, 
et se développent, comme ceux des autres Gastéropodes, un 
moment après; le pied est très-contractile , et pour peu qu'il se 
dilate, il surpasse tous les bords du manteau. Ceile espèce, à 


374 JOURNAL DE PIYSIQUE, DE CHIMIE 


qui j'ai donné le nom d’orangée (1), à cause de cette belle teinte 
qui la colore, commence à se montrer sur nos bords au com- 
mencement du printemps ; elle préfère les profondeurs de trois 
à quatre mètres, et choisit pour demeure les endroits vaseux 
à l'abri des courans; elle se nourrit de vers et de petits Crus- 
tacés. Sa démarche est aussi lente que celle des Aplysies; elle se 
traine en ondulant au fond des eaux, sans venir, comme celle- 
ci, respirer à sa surface. 
P. orangé. P. aurantiacus, N. 


P. corpore ovato, oblongo, glabro; rubro aurantiaco, capite 
rotundato, N. 


Corps ovale, oblong, bombé en dessus, d’une belle teinte 
orange, recouvert d'un large manteau à surface glabre et unie. 
Tête formée par un prolongement charnu , aplatie et ronde sur 
le devant. Tentacules longs , coniques. Yeux petils, noirs, situés 
à leur base. Bouche placée à l'extrémité d'une petite trompe 
contractile. Organe de la génération se développant en un long 
tube. Branchies composées de seize rangées de feuillets sub- 
triangulaires , étroits, opposés, pinnés. Pied très-large , dé- 
passant le plus souvent le manteau qui le recouvre à nu, saillant. 

Long., 0050—00/40; larg., 0015—0020. Appar., mars, avril. 
Séjour, endroits vaseux ; coquille pette, solide, auriculaire, 
d’une couleur de succin, cachée sous le manteau. 


APLYSIE. ÆPpzysi4, Linn. 


Le savant Mémoire sur les Aplysies , que M. Cuvier a publié 
dans les Annales du Muséum, ne laisse rien à desirer sur ce 
genre intéressant; nous nous contenterons de dire pour le mo- 
ment, que l’unicolore est assez commune sur nos bords; la 
bordée de noir est fort agile dans ses mouvemens ; létoilée 
se lient presque toujours cachée sous les pierres; et la jaune 
eufin, est celle qu'on rencontre le plus rarement sur nos rivages. 

1. À. unicolore, N. 4. unicolor, N. 

À corpore ovato , virescente, obscurè marmorato ; testa proemi- 
nente, N. 

Corps ovale, d’un beau vert, marbré de brun. Tête proé- 
minente , affectant une forme quadrangulaire. Tentacules ver- 


(1) Observations sur divers animaux des environs de Nice, envoyées à l’Ins- 
titut en 1811. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 575 
dâtres. Yeux noirs. Partie postérieure oblongue. Coquille ovale. 
Pied d’un vert clair. L 

Long., 0030; larg., oo10. Appar., mars. Séjour, dans les algues. 


2. À. bordée de noir, N. 4. nigromarginata, N. | 
A. corpore ovato, oblongo, nigrescente ; nigerrimo, marginalo ; 
testa rotundata, N. 


Corps ovale , oblong, d’une couleur noirâtre; rebord du man- 
teau d’un noir foncé. Tentacules obscurs. Tête arrondie. Co- 
quille oblongue. Pied verdätre. 3 h 

Long., 0056; larg., 0009. Appar., avril. Séjour, dans les 
fucus. 

3. A. étoilée, N. 4. stellata, N. 


A. corpore rubro , albo nigroque punctato , N. 


Corps ovale, alongé, d’un rouge cramoisi päle, orné de petits 
points noirs, la plupart tachetés de blanc au milieu. Bords du 
pied couvert de pelites taches en forme d'étoiles. Tentacules 
noirätres. Tête arrondie. Coquille oblongue. Pied d'un gris clair. 

_Long., 0046; larg., 0016. Appar., février. Séjour , sous les 
pierres. 

4. À. jaune. À. lutea, N. +: 

A. corpore luteo ; tentaculis superioribus margine gTIsels , N. 

Corps ovale, oblong, d’un jaune foncé. Yeux blanchätres- 
Tentacules supérieurs gris au sommet. ‘Tête comme sinueéé en 
devant. Coquille oblongue. Pied grisätre. L 

Long., 0040; larg., 0012. Appar., mars. Séjour, sous les 
galets. 


Norarcur. Norarcaus, Cuv. 


Ce joli tectibranche, que j'avois nommé en 1812 Elysia ti- 
mida, convient parfaitement au genre Notarche que M. Cuvier 
vient nouvellement d'établir dans son règne animal, sur une 
espèce de la mer des Indes, apportée par M. Mathieu. » 

Les naturalistes qui se sont livrés à la recherche des ani- 
maux qui habitent la Méditerranée , paroissent n'avoir pas connu 
ce Gastéropode, si remarquable par sa forme et ses belles 
couleurs ; sa rareté tient, non-seulement à ses petiles dimen- 
sions, mais à ce qu'il reste toujours caché sous des cailloux, 
à l'abri de la lumière. Dans son état ordinaire, 1l est accroupl, 
mais on le voit quelquefois à la surface de l’eau immobile, où 
il demeure étendu et renversé pendant les calmes du printemps. 
Ce Notarche a des mouyemens fort lents, il se traine mollement 


376 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


en alongeant toutes les parties de son corps, les replie peu à 
peu, en même temps qu'il communique de légères ondulations 
à ses membranes latérales, qui sont toujours droites et paroissent 
faire fonction de nageoires comme celles des Raies. S'il veut 
aller au fond de l’eau, il plie son corps du côté gauche, s’enve- 
loppe de son manteau et se laisse tomber par son propre poids. 
Aussitôt qu'il a choisi un abri pour s'y fixer , il transude une 
humeur glaireuse qui le retient contre l'impétuosité des vagues; 
celte même matière lui sert aussi pour envelopper quelques 
petits œufs ronds, jaunes, qu’il pond en avril, lesquels n’éclosent 
qu'un mois et demi après: Ces Gastéropodes paroissent herma- 
phrodites , leur nourriture consiste en débris d'êtres marins; l'ab- 
domen contenant les viscères est aussi long que le pied; au 
moindre atlouchement qu'ils éprouvent, ils plient en spirale les 
filets qui composent les branchies, rentrent le cou et la moitié 
de leurs tentacules dans leur corps, qu'ils recouvrent avec les 
membranes latérales, et restent tranquilles jusqu’à ce que le repos 
soit rélabli dans le liquide. 


1. N. ümide, N. NN. timidus, N. 
NN. corpore rhomboideo , supra viridi; subtus candido, rubro 
punctato, N. 


Corps formant un disque rhomboïdal, dont deux angles ser- 
vent à déterminer les parties antérieure et postérieure, les deux 
autres sont les angles latéraux. Cou presque arrondi , assez long, 
contractile, d’un vert voilé de blanc finement pointillé de rouge. 
Yeux petits, noirs, proéminens, situés sur les côtés supérieurs 
en dessous des tentacules. Bouche placée à l'extrémité du cou, 
fendue longitudinalement, garnie sur les bords de quatre petits 
filets tentaculaires, charnus, rétractiles. T'entacules auriformes, 
verdètre à leur base, le droit plus long que le gauche : de son 
milieu sort, au gré de l'animal, un filet subtil d'un beau blanc, 
qui est sans doute l'organe générateur. Dos aplati, garni à son 
origine, à la base du cou, de pelites James ou branchies simples, 
quelques-unes bifides, placées comme en fer à cheval. Parties 
latérales prolongées sur les côtés en membrane festonnée ; elles 
forment une espèce de triangle isoscèle que l'animal tient toujours 
relevé et fait mouvoir dans sa marche. Pied alongé, blanchàtre, 
terminé en pointe, perforé vers son extrémité d’un tubercule 
creux , qui fait fonction d’anus. Ce Notarche est d’une consistance 
molle, d'un beau vert de pré sur sa partie supérieure, d'un 
beau blanc parsemé de pelits points rouges sur l'inférieure , 

avec 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 377 


avec des bandes longitudinales vertes qui bordent le pied de 


chaque côté. 
Long., o010—0012; larg., 0003—0008. Appar., mars, avril. 


Séjour, sous les pierres. 


ZOOLOGICAL MISCELLAN Y, zrc., 
OU 


MÉLANGES DE ZOOLOGIE:; 
Par M. ze Docreur LEACH. 


Avec des figures coloriées par Nodder. Troisième volume. 
EXTRAIT (suite). 


Le XII° article de l'ouvrage que nous analysons, contient 
les caractères des genres de la classe des Myriapodes, que M. le 
Dr Leach place encore après les Crustacés, et qu'il caractérise 
cependant d’après les observations les plus récentes. Il la sub- 
divise, avec juste raison, en deux ordres, qu'il nomme, le pre- 
mier , les Chilognathes, Chilognatha, qui correspond au genre 
Lulus des auteurs linnéens; et le second, les Syngnathes, Syn- 
gnatha, où leurs Scolopendres Il est faächeux que M. Leach ait 
employé comme nom de cet ordre, une dénomination déjà con- 
sacrée pour désigner un genre de poisson. D'ailleurs, ne seroit-il 
pas préférable, dans le développement que la grande quantité 
d'espèces nouvellement connues nous force de donner au sys- 
tème de Linnæus, de nous rattacher au travail de ce grand 
homme , en conservant pour nom d'ordre, la dénomination du 
genre sous laquelle il avoit désigné un groupe d’animaux que 
nous croyons devoir subdiviser ; par là, nous obtiendrons deux 
choses importantes; nous embrouillerions moins la science, et 
nous honorerions la mémoire du plus grand des zoologistes 
systématiques. Quoi qu'il en soit de cette observation, M. Je Dr 
Leach établit dans ce groupe un seul genre nouveau qu’il nomme 
Craspedosoma, et auquel il donne pour caractères distinctifs, 
d’avoir le corps alongé, linéaire, déprimé, composé d’un grand 
nombre d’articulations comprimées et rebordées latéralement, 
et dont les anlennes insérées comme dans les Iules, ont le 


Tome LXXXVII. NOVEMBRE an 1818. Bbb 


378 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


deuxième article plus court que le troisième , au contraire de 
ce qui a lieu dans ce dernier genre. D'où l’on voit que ce sont 
des genres excessivement rapprochés. Les deux seules espèces 
de Craspédosome sont, à ce qu'il paroit, nouvelles, quoique 
très-communes sous les pierresen Ecosse et en Angleterre. L'une, 
C. rawlinsii, figurée pl. 134, fig. 1—5, a les anneaux du corps 
saillans vers le milieu, et le dos brun avec quatre lignes de points 
blancs, tandis que dans l’autre, le C. polydesmoïdes, pl. 154, 
fig. 6—9, les anneaux du corps ont une saillie postérieure , 
et l'angle postérieur pourvu de soies, ce qui rappelle certaines 
espèces de Néréides. Dans le genre Zulus, M. Leach fait con- 
noitre quatre espèces qu'il regarde comme nouvelles, et qui 
sont les Z. londinensis, niger, unclatus et pusillus. 

Dans l’ordre des Syngnathes, il établitun plus grand nombre 
de genres nouveaux. Der il change , avec Illiger, la déno- 
mination de Seutisère, employée par M. de Lamarck pour dé- 
signer les espèces de Scolopendre qui ont les anneaux du corps 
couverts deux à deux par une sorte d’écaille, en celle de Cer- 
malia , parce que le nom de Scutigère est déjà employé pour 
d’autres corps organisés. Il fait, en outre, connoîltre une nouvelle 
espèce qu'il appélle €. Uivida, tab. 136, dont le corps est livide 
et les pieds jaunes, et qui provient de Madère. Le second genre 
de cet ordre, est celui que M. Leach nomme Zithobius; quoi- 
qu’assez rapproché du précédent, il en diffère parce que toutes 
les articulations inégales sont visibles , et surtout parce que l’ex- 
pausion lamelliforme de la seconde paire d’appendices est lar- 
gement échancrée et fortement dentelée. Le type de ce genre 
est le Scolopendra forficata de Linnœus. M. Leach y joint deux 
nouvelles espèces, qu'il nomme Z. variegatus et vulgaris, et qui 
différent essentiellement par la forme de l'expansion lamelliforme. 

Dans le genre Scolopendre, il divise les espèces d’après la 
forme des segmens du corps. Dans la première section, qui les 
a alongés ou sub-alongés et irréguliers, il place le S. morsitans; 
dans la seconde, dont les segmens sont transverses , et alter- 
nativement plus grands ou plus petits, le $. alternans, dont 
il donne une excellente figure, tab. +58 ; le S. subspinipes et 
le S. trigonopoda, qui sont toutes trois nouvelles et qui paroissent 
ne différer que par la forme ronde, sub-ronde ou trigone , des 
pieds postérieurs, et peut-être par la disposition des épines dont 
est armé leur premier article. 

Le genre Cryptos, dont l'établissement est dû à M. Leach, 
ne me paroit guere différer des véritables Scolopendres, qne 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 379 


par l'absence totale d’yeux. Il contient deux espèces , toutes deux 
d'Angleterre, l'une, le C. hortensis , lab. 139, fig. 1 ; 2» 3, 4 qu 
est de couleur ferrugineuse, et le €. Savignu, qui est jaunatre 
et a les pieds postérieurs un peu épineux. L Me 

Le dernier genre, nommé par M. Leach Geophilus , a Evi- 
demment beaucoup de ressemblance avec certaines especes de 
Néréides; ses antennes, presque cylindriques, n’ont que 1427 
ticles; les articles basilaires de la secoude paire de pieds, sont 
à peine séparés antérieurement par une fissure. Les yeux sont 
nuls. Les espèces de ce genre sont divisées en deux sections , 
d'après la longueur des articles des antennes ; dans la premiere ;, 
qui les a courts, sont le Geop. carpophagus, qui a les antennes, 
la tête et l’anus jaunätres, le corps violacé et les pieds d'un 
jaune pale; le Geop. subterraneus, long de trois pouces ; le 
corps jaune et la tête ferrugineuse; le Geop. maritimus , tab. 140, 
fig. 1-2, linéaire, d’un brun ferrugineux, la tête et les antennes 
de celte dernière couleur, les pieds d’un jaune brun; le Geop. 
acuminatus , dont le corps plus étroit en avant, est entièrement 
ferrugineux, la tête et les pieds plus pâles. Dans la seconde 
section, qui a les articles des antennes un peu alongés, il n'y 
a qu’une espèce, le Geop. longicornis, tab. 410, fig. 3-6, 
dont le corps est jaune et la tête ferrugineuse. Toutes les es- 
pèces de ce genre n'ont été, à ce qu'il paroïit, observées jus- 
qu'ici qu'en Angleterre. 

Le X° article est entièrement consacré à donner les carac- 
ières de la classe des Arachnides, et des familles qu'il y établit. 
Ces familles ne sont qu'au nombre de quatre , savoir: les Scor- 
pionides, les T'arentulides, les Phalangides , les Solpugides et les 
Arachnides, dont les noms indiquent les principaux genres qui 
les composent, et qui sont tous assez bien connus. Quant aux 
autres genres, qui forment la division des Ærachnides trachéennes 
de M. Latreille (les G. Pyenogonum, Phoxichilus, Ammothea et 
Nymphum, dont la place dans la série lui semble encore incer- 
taine, exceptés), M. Leach en forme une classe particulière qu’il 
nomme Acari. Îl paroit vouloir y joindre les genres P?halangium, 
Solpuga, Trogulus et peut-être les Cirons, dont cependant il 
a donné les caractères dans la classe des 4rachnides proprement 
dites , en sorte qu'il est assez diflicile de savoir au juste quelle 
est la classification à laquelle s'arrête définitivement M. Leach. 
Ces vacillations nous paroissent évidemment provenir de ce qu'il 
a encore pris pour point de départ, la nature des organes de 
la respiration. Notre ami ne paroït cependant pas toujours èlre 


Bbb 2 


380 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


conséquent à cette maniere de voir, puisqu'il place avec les 
Scorpions, animaux qui respirent par des sacs pulmonaires, les 
Pinces et les Obesium , séparés de ce genre par Illiger, qui 
ont tant de rapports avec les Æcarus , et qui respirent évidem- 
ment par des trachées, Quoi qu'il en soit, M. le Dr Leach fait 
connoitre par de bonnes figures, plusieurs espèces nouvelles dans 
ces deux premiers genres, et qui existent toutes en Angleterre; 
il les distingue surtout par la forme et la proportion des articles 
des pinces. Quant aux Scorpions proprement dits, il les sépare 
en deux genres, d’après le nombre des yeux; les Scorpions 
proprement dits n’ont que 6 yeux , comme le Scorpion d'Europe, 
tandis que les espèces qui en ont huit comme le S. d’Espagne, 
forment le nouveau genre Buthus. 1 nous semble que si M. Leach 
croyoit nécessaire de séparer les Scorpions en deux genres, il 
pouvoit tirer ses caractères d'organes évidemment plus impor- 
lans, comme de la forme grêle et alongéé, ou courte et forte 
de la pince, de la disposition des dents dont elle est armée, 
ce qui se trouve parfaitement concorder avec la longueur des 
peignes , et méme de la queue abdominale. Il auroit en outre 
obtenu par là, une plus égale répartition des espèces; car son 
genre Buthus n’en contient guère plus de deux. 

Avant de passer à l'illustration de quelques familles de véri- 
tables insectes, M. Leach parle dans son XV® article, d’un petit 
groupe d'animaux extrémement remarquables, et tout-ä-fait ano- 
maux, du moins sl étoit vrai qu'ils eussent la bouche sur le 
dos, c’est des Phtiridies que je veux parler, très-petit animaux 
parasites, que M. Latreille a nommés Wycierebies , et qu'il a cru 
devoir placer parmi les Diptères, tout en faisant l'observation 
qu'ils pourront constituer un ordre disünct. Le Dr Leach, s'ap- 
puyaut sur ce que ces animaux n’ont pas d'antennes, et que la 
iète est réunie au corcelet, du moins selon lui, a cru devoir 
en faire une division de la classe des Arachnides, mäis, à ce 
qu'il nous semble, tout-à-fait à tort. En effet, en étudiant avec 
soin cet animal, on trouve qu'il a, du moins si j'ai bien vu, la 
bouche à la partie inférieure et non sur le dos; des antennes, 
des palpes, une lèvre inférieure, tout cela appartenant à une 
tète bien distincte , enfin une disposition générale des parties 
à peu près semblable à ce qui a lieu dans les Hippobosques. 
Voici du moins ce que j'ai cru voir sur l'individu qui a servi 
à l'établissement de l'espèce que mon ami a bien voulu me dé- 
dier. Le corps paroît, au premier abord, n'être composé que 
de deux parties , le thorax et l'abdomen ; le premier est le plus 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 56 


er 


large, clypéiforme, convexe en dessus, concave en dessous 
certainement formé d'une seule pièce, et debordant par 52 cir 
conference la racine de la première paire de pattes. De chaque 
côté et en dessus , se voit une ligne ovale, noire, un peu courbée 
et que je crois un sligmate thoracique, et dans la ligne mé- 
diane, une autre ligne ou impression noire. Vers le milieu 
est une sorte de chevron jaune, dont les branches tournées 
en arrière n'atleignent pas tout-àa-fait le bord du bouclier. 
A sa parlie inférieure en avant, et dans la ligne médiane, 
on voit un point uoir dont j'ignore la nature, et plus en 
arrière, et également dans la ligne médiane, au tiers antérieur 
du thorax , une masse fort singulière au premier apercu, et qui 
me semble n'être autre chose que la tête. Elle est en effet fort 
mobile sur le thorax à sa racine; son enveloppe est coriace, 
cylindrique; à la partie antérieure ou supérieure de son extré- 
mité, se voit une paire d'appendices assez longs, probablement 
articulés et garnis de poils à l'extrémité, qui est séparée d’une 
sorte de lèvre inférieure, occupant le bord postérieur de cette 
espèce de trompe par une échancrure assez profonde, au fond 
de laquelle se trouve très-probablement l'entrée du canal in- 
testinal, Enfin, sur le dos de cette masse se voit un organe assez 
mou , cylindrique, terminé par une pelite pointe, que je suis 
fort porté à regarder comme un rudiment d'antennes. L’abdomen, 
un peu pédiculé, se compose de six articles, dont les cinq pre- 
miers sont presque égaux, mais le dernier beaucoup plus long, 
étoit terminé par deux courts appendices , garnis de quelques 
poils longs à leur extrémité. Les membres ou appendices pour 
la locomotion, sont extrêmement longs, gréles ct pour ainsi 
dire indifférens pour la direction de leurs flexions; aussi sont-ils 
articulés sur le bord même ou la tranche du thorax, du moins 
pour les deux paires postérieures, car l’antérieure est évidem- 
ment attachée au dedans du bord, et du même côté que se lrouve 
la tête, et par conséquentda bouche. Ces pattes, d’autant plus 
longues qu’elles sont plus postérieures, sont composées toutes 
de quatre articulations principales, la première courte, les 
seconde et troisième beaucoup plus longues et presque égales, 
celle-ci seulement plus grêle; enfin, la quatrième un peu plus 
courte et extrêémement gréle , porte, à son extrémité, cinq autres 
très-pelits articles , dont le dernier est armé d’une double paire 
de crochets ou d'ongles crochus et aigus. Je ne voudrois pas 
assurer que la description que je viens de donner, convienne 
exactement au P. hermanni, que figure M. Leach, tab. 144. 


vs 


382 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


ES 


ANALYSE DE MINÉRAUX, 


Par M. re Comure Dunix BORKOWSKY. 
EXTRAIT Par M. DE BONNARD. 


1°. Description et analyse de lEgeran, 


Depuis que M. Berzelius a étendu à la Minéralogie la con- 
noissance des proporlions exactes des principes constituans, dit 
M. le comte Borkowski, l'analyse des minéraux a acquis un 
intérêt nouveau, puisque dans la détermination des espèces mi- 
nérales, la nature des principes et la quantité de ces principes 
sont maintenant d’une égale importance. L'analyse de l'Egeran, 
substance que Werner a introduite comme espèce distinete dans 
son dernier tableau systématique des minéraux, va nous fournir 
une nouyelle preuve de la justesse de cette considération, en 
même temps qu’elle nous montrera comment les recherches do- 
cimastiques peuvent servir de points de repère, même à ceux 
des minéralogistes qui ne rendent pas un hommage exclusif 
au sysième chimique. 

M. le comte Borkowski rapporte, avant son analyse, la ca- 
ractéristique que M. Breithaupt a donnée del’Egeran , parce qu'elle 
a élé faite sur les nombreux échantillons qui ont servi à Werner 
pour déterminer cette espèce, et parce qu’elle convient d’ailleurs 
parfaitement aux échantillons que l’auteur possède ; il joint à cette 
description, l'indication de caractères physiques et chimiques 
quil a observés lui-même. 


Caractères extérieurs. 


Couleur. D'un brun-rougeätre , passant rarement au brun hé- 
palique. 

Forme extérieure. Tanlôt en masse, et tantôt cristallisé en 
prismes quadrangulaires, dont les faces latérales sont un peu 
convexes, et dont les angles paroissent tantôt droits, tantôt un 
peu différens de l'angle droit, ce qui provient sans doute, dans 
ce dernier cas, tant de ce que les pans sont fortement striés 
dans leur longueur, que des troncatures ou des bisellemens qui 
remplacent quelquefois les bords latéraux. Les faces terminale 
sont toujours parfaites. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 583 


Éclat. À extérieur, éclatant, et très-éclatant sur les faces 
terminales ; à l'intérieur, peu éclatant, d’un éclat vitreux qui se 
rapproche un peu de l'éclat gras. 

Cassure. La cassure est lamelleuse et présente un double cli- 
vage, dont les deux sens se coupent à angle droit, parallèle- 
ment aux plans du prisme. On remarque aussi une cassure trans- 
versale , compacte et inégale , se rapprochant quelquefois de la 
cassure inparfaitement conchoïde. 

L'Egeran en masse présente constamment des pièces séparées 
scapiformes, minces tantôt divergentes en faisceaux, tantôt en- 
trelacées. 

Transparence. Foiblement translucide sur les bords. 

Dureté. Dur, mais à un foible degré. 

Ductilite. Aigre. 

Pesanteur spécifique, 3,294. L'Egeran a été trouvé à Hassau, 
près d’'Egra en Bohème. 

D’après les expériences de M. le comte de Borkowsky, l'Egeran 
n’exerce aucune action sur l'aiguille aimantée, même quand 
on a dérangé l'aiguille de sa direction, suivant la méthode in- 
diquée par M. Haüy, pour essayer les minéraux foiblement ma- 
gnétiques. L’Egeran n'est électrique ni par chaleur, ni par frot- 
tement. Ces propriétés lui sont communes avec l'Idocrase, ainsi 
que la plupart de ses caractères exlérieurs. 

L'Egeran fond au chalumeau beaucoup plus facilement que 
l'Idocrase, et avec bouillonnement. M. Breithaupt remarque que 
l'Egeran se distingue essentiellement de lIdocrase par la couleur 
et par la structure des pièces séparées; le premier de ces ca- 
ractères , dit M. le comte de Borkowsky, ne peut pas être re- 
gardé comme important, et on doit d'autant moins lui donner 
d'importance dans le cas actuel, qu’on trouve en Piémont des 
Idocrases dont la couleur diffère beaucoup plus de celle des 
Idocrases du Vésuve et de Sibérie, que celles-ci ne diffèrent de 
l'Egeran. Mais la structure est un caractère assez essentiel pour 
faire douter de l'identité des deux substances (1). 

Sans entrer dans les détails de l'analyse qui a été faite avec 
beaucoup de soin par M. le comte de Borkowsky, nous en ferons 
connoître seulement les résultats. 


(1) On trouve dans les Annales des Mines, première livraison de 1818 , une 
note de M. Cordier sur l'Egeran, dans laquelle il conclut à la réunion de cette 
substance à l'espèce de l’Idocrase. La même opinion avoit été émise par M. de 
Monteiro , dans sa correspondance avec M. Haüy. 


384 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
L'échantillon d'Egeran analysé a donné, sur 100 parties, 


DUICES ST. en RUE EN SET 
Alone es EDR ERRNN ETES AURAS 
CRAN PES ES QU UE en 
Magnésiesle es s DRM LA RE Oo 
VHS ARGR PRO TS FÉES ERDE PETER AE 
Manganèse.. SE D ee NT ef AS PRE 2 
Rotassen ess HS don I 

Lotallit. Sens ts fithe de 


En ne faisant même aucune attention à la magnésie et à la 
potasse, dit l’auteur de l’analyse, les seules proportions des autres 
principes suflisent pour établir une différence essentielle entre 
l'Egeran et l'Idocrase. En eflet, en comparant les résultats ci- 
dessus indiqués avec ceux obtenus par Klaproth, dans l'analyse 
de l'Idocrase, et appliquant à ces résultats les principes posés 
par M. Berzelius, on voit que 


(Oxigène de Chaux (Oxigène de Alnnones (Oxigène de 


Silice. la Silice.) la Chaux.) PAlumine.) 
L'Tdocrase contient, 35 . . (17,37) . . 33 . . (9,94) . . 22 . . (10,27) 
L'Egeran contient, 41 . . (20,35) . . 20 . . (5,88) . . 29 . . (10,27) 


D'où il résulte que l'Idocrase est un Silicias-aluminico-calcicus 

de M. Berzelius, tandis que l'Egeran est un Silicias aluminicus 
‘uni à un Pisilicias calcicus. 

M. le comte Borkowsky fait observer ensuite, que la présence 
de la magnésie et de la potasse dans l'Egeran, vient à l'appui 
de la séparation des deux substances, et confirme la justesse 
des principes du célèbre chimiste suédois ; qu’ainsi l'Egeran paroît 
devoir constituer une espèce distincte dans le système minéra- 
logique, et rester comme un nouveau et dernier témoignage 
de l’admirable perspicacité de Werner, qualité, ajoute-t-il, qui 
est peut-être ensevelie à jamais avec ce grand minéralooiste. 

2°. M. le comte Borkowsky a aussi analysé le Tantalite de 
Bavière et la Meïonite, ’ 

La Meiïonite lui a donné pour résultats, sur 100 parties, 

(Oxigène d’après M. Berzelius.) 
SUCER PACA. 064) 
NT ES en EE) 
REX L EE Aie: 2 7 8e GE ea NL 1) 
DOUTE Re ER MONS 
Total! "Melon; 


Cette 


LS 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 385 


Cette substance forme donc, d’après le système de M. Ber- 
zelius, un Silicias aluminico-calcicus, dont l'expression seroit 


CS + 5AS. 
La Tantalite de Bavière a donné à l’analyse, 


Onde de tantale- 2.12. «. «  . . 79 
Ondeidenter sde ue. 0.8.0 20 
Oxide de manganèse. . . . . . . 4 
JETTA G VON ER OPEN OR REP SARLE 0,5 


To obus Non 700,5 


Les détails de cette dernière analyse ont été envoyés par 
l’auteur, à M. Léonhard, en janvier 1816, pour être insérés 
dans le XII° volume de l'Annuaire de Minéralogie. Son résultat 
concorde entièrement avec celui que M. Vogel a publié depuis 
dans le Journal de Chimie de Schweiger. 


OBSERVATIONS DE M. THENARD 


Sur les Combinaisons nouvelles entre lOxigène et diverses 
Substances. 


Dans notre Cahier de juillet, nous avons fait connoitre à nos 
lecteurs les premiers résultats obtenus par M. Thenard, dans 
celte nouvelle classe de corps qu'il.se proposoit d'étudier suc 
cessivement avec plus de détails. C’est en effet ce qu'il a fait, 
et ce qu’il fait encore avec tout le succès desirable. 

Nous avons vu qu'il a successivement réussi à oxigéner la 
plupart des acides minéraux, c’est-à-dire les acides nitrique, 
sulfurique, phosphorique , fluorique , borique. Il s'est également 
assuré que la plupart des acides végétaux possèdent aussi cette 
propriété. On les obtient en versant de l'acide kydro-chlorique 
oxigéné sur la combinaison de l’oxide d'argent avec l'acide vé- 
gétal. Il ne se dégage aucun gaz au moment de la réaction, 
et à peine en apercoit-on quelques bulles, du moins avec les 
acides acétique, oxalique et tarlarique, lorsqu'on porte la li- 
queur à l’ébullition. 

Il s’est en outre occupé de rechercher la quantité d’oxigène 
que pouvoient prendre les acides nitrique et hydro-chlorique, 
qu'il paroit avoir plus spécialement étudiés. Pour celui-ci, il a 


Tome LXXXV II. NOVEMBRE an 1818. Ccc 


386 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


pris de l'acide hydro-chlorique liquide, au point de concen- 
tration où, en le combinant avec la baryte , il en résultoit une 
dissolution qui, par une légère évaporation , laissoit déposer 
des cristaux d'hydro-chlorate. Cet acide a été saturé de deu- 
toxide de baryum, et la baryte a été précipitée de la liqueur 
par une quantité convenable d'acide sulfurique. L’acide hydro- 
chlorique oxigené ainsi obtenu, a été de nouveau traité par le 
deutoxide de baryum, et l'acide sulfurique pour l'oxigéner de 
nouveau, et cela jusqu'a quinze fois. M. Thenard a ainsi ob- 
teuu un acide qui contenoit trente-deux fois son volume d'oxi- 
gène à la température de 20°, sous la pression de 0,76°, et 
seulement quatre volumes et demi de gaz hydro-chlorique, c'est 
à-dire que le volume d’oxigène étant 7, celui de l'acide hydro- 
chlorique n'étoit que de 1. On peut cependant encore faire 
recevoir une nouvelle portion d'oxigène à cet acide, mais par 
un autre procédé, qui consiste à le mettre en contact avec du 
sulfate d'argent , à séparer par le filtre le chlorure d'argent 
insoluble qui se forme de l'acide sulfurique oxigéné très-so- 
luble, à verser dans celui-ci de l'acide hydro-chlorique, et dans 
le mélange assez de baryte pour précipiter l'acide sulfurique ; 
alors l’acide hydro-chlorique passe au summum d’oxigénalion. 
En combinant ces deux méthodes, M. Thenard a obtenu de 
l'acide hydro-chlorique oxigéné, qui contenoit en volume près 
de 16 fois autant d’oxigène que l'acide hydro-chlorique réel. 

Cet acide , mis sous le récipient de la machine pneumatique, 
ne laisse dégager qu'une très-petite partie du gaz qui s’y trouve 
renferme. 

A la température de l’eau bouillante continuée pendant une 
demi-heure, il reste encore de l’oxigène ; ce qu’on démontre 
aisément par le moyen de l'oxide d'argent; à peine le contact 
a-t-il lieu , que le dégagement s’en fait tout à coup; aussi M. The- 
nard se sert-il de ce moyen pour déterminer la quantité d’oxi- 
gène contenu dans l’acide hydro-chlorique oxigéné, et cela très 
aisément et en peu de temps. Il remplit un tube de verre gradué 
presqu'entièrement de mercure, sur lequel il met ensuite un 
volume déterminé d'acide, et il achève de remplir de mercure 
le tube, qu'il renverse sur le bain ; on y fait passer ensuite un 
excès d’oxide d'argent tenu en suspension dans l’eau, et tout 
à coup on voit le volume d’oxigene; mais tout cet oxigène 
ne provient évidemment pas de l'acide hydro-chlorique oxigéné 
par l’oxide d'argent, il y en a une petite quantité provenant de 
cet oxide; pour la déterminer, on recueille le chlorure d'argent 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 387 
produit et mêlé à l'oxide d'argent; on traite le mélange par 
Pammoniaque, et on a pour résidu le métal de l’oxide réduit, 
et par conséquent la quantité d’oxigène cherchée; mais comme 
dans la première opération ce dégagement de l'oxigène est ex- 
trémement rapide, il y auroit du danger à opérer sur un 
acide foible qui contiendroit 26 à 30 volumes d'oxigène. 

Il étoit assez curieux de savoir si les acides oxigénés pou- 
voient prendre d'autant plus d’oxigène, qu'ils contenoient plus 
d'acide réel, ou si l'eau, par sa quantité, n’avoit pas une in- 
fluence sur la plus ou moins grande oxigénation de l'acide ; 
aussi M. Thenard a-til fait plusieurs tentatives pour le savoir, 
mais jusqu'ici il n’a pu résoudre complètement celte question. 


La strontiane, la chaux et la baryte sont susceptibles d'être 
sur-oxidées par les acides sur-oxigénes. Lorsqu’en effet on verse 
un excès d'eau de baryte dans l'acide nitrique, ou dans l'acide 
hydro-chlorique oxigéné , et à plus forte raison Sa SES ,ilse 
forme un précipité cristallin d'hydrate de deutoxide de barium. 
Ce précipité est très-abondant en paillettes nacrées, et peu so- 
luble dans l’eau. Celle-ci à 10°, le décompose et le transforme 
en gaz oxisène, ou en baryte, ou protoxide de baryum. L'hy- 
drate de deutoxide de strontiane ressemble beaucoup à celui 
de baryum , celui de chaux est en paillettes plus fines. 


Quant à l’alumine et à la magnésie, M. Therard a tenté 
jusqu'ici sans succès de les oxigéner; mais il est parvenu à 
sur-oxigéner plusieurs oxides, savoir, ceux de zinc , de cuivre 
et de nikel. Pour y parvenir, il faut dissoudre ces oxides dans 
de l'acide hydro-chlorique oxigéné trois à quatre fois, et dé- 
composer ensuite lhydro-chlorate qui s’est formé par de la 
potasse ou de la soude, dont il faut ne mettre qu'un petit 
excès. L'oxide se précipite en masse gélalineuse, ou à l’état 
d'hydrate jaunâtre pour le zinc, d’un vert olive pour le cuivre, 
et d'un vért pomme sale peu foncé pour le nikel. Les deux 
premiers laissent dégager une portion de leur oxigène à la lem- 
pérature ordinaire, une bien plus considérable quand on les fait 
bouillir avec l’eau , mais jamais ils n’abandonnent tout celui qu'ils 
ont absorbé, surtout l’oxide de zinc; celui de nikel se décom- 
pose aussi par l’ébullition , et même au-dessous. Traité par de 
l'acide hydro-chlorique, il se dissous comme les oxides de zinc 


et de cuivre, et se désoxigène par la chaleur sans qu'il se ma- 
nifeste de chlore. 


M. Thenard, dans le cours de ses recherches, a été conduit 
Ccc 2 


388 JOURNAL DE PIYSIQUE, DE CHIMIE 


à essayer l’action des acides oxigénés sur les sels, et ensuite 
sur les oxides métalliques. 

Les acides nitrique et bydro-chlorique oxigénés, dissolvent 
l'hydrate de deutoxide de mercure sans effervescence; mais si 
l'on verse un excès d’alcali dans la dissolution, il se dégage 
beaucoup d’oxigène. Cet hydrate est également réduit en le 
metlant en contact avec le nitrate et l'hydro-chlorate de potasse 
oxigéné. 

En mettant dans de l'acide hydro-chlorique oxigéné de l’oxide 
d’or en gelée, et extrait de l’hydro-chlorate d’or par la baryte, 
il y a vive effervescence due au dégagement d’oxigène, l’oxide 
devient pourpre , et peu de temps après il est complètement 
réduit. É 

Les acides nitrique, sulfurique et phosphorique oxigénés pro- 
duisent à peu près les mêmes phénomènes avec l'oxide d’or, 
mais l’oxide devient brun foncé, au lieu de prendre l'aspect de 
l'or précipité par le sulfate de fer. 

L’acide nitrique oxigéné versé sur l’oxide d'argent, produit 
une vive effervescence due au dégagement de l’oxigène , comme 
dans les cas précédens. Une portion de l’oxide se dissout, l’autre 
se réduit d’abord et se dissout ensuite elle-même , pourvu que 
l'acide soit en quantité convenable. Si l’on verse , la dissolution 
étant faite, de la potasse peu à peu, il se produit une nouvelle 
effervescence, el un précipité d’un violet noir foncé, insoluble 
dans l’'ammoniaque, et selon toute apparence, dit M. Thenard, 
un protoxide d'argent. 

Les acides sulfurique et phosphorique oxigenés, réduisent 
aussi l’oxide d'argent en donnant lieu à une effervescence. 

Nous avons parlé plus haut de l’action de l'acide hydro-chlo- 
rique oxigéné sur l'argent. 

L’acide nitrique oxigéné dissout les peroxides de manganèse 
et de plomb, avec la plus grande facilité, et il y a un grand 
dégagement d’oxigène. La potasse produit un précipité noir 
floconneux dans la dissolution de manganèse, et couleur de 
brique dans celle de plomb. 

L’acide hydro-chlorique le plus oxigéné possible, versé sur 
du sulfate, sur du nitrate, sur du fluate ou du phosphate d’ar- 
gent , ne produit aucune effervescence; tout son oxigène s’unit 
a l'acide du sel. 

M. Thenard a déjà fait aussi quelques essais sur l’action des 
sels oxigénés sur les métaux oxidés ou non; ainsi lorsqu'on 
plonge un tube chargé d’oxide d’argeut dans une dissolution de 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 389 


nitrate oxigéné de potasse, il y a effervescence par le dégage- 
ment de l'oxigène provenant du nitrate oxigéné, ainsi que de 
l'oxide d'argent qui se réduit et se précipite, et la dissolution 
ne contient plus que le nitrate de potasse. di 

L'oxide d'argent se comporte avec l’hydro-chlorate oxigéné 
de potasse, comme avec le nitrate oxigené. 

Le peroxide de manganèse et celui de plomb, peuvent éga- 
lement décomposer les nitrates et hydro-chlorates oxigénés de 
potasse. Peut-être le dernier est-il ramené à un moindre degré 
d’oxidation. 

Les sulfates, phosphates et fluates oxigénés se comportent avec 
loxide d'argent, l'argent, et probablement les autres corps, 
de même que le nitrate et l’hydro-chlorate de potasse. 

En mettant de l'argent très-divisé dans du nitrate ou de l'hy- 
dro-chlorate oxigénés de potasse , tout l’oxigène du sel se de- 
gage, l'argent n'est pas attaqué, et il reste un sel neutre. L’ac- 
tion paroit cependant moins vive avec le dernier sel. 

Le fer, le zinc, le cuivre, le bismuth, le platine produisent 
les mêmes effets ; mais les deux premiers s’oxident et les autres 
pas sensiblement. 

C'est ce qui a sans doute conduit M.Thenard à rechercher, 
si le sable et le verre pilé n’auroient pas quelque action sur les 
acides et les sels oxigénés, et il a trouvé que ces substances ne 
produisoient aucun dégagement d'oxigène. 

Quelle peut donc être la cause de phénomènes aussi singuliers? 
Ea rappelant ce que nous venons de voir, quand on met de 
l'argent très-divisé ou de l'oxide avec du nitrate oxigéné neutre 
de potasse, il est évident, dit M. Thenard, que l’action chi- 
mique est nulle; or, ils ne dépendent ni de la chaleur ni de 
la lumière, d'où il suit que tres-probablement ils sont dus à 
l'électricité. Mais dans cette hypothèse, il étoit nécessaire de cher- 
cher, si l'eau seule ne seroit pas susceptible de s’oxigéner. 
C'est à quoi M. Thenard est parvenu dans de nouvelles re- 
cherches communiquées à l’Académie des Sciences dans sa séance 
du 23 novembre; après plusieurs essais infructeux , il a obtenu 
l'oxigénation de l’eau par l'acide sulfurique oxigéné et l’eaul de 
baryte. Voici le procédé qu'il a suivi. Il versa peu à peu de 
l’eau de baryte dans de l'acide sulfurique oxigéné, en ayant soin 
d’agiter constamment la liqueur. Près du point de saturation, 
l'effervescence qui jusqu'alors n’avoit pas été sensible, devint 
assez vive, et le sulfate de baryte se précipita en flocons. La 
saturation achevée le plutôt possible, il filtra et obtint une li- 


390 JOURNAL, DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


queur qui ne contenoit ni acide sulfurique ni baryle, ou du 
moins qui ne précipitoit ni par le nitrate de baryte, ni par 
l'acide sulfurique; elle contenoit cependant beaucoup d’oxigène ; 
évaporée jusqu'à siccité, elle ne laissa qu'un résidu à peine ap- 
préciable, qui n’a très-probablement aucune influence sur l’oxi- 
génation du liquide (1). 

L'eau est donc susceptible de pouvoir étre oxigénée, et 
M. Thenard est déjà parvenu à lui faire absorber plus de six 
fois son volume d'oxigene. 

L'eau oxigénée par ses propriétés physiques, ressemble tout- 
à-fait à l’eau ordinaire; elle est insipide, n’a aucune action 
sur la teinture de tournesol. Parmi ses autres propriétés chi- 
miques qui paroissent être nombreuses, M. Thenard rapporte 
les suivantes : 

Mise sous la machine pneumatique, et le vide étant fait à un 
haut degré pendant un jour entier, il ne se dégage pas d'oxi- 
gène. Elle se distille à la température ordinaire sans éprouver 
d'altération , tandis qu’elle laisse dégager son oxigène tout entier 
à la température de r00°. 

L'oxide de mercure n’a presque aucune action sur elle. 

Mise en contact avec l’oxide d'argent, elle le réduit tout à 
coup, en se désoxigénant elle-même, de sorte que l'efferves- 
cence est très-considérable. L'argent à l’état métallique et l'oxide 
puce de plomb la désoxigène presque aussi bien. 

Les eaux de baryte, de strontiane et de chaux forment avec 
elle une foule de paillettes comparables à celles qui se produisent 
par le mélange d’un acide oxigéné et de ces dissolutions al- 
calines. ! 

Mais si l’eau est susceptible de s’oxigéner, ajoute M. Thenard, 
existe-t-il des acides oxigénés? L'eau oxigénée abandonne beau 
coup plus facilement son oxigène lorsqu'elle est pure, que lors- 
qu’elle contient un peu d'un acide tel que l'acide phosphorique, 
l'acide fluorique , l'acide sulfurique , l'acide hydro-chlorique, 
l'acide arsénique , l’acide oxalique, etc., etc. En effet, que l'on 
prenne de l’eau oxigénée, qu'on la chauffe au point d'en dé- 
gager beaucoup de gaz oxigène, et qu'on y ajoute un peu de 
l'un de ces acides qui pourront être chauffés d'avance, et à 
l'instant même le dégagement de gaz cessera. Les acides sulfu- 


(1) M. Thenard pense qu'il seroit cependant nécessaire de rechercher si ce 
foible résidu n’a réellement aucune influence. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 391 
rique, phosphorique, oxalique, fluorique, peuvent même étre 


chauffés pendant plus d’une heure sans perdre, à beaucoup 
près, tout l'oxigène qu'ils contiennent (1) : ainsi leur présence 
dans l'eau oxigénée augmente donc l’aflinité du liquide pour 
l'oxigène. 

Il paroît en être de même du sucre, de plusieurs autres sub- 
stances végétales, et de diverses substances animales; et sil 
m'étoit permis d'aller plus loin, ajoute M. Thenard, je dirois 
que vraisemblablement la plupart des corps ont sur l’eau ox1- 
génée une action qui tend à unir plus intimement l'oxigène à 
l'eau, ou à l'en séparer. 


NOUVELLES SCIENTIFIQUES. 
ASTRONOMIE. 


Sur une nouvelle Cométe; par M. Pons. 


M. Pons, astronome adjoint de l'Observatoire royal de Mar- 
seille, a découvert le 26 novembre, une nouvelle comète dans 
la constellation de Pégase. D'après les observations de M. Blan- 
pain, elle avoit, le 27 novembre, à 4* 46’ de temps moyen, 
332° 22! d'ascension droite, et 8° 2! de déclinaison boréale. Le 
lendemain, 28, à 8* temps moyen, le mème astronome a vu 
la Comète par 332° 2/ d'ascension droite, et 7° 48’ de déclinaison 
boréale. Cet astre est très-foible, il est visible à l'œil nu ; avec 
une lunette, on apercoit un foible noyau entouré d’une lumière 
pile et diffuse. 

CHIMIE. 


Sur la fausse Angusture, Angustara pseudo-ferruginea; par 
MM. Perrerier et CAVANTOU. 


D’après une note que MM. Pelletier et Cavantou ont lue à la 
Société Philomathique dans sa séance du 29 novembre, la fausse 
Angusture doit ses propriétés vénéneuses à une matière alcaline 
cristallisable, qui paroïît avoir beaucoup d’analogie avec la Vau- 
queline , substance nouvelle dont nous devons aussi la découverte 


. (1) L’acide fluorique l’abandonne un peu plutôt que les autres acides , lorsque 
l'expérience se fait dans le verre, parce que le verre se trouve attaqué. 


392 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CNIMIE , etc. 


aux mêmes chimistes. Elle en diffère cependant par plusieurs 
caractères. Elle est d’abord beaucoup plus soluhle; son deulo- 
nitrate prend une couleur violette superbe par le proto-hydro- 
chlorate d’étain; son nitrate ne cristallise pas comme celui de 
la Vauqueline. Cependant MM. Pelletier et Caventou ne pro- 
noncent pas encore sur l'identité de ces deux substances ou 
sur leur séparation (1); ils n'insistent que sur son existence et 
son alcalinité. 

La poussière jaune rougeàtre qui se trouve souvent à la sur= 
face des écorces de fausse Angusture, ne doit pas sa couleur 
à l'oxide de fer, comme on l’a trop légèrement avance. C'est 
une malière particulière soluble dans l'alcool, et qui prend une 
belle couleur verte par le contact de l’acide nitrique. 


GÉOLOGIE. 
Sur la découverte d'un grand fleuve dans la baie de Van-Diémen, 
au nord de la Nouvelle- Hollande. 


Le capitaine King, chargé par le Gouvernement anglois d’ex- 
plorer la côte nord-ouest de la Nouvelle-Hollande , vient d'en- 
voyer à l'Amirauté, des dépèches datées de Timor, et dont il 
résulte que cet oflicier a rempli avec succès sa mission. il a 
pénétré derrière les îles de Rosemary où Dampier croyoit qu'il 
y avoit une baie ou un grand fleuve; il a également examiné 
les autres points de cette grande côte, et n'y a trouvé aucune 
ouverture , et seulement de petites baies, ainsi que les anciennes 
cartes hollandoises l’indiquoient déjà; il n’y a pas vu de rivière 
considérable. Mais arrivé à la baiede Van-Diémen , au nord dela 
Nouvelle-Hollaude, il y a découvert un grand fleuve qui forme 
à son embouchure un delta considérable, et qu'il a remonté avec 
le schooner le Mermaide, qu’il commande , l’espace de 60 milles ; 
à cette distancé, le fleuve avoit encore plus de 400 pieds de 
large. Le terrain bordant ce fleuve, aussi loin que la vue pouvoit 
se porter, offroit une immense plaine composée d’un sol d'al- 


luvion. La marée remontoit dans ce fleuve à une distance consi- 
dérable. 


== 0070 


(1) Depuis la communication de cette Note, j'ai appris de MM. Pelletier 
et Cavantou, qui poursuivent, comme on le pense bien, leurs expériences 
sur cette écorce, que la matière alcaline de la fausse Angusture étoit certai- 
nement différente de la Vauqueline. (R ) 


De l'Imprimerie de M®e V COURCIER , rue du Jardinet, n° 124 


bre 1818 . 


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JOURNAL 


DE PHYSIQUE, 
DE CHIMIE 
ET D'HISTOIRE NATURELLE. 


DÉCEMBRE an 1818. 


SUITE DES RECHERCHES 
SUR 
LA MESURE DES TEMPÉRATURES 


ET SUR LES LOIS DE LA COMMUNICATION DE LA CHALEUR; 


Par MM. DULONG #r PETIT. 
SECONDE PARTIE. 


DES LOÏS DU REFROIDISSEMENT. 


Les premières vues relatives aux lois de la communication 
de la chaleur, se trouvent consignées dans les Opuscules de 
Newton (1). Ce grand physicien admet, à priori, qu'un corps 
échauffé , soumis à une cause constante de refroidissement telle 
que l’action d’un courant d'air uniforme, doit perdre, dans chaque 
instant, uue quantité de chaleur proportionnelle à l'excès de sa 
température sur celle de l’air ambiant; et que, par conséquent, 
ces perles de chaleur, dans des intervalles de temps égaux et 


(1) Neutoni Opusculo, tome IT, pag. 423. 
Tome LXXXVII. DÉCEMBRE an 1818. Dad 


394 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE. 


successifs, doivent former une progression géométrique décrois- 
sante. Kraft, et après lui Richmaun (1), ont essayé de vérifier 
celte loi par des expériences directes sur le refroidissement de 
masses liquides. Ces expériences, répétées depuis par plusieurs 
physiciens, prouvent en effet que, pour des différences de tem- 
pérature qui n’excèdent pas 40 ou 5o degrés, la loi de la pro- 
gression géométrique représente assez exactement la marche du 
refroidissement d’un corps. 

Dans une dissertation peu connue , sur plusieurs points de la 
théorie de la chaleur, publiée en 1740, par conséquent plusieurs 
années ayant l’époque où Kraft et Richmann ont fait connoître 
leurs recherches, Martine (2) avoit déjà signalé l’inexactitude 
de la loi précédente, et avoit cherché à lui en substituer une 
autre dans laquelle les pertes de chaleur croîtroient plus rapi- 
dement que dans la loi de Newton. 

Erxleben (5) prouva également, par des observations très- 
précises, que l'écart de la loi supposée augmente de plus en 
plus à mesure que l’on considère de plus grandes différences 
de température, et il en a conclu qu'on commeltroit des erreurs 
graves, si l’on étendoit cette loi fort au-delà des limites entre 
lesquelles elle a été vérifiée. Gette remarque très-juste d'Erxleben 
ne paroit pas avoir fixé l'attention des physiciens; car, dans 
toutes les recherches postérieures sur le même objet, on voit 
la loi de Newion présentée, non comme une approximation, 
mais comme une vérité rigoureuse et constatée. 

Ainsi, M. Leslie (4), dans ses ingénieuses recherches sur la 
chaleur, a fait de cette loi la base de plusieurs déterminations 
qui, par cela même, se trouvent inexactes, ainsi que nous le 
prouverons par la suite. 

Peu de temps après la publication des travaux de M. Leslie, 
M. Dalton fit connoitre, dans son Vouveau Traité de Chimie 
philosophique, une série d'expériences sur le refroidissement 
de corps portés à une température très-élevée. Les résultats de 
ces expériences montrent évidemment que la loi de Richmann 
n'est qu'approchée dans les basses températures, et qu’elle devient 
toul-à-fait inexacte dans les températures élevées. M. Dalton, 


Q) Nov. Com. Ac. Pelrop., tome I, pag. 195. 

(2) Dissertations sur la Chaleur, etc., pag. 72 et suiv. 
(8) Novi Comment. Soc. Gotting., tome VIII, pag. 74. 
(4) An Inquiry into the nat. of heat, pag. 265. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 395 


au lieu de chercher à découvrir une autre loi fondée sur ses 
propres observations, essaya de justifier celle de Richmann, 
en substituant à l'échelle thermométrique ordinaire celle qu’il a 
cru pouvoir établir d’après les considérations que nous avons 
discutées dans la première partie de ce Mémoire. Mais, lors 
même que._l'on auroit constaté l'exactitude des principes sur 
lesquels repose celte nouvelle échelle, on seroit encore forcé 
de convenir qu’elle ne satisfait pas à la condition de rendre les 
pertes de chaleur d’un corps proportionnelles aux excès de sa 
température sur celle de l'air environnant , ou, en d’autres 
termes, qu’elle ne rétablit pas la loi de Richmann; car il fau- 
droit pour cela, que la loi du refroidissement füt la mème pour 
tous les corps, et nos expériences prouvent rigoureusement le 
contraire. 

Les derniers travaux entrepris sur le sujet qui nous occupe, 
sont ceux que Laroche a insérés dans son Mémoire relatif à 
quelques propriétés de la chaleur rayonnante. Il établit, entre 
autres propositions , que La quantité de chaleur qu'un corps chaud 
cède dans un temps donné, par voie de rayonnement, à un corps 
froid situé à distance , croît, touiés choses égales d’ailleurs, suivant 
une progression plus rapide que l'excès de la température du premier 
sur celle du second. 

Cette proposition est, comme on le voit, pour le rayonne- 
ment, l'équivalent de celle de M. Dalton pour le refroidisse- 
ment total d’un corps dans l'air; mais Laroche n’a présenté que 
des résultats isolés, et n’a pas cherché la loi dont ils dépendent. 
Nous verrons même par la suite que ces résultats sont com- 
pliqués par l’action de causes particulières dont il auroit fallu 
les dégager pour arriver à la loi du refroidissement dans le 
vide, qui, d’ailleurs, n’est pas la même qne celle du rayon- 
nement. 

Les travaux des physiciens sur les lois du refroidissement se 
bornent donc jusqu'ici à avoir montré que la loi. admise par 
Newton est suffisamment approchée, tant que l’on ne considère 
que de pelits excès de température; mais qu’elle s'éloigne de 
plus en plus de la vérité, à mesure qu'on l'étend à des diffé- 
rences de plus en plus grandes : et si, dans l'exposé succinct 
de ces travaux, nous n'avons pas cité les recherches mathé- 
matiques de M. Fourier sur les lois de la distribution de la 
chaleur, c’est que toutes les applications de son analyse sont 
fondées sur la loi de Newton, admise comme une vérité d'ob- 
Servalion, tandis que nos expériences ont uniquement pour 


Ddd 2 


396 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


objet de découvrir la loi qu'on doit substituer à celle-ci. Du 
reste , les conséquences très-remarquables auxquelles ce profond 
géomètre a été Conduit, conserveront toute leur exactitude dans 
les circonstances et entre les limites où la loi de Newton se 
vérifie, et il suflira, pour les étendre aux auires cas, de les 
modifier conformément aux nouvelles lois que nous établirons. 


Du Refroidissement en général. 


On sait que lorsqu'un corps se refroidit dans le vide, sa cha- 
leur se dissipe entièrement sous forme rayonnante , et que lors- 
qu'il est placé dans l'air ou dans tout autre fluide, son refroidis- 
sement devient alors plus rapide , parce que la perte occasionnée 
par le fluide s'ajoute à celle que produit le rayonnement. Ilest 
donc indispensable de distinguer ces deux eflets; et, comme 
ils sont d’ailleurs assujétis, suivant toute apparence, à des lois 
différentes, 1l est nécessaire de les étudier isolément. C’est ce 
que nous allons faire en traitant successivement du refroidisse- 
ment dans le vide et dans les fluides élastiques ; mais comme 
la marche que nous avons suivie dans chacune de ces recherches 
est fondée sur les mêmes principes, il est convenable de les 
établir dès à présent. 

Pour parvenir à connoître la loi élémentaire du refroidissement, 
EN celle que suivroit un corps de dimensions assez 
petites , pour qu’on püt supposer à chaque instant tous ses points 
à la même température, c’eûtété compliquer inutilement la ques- 
tion, et peut-être la rendre insoluble, que d'observer d’abord 
la marche du phénomène dans les solides, puisque l’on embras- 
seroit alors un élément de plus, savoir, la distribution intérieure 
de la chaleur, qui est une fonction de la conductibilité. Etant 
ainsi obligés, par la nature du problème, d’avoir recours aux 
liquides, le thermomètre à mercure lui-même nous a paru l’ins- 
trument le plus approprié à ce genre d'expériences ; mais comme 
il est nécessaire, quand on veut étendre l'observation à des tem= 
pératures très-élevées, de donner au corps sur lequel on opère 
un volume assez considérable pour que le refroidissement n’en 
soit point tellement rapide qu’on ne puisse en suivre le progrès 
avec exactitude, il falloit, avant tout, examiner quelle influence 
peut avoir, sur la loi du refroidissement, la masse plus ou 
moins grande du liquide contenu dans le réservoir du thermo- 
mètre : il n’étoit pas moins important de rechercher si cette loi 
dépend de la nature du liquide, de la nature et de la forme du 
vase dans lequel ce liquide est renfermé. Cette discussion pré- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 597 


liminaire a été l'objet d’une série d'expériences que nous allons 
rapporter , après avoir exposé la méthode uniforme de calcul dont 
nous avons constamment fait usage pour rendre nos résultals 
plus faciles à comparer. 

Supposons qu'on observe, à des intervalles de temps égaux 
entre eux, de minute en minute, par exemple, les excès de 
températures d’un corps sur le milieu environnant, et que, 
Pour ies lemps, 


Dan Mie ER ei il ouet Cite ghs 


ces excès soient A, B, C..."T. Si la loi de la progression géo- 
métrique étoit exacte, on devroit avoir 


PB Am ATT..-.l—AMS; 


m étant une fraction qui varieroit d'un corps à un autre. Cette 
loi ne se vérifie jamais exactement , surlout quand les tempé- 
ratures À, B, C sont élevées; mais on conçoit qu’on pourra 
toujours représenter un cerlain nombre de termes de la série 
précédente par une expression de la forme Am:t+%°, en dé- 
terminant convenablement les coefliciens 72, «, B; et, à l’aide 
de cette formule, on pourra calculer avecune très-grandeapproxi- 
mation la valeur du temps £, correspondant à un excès de tem- 
pérature quelconque T, pourvu que cet excès soit compris dans 
la portion de la série qui a servi à l’interpolation. 

Cette même expression nous donne le moyen de détérminer 
la vitesse de refroidissement correspondante à chaque excès de 
température, c'est-à-dire, le nombre de degrés dont la tempé- 
rature du corps s’abaisseroit dans une minute , en supposant la 
vilesse du refroidissement uniforme pendant celte minute. En 
effet, on a pour celte vitesse 

É=T.(a+ 280) log mn. 
Cette quantité doit toujours excéder la perte réelle de tem- 
pérature pendant le même temps, puisque la vitesse du refroi- 
dissement diminue pendant toute sa durée, quelque courte 
qu'elle soit. 

Ce n’est pas, comme on le pense bien, pour corriger la 
petite différence dont nous venons de parler, que nous avons 
fait usage de ce procédé; mais on sentira aisément que lors- 
qu'une série se trouvoit ainsi divisée en plusieurs parties re- 
présentées chacune par des formules empiriques qui satisfaisoient 


395 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIF 


le plus exactement possible aux nombres observés, les vitesses 
de refroidissement, déduites de ces formules pour les différens 
excès de température, se trouvoient dégagées des incertitudes 
et des irrégularités que peuvent présenter des résultats isolés. 
Revenons maintenant à la première comparaison dont nous 
parlions tout à l'heure, et pour cela, examinons comment la 
vitesse du refroidissement a varié dans les trois séries dont les 
résultats calculés sont renfermés dans le tableau suivant : 


VITESSE 
de refroidissement 
du thermomètre B. 


VITESSE 
du refroidissement 
ES 
du thermomètre C. 


EXCÈS VITESSE 
de refroidissement 


de tempé : 
pérature | TT thermomètre A 


sur l'air. | diam. —acent. diam. = 4 cent. diam. =7 cent. 
, 100° | 18°92 8°97 5°00 
80 14,00 6,60 3,67 
69 9,28 4,56 2,52 
40 5,95 2,80 1,56 
20 2,75 | 1,50 | 0,73 


La première colonne contient les excès de la température des 
thermomètres sur celle de l'air environnant ; la seconde ren- 
ferme les vitesses correspondantes de refroidissement du ther- 
momètre À, dont la boule a environ 2 centimètres de diamètre. 
Ces vitesses ont été calculées par la méthode exposée plus haut, 
d'après les observations directes. La troisième et la quatrième 
colonne comprennent les vitesses de refroidissement des ther- 
momètres B et C, calculées de la même manière pour les excès 
de température indiqués dans la première colonne. La boule du 
thermomètre B a à peu près 4 centimètres de diamètre; celle 
du thermomètre C en a 7. 

Un simple coup-d'œil jeté sur ce premier tableau nous montre 
déjà l'inexactitude de le loi de Richmann; car on voit que les 
vitesses de refroidissement croissent suivant une progression plus 
rapide que les excès de température. Maintenant, si l’on prend 
les rapports des nombres correspondans de Ja seconde et de 
la troisième colonne, on trouvera qu'ils ont varié ainsi qu'il 
suit, en commencant par les termes qui répondent aux plus 
grands excès de température : 


TU. Cents PONT MR T2 02) IIS 


Ces nombres, qui ne différent que très-peu les uns des autres, 
el qui sont tantôt plus grands et tantôt plus petits, nous ap- 


6 4 
£T D'HISTOIRE NATURELLE. 599 


prenuent que la vitesse du refroidissement varie, suivant la même 
loi, dans les thermomètres À et B. En comparant de la même 
manière les nombres contenus dans la seconde et la quatrième 
colonne, on trouvera pour leurs rapports 


DC NOT. ee 1000. ..03,00,1 413,77: 


L'égalité presque parfaite de ces nombres nous montre que 
la loi du refroidissement est encore la même pour les thermo- 
mètres À et C; car les différences que présentent les nombres 
précédens doivent être attribuées aux erreurs inséparables des 
expériences , et ne répondent d’ailleurs qu’à des incertitudes d’un 
centième de degré sur les vitesses. 


On est donc en droit de conclure de ce qui précède, que la 
loi du refroidissement, observée sur un thermomètre à mercure, 
est indépendante de la grandeur de son réservoir, et qu'elle 
est par conséquent cette loi élémentaire du refroidissement que 
nous cherchons, ou, si l’on veut, la loi que suivroit le refroi- 
dissement d’un point matériel, 


Nous n'avons pas examiné comment les vitesses de refroi- 
dissement varient avec la grandeur des surfaces, à cause du peu 
de précision dont seroit susceptible la mesure de la surface 
d’une boule de verre soufilée à l'extrémité d’un tube, et parce 
que cette recherche étoit étrangère à celle qui nous occupe. 
Néanmoins, on voit par les mesures approchées que nous avons 
données des diamètres des boules, que les vitesses de refroi- 
dissement sont à très-peu près dans le rapport que l’on obser- 
veroit à l'égard de sphères de dimensions infiniment pelites, 
c’est-à-dire en raison inverse des diamètres. 


Passons maintenant à l'examen de l'influence que pourroit 
avoir sur la loi du refroidissement la nature du liquide contenu 
dans le vase. Ici, la difiiculié de construire des thermomètres 
avec des liquides autres que le mercure, difficulté qui tient aux 
incertitudes qui restent encore sur les lois de dilatation de ces 
corps , nous a déterminés à observer le refroidissement de ces 
liquides en les renfermant dans un même malras de verre, au 
centre duquel plongeoit un thermomètre à mercure très-sen- 
sible. Nous avons même reconnu que la posilion du thermomètre 
étoit indifférente, et qu’à un instant donné, les températures 
de tous les points de la masse étoient sensiblement les mêmes ; 
ce qui lient évidemment à ce que la conductibilité intérieure, 
qui, dans les liquides , est le résultat des courans qui s’y forment, 


400 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
peut ètre regardée comme à peu près parfaite, au moins pour 
des masses telles que celles sur lesquelles nous avons opéré. 

Le premier des tableaux suivans contient les vitesses com- 
parées du refroidissement du mercure et de l'eau; le second 
renferme une comparaison semblable faite entre le mercure et 


l'alcool absolu; le troisième entre le mercure et l'acide sulfu- 
rique concentré. 


EXCÈS VITESSE VITESSE RAPPORT 
de température | de refroidissement | de refroidissement entre 
u corps. du mercure. de Peau. ces vitesses. 
RFA dt se D LES Ep SA EE RE ni 2e. PES A ET 
60° 3°03 159 0,458 
bo 2,47 1,15 0,452 
40 1,8 0,85 0,450 
30 1,5 0,62 0,456 
EXCÈS VITESSE VITESSE RAPPORT 
de température | de refroidissement | de refroidissement entre 
du corps. du mercure. de l'alcool absolu. | ces vitesses. 
| RE 
40° 1°89 1°50 0,798 
30 1,36 1,09 0,801 
20 0,87 | 0,69 0,794 
EL 
EXCÈS VITESSE VITESSE RAPPORT 
de température | de refroidissement | de refroidissement entre 
du corps. du mercure. de l’acide sulfurique.| ces vitesses. 
60° 3203 | 1297 0,650 
5o © | 2,47 1,99 0,649 
40 1,8 1,92 0,646 
50 | 1, 0,89 0,694. 


Les rapports inscrits dans les dernières colonnes de chacun 
de ces tableaux, nous montrent que la loi du refroidissement 
est la même pour les quatre liquides comparés; car les petites 
variations irrégulières de ces rapports proviennent évidemment 
des incertitudes de l'observation : et d’ailleurs, pour les faire 
disparoitre, il sufhiroit d'altérer les valeurs des vitesses observées, 
de quantités qui s'élèvent à peine à un centième de degré. 

Maintenant , si des liquides aussi différens par leur nature, 
leur densité et leur fluidité, présentent des lois de refroidisse- 
ment absolument semblables, il est permis de généraliser ce 


résultat , 


+ 


ET D'HISTOIRE NATURELLE: 4ot 


résultat, et de conclure qu'une masse liquide telle que celles 
dont nous avons fait usage, quelle que soit d’ailleurs sa na- 
ure , se refroidit exactement suivant cette loi élémentaire que 
nous cherchons. 

Restoit à examiner l'influence de la nature et de la forme du vase. 

On a d'abord comparé les refroidissemens de deux sphères, 
l'une de verre, l’autre de fer-blanc, toutes deux pleines d'eau. 
(Le rayon de la boule de fer-blanc excède un peu celui de 
la boule de verre.) 


PACÈS VITESSE VITESSE RAPPORT 
de température | de refroidissement de refroidissement entre 
du corps. de la boule de verre. [de la boule de | ces vitesses. 
nn dt — —_— 
60° 1°3 0°90 1,54. 
5o 1,1 0,73 1,55 
49 0,85 0,54 1,97 
Este) 0,62 0,38 1,65 
20 | 0,37 0,21 1,75 


Ici, les rapports indiqués dans la dernière colonne ont varié 
toujours dans le mème sens, et nous montrent que ja loi du 
refroidissement est plus rapide pour la boule de fer-blanc que 
pour la boule de verre. M. Leslie est arrivé au même résultat, 
qu'il a généralisé en admettant que cette loi change avec la 
nature des corps, et qu'elle est d'autant plus rapide que ces 
corps rayonnent moins. Celte proposition est vraie dans la por- 
tion de l'échelle thermométrique que M. Leslie n’a pas dépassée 
dans ses expériences; mais, par une circonstance très-remar= 
quable, un effet contraire se produit dans les hautes tempé- 
ratures : de manière que quand on compare les lois de refroi- 
dissement de deux corps de surfaces différentes, celle des deux 
lois qui est la plus rapide dans la partie inférieure de l'échelle, 
devient au contraire la moins rapide dans les températures élevées. 
Ainsi, dans la série rapportée plus haut, les rapports inscrits 
dans la dernière colonne diminuent à mesure que l’on consi- 
dère de plus grands excès de température : ils augmenteroient 
ensuite si l’on prolongeoit la série plus loin ; et suivant la pro- 
priété commune à toutes les quantités dont les variations chan- 
gent de signe, ces rapports resteroient à lrès-peu près les mêmes 
dans une portion assez étendue de l'échelle thermométrique. 
C'est ici lun des points les plus importans de la théorie du re- 
froïdissement, Si nous ne nous abusons pas sur l'exactitude des 


Tome LXXXV II. DÉCEMBRE an 1818. Ece 


402 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


lois auxquelles nous sommes parvenus, on trouvera, dans la 
suite de ce Mémoire, une explication très-simple de ce fait 
remarquable, qu'on ne pouvoit décrire qu’en observant, ainsi 
que nous l'avons fait, les refroidissemens à partir de tempéra- 
tures très-élevées. 


C’est pour n’avoir pas pris ce soin, que MM. Dalton et Leslie 
sont arrivés à des conséquences si éloignées de la vérité sur 
la question qui nous occupe : le premier, entraîné sans doute 
par l’idée que la loi de Richmann se vérifioit dans son échelle 
thermométrique, et n'ayant pas d’ailleurs comparé les refroi- 
dissemens des surfaces différentes dans un intervalle assez étendu, 
avoit été conduit à supposer que la loi du refroidissement est 
la même pour tous les corps; et M. Leslie, qui avoit remarqué 
que cette loi change avec la nature de la surface, n’ayant pas 
embrassé , dans ses expériences, des températures suflisamment 
élevées, a cru que la différence qu’il avoit découverte ne faisoit 
que s’accroitre à mesure qu’on s’avance dans l'échelle thermo- 
métrique ; ce qui l’a entrainé dans des conséquences fort inexactes, 
sur lesquelles nous aurons occasion de revenir par la suite. Nous 
ferons seulement remarquer en passant, qu'on doit être surpris 
que M. Leslie, à qui l'influence de la nature des corps sur la 
loi du refroidissement n’avoit pas échappé, et qui en avoit conclu 
avec raison que la loi de Richmann devoit être inexacte, ail 
fait cependant un usage presque général de cette loi dans le 
calcul de toutes ses expériences, 


Nous avons terminé ces recherches préliminaires en examinant 
le refroidissement de l'eau dans trois vases de fer-blanc de 
même capacité; le premier sphérique; le second cylindrique, 
ayant une hauteur double du diamètre de Ja base; et le troi- 
sième cylindrique aussi, mais ayant une hauteur de moilié de 
son diamètre. 


EXCÈS VITESSE | VITESSE DE R. | vITESSE DE R. RAPPORT RAPPORT. 


TE du cylindre du cylindre ; P 
de de refonte] Le la H. 2 dont IA *_ [de Ja 3e colonnelde la 4e colonne 
température.| dela bou'e, [est double du D.lest moitié du D. à Ja 2e. à la 2e, 
60° 0°90 VTT 101 1,23 , 
5o 0,73 0,89 0,80 1,22 o 
40 0,54 H o,6b | 0,60 1,22 11 
30 0/88 | odn | 45 1,23 | 3 
20 | 0,21 0,26 0,23 | 1,24 1,10 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 403 


La loi du refroidissement est encore la même pour les trois 
vases de figures différentes, ainsi que l'indiquent les rapports 
inscrits dans les deux dernières colonnes. La forme du vase 
n’a donc aucune influence sensible sur la loi du refroidissement; 
et ce qui confirme cette assertion, c’est que les rapports trouvés 
entre les vitesses de refroidissement sont à très-peu près les mêmes 
que ceux qui existent entre les surfaces des trois vases, COMME 
on peut aisément s’en assurer. En récapitulant les résultats que 
nous venons de faire connoître, on voit que la loi du refroi- 
dissement d'une masse liquide, variable avec l’état de la surface 
qui lui sert d’enveloppe, est néanmoins indépendante de la na= 
ture de ce liquide, de la forme et de la grandeur du vase qui. 
le contient. C’est là le principe que nous nous proposions d'établir 
dans cette introduction, et qui va servir de base aux recherches 
que nous allons exposer. 


Appareils destinés aux Expériences sur le Refroidissement. 


Les corps dont nous avons observé le refroidissement ont été, 
conformément aux principes exposés précédemment, des ther- 
momètres d’un volume tel, que leurs abaissemens de température 
pussent être observés avec précision. Nous en avons construit 
deux, dont les réservoirs avoient environ, l'an 6 centimètres 
de diamètre, l’autre 2 : le premier, contenant environ trois 
livres de mercure, servoit aux observations dans les tempéra- 
tures élevées ; le plus petit étoit employé pour les basses tem- 
pératures , afin d’abréger la durée des expériences. Il étoit d’ail- 
leurs facile de déduire des résultats fournis par ce dernier, 
ceux qu’auroit donné le grand si l’on eût prolongé la série de 
son refroidissement. Il suflisoit pour cela de commencer l’ob- 
servation , sur le petit thermomètre, à une température plus 
élevée que celle à laquelle on avoit terminé la série du grand. 
En déterminant alors le rapport de la vitesse du refroidissement 
de ce dernier à celle du petit thermomètre, pour un excès 
commun de température, on avoit le nombre par lequel on 
devoit multiplier tous les résultats fournis par celui-ci pour ob- 
tenir les vitesses correspondantes dans l'autre. 

Ces deux instrumens, construits avec tout le soin possible , 
ne différoient d'ailleurs des thermomètres ordinaires qu'en ce 
que le tube sur lequel les degrés éloient marqués se trouvoit 
séparé de la boule par un tube intermédiaire, dont le calibre 


intérieur étoit très-petit. On verra bientôt le motif de cette dis- 
position, 


Eee 2 


404 JOURNAL DE PIYSIQUE, DE CHIMIE 


Les expériences sur le refroidissement dans le vide, par les- 
quelles nous devions commencer, exigeoient que Île thermo= 
mètre pût être transporté dans un espace suflisamment grand , 
daus lequel le vide seroit fait très-promptement : il falloit aussi 
que l'enceinte qui environnoit de toutes parts le thermomètre 
füt maintenue à une température connue; el comme le même 
appareil devoit nous servir à observer le refroidissement dans 
V'air et dans les gaz, il falloit que ces gaz pussent y être in- 
troduits d’une manière commode et prompte. Toutes ces con- 
ditions se trouvent remplies dans la constraction suivante. 

(Fig. 5.) L’enceinte dans laquelle s’observe le refroidisse- 
ment est formée par un grand ballon en cnivre très- mince 
MM'M'M/", dont le diamètre est d'environ 3 décimètres; le 
col saillant de ce ballon a été usé dans sa partie supérieure, 
de manière à être terminé par une surface exactement plane, 
qu’on rend horizontale à l’aide d'un niveau. Ce ballon est plongé, 
jusqu'à une pelite distance de ses bords, dans une grande cuve 
cylindrique de bois pleine d’eau, où il est retenu dans une po- 
sition invariable par de fortes traverses RR', RR'. On concoit 
que les parois de ce ballon, étant très-minces et très-conduc- 
trices, doivent prendre constamment la température de l’eau 

ui les environne , et qu’élant recouvertes intérieurement de 
noir de fumée, elles ne peuvent réfléchir qu'une portion ex- 
cessivement petile de la chaleur que leur envoie le thermomètre. 
Cet effet croissant d'ailleurs à peu près comme les pertes de 
chaleur du corps, l'erreur qui en résulte affecte proportionnel 
lement tous les résultats. Il étoit facile d'élever la température 
de l’enceinte, c’est-à-dire, de l’eau environnante, en faisant 
arriver de la vapeur dans le tonneau par le tube recourbé SUV, 
plongeant jusqu'au fond du vase. 

L'orifice du ballon est fermé par une plaque épaisse de verre 
‘AB, usée avec le plus grand soin sur les bords mêmes du ballon; 
les surfaces en contact ont d'ailleurs, à raison de l’épaisseur 
du col, une étendue sullisante pour que l'interposition d’une 
petite quantité de substance grasse rende le contact. très-intime 
et empêche toute communication avec le dehors. 

Cette plaque est percée, à son centre, d'une ouverture cir- 
culaire dans laquelle on introduit à frottement un bouchon qui 
porte la tige d'un thermomètre : les degrés de cet instrument 
commencent immédiatement au-dessus du bouchon, et le tube 
intermédiaire CO a la longueur convenable pour que la boule 
se trouve au centre du ballon. Eu donnant à ce tube intermc- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 405 


diaire un très-petit diamètre, on diminue la quantité de mer- 
cure hors de la boule ,on empêche le courant de s'établir, et le 
renflement qui a lieu au commencement de l'échelle permet d'as- 
sujétir plus fortement le tube dans le bouchon. La disposition 
de la plaque et du thermomètre est représentée dans la figure 6; 
où la boule de l'instrument est placée au-dessus du fourneau 
qui sert à l'échauffer : les écrans AA’ sont des feuilles de fer- 
blanc séparées les unes des autres, et qui servent à garantir la 
plaque AB de l'action du feu. | 

Revenons maintenant à la figure 5 : Ja tige du thermomètre, 
qui est, comme on le voit, en dehors du ballon, est recou- 
verte par un tube évasé , dont les bords usés s'appliquent exac- 
tement sur la face supérieure de la plaque de verre. Cétte espèce 
de cloche est terminée, dans le haut, par une pièce à robinet D, 
qui se visse à l’une des extrémités d’un tube de plomb très 
flexible DEF, dont l’autre extrémité F est elle-même fortement 
vissée sur la platine HK d'une machine pneumatique. Le canal, 

ui, dans celte machine, fait communiquer le centre de la 
platine avec le baromètre ; porle une autre ‘pièce à robinet T', 
terminée par une douille dans laquelle est mastiqué nn tube 
plein de muriate de chaux. C'est par ce tube que s'écoule le 
gaz contenu dans la cloche V, après avoir passé par le tube 
recourbé mnprs. Cette cloche étant d'ailleurs mobile de haut 
en bas, on peut facilement établir l'équilibre entre l'élasticité 
du gaz introduit et la pression de l'atmosphère. Voici main- 
tenant la marche que nous avons suivie dans chaque expérience. 

l'eau du tonneau étant portée à la température convenable; 
et le thermomètre engagé dans la plaque de verre étant chauffé 
presqu'a l’éballition du mercure, on le transportoit rapidement 
dans le ballon; la cloche CT, qui étoit vissée d'avance au tube 
de plomb, étoit alors descendue sur la plaque ; et tandis qu’on 
Iuntoit avec soin les surfaces en contact, un aïde. faisoit rapi- 
dement le vide au moyen de la machine pneumatique. La com- 
munication du ballon et de la cloche étoit d’ailleurs rendue 
très-libre par des ouvertures a et b, pratiquées dans le disque 
de verre, près de l'ouverture centrale. 

Si le refroidissement devoit être observé dans le vide, on 
s’arrétoit quand la machine cessoit de dilater l'air, et Fon me- 
suroit immédiatement à l’éprouvette la tension de ce quitestoit 
dans le ballon. On fermoit ensuite le robinet de la cloche, et 
l'observation commençoit. Quand l'expérience se faisoit: dans 
l'air, on dilatoit d’abord celui du ballon, afin d'aider au contact 


406 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


des surfaces, et l'on en laissoit ensuite rentrer la quantité con 
venable ; enfin , lorsque le refroidissement devoit être observé 
dans un gaz, on faisoit d’abord le vide, puis on laissoit rentrer 
une cerlaine quantité de gaz : on faisoit de nouveau le vide, 
après quoi, l’on introduisoit la totalité du gaz qu’on vouloit em- 
ployer; il ne se trouvoit plus alors mélangé que d’une proportion 
d'air tout-à-fait inappréciable. 

Nous terminerons cette description en disant que les dimen- 
sions du thermomètre avoient été calculées de manière que l’ob- 
servalion du refroidissement püt commencer dans le vide à en- 
viron 500°. Les expériences qui ont été failes dans l'air et dans 
les gaz, exigeant une manipulation un peu plus longue, et ne 
pouvant d’ailleurs être commencées avec sûreté que lorsque l'é- 
quilibre s’étoit établi dans toute l'étendue du fluide, les séries 
d'observations qui s’y rapportent ne commencent que vers 250°. 

L'expérience pour le refroidissement dans le vide ou dans 
un gaz ayant élé préparée comme nous venons de l'expliquer, 
il ne restoit plus qu'à observer, à l'aide d’une montre à secondes, 
les températures indiquées par le thermomètre après des inter- 
valles de temps égaux entre eux; mais ces températures devoient 
subir deux corrections que nous allons indiquer. D'abord, on 
voit, par la disposition même de notre appareil, que la tige 
du thermomètre étoit, au bout de peu d'instans, à la tempé- 
rature de l'air environnant ; chaque température observée étoit 
donc trop basse d'un nombre de degrés égal à celui dont se 
seroit dilatée la colonne de mercure contenue dans la tige du 
thermomètre, en la portant de la température de l’air environ- 
nant à celle de la boule. Cette correction étoit facile à calculer, 
ct l’on à eu soin de l'appliquer à toutes les températures ob- 
servées. La seconde correction avoit pour but de ramener les 
indications du thermomètre à mercure à celles du thermomètre 
à air, et l’on s'est servi pour cela de la table rapportée dans 
la première partie de ce Mémoire. 

Lorsqu'on avoit ainsi formé rigoureusement la série des tem- 
pératures consécutives du thermomètre , il ne restoit plus qu'à 
appliquer à celte série le mode de calcul que nous avons ex- 
posé plus haut. On la divisoit donc en plusieurs parties, qu on 
représentoit chacune par des expressions de la forme m.a*+f#, 
où & désigne le temps, lesquelles servoient ensuite à calculer 
les vitesses de refroidissement pour les différens excès de tem- 
pérature; mais ces vitesses doivent subir une diminution facile 
à déterminer dans chaque cas. Pour concevoir en quoi elle con- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 407 


sisté, il faut remarquer que le refroidissement de la boule 
du thérmomèëtre , provenant de la déperdition de chaleur qui 
a lieu par la surface, se, trouve toujours un peu augmenté par 
Ja rentrée du mercure froid, venant de la colonne de l'instru- 
ment : or, le volume de ce mercure étoit connu, ainsi que sa 
température; on pouvoil donc encore évaluer exactement cette 
dernière correction, qui, bien que très-foible, n’a pas dù étre 
négligée. s 

Telle est la marche constamment suivie dans l'observation et 
le calcul de toutes nos expériences. Nous nous sommes con- 
tentés de déterminer les vitesses de refroidissement pour des 
excès de températures, croissant de 20 en 20 degrés; et, dans 
la crainte de donner trop d’étendue à ce Mémoire, nous avons 
supprimé tous les calculs intermédiaires qui ont servi à ces 
déterminations. 

Nous allons maintenant entrer dans le détail de nos expériences, 
en les exposant dans l'ordre où elles ont été faites. 

Nos recherches préliminaires nous ayant fail connoître l’in- 
fluence de la nature des surfaces sùr la loi du refroidissement, 
il étoit indispensable d'étudier cette loi pour divers états de la 
surface de nos thermomètres; mais il falloit aussi que ces sur- 
faces n'éprouvassent aucune altération aux plus hautes tempé- 
ralures auxquelles elles seroient exposées. Les deux seules qui 
nous aient paru remplir, cette condition, sont les surfaces vilreuses 
et argentées; aussi la plupart de nos expériences ont-elles été 
faites. d'abord en conservant au thermomètre sa surface nalu- 
relle,. puis en la recouvrant d’une feuille d'argent très-minte. Ces 
deux, espèces de surfaces jouissent, comme on le sait, de pou- 
voirs rayonnans très-différens; le verre étant ua des corps qui 
rayonnent le plus, et l'argent celui de tous qui rayonne le 
moins. Les lois auxquelles nous sommes parvenus dans la Com- 
paraison dés refroïdissemens de ces deux surfacës;" sont d’une 
telle simplicité, qu'il est hors de doute qu’elles s’appliquent à 
iout autre corps. 


Du Refroidissement dans le Vide. 


Les observations sur le refroidissement dans le vide , calcu- 
Iées comme nous l'avons précédemment expliqué, sont toutes 
affectées d’une erreur tres-foible à la vérité, mais dont il est in- 
dispensable de les corriger. Cette erreur provient de la petite 
quantité d'air restée dans le ballon, et dont la tension, dans le 
plus grand nombredes expériences, ne s’élevoit qu'a5 millimètres. 


408 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIF 


Ce n'est point sur la série de températures fournie par l’ob- 
servalion, que cette correction peut êlre exécutée immédiate- 
ment; mais il est aisé de la faire subir aux vitesses de refroi- 
dissement déduites du calcul; et pour cela, il suflit de les 
diminuer de la quantité correspondante à la chaleur enlevée 
par l'air resté dans le ballon. 

Pour déterminer la valeur de cette correction dans chaque cas, 
nous avons observé le refroidissement de notre thermomètre 
dans le ballon contenant de l'air à différens degrés de densité, 
et nous avons Calculé, pour les divers excès de température, 
les vitesses de refroidissement correspondantes à chaque den- 
silé : en relranchant de ces vitesses celles qui ont lieu dans 
le vide, on auroit exactement la mesure des quantités de chaleur 
enlevées par l'air dans ses différens états de raréfaction. On aura 
donc des valeurs presque exactes de ces mêmes quanlités, 
en retranchant les vitesses déjà très-approchées que donne l’ob- 
servalion du refroidissement dans le ballon, lorsqu'il ne contient 
plus qu’une quantité extrêmement foible de gaz. 

Ayant ainsi déterminé, pour chaque excès de température 
et pour diverses densités, les quantités de chaleur enlevées par 
l'air, nous avons reconnu qu’elles suivoient une loi simple, à l’aide 
de laquelle nous avons déterminé , avec une précision suflisante, 
les corrections que devoient subir les vitesses calculées. Les 
nombres que nous rapporterons dans la suite de ce chapitre, 
peuvent donc être regardés comme extrêmement peu éloignés 
de ceux qu’on dédniroit d'observations faites dans un vide absolu. 

Passons maintenant à l'examen des diverses séries calculées 
et Corrigées, et commencons par celle dans laquelle le ballon 
étoit entouré de glace fondante. Le thermomètre conserve sa 
surface vitreuse naturelle. 


RE RE 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE VITESSES, CORRESPONDANTES 
du thermomètre sur l'enceinte. de refroidissement. 

PRES LEE a  e ne 

240° 10°69 

220 8,82 

209 7,40 

180 6,10 

160 4,89 

140 5,88 

120 3,02 

100 2,30 

80 1,74 


La 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 409 


La première colonne contient les excès de température du 
thermomètre sur celle de l'enceinte, c’est-à-dire les tempéra- 
iures elles-mêmes, puisque l'enceinte étoit à 0° : la seconde 
colonne renferme les vitesses correspondantes de refroidissement, 
calculées'et corrigées par les méthodes que nous avons indi- 
quées. Ces vitesses , ainsi que nous avons eu l'occasion de le 
dire plusieurs fois, sont les nombres de degrés dont la tem- 
pérature s’abaisseroit dans le vide durant une minute, en sup- 
posant le refroidissement uniforme pendant la durée de cette 
minute. 

Cette première série met bien en évidence l’inexactitude de 
la loi de Richmann; car, dans cette loi, la vitesse de refroi- 
dissement à 200° devroit être double de celle qui correspond 
à 100°, et nous la trouvons plus que triple. En comparant de 
même les pertes à 240° et à 80° d’excès, on trouve la première 
environ six fois plus grande, tandis que, suivant la loi de 
Richmann, elle devroit être seulement triple. 

Rien ne seroit plus facile que de représenter, avec une for- 
mule composée de deux ou trois termes, les résultals contenus 
dans le tableau précédent, et d'obtenir ainsi une relation em- 
pirique entre les tempéralures des corps el les vitesses corres- 
pondantes de refroidissement ; mais les formules de ce genre, 
utiles sans doute lorsqu'on a besoin de calculer des effets in- 
termédiaires compris dans la série de ceux qui ont servi à l'in- 
terpolation, deviennent presque toujours inexactes hors les li- 
mites entre lesquelles elles ont été déterminées , et ne doivent 
jamais être considérées comme l'expression des lois du phé- 
nomène. 

Nous avons donc cru nécessaire, avant de rechercher aucune 
loi, de varier nos observations autant que la nature du sujet le 
permetloit, La remarque suivante, qui ne s’éloit encore pré- 
sentée à l'esprit d'aucun physicien, nous a heureusement di- 
rigés dans le choix des circonstances propres à faire découvrir 
les élémens essentiels du problème. 

Dans la théorie généralement adoptée des échanges de cha- 
leur, le refroidissement d’un corps dans le vide n’est que l'excès 
de son rayonnement sur celui des corps environnans. Ainsi, 
en appelant 8 la température de l'enceinte vide dans laquelle un 
corps se refroidit , et £+- 8 la température de ce corps , on aura 
en général, pour la vitesse V du refroidissement (en observant 
que cette vilesse est nulle quand £ est nul), 


V=E (+8) —F (8); 
T'ome LXXXVII. DÉCEMBRE an 1818. Ff£f 


410 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


F désignant la fonction inconnue de la température absolue qui 
représente la loi du rayonnement. 

Si les fonctions F(4+- 8) et F(8) étoient proportionnelles à 
leurs variables, c’est-à-dire qu’elles fussent de la forme 


m(t+8) et m(8), 


m élant une constante, on trouveroit la vitesse du refroidisse= 
ment égale à mt, et l'on retomberoit dans la loi de Richmann, 
puisque les vitesses de refroidissement se trouveroient ainsi pro- 
portionnelles aux excès de température : ces vitesses seroient 
en même temps indépendantes des températures absolnes, comme 
on l’a supposé jusqu'à présent. Mais si la fonction F n’est point 
proportionnelle à sa variable, l'expression 


F(+6)—F(6), 


qui représente la vitesse du refroidissement , devra dépendre 
à la fois de l'excès de température # et de la température ab- 
solue 8 de l'enceinte. C’est pour vérifier cette dernière consé- 
quence que nous avons observé le refroidissement du thermo- 
mètre dans le vide, ex amenant successivement l'eau du tonneau, 
dans lequel le ballon est plongé, à 20°, 40°, 6o°, 80°. Le tableau 
suivant présente, sous un même point de vue, tous les résultats 
de chacune de ces séries d'observations qui ont d’ailleurs été 
répétées plusieurs fois. 


PES En EI TIRE AL NT D PURE EPP SRE TER EEE EEE EE EPIPEEEENNCLEE IR TU Z AENMEPE IEEE NELATES PER ETS SEE KE ELEUTE 


EXCÈS VITESSE VITESSE VITESSE VITESSE VITESSE 

de température de de de de de 

du thermom., [refroidissement, refroidissement, |refroidissement, |refroidissement, |refroidissement, 
surface l'enceinte l'enceinte l'enceinte l'enceinte V’enceinte 
vitreuse. à 00. à 20°, à 400. à Goo, à 80°. 

— LR RE OS PP PP RE PRE pa Et ES A 
240° 10°69 12°40 14°35 SO0E .... 
220 8,81 10,41 ne MED LAS ras eouc 
200 7,40 8,58 10,01 11264 13°45 
180 6,10 7,04 8,20 9,55 11,05 
160 4,89 5,67 6,61 7,68 8,95 
140 3,88 4,57 5,32 6,14 7:19 
120 3,02 5,56 4,15 4,84 5,64 
100 2,30 2,74 3,16 3,68 4,29 

80 1,74 1,99 2,30 | 273 3,18 

60 cs: ep 1,40 1,62 | 1,88 |: - 2,17 


Ce tableau, qui n’a besoin d'aucune explication, confirme ; 
comme on le voit, le principe que nous venons d'établir; mais 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 4ir 


les résultats qu'il renferme donnent lieu à un rapprochement 
très-simple qui nous a conduits à la découverte de la loi du 
refroidissement dans le vide. Si l’on compare les nombres cor- 
respondans de la 2° et de la 3° colonne, c’est-à-dire les vitesses 
de refroidissement pour les mêmes excès de température , l’en- 
ceinte étant successivement à zéro et à 20°, on trouve que les 
rapports de ces vitesses ont varié ainsi qu'il suit: 


TR 210 0: Nec HolO bee TolTese Tol7 eee 
Le jo Ch D EEE 


Ces nombres, qui diffèrent déja très-peu les uns des autres 
sans offrir rien de régulier dans leurs variations, n’exigeroient, 
pour être rendus égaux, qu’un changement, sur quelques vi- 
tesses, qui s’éleveroit à peine à un centième de leur valeur. 

Comparons de même les vitesses observées, l'enceinte étant 

20° et à 40°. On trouvera pour les rapports des vitesses , 


HO UD 110 MIRIO. ANT 170 en) Tl0,., 1Tl7... 
TO TT OT LOS 


Prenons maintenant les rapports entre les vitesses pour le cas 
où l'enceinte est à 40°, et celui où elle est à 60°; on trouve: 


TETE PA À DOC Et OO EP LOME AN L OE 18 | CPE 
OR TLO: 


Enfin, on aura pour les rapports entre les vitesses correspon- 
dantes aux cas où l'enceinte est à 60° et à 80°, 


TD ee NID 10e 0 nl L Te UTaLO Ne se y ll7e ee 
SCO SAINT 


Les trois dernières comparaisons nous conduisent au même 
résultat que la première , et nous apprennent en outre que le 
rapport constant entre deux des séries consécutives est resté 
le même, en portant l’enceinte de o° à 20°; de 20° à 40°; de 
40° à 60°; enfin, de 60° à 80°. Les expériences précédentes. 
mettent donc en évidence la loi suivante : 

La vitesse de refroidissement d’un thermomètre dans le vide , 
pour un excès constant de température ; croît en progression géo- 
métrique , quand la température de l'enceinte croît en progression 
arithmétique. Le rapport de cette progression géométrique est le 
même, quel que soit l'excès de température que l'on considere. 

Celle première loi, qui se rapporte uniquement à la variation 


FfF 2 


412 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


de température de l'enceinte, nous permet de mettre l'expression 
précédemment trouvée de Ja vitesse du refroidissement dansle vide: 


F («+8 —F(#), 
sous la forme 


Qt X a, 


a étant un nombre constant, et @(#) une fonction dé la variable’ # 
seulement, et qu'il s’agit de découvrir. 

Les deux expressions de la vitesse de refroidissement étant 
égales, nous donnent 


HR POST One 


aÿ 
d'où, en développant en série, 
D M AC Pr = Vo CEE 4 nt 
Lo er a ce a 1 1 


et celle équation , devant étre satisfaite pour toutes les valeurs 
de t, exige qu'on ait 


AE LEE 


F (8)= m.@, 
m élant un nombre indéterminé; on en déduit 


F (0) = 7.0 + constante ; 
et par suite 
F (4 + 6) — 7.4 + constante. 


On a donc enfin pour la valeur de la vitesse, 
V = mm. (a — 1); 
équation qui renferme la loi du refroidissement dans.le vide. 


Si l’on suppose 8 constant, le coeflicient rat le sera aussi, 
et la loi précédente pourra s’énoncer ainsi : 


Lorsqu'un corps se refroidit dans une enceinte vide et entretenue 
à une température constante, la vitesse du refroidissement, pour 
des excès de température en progression arithmétique, croît comme 
les termes d'une progression géométrique diminués d'un nombre 
constant. 

Le rapport & de cette progression est facile à trouver pour 
le thermomètre dont nous venons d'observer le refroidissement; 
car , lorsque Ô augmente de 20°, { restant le même, la vitesse 
du refroidissement se trouve mullipliée par 1,165, moyenne 


22 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 415 
entre tous les rapports déterminés précédemment. On a donc 


V (15165)= 1,0077 (1): 


Il ne reste plus maintenant, pour vérifier l'exactitude de la 
loi précédente, qu’à la comparer aux différentes séries contenues 
dans le tableau rapporté plus haut. Commencons par celle où 
l'enceinte étoit à 0°; on trouve alors qu'il faut faire »2==2,057; 
on a donc, pour ce cas, 


V = 2,037 (a — 1), 
ou | 
a = 1,0077. 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE VALEURS VALEURS 


du thermomètre, observées de V.. | calculées de-V. 

ou valeurs de t. 
240° 10°69 10°68: 
210 8,81 | 8,89 
200 7,40 7,34 
180 6,10 | 6,03 
160 4,89 4,87 
140 3,85 | 3,89 
120 | 3,02 3,05 
100 2,50 | 2,33 

80 NOR 1,72 


Prenons maintenant la série faite dans l'enceinte à 20°; le 
coeflicient précédent de (a — 1) doit être alors multiplié par 
a = 1,165; on a donc 


V = 2,374 (a — 3). 


D 2 ee 


QG) Un rapprochement assez singulier pour être remarqué, sans vonloir toute- 
fois en tirer aucune conséquence , c'est que ce coellicient 1,0077 soit à peu prés 
le carré du coefficient de la dilatation des gaz. ° 


414 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


2 DL RE I SD ONE EEE 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE, VALEURS VALEURS 
ou valeurs de £. observées de V. | calculées de V, 

2409 12°40 12°46 
220 10441 10,36 
200 8,58 | 8,56 
180 7,04 7,01 
160 5,67 5,68 
140 4,57 454 
120 3,56 3,56 
100 2,74 2,72 

80 | 1,99 2,00 

60 1,40 1,38 

40 | 0,86 0,85 

20 |  o,39 0,39 


Passons à la série correspondante au cas où l'enceinte est à 40°; 
le coefficient précédent de (a— 1) doit étre encore multiplié 
par a = 1,165; ainsi 


V = 2,766 (a'— 1). 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE 
du thermomètre 
ou valeurs det. 


| — 


240° 1435 1444 


VALEURS ALEURS 
observées de V. | calculées de V. 


220 11,98 12,06 
200 10,01 9,97 
180 8,20 8,17 
160 6,61 6,62 
140 5,32 5,29 
120 4, 15 4, 14 
100 3,16 3,17 

80 2,30 2,33 

6o 1,62 1,61 


Pour la série dans laquelle l’enceinte est à 6o°, on aura 


V = 3,222 (a — 1). 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 415 


TRRERPSIIETLEDAT M PTE IA MAP ENTL DE RG ES ENS ET TTL IELS LI FERT ES 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE, VALEURS VALEURS 
ou valeurs de z. observées de V. | calculees de V. 

200° 1164 1161 

180 9,5? 9,52 

160 7,68 | 7,71 

140 6,14 6,16 

120 4,84 4,82 

100 3,68 5,69 

80 2,73 2,71 

60 | 1,88 | 1,87 


Eofin, quaud l'enceinte est à 80°, on a 
V=5,754 (a — 1). 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE, VALEURS VALEURS 
ou valeurs de £. observées de V. | calculées de V. 

200° 13°45 13°52 

180 11,05 11,0q 

160 8,95 8,98 

140 7,19 7,18 

120 | 5,64 5,61 

100 4,29 | 4,50 

80 | 3,18 3,16 

bo 2,17 2,18 


L'accord remarquable des résultats du calcul et de l’observa- 
tion ne permet point de douter de l'exactitude de la loi à laquelle 
nous avons été conduits. Sans nous arrêter pour l'instant aux 
conséquences qui peuvent s’en déduire, examinons tout de suite 
les séries relatives à la boule argentée. Lorsque ces séries ont 
été calculées, nous nous sommes immédiatement apercus, en 
les comparant aux séries analogues du thermomètre nu, que 
les vitesses de refroidissement de celui-ci étoient, pour la même 
température de l’enceinte et pour les mêmes excès de tempé- 
rature du corps, proportionnelles aux vitesses correspondantes 
de refroidissement de la boule à surface argentée : la formule 
trouvée précédemment s’appliquera donc encore à ce geure de 
surface, en conservant à & la même valeur, et en diminuant 
convenablement 77. - 

Notre première observation sur le refroidissement du ther- 
momètre argenté a été faite, O élant égal à 20°. Nous avons 


L] 
416 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 18 
trouvé qu’il falloit supposer »# = 0,557, et par conséquent, 
mé = 0,416; donc 
V = 0,416 (a — 1). 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE, VALEURS VALEURS 
ou valeurs de t. observées de V. | calculées de V, 
us EN ae MSRaN 1/0 ee ei 

2800 3°05 | Gex 

260 2,5q | 2,61 

240 2,18 2,18 

220 1,83 | 1,81 

200 1,53 | 1,50 

180 1,26 1,23 

160 1,02 | 1,00 

140 O,8I 0,80 

120 0,62 | 0,62 

100 0,47 0,48 

80 0,34 | 0,35 

60 0,24 0,24 

40 0,1D 0,15 

20 0,07 0,07 


Une série aussi étendue que la précédente suffiroit pour 
prouver que la formule qui satisfait au refroidissement de la 
boule vitreuse dans le vide, s'étend au cas de la boule argentée, 
en y conservant pour a la même valeur ; néanmoins, pour ne 
négliger aucun des moyens de vérification qui nous étoient of- 
ferts, nous avons fait varier la température de l'enceinte, et 
nous l'avons portée de suite à 80°. Le coeflicient précédent de 
(a'— 1) doit être multiplié par 4”; ce qui donne l 


V = 0,658 (a'—1). 


VALEURS 
calculées de V. 


VALEURS 
observées de V. 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE, 
ou valeurs de t. 


240° 3°40 | 3°44 
220 2,87 2,86 . 
200 | 2,35 | 2,37 
180 1,92 1,94 
160 | 1,56 | 1,58 
140 1,27 1,26 
120 | 0,99 0,98 
100 0,75 0,76 
80 | 0,56 0,55 


La 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 417 


La simplicité et la généralité de la loi que nous venons 
d'établir, l'exactitude avec laquelle l'observation la confirme dans 
une étendue de près de 500° de l'échelle thermométrique, tout 
porte à croire qu’elle représentera rigoureusement le progrès 
du refroidissement dans la vide, à toutes les températures, et 
pour tous les corps. 


Revenons maintenant au calcul qui nous a conduits à la dé- 
couverte de cette loi. 

Le rayonnement total de l'enceinte y est représenté par F(8), 
et nous trouvons pour sa valeur 


rnaÿ + constante. 


Or, le point à partir duquel se comptent les températures 
absolues 8 étant arbitraire, on peut le choisir de manière que 
la constante soit nulle; ce qui réduira l’expression précédente 
à mna°. On en conclura donc que s’il étoit possible d'observer 
le refroidissement absolu d’un corps dans le vide, c’est-à-dire 
les pertes de chaleur de ce corps, sans restitution de la part 
des corps environnans , ce refroidissement suivroit une loi dans 
laquelle les vitesses décroîitroient en progression géométrique, les 
températures décroissant en progression arithmétique; et de 
plus, que le rapport de cette progression géométrique seroit 
le même pour tous les corps, quel que füt l’état de leurs surfaces. 


De cette loi très-simple en elle-même, on déduit aisément 
celle du refroidissement réel des corps dans le vide. En effet, 
pour passer du premier cas à celui-ci, il sufiit de tenir compte 
de la quantité de chaleur envoyée à chaque instant par l'enceinte : 
celte quantité de chaleur sera constante, si la température de 
l'enceinte ne varie pas; d'où il suit que la vitesse du refroi- 
dissement réel d'un corps dans le vide, pour des excès de tem- 
pérature en progression arithmétique, doit croître comme les 
termes d’une progression géométrique diminués d’un nombre 
constant. Ce nombre doit lui-même varier en progression géo- 
métrique, quand Ja température de l’enceinte (dont il représente 
le rayonnement absolu) varie en progression arithmétique. Ces 
divers résultats sont clairement exprimés dans l’équation obtenue 
précédemment. En y faisant ma = M, on a 


V=M (a — 1) 
M est le nombre qu'on doit retrancher des différens termes de 
la progression géométrique exprimés par Ma, et l'on voit, en 


Tome LXXXV1II. DÉCEMBRE an 1818. Geg 


418 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


outre, que ce nombre M est lié par 8 avec la relation énoncée plus 
haut. 

Puisque la valeur de a est indépendante de la nature de la 
surface, il en résulte que la loi du refroidissement dans le vide 
est la même pour tous les corps; en sorte que les pouvoirs 
rayonnans de diverses substances conservent les mêmes rapports 
à toutes les températures. Nous avons trouvé ce rapport égal 
à 5,7, en comparant le verre à l'argent : ce résullat est un peu 
moindre que celui de M. Leslie; mais cela tient sans doute à 
ce que la surface argentée de notre thermomètre éloit mate, 
tandis que M. Leslie a employé de l'argent poli. 

On voit aussi, en supposant la loi du rayonnement absolu 
représentée par la formule m”4°, qu'il faut faire 0— pour 
rendre la vitesse nulle ; ce qui fixe le zéro absolu à l'infini. Cette 
opinion, rejetée par un grand nombre de physiciens , parce 
qu’elle conduisoit à regarder comme infinie la quantité de chaleur 
contenue dans les corps, lorsqu'on supposoit leur capacité con- 
slante, devient au contraire vraisemblable, maintenant qu’on 
sait que les chaleurs spécifiques diminuent à mesure que la 
température s’abaisse; car la loi de cette diminution peut être 
telle, que l'intégrale des quantités de chaleur, prise jusqu’à une 
température infiniment basse, ait cependant une valeur finie. 

La loi du refroidissement, telle que nous venons de la pré- 
senter, et telle qu’on peut l’observer dans le vide, se rapporte 
uniquement aux vitesses de refroidissement estimées par l’abais- 
sement de température qu'indiqueroit un thermomètre à air. 
On peut voir, par la correspondance de toutes les échelles ther- 
mométriques précédemment exposée, qu’en se servant de tout 
autre thermomètre , les relations que nous avons découvertes 
entre les températures et les vitesses de refroidissement perdroient 
ce caractère de simplicité et de généralité qui est l’attribui or 
dinaire des lois de la nature. 

Si les capacités des corps pour la chaleur étoient constantes, 
dans l'échelle du thermomètre à air, la loi précédente donneroit 
encore l'expression des quantités de chaleur perdues, en fonction 
des températures correspondantes, Mais comme nous avons prouvé 
que le calorique spécifique des corps n’est constant dans aucune 
échelle thermométrique, on voit que, pour passer à ces pertes 
réelles de chaleur, il est nécessaire d'introduire un élément de 
plus, savoir, la variation de capacité des cors soumis à l’ob- 
Servation. En considérant la question sous ce point de vue, 
il faudroit douc connoïtre d'abord la loi suivant laquelle varient 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 419 


les capacités d’un certain corps , et déterminer ensuite, par des 
observations directes, les quantités de chaleur perdues par ce 
même corps, à des lermes fixes de température indiquée par 
le thermomètre à air. Alors, en multipliant les vitesses de re- 
froidissement déduites de la loi précédente, par les capacités 
correspondantes, on représenteroitles pertes absolues de chaleur. 
Ce n’est pas dans l'intervalle des deux ou trois cents premiers 
degrés de l’échelle centigrade que l'on peut espérer de vérifier 
l'exactitude de ces conséquences. La variation des capacités né 
commencant à devenir très-sensible qu'au-delà de ce terme, il 
faudroit pouvoir observer à des températures de 5 à 60o°. On 
concoit facilement toute la difficulté d’un pareil genre d’expé- 
riences. Cependant nous sommes parvenus à construire des ap- 
pareils qui réunissent toutes les conditions desirables, et nous 
avons déjà fait un grand nombre d'observations relatives à ce 
sujet; mais comme nos résultats ne présentent point toute la 
régularité que nous pouvons espérer de leur donner, nous en 
différerons encore la publication. 

Le moyen que M. Leslie a employé pour mesurer les pouvoirs 
émissifs des surfaces de différente nature, est très-propre à faire 
connoître les quantités de chaleur rayonnante perdues par un 
corps à toutes les températures. On sait que ce moyen consiste 
à évaluer le rayonnement d'yn corps par le réchauffement d’un 
thermomètre à air ou à mercure placé à une certaine distance 
du corps chaud, et que, pour rendre les effets plus sensibles, 
ce thermomètre est situé au foyer d’un réflecteur. 

C’est en se servant de cet appareil, que Laroche est parvenu 
au résultat que nous avons précédemment rappelé. Parmi les 
séries d'observations faites par ce moyen, il s’en trouve une 
qui s'étend, à la vérité, à des températures très-élevées; mais 
elle ne peut être d'aucune utilité, parce que les températures 
ont été déterminées par un procédé fondé sur la supposition 
que les capacités étoient constantes : les nombres qui repré- 
sentent les pertes de chaleur sont d’ailleurs affectés d'une autre 
erreur qui provient de ce que le réchauffement de son thermo- 
mètre focal éloit trop grand, pour que déjà l’inexactitude de 
la loi de Newton ne füt très-sensible. Mais pour faire voir que 
notre loi Satisfait aux observations faites par ce procédé, quand 
elles sont débarrassées des causes d'erreurs dont nous venons 
de parler, nous l’appliquerons aux séries rapportées dans le 
même Mémoire, et qui ne sortent point des limites dans lesquelles 
la variation de capacité n’exerce qu’une influence inappréciable. 


Geg 2 


420 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Ces séries sont celles du rayonnement d’un creuset de fer plein 
de mercure. Ici, la température du corps n'ayant pas excédé 
200°, on peut supposer la chaleur spécifique constante. On peut 
pareillement négliger la correction que les indications du ther- 
momètre à mercure doivent subir pour être ramenées à l'é- 
chelle du thermomètre à air, parce que, dans l'expérience de 
Laroche, la tige du thermomètre ne pouvant plonger en entier 
dans le liquide, les températures observées ont dû être affectées 
d'une erreur au moins égale à la correction dont il s’agit. 

Au lieu de prendre chacune des séries rapportées par ce 
physicien, nous en avons pris en quelque sorte les moyennes 
en nous servant de la formule par laquelle M. Biot a représenté 
ces observations; formule qui se trouve pag. 654 du quatrième 
volume de son Traité de Physique. Les nombres que nous donnons 
comme résultats de l'observation sont donc déduits de la for- 
mule de M. Biot. Pour les exprimer à l’aide de notre loi, ül 
faut faire V, qui représente ici le rayonnement, égal à 


4,24 (a' EF 1). 
t étant l’excès de température du creuset, et a un nombre con- 
slant que nous avons trouvé précisément égal à 1,0077. 
RE EE ES EE ES Ne ne +: } 


VALEURS VALEURS 


VALEURS DE £. | Observées de V. | calculées de V. 


200° 15°33 15°2g 
189 19,51 12,52 
160 10,09 10,15 
140 8,04 8,11 
120 6,30 6,36 
100 4,84 4,86 

80 5,60 3,58 

60 | 2,54 1 2,47 


L'accord que l’on remarque encore ici entre le calcul et l’ob- 
servation, fournit une nouvelle preuve que le nombre a ne 
dépend ni de la masse ni de l’état de la surface du corps, 
puisque nous lui retrouvons , dans des circonstances fort dif- 
férentes, la même valeur que dans nos expériences sur le re- 
froidissement dans le vide des surfaces vitreuses et argentées. 

On peut déduire aisément de l’expression de la vitesse du 
refroidissement dans le vide, la relation qui lie les tempéra- 
dures et le temps; en effet, en désignant le temps par x, on a 


ou 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 421 


dt \S 
=— 7 —=M (a — 1); 
M étant un coefficient constant qui dépend seulement de la 


tempéralure de l’enceinte, on en conclut 


— dt 
Ne) 
et 


Q'— 1 


1 
LE je (log) + const. 


La constante arbitraire et le nombre M se détermineront 

dans chaque cas particulier, lorsqu'on aura observé les valeurs 
de #, répondant à deux valeurs connues du temps x. 
. Si l’on supposoit #£ assez pelit pour que, eu égard à la pe- 
ütesse du logarithme de a, on püt se borner aux termes de 
la première puissance dans le développement de «‘, on retom- 
beroit dans la loi de Newton. 


Du Refroidissement dans l'Air et dans les Gaz. 


Les lois du refroidissement dans le vide étant connues, rien 
n’est plus simple que de séparer, du refroidissement total d'un 
corps environné d'air ou d'un autre gaz, la portion de l'effet 
due au contact du fluide. Il suflit évidemment pour cela, de 
retrancher, des vitesses de refroidissement réelles, celles qui 
auroient lieu si, toutes choses égales d’ailleurs, le corps étoit 
placé dans le vide. Cette soustraction peut très-aisément s’opérer, 
maintenant que nous avons une formule qui représente ces vitesses 
avec une grande exactitude et pour tous les cas possibles. Nous 
pouvons donc déierminer l'énergie du refroidissement dû au seul 
contact des fluides, et telle qu’elle s’observeroit immédiatement 
si les corps pouvoient être privés de la faculté de rayonner. 
Cette parlie de notre travail exigeoit un nombre très-considérable 
d'expériences, puisque les lois que nous cherchions à découvrir 
devoient être étudiées sur des gaz différens, et, pour chacun 
d'eux, à des pressions et à des températures diverses. Chaque 
expérience a été faite et calculée comme nous l'avons expliqué 
plus haut; aussi nous bornerons-nous encore à rapporter les 
résultats moyens et tout calculés de ces diverses observations. 

La première question dont nous devions nous occuper étoit 
de rechercher si les modifications de la surface des corps, qui 
exercent sur le rayonnement une si puissante influence, ap- 


422 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


porleroiïent aussi quelque changement dans les pertes de chaleur 
occasionnées par le contact des fluides. Il suffisoit pour cela 
d'observer le refroidissement de notre thermomètre dans un 
gaz d'une élasticité et d’une température déterminées, d'abord 
en conservant à la boule sa surface vitreuse et naturelle, et 
ensuile en la recouvrant d’une feuille d'argent. 

De toutes les expériences qui ont eu cette comparaison pour 
objet, nous ne citerons que les deux suivantes : 

Dans la première, nous avons observé le refroidissement du 
plus gros de nos deux thermomètres dans le ballon contenant 
de l'air à la pression de o",72 et à la température de 20°. 


Premier cas. Le thermomètre ayant sa surface naturelle. 


EEE EE I RIRE PE VE EEE CI DE PE CEE PE MECS 


EXCÈS VITESSES TOTALES VITESSES DIFFÉRENCES 

de température | de refroidissement | de refroidissement ou vitesses 
du thermomètre de qui auroient lieu | de refroidissement 
à surface vitreuse. | ce thermomètre. dans le vide. dues à l’airseul, 

200° 14°04 8°56 5°48 

180 11,76 7,01 4,75 

160 9,85 5,68 4,17 

140 8,05 4,p4 3,51 

120 6,46 3,56 2,90 

100 | 4,99 [l 2,72 | 2,27 


Deuxième cas. Le thermomètre ayant sa surface argentée. 


EXCÈS VITESSES TOTALES VITESSES DIFFÉRENCES 
de température | de refroidissement | de refroidissement ou vitesses 
du thermomètre de qui auroient lieu | de refroidissement 
à surface argentée. | ce thermomètre. dans le vide. dues à l’air seul. 

200° 6°93 150 5°43 

180 6,02 1,93 4,79 

160 5,19 1,00 4,19 

140 4,32 0,80 3,52 

120 3,50 0,62 2,88 

100 | 2,80 0,48 | 2,52 


On voit, en comparant les dernières colonnes des deux ta- 
‘bleaux précédens, que les nombres correspondans ne présentent 
que des différences très-pelites qu’on doit raisonnablement at- 
tribuer aux erreurs des expériences. L’air enlève donc, toutes 
choses égales d’ailleurs, la même quantité de chaleur aux sur- 
faces vitreuses et aux surfaces métalliques. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 423 


Les deux tableäux suivans renferment tous les élémens d'une 
Comparaison semblable faite sur le gaz hydrogène. On a seu- 
lement substitué le petit thermomètre au grand. L 

L'expérience a élé faite à 20°, le gaz ayant une élasticité 
de 07,74. 


Premier cas. Le thermomètre ayant sa surface naturelle. 


SG ue. 6 4 À À" {QT Qu, CRU Gé US 


EXCÈS VITESSES TOTALES VITESSES DIFFÉRENCES 
de températnre | de refroidissement | de refroidissement ou vitesses 
du thermomètre de qui auroïentlieu | de refroidissement 
à surface vitreuse.| ce thermomètre. dass le vide. dues à l’'hydrog. seul. 
80° 22°96 5203 17°93 
60 16,14 3,54 12,60 
40 9,87 2,18 7,69 
L' 22 
20 | 4,28 0,95 3,33 


Deuxième cas. Le thermomètre ayant sa surface argentée. 


EXCÈS VITESSES TOTALES VITESSES DIFFÉRENCES 
de température _ | de refroidissement | de refroidissement ou vitesses 
du thermomètre de qui auroientlieu | de refroidissement 
à surface argentée. | ce thermomètre. dans le vide. [dues à l’hydrog. seul. 
80° 19°59 1977 | 17°82 
60 15,97 1,29 | 12,68 
40 8,62 0,87 775 
z Z 
20 3,74 | 0,57 | 3,37 


Cette comparaison donne pour l'hydrogène un résultat sem- 
blable à celui de l'air. L'égalité dont il s’agit se trouvant ainsi 
vérifiée pour des surfaces qui diffèrent autant que le verre et 
l'argent par leurs pouvoirs émissifs, et pour des gaz aussi dif- 
férens que l'air et l'hydrogène, il est naturel de généraliser ce 
résultat et d'en déduire la loi suivante : 

Les pertes de chaleur dues au contact d'un gaz sont, toutes 
choses égales d'ailleurs, indépendantes de l'état de la surface ducorps 
qui se refroïdit. 

Cette loi remarquable de la communicalion de la chaleur a 
déjà été admise par M. Leslie; mais cet habile physicien ne 
l'a présentée que comme une conséquence vraisemblable de deux 
expériences indirectes, qui se réduisent à prouver que l’état de 
la surface n'a plus qu'une influence très-foible sur la durée du 


124 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
refroidissement total , dans les circonstances où le rayonnement 
nc peut plus contribuer que pour une portion très-pelite à la 
perte de chaleur. C’est, par exemple, ce qui a lieu lorsqu'un 
corps échauflé est exposé à un vent très-violent, ou bien lorsqu'il 
est plongé dans un liquide. Quelque ingénieuses que soient de 
pareilles expériences, elles ne suppléent jamais complètement 
à des observations directes; et dans le cas dont il s’agit, n’eüt-il 
pas élé possible, par exemple, de supposer qu'une propriété 
reconnue à l'air animé d’une grande vitesse ne s’appliqueroit 
qu'avec des restrictions à l'air en repos? Ce doute seroil encore 
plus fondé, si l'on admettoit avec M. Leslie que l'air en repos 
enlève aux corps leur chaleur par deux moyens très-différens , 
Savoir, par une propriété conductrice, telle qu'on la conçoit 
dans les solides, et par le renouvellement du fluide dû au courant 
ascendant. Notre procédé, en nous permettant d'abord de con- 
Slater une pareille loi dans des gaz de nature diverse, dissipe en 
outre, toutes les incertitudes que laissoient subsister encore les 
expériences de M. Leslie. C’est une des occasions où l’on peut le 
mieux juger des avantages de la méthode expérimentale dont 
nous avons fait usage. 

Le principe que nous venons d'établir étant bien vérifié, nous 
avons pu nous borner, dans la suite de notre travail, à observer 
le refroidissement du thermomètre à boule nue, dans l'air et 
dans les différens gaz. Désormais nous ne rapporterons plus, 
dans nos tableaux, que les effets dus seulement au contact du 
gaz. Ils ont toujours été calculés, comme nous l'avons dit pré- 
cédemment, en retranchant des vitesses totales de refroidisse- 
ment celles qui auroient eu lieu, dans les mêmes conditions, 
si le thermomètre se ft refroidi dans le vide. 

Nous allons maintenant entrer dans l'examen des diverses cir- 
Couslances qui peuvent modifier l'énergie des fluides élastiques 
dans la production du phénomène qui nous occupe. Nous étu- 
dicrons l'influence de chacune de ces causes , d'abord sur l'air, 
ensuite sur l'hydrogène, l'acide carbonique et le gaz oléfiant. 
Nous avons choisi les deux premiers, à raison de la grande dif- 
férence qu'ils présentent dans quelques-unes de leurs propriétés 
physiques. L’air et le gaz oléfiant offroient, au contraire, le 
rapprochement curieux de deux gaz de densités presque égales, 
mais de capacités très-différentes. 

L'exemple de l'influence qu'exerce, sur le refroidissement 
dans le vide, la température plus ou moins élevée de l'enceinte, 
LOuS à naturellement conduits à examiner, en premier lieu, si 

la 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 425 


la température d’un gaz ne produiroit pas un effet analogue 
sur les quantités de chaleur qu'il enlève. Il est inutile de dire 
que de pareilles expériences n’avoient point encore été teutées, les 
physiciens qui se sont occupés des questions de ce genre ayant 
toujours supposé que les vitesses de refroidissement ne dépendent 
que des excès de température. 

Sans nous arrêter au détail de nos premières tentatives, nous 
rapporterons tout de suite les tableaux où ‘la loi se, manifeste 
d'elle-même. Dans les expériences dont il s'agit, on a fait varier 
la température du gaz en échauffant convenablement l’eau qui 
entouroit le ballon; mais on laissoit en mêmé temps le gaz se 
dilater librement, de manière qu'il conservät, dans tous les cas, 
Ja même élasticité. Le tableau suivant contient les résultats d’une 
pareille série d'observations faites sur l'air. 


ExCÈS VITESSES VITESSES VITESSES MITESSES 
de températare | de refroïdissement | de refroidissément de refroidissement | dé refroidissement 
Arbre dt dues au contact seul|dues au contact seulldues au-contacr seul|dues an contact seul 
e l’air de Pair de Pair de Pair 
à la pression 0”,52,|à la pression 0",72,à la pression 0”,52,là la pression. 0,72, 
à : A © 
environnant | et à la temp. 20°. | ec à la temp. 40°. | et à la temp. Go°. | et à la temp. 80°. 


sur l’air 


a 


| ———— 


200° 5°48 5°46 HE 3 PAT: 
180 4575 470 4°79 sus 
160 4,17 4,16 4,90 4213 
140 3,51 3,55 EE QMOEE OR UE 1177 
120 2,90 2,93 2,94 2,88. 
100 | 2,27 2,28 2,24 | 2,25 
80 1,77 175. | LL 1,78 
60 | 1,23 1,19 1,18 | 1,90 


L'inspection seule de ce tableau montre que les vitesses de 
refroidissement sont restées les mêmes , dans chacune des quatre 
séries, pour les mêmes excès de température. Cette loi simple 
étoit trop importante, pour qu'on ne cherchät pas à la vérifier 
sur d'autres fluides élastiques. Le tableau suivant offre une com- 
paraison semblable pour le gaz hydrogène, qu’on a porté suc- 
cessivement à 20°, 40°, 60°, 80°. La tension a été, dans cha- 
eune des expériences, de 0",72. 


Tome LXXXVII. DÉCEMBRE an 1818, Hhh 


426 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


ExCŸs YITESSES VITESSES VITESSES VITESSES 
de température | de refroidissement | de refroidissement | de refroidissement | de refroidissement 
u dues au contact seul|dues au contact seul|dues au contact seul|dues an contact seuk 
thermomètre du gaz du gaz du gaz da gaz 
sur le gaz  |sous la press. o",72, [sons la press. o”,7a,/sous la press. 0,52, |sous la press. 0,72, 
environnant. À el à la temp. 20°. à la temp. 40°, à la temp: Goo, et à la temp. Bo°, 
——— ER, PE RS EN RO SAS ME ne 
160° 14296 14208 14,18 else 
140 12,11 12,16 12,12 | 12°08 
120 10j10 10,13 10,20 10,1q 
100 7,98 7,83 8,03 8,05 
80 6,06 5,97 | 6,ot 6,00 
Go 4,21 4,17 418 | 4,20 


Ce tableau conduit à la même conséquence que le précédent. 
Pour faire voir qu’elle s'étend à tous les gaz , quelles que soient 
leur nature et leur densité, nous réunissons ici les résultats 
d'expériences semblables sur l'acide carbonique à la pression 
de 0",72, et sur l'air dilaté à la pression 0",56. 


ED EEE I PE EP VE EE SO 


ExCÈS# VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES 
de température | de refroidissement lde refroidissement | de refroidissement | de refroidissement 
dues au contact seul|dues au contact seul|dues au contact seul|dues au contact seut 
thermomètre |de l'acide cärboniq.|[de acide carboniq.fde l’acide carboniq. de Pacide carboniq. 
sur le gaz sous la press. 0,72, |sous la press. 0,72, |sous Ja press. 0”,72,/sûus la press, 0,52, 
environnant. ettempérat:20°. et Lempérat. 40°. ct'températ. Go°. et températ. 800. 
pr ALP) PES La LL REN ad nv EL Die DE ERA? : © 22 \ L'ÉCIES 


200° 5eb5 buy He DEC 
180 457 | 4,63 4°52 m2 
160, 4,04 4,06 5,97 410 
140 3,59 3,5g 3,34 | NS 45 
120 2,82 2,80 2,79 2,88 
100 2,29 9,18 | 92,21 | 2,90 
EXCÈS VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES 
de température | de refroidissement | de refroidissement | derefroidissement | de reftoïdissement 

du 111, [dues au contact seulldues au contact seul|dues au contact seul|dues au contact seuk 
thermomètre ._  _dePair. de l'air de l'air de Pair 

sur Pair {sons la‘press. o",86,|sous la press. 0,36, [sous la press. 0”,36,/sous Ta press, 0,36, 

enwixonnant. | eutempérat. 20., | et températ, 40°, | ettempérat. Goo. | et températ. 80e. 

200° 4o1 410 See AE: 
180 3,52 3,50 3°55 Haas 
160 3,03 2,99 3,04 3°0g 
140 | 2,62 2,57 2,62 2,66 
120 2,12 2,16 2,14 2,15 
100 | 1,69 | V7 Ÿ 1,67 1,74 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 427 


De toutes ces comparaisons, on peut déduire la loi suivante: 

La vitesse de refroidissement d'un corps, due au contact. seul 
d'un gas, dépend, pour un méme excès de température, de la 
densité et de la température du fluide; mais. cette. dépendance est 
telle, que la vitesse du refroidissement reste la même si la den- 
sité et la température du gaz changent de manière que l'élasticité 
reste conslante. 

Dans la recherche de la loi du refroidissement produit par 
les gaz, on peut, d’après cela, n'avoir égard-qu’à leur élas- 
ticilé : c’est donc l'influence de ce dernier élément qu'il s’agit 
d'apprécier. 

Pour y parvenir, nous avons déterminé, pour chaque gaz 
pris successivement à des élasticités différentes, les vitesses de 
refroidissement correspondantes aux mêmes excès de tempéra- 
ture; nous ne rapporterons de chacune de ces séries d'expé- 
æiences que ce qui sera nécessaire pour meltre en évidence la loi 
à laquelle nous sommes parvenus. PE 

Commencons par l'air. 

Le tableau suivant renferme les vitesses correspondantes de 
refroidissement dues au contact de l'air seul sous les pressions 


02. -10 0%. 010. -5 000.:. 0040; 
, 4 Le 1 . 37 » b 
c’est-à-dire, sous des pressions décroissant comme les nombres 


ai OU La fé Le 
JARDL ÉD UE31 T6 


ExCÈS VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES 
de de de de de . de 
température | refroidissement | refroidissement | refroidissement | refroidissement refroidissement 
du dues dues dues dues dues 
thermomètre| au contact seul | au contact seul | au contact seul | au contact senl [au contact seul 
sur lair de Pair de l'air de l'air de Pair de Pair 


environnant.{à le press. o%,72.|à la press. 0",36.|à la press. 0,18 |à la press. 07,09 à la pres. 0,045. 


a — | ——————— — 


200° 5°48 {oi 2°g5 2°20 1°59 
180 4,75 3,52 2,61 1,90 1,97 
160 4,17 3,03 2,21 1,62 1,20 
140 3,51 2,62 1,91 1,40 1,02 
120 2,90 2,19 1,57 1,15 0,84 
190 2,27 1,69 1,23 0,90 0,65 
80 1,77 1,29 0,96 1,1, 0,70 0,52 
60 1,23 0,90 cn 0,48 0,35 
40 0,75 £ 
20 0,52 


Si l'on prend les rapports des nombres correspondans de Ja 
Hbh 2 


‘428 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


2° et de la 5° colonne, on trouve que leurs valeurs, en com- 
mencant parle haut, sont : 


139744, 1,854,.4 1,574... 1,544. 1987 de 24 Ty Dei eie 
1597 vis «le: 1986. 


On a pareillement pour les rapports entre les nombres con- 
tenus dans la 3° et la 4° colonne, 


Da 2 030200 Dai HIT A UL ASIN EG Re, 5 
TOM NOTE se 
Fe 


Pour les rapports entre les nombres de la 4° et de la 5 
colonne, 


VE RME EE PO A RE NN ME RS AR (EU 
PEN EN ET 


Enfin on trouve, en divisant les termes de la 5° colonne par 
ceux de la Ge, 


BB NB6u 0 1138544 20 1/30 0 12 3386 .1%07a58pooul 
T3 20 air 5 7e 


Tous ces rapports ne présentent que les irrégularités aux- 
quelles on doit s'attendre dans les résultats des observations 
les plus soignées ; et l’on est en droit d’en tirer les conclusions 
suivantes : 

1°. Quelle que soit l'élasticité de l'air, la vitesse du refroidisse- 
ment produit par le contact de ce fluide varie exactement de la méme 
manière , pourvu que les excès de température restent les mêmes; 

2°. L’élasticité de l'air variant en progression géométrique, son 
pouvoir refroidissant change aussi en progression géométrique ; 
de telle manière que, quand-le rapport de la premiere progression 
géométrique est 2, celui de la seconde est 1,366, moyenne entre 
tous les nombres rapportés plus haut. 


On concoit facilement que la loi précédente n’a dù se mani- 
fester qu'après beaucoup d'essais; mais une fois vérifiée pour 
l'air, il étoit naturel de l’éprouver sur les autres gaz : mous 
allons rapporter les tableäux d'observations relatifs à chacun d'eux. 

Commencons par l'hydrogène. 


ET D'HISTOIRE NATURFZLE. 429 


É nn e 2 EN De Pen Sue A eee "de . """""  | 


: VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES 
FRE de de de de ..de 
=. [refroidissement | refroidissement | refroidissement refroidissement | refroidissement 
A «Os dues ” dues dues dues dues 

1 cu \ au contactseul | au contact seul |au contact,seul | au contact seul | au contact seul 
( ee LE de l'hydrogène | de l'hydrogène | de l'hydrogène | de l'hydrogène de l'hydrogène 
Sur es SZ | sous la pression | sous la pression | sous la pression | sous là pression | sons la pression 

environnans. 072. 07,36. 0,18. 07,09. 0,045. 
a EL: dm CPIRE Le en PE ORC ARE Que TS Ésis# dise 

180° 16°5q 12°86 9°82 7°49 5°81 

160 14,26 10,97 8,57 6,49 | 4,95 

140 12,11 924 711 5,47 4,24 

Led 

190 10,10 7,88 | 5,99 4564 8,51 

100 7,98 6,23 4,72 3,63 2,80 

80 6,06 462 | 5,58 2,77 2,09 

60 | 4,0. | 3,91 2,48 1,88 | 1,46 


Les rapports entre les nombres de la 2€ et de la 5€ colonne sont : 
120 DOI UOTE ce 1200: TyDlee TT. 


Les rapports entre les nombres de la 3° et de la 4 colonne 
sont : 


TANT OS SON ME OT TO De Te 20). ll, 20 
Les rapports des nombres de la 4° et de la 5° colonne sont: 
ML à Der 130022 1,207 Ref, 30 0.  EjAO ee d° 1592 
Les rapports des nombres de la 5° et de la 6° colonne sont: 
D 20 De 20,04 bas 42e dd. 13010 5 13207 


L'égalité presque parfaite de ces nombres nous fournit donc 
un résultat analogue à celui qui est relatif à Pair; ainsi : 

1°. Quelle que soit l'élasticité du gas hydrogène, l'intensité du 
refroidissement qu'il produit doit étre représentée par une méme 
Jonction de la différence des températures; 

2. Le pouvoir refroidissant du gaz gydrogène décroit suivant 
une progression géométrique dont le rapport est 1,301, quand 
son élasticité diminue suivant une progression géométrique dont 
le rapport est 2. 

Nous sommes arrivés aux mêmes conséquences à l'égard de 
l'acide carbonique et du gaz cléfiant. C’est ce que l’on peut ai- 
sément vérifier sur les deux tableaux suivans, disposés pour 
chacun de ces gaz, comme ceux que nous avons rapportés plus 
haut pour l'air et l'hydrogène. 


a 


450 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


y VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES 
me de de de de . de 
nn Aatnre refroidissement | refroidissement | refroidissement | refroidissement | refroidissement 
Ve dues dues dues dues dues 
dhermomètrel 2 £0ntact seul | au contact seul | au contact seul | au contact seul | au contact seul 
pe l'acide de l'acide de Pacide de Pacide de l'acide de l'acide 
ec 4: carbonique carbonique carbonique carbonique carbonique 
arbonique ES c é su re ; PACE CR 
SA Ua la pression à la pression | à la pression à la pression | à la pression 
* 0",72: 0,36. 0,18. 0,09. 0,045. 
| mme 4 mt ee po ete mom) eee TRES 
200° 5°25 364 2056 | 1979 1°25 
180 4,57 3,22 2,25 1,06 1,09 
160 4,04 2,80 1,97 1,37 0,92 
140 5,39 2,38 1,65 1,17 0,80 
120 2,82 1,97 1,56 0,99 0,67 
100 2,92 1,5 1,08 0,76 0,52 
80 1,69 17 0,82 0,57 | 0,40 
60 | 1,18 ©,82 0,57 | 0,49 0,28 
ES OS Ce RE 
EXCÈS VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES VITESSES 
de de de de de . de 
température | refroidissement | refroidissement | refroidissement | refroidissement | refroidissement 
du dues dues dues dues dues 
mhermomètre| au contact seul | au contact seul | an contact seul” au contact seul | au contact seul 
sur du gaz oléfiant | du gaz olefiant | du gaz oléfant | du gaz oléfiant | du gaz oléfiant 
legaz oléfiant| à Ïa pression à la pression à Ja pression à la pression à la pression 
environnant, om,72. 07,36. 07,18. 0/:,09. 07,045, 
200° 7°41 bo18 | 3°64 2058 | 1°84 
180 6,45 4,7 SLT. 2,22 1,59 
160 Er 5:86 A 18 | 134 
140 4,790 3,31 2,35 1,6 | 1,18 
BE 
120 3,84 2,76 1,92 1,35 0,96 
100 | 3,12 | 2,21 1,55 1,08 | 0,78 
80 2,34 1,62 | 1,15 0,79- 0,62 


Moyennes de tous les rapports. 


Pour l'acide carbonique = 1,451. 
Pour le gaz oléfiant. . = 1,415. 


On peut donc, de tout ce qui précède, tirer les conséquences 
suivantes : 

1°. Les pertes de chaleur dues au contact d'un gaz croissent avec 
les excès de température suivant une loi qui reste lu même, quelle 
que soit l'élasticité du gaz; 

2°. Pour une même différence de température, le pouvoir re- 
Jroidissant d'un méme gaz varie en progression géométrique, lorsque 
sa force élastique varie elle-méme en progression géométrique ; et 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 451 
st l’on suppose le rapport de cette seconde progression égal à 2, 
le rapport de la première sera 1,566 pour l'air, 1,301 pour l'hy- 
drogene, 1,431 pour l'acide carbdnique, et 1,415 pour le gaz 
olefiant. 
. Ce résultat peut étre présenté d'une manière encore plus 
simple, à l’aide du calcul suivant : 

Si l'on appelle P le pouvoir refroidissant de l'air à la pres- 
sionp, ce pouvoir deviendra P(1,566) à la pression 2p; P(1,366)° 
à la pression 4p ; et enfin à une pression p.2", il seroit P(1,566)"; 
faisant 

PET AE A à (LEE 0) ne 
on aura évidemment, en éliminant », 


log. P°— log. P __ log. p —log.p 


log. (1,366) log. 2 ; 


d'où, en remontant aux nombres 
FE} - | 


P’ sla p' 0,45 
CC) 


on lrouveroit parcillement pour l'hydrogène 


LI P' 
Ps (Gus. 
Pour l'acide carbonique, l'exposant seroit 0,517; et pour le 
gaz oléfiant, 0,501. 


De là on conclut que le pouvoir refroidissant d'un gaz est, 
toutes choses égales d’ailleurs , proportionnel à une certaine 
puissance de son élasticité; mais que l’exposant de cette puis- 
sance varie en passant d'un gaz à un autre. Il est 0,38 pour 
l'hydrogène, 0,45 pour l'air, 0,517 pour l’acide carbonique et 
0,501 pour le gaz oléfiant. Ces trois derniers nombres différant 
peu de 0,5, on peut dire que , dans les gaz auxquels ils se rap- 
portent, le pouvoir refroidissant est à peu près proportionnel à 
la racine carrée de l’élasticité. 


Si l'on compare la loi que nous venons dénoncer aux lois 
approximatives proposées sur le même sujet, mais dans le cas 
de l'air seulement, par MM. Leslie et Dalton, on pourra juger 
de l’erreur dans laquelle les ont entraînés l'inexactitude des sup- 
positions qui servent de base à tous leurs calculs, et le peu de 
précision que comportent les procédés dont ils ont fait usage. 


432 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

En effet, le premier (1), par des expériences photométriques ; 
calculées au moyen de la loi de Newton, trouve le pouvoir re- 
froidissant de l'air proportionnel à la racine cinquième de la 
densité; et M. Dalton (2) le trouve proportionnel à la racine 
cubique, en supposant, comme il le fait partout, une loi in- 
variable pour le refroidissement total de tous les corps et dans 
tous les gaz. 

Maintenant qu'on connoït l'influence qu'exercent sur le re- 
froidissement la température et la densité du gaz dans lequel 
il a lieu, il reste à découvrir comment, pour un état donné 
d'un fluide, les vitesses de refroidissement dépendent des excès 
de température, 

Nous avons déja reconnu que la loi qui exprime celte dé- 
pendance, reste la même, pour un même gaz, lorsque son 
élasticité vient à changer, Voyons maintenant ce qui arrive quand 
on passe d’un gaz à un autre, et, pour cela, reprenons, dans 
les tableaux précédens, les vitesses de refroidissement dues au 
contact seul de l'air, de l'hydrogène, de l'acide carbonique et 
du gaz oléfiant, ces quatre fluides étant sous la pression 0",72. 


VITESSES 
de refroidissement 
dues au contact seul 
du gaz oléfiant 
sous la press. 07,72. 


EXCÈS YITESSES VITESSES VITESSES 
de températnre | de refroidissement | de refroidissement | de refroidissement 
du theimomètre|dues au contact seul dues au contact seul|dues au contact seal 
sur le fluide de Pair de l’hydrogène  Îde lacide carboniq 
environnant. |sous la press. 0,72. /sous la press. 0”,72.|sous la press. 0,72. 


——— —————— 


—— 


200° 5°48 15406 5°95 7°4AA 
180 4,75 16°59 4,57 6,45 
160 417 14,26 4,04 5,41 
140 3,51 12,11 3,39 4,70 
120 2,90 10,10 2,82 3,84 
100 2,27 7,98 2,22 3,12 
80 1,77 I 6,06 1,69 2,84 


7e 


En divisant les nombres de la 5° colonne par ceux de la se- 
conde, on trouve, pour les rapports entre les pertes produites 
par l'hydrogène et par l'air, 

3,401005 ac 05450 05,48 19 4,51 4e08344 


Et comme il sufliroit, pour rendre ces rapports égaux, d’al- 


QG) ge experimental Inquiry into the nature and propagation of heat, 
pag. 486. 
(2) 4 new System of chemical Philosophy, part. I, pag. 121. 


térer 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 433 


térer les vitesses qui ont servi à les déterminer, de quantités 
comprises entre les limites de l'incertitude que comportent tou- 
jours les observations, on peut en conclure que la loi cherchée 
est la même pour l'hydrogène et pour l'air. 

On arrivera à une conséquence semblable relativement aux 
deux autres gaz, en prenant les rapports des vitesses du re- 
froidissement qu'ils preduisent, aux vitesses correspondantes de 
la première colonne; on trouve pour l'acide carbonique la série 
de nombres, 


0,958... 0,962... 0,968... 0,065... 0,972... 0,977... 0,955; 
et pour le gaz oléfiant, 
SD PO) RE SON NID T2 t0 Vider 1502: 


La loi du refroidissement produit par le seul contact d'un 
gaz est donc indépendante de la nature et de la densité de ce 
gaz ; et la comparaison de l’une quelconque des séries rapportées 
plus haut, avec une série analogue de refroidissement dans le 
vide, montre clairement que la loi que nous cherchons diffère 
de celle du rayonnement. 

Après un grand nombre de tentatives dont il seroit inutile 
de rendre compte , nous avons trouvé que les vitesses de re- 
froidissement , dues au contact seul d’un gaz, varient, avec les 
excès de température du corps, suivant une loi analogue à 
celle qui lie le pouvoir refroidissant d’un fluide à son élastieité ; 
c'est-à-dire que les quantités de chaleur qu’un gaz enlève à un 
corps croissent en progression géométrique, les excès de tem- 
pérature de ce corps croissant aussi en progression géométrique. 
Le rapport de cette dernière progression étant 2, celui de la 
premiere est 2,35; et, par un calcul semblable à ceux que 
nous avons faits précédemment, ce résultat se transforme en 
celui-ci, dont l'énoncé est plus général, savoir : que les pertes 
de chaleur dues au contact d’un gaz sont proportionnelles aux 
excès de température des corps élevés à la puissance 1,233. 

Pour metre à portée de juger de l'exactitude de cette loi, 
nous rapporterons dans le tableau suivant, les vitesses de re- 
froidissement produites par le contact de l'air à o",72 de pres- 
sion, la 2° colonne contenant les valeurs observées de ces vi- 
tesses , et la 3 leurs valeurs déduites de la loi que nous venons 
dénoncer. 


Tome LXXXVII, DÉCEMBRE an 1818. li 


454 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


LE ETS 
EXCÈS DE TEMPÉRATURE. | VITESSES OBSERVÉES. | VITESSES CALCULÉES. 


200° | 5°48 5°45 
180 4,75 4,78 
160 417 414 
140 3,51 3,51 
120 2,90 | 2,91 
100 2,927 9,51 
80 | d 77 1,76 
60 1,23 1,24 
4° | 0,77 0,75 
20 0,33 0,52 


Il est inutile de rapporter les comparaisons semblables que 
nous avons faites sur les autres gaz, et a chacune des pressions 
auxquelles nous avons opéré; car nous avons remarqué plus haut 
que les séries relatives à chacun d’eux suivent exactement la 
même loi que celle de l'air, et que cette loi s’observe à toutes 
les pressious. Au reste, les comparaisons dont nous parlons nous 
ont donné des résultats aussi satisfaisans que la précédente, et 
c’est d’ailleurs ce qu’on peut vérifier immédiatement sur chacune 
des séries d'observations que nous avons fait connoitre. 

Pour obtenir actuellement une expression générale de lin- 
tensilé du refroidissement occasionné par le contact d’un fluide, 
il est nécessaire de rassembler toutes les lois particulières que 
nous venons d'établir. Or, la première nous apprend que l’état 
de la surface du corps n’a aucune influence sur la quantité 
de chaleur qu’un fluide lui enlève; et la seconde prouve que 
la densité et la température de ce fluide n’affectent le refroi- 
dissement qu’autant qu’elles concourent à faire varier la pression ; 
en sorle que le pouvoir refroidissant de ce fluide ne dépend 
en définiuf que de son élasticité. Cette élasticité et l'excès de 
température du corps sont donc les deux seuls élémens qui 
puissent faire varier la vitesse du refroidissement. En désignant le 
premier de ces élémens par p, et le second par {, on aura, 
pour la vitesse V du refroidissement par le contact d’un fluide, 


Va=nepat, 


b étant, pour tous les gaz et pour tous les corps, égal à 1,233; 
c étant aussi le même pour tous les corps, mais variant d’un 

az à uu autre, ét >»? ayant une valeur qui change avec la nature 
de gaz et avec les dimensions du corps. Les valeurs de € sont, 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 435 


comme nous l'avons trouvé, 0,45 pour l'air, 0,38 pour l’hy- 
drogène, 0,517 pour l'acide carbonique, et 0,501 pour le gaz 
oléfiant. Les valeurs de #» dépendent, ainsi que nous l'avons 
dit, des dimensions du corps et de la nature du gaz. Pour 
notre thermomètre, 7» est égal à 0,00919 dans l'air, à 0,0318 
dans l'hydrogène , à 00,0887 dans l’acide carbonique, et à0,01227 
dans le gaz oléfiant. (Ces valeurs de #2 supposent p exprimé 
en mètres, et £ en degrés centigrades.) On pourroit, à l’aide 
de la valeur précédente de V, calculer les rapports des pouvoirs 
refroidissans des différens gaz pour chaque pression. Ainsi, en 
prenant pour unité le pouvoir refroidissant de l'air, et supposant 
la pression —0",76, on a, pour le pouvoir refroidissant de 
l'hydrogène , 3,45; et pour celui de l'acide carbonique, 0,965. 
Ces nombres changeroient avec l’élasticité supposée aux trois 
gaz; c’est ce que MM. Leslie et Dalton n’ont pas apercu, et 
ce qu'on déduit aisément de notre formule : néanmoins leurs 
déterminations s’éloignent peu de celle que nous venons de 
Calculer pour la pression 0",76. Nous reviendrons plus tard 
sur cet accord accidentel entre leurs expériences et les nôtres. 

La simplicité de Ja loi générale que nous venons de faire 
connoître nous faisant vivement desirer de la vérifier sur des 
températures plus élevées que celles auxquelles il nous avoit 
été possible d'atteindre dans les expériences précédentes, nous 
y sommes parvenus par un procédé très-simple dont l'idée est 
due à M. Leslie. 

Lorsque notre thermomètre à surface vitreuse se refroidit 
dans l'air libre, da vitesse totale de ce refroidissement est la 
somme des vitesses dues séparément au contact de Fair et au 
rayonnement. En désignant celles-ci par v et v', la vitesse totale 
est v—+v'. Si le thermomètre est argenté, la vitesse v, due à 
l'air, reste la même pour une même température, et v’ se réduit 


4 


2,707 8 
du verre et de l'argent est 5,707. La vitesse lotale de refroi- 


Va 


v . . 
5 703» Puisque le rapport constant des pouvoirs rayonnans 


. “ » V 
dissement du thermomètre argenté est donc v + NS De h, 
43 


il est aisé de conclure que, pour connoitre, à loutes les tem- 
pératures, les pertes de chaleur produites par le contact de 
l'air, al suffit de déterminer les vitesses totales de refroidisse- 
ment de notre thermomètre, d’abord en lui conservant sa surface 
naturelle, puis en la recouvrant d'une feuille d'argent; ces vi- 
tesses étant représentées par a et par d, on aura 


li à 


436 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 
a=v+v" pat ri tuat 
k 5,707? 


5,707 X b— a 
Here." 
Appliquons celte formule aux résultats contenus dans le 1a+ 
bleau suivant: 


= 


VITESSES TOTÂLES 
de refroidissement 
du thermomètre 


VITESSES TOTÂLES 
de refroidissement 
du thermomètre 


EXCÈS 
de température 
du thermomètre, 


VALEURS DE #. 


vitreux. argenté. | 

260° 24°42 10°96 | 810 
240 21,12 9,82 7,4 
220 17,92 8,59 6,61 
200 15,30 727 5,92 
180 É 15,04 6,57 5,19 
160 |! ro,7o 5,59 4,50 
140 8,79 4,61 3,73 
120 6,82 3,80 3,11 
100 5,57 3,06 2,53 

80 4,15 2,82 1,93 


La seconde et la troisième colonne contiennent les vitesses 
totales de refroidissement des thermomètres à surface vitreuse 
et à surface argentée, pour les excès de température compris 
dans la première colonne. La dernière renferme les valeurs cor- 
respoudantes de », déduites de la formule ci-dessus, c’est-à-dire, 
les pertes de chaleur que le contact seul de l'air fait éprouver 
à chacun de ces thermomètres : or, d’après ce qui précède, 
la loi que suivent les pertes de chaleur provenant de cette cause 
est exprimée par l'équation : 


_— 1,233 
CAEN 0 » 


dans laquelle ? doit être déterminé dans chaque cas particulier. 
Pour celui que nous considérons , 2—0,00857. Si l’on substitue 
successivement à la place de £ tous les nombres de 20 en 2o, 
depuis 80 jusqu'à 260, on trouve pour » des valeurs corres- 
pondantes qui différent peu de celles qui ont été déduites de 
lexpérience. C’est ce que l’on peut voir en comparant les 
nomlres correspondans de la deuxième ‘et de la troisième co- 
lonne du tableau suivant : 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 437 


VALEURS DE 


déduites de l'observation. | VALEURS CALCULÉES DE #. 


EXCÈS DE TEMPÉRATURE. 


— a — 


260° 8°10 8°14 
240 7,41 , 38 
220 6,6x 6,63 
300 5,92 5,87 
180 5,19 5,17 
160 4,50 4,47 
140 3,73 3,79 
120 3,14 5,14 
100 | 2,53 2,0 

80 1,93 1,90 


Ainsi, la loi que nous avons annoncée comme représentant 
les pertes de chaleur occasionnées par le contact de l'air, se 
trouve confirmée , en étendant les observations à de plus grands 
excès de température. Les résultats rapportés précédemment peu- 
vent encore nous fournir le moyen de vérifier la loi du refroi- 
dissement dans le vide; il suffit pour cela de retrancher des 
vitesses lotales de refroidissement dans l'air libre celles qui sont 
dues au seul contact de l’air, c’est-à-dire, les valeurs succes= 
sives de ». Les restes seront évidemment les vitesses du refroi- 
dissement produit par le rayonnement, ou, ce qui revient au 
même, celles qui auroient lieu dans le vide. 

Nous rapportons ci-dessous les nombres ainsi déterminés pour 
le thermomètre à boule nue, en y joignant les vitesses calculées 
d'après la loi du refroidissement dans le vide. On sait que 
ces vitesses y sont exprimées par 


m (a'— 1); 


1 représentant l'excès de température du corps, #7 un coefñicient 
constant qu'on doit déterminer dans chaque cas, et qui est ici 
égal à 2,61; et enfin, a désignant l’exposant 1,0077, commun 
à tous les corps. 


438 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


CET PERD CE EEE TETE APTE EEE RE CR CESR TS ANE SRE SET EE NES 


VITESSES 


de refroidissement dans le vide MANENSES 


2XGÈS DE TEMPÉRATURE. déduites de l’observation de refroidissement dans le vide 

dans l’air libre. par le calcul. 

260° 16°52 16°40 
249 13,71 13,71 
220 11,91 11,40 
200 9,38 9,42 
180 7,85 Pi 
160 6,20 6.25 
140 5,02 4,99 
120 3,93 3,92 
100 3,04 2,99 
£o 2,22 2,20 


On voit, par l'exemple que nous venons de donner, qu'on 
peut, par des observations immédiates de refroidissement dans 
l'air, évaluer séparément les pertes de chaleur dues au contact 
du fluide et au rayonnement, et qu’il faut, pour cela, observer 
le refroidissement du même corps pour deux états différens de 
sa surface; mais ce mode de calcul repose, d’une part, sur la 
supposition que la quantité de chaleur enlevée par l'air est in- 
dépendante de la nature de la surface du corps; et, en second 
lieu, sur ce principe, que les corps de nature différente conservent, 
à toutes les températures, le même rapport entre leurs pouvoirs 
rayonnans. Ces deux propositions sont rigoureuses; mais elles 
ne pouvoient être constatées que par des expériences directes, 
comme celles que nous avons rapportées précédemment, et 
quoique M. Leslie les ait adoptées dans l'usage qu'il a fait du 
principe que nous venons d'exposer, ses résultats n’en sont pas 
moins inexacts, parce qu'il a toujours calculé les vitesses de 
refroidissement d’après Ja loi de Newton. 

Les lois relatives à chacun des deux effets qui concourent 
au refroidissement d'un corps plongé dans un fluide, étant sé- 
parément établies , il suflit de les rassembler pour en déduire 
la loi du refroidissement total. 

La vitesse v de ce refroidissement pour un excès 4 de tem- 
pérature, sera done exprimée par la formule 


m (a — 1) + nt. 


Les quantités a et b seront, pour tous les corps et dans 
tous les fluides, égales, la première à 1,0077, et la seconde 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 439 


à 1,233. Le coeflicient » dépendra de la grandeur et de la 
nalure de la surface, ainsi que de la température absolue de 
l'enceinte. Le coeflicient 2, indépendant de cette température 
absolue, ainsi que de la nature de la surface du corps, va- 
riera avec l'élasücité et l'espèce de gaz dans lequel le corps sera 
plongé ; et ces variations suivront les lois que nous ayons pré- 
cédemment établies. 

Cette formule nous montre d’abord, comme nous l'avons an- 
noncé au commencement de ce Mémoire, que la loi du refroi- 
dissement dans les fluides élastiques change avec la nature de 
la surface du corps. En effet, lorsque ce changement a lieu, 
les quantités 4, b et » conservent leurs valeurs; mais le coef- 
ficient »# varie proportionnellement au pouvoir rayonnant de 
la surface. Si l’on représente sa nouvelle valeur par #1, la vi- 
esse du refroidissement deviendra 


mr (a — 1) +; 
quanlité qui ne reste pas proportionnelle à 


m (a — 1) + nt}, 
lorsque # change. 

Examinons maintenant comment varie le rapport de ces deux 
vitesses, et supposons, pour fixer les idées, que m» soit plus 
grand que »', c'est-à-dire qu'il se rapporte au corps dont le 
rayonnement est le plus intense. 

On pourra d’abord s'assurer aisément, à l’aide des règles du 
calcul différentiel, que la fraction 


m (a — 1) + ni 
mi (a'— 1) +nt 
. m “ 
devient égale à 7» Soit qu'on fasse {— 0 où £—. 


Si l’on suppose £ très-petit, la quantité a— 1 se réduit à 
t.log. a, et le rapport précédent devient, en divisant par £ log. a; 


HD OT 0S) EE 


Sous cette forme, il est évident que le rapport doit diminuer 
à mesure que { augmente, © élant plus grand que 1; mais, 
après avoir diminué, ce rapport augmentera, puisqu'il doit re- 
prendre à l'infini la valeur qu'il a lorsque 4 0. De là, il est 


440 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


facile de conclure ce principe , que nous avions établi au com- 
mencement de ce Mémoire, et qui revient à dire que, lorsque 
l'on compare les lois du refroidissement dans deux corps de 
surface différente, la loi est plus rapide dans les basses tem- 
pératures pour le corps qui rayonne le moins, et moius rapide, 
au contraire, dans les températures élevéés. 

C'est ce qu'on peut aisément vérifier sur le tableau suivant, 
dans lequel on a inscrit les vitesses de refroidissement du ther- 
momètre nu et du thermomètre argenté, ainsi que les rapports 
entre ces vitesses. 


CAPES A TETE CS PERTE ALP DIRE RE DE SA LT A EE NES PSE CN CE SRE EME 


VITESSES VITESSES 


EXCÈS de refroidissement | de refroidissement RADORE 
de température du thermomètre du thermomètre ; 
des thermomètres. Mol nes à boule argentée, entre ces vitesses. 
260° 24249 10°96 2,23 
240 21,12 | ,82 | 2,15 
220 17,92 8/59 | 2,09 
200 15,50 7,57 2,02 
180 13,04 6,57 | 18 0 
160 10,70 5,5g 1,91 
140 8,75 | 4,61 | 160 
120 6,82 3,80 1,80 
100 5,56 | 3,06 | 1,81 
80 4,15 2,52 1,78 
6o 2,86 1,60 | 1,79 
4o 1,74 0,96 1,81 
20 0,77 o,42 1,85 
10 0,57 | 0,19 | 1,90 


La seule inspection des nombres inscrits dans la dernière 
colonne coufirme pleinement le fait énoncé plus haut. On 
voit aussi les rapports des vitesses de refroidissement des deux 
thermomètres rester à très-peu près les mêmes pour les excès 
de température compris entre 40° et 120°. Celle circonstance, 
qui résulte évidemment de ce que les rapports dont il s’agit 
augmentent après avoir diminué, a probablement contribué à 
persuader à M. Dalton que la loi du refroidissement dans l'air 
devoit étre la même pour tous les corps. Si l’on poussoit plus 
loin ces séries, on trouveroit que le rapport des vitesses de 
refroidissement, qui est déja égal à 2,25 pour un excès de 
température de 260°, croit rapidement à mesure que cet excès 
augmente ; et qu'il se rapproche de plus en plus du nombre 5,707 


qui 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 44: 
qui en est la limite, puisque telle est la valeur de la fraction 
m 4 , 
= pour le cas du verre comparé à l'argent. Cet examen nous 


offre une nouvelle preuve de la nécessité indispensable d’em- 
brasser, dans l'étude de certains phénomènes de la chaleur, 
un très-grand intervalle de température; et il rend parfaitement 
raison des circonstances qui ont conduit M. Leslie à des ré- 
sultats si différens de ceux que nous venons dénoncer. En effet, 
ce célèbre physicien, partant d'observations faites à de basses 
températures, a pensé que le rapport dont il vient d’être question 
continueroit toujours à diminuer, et qu'il fiuiroit par devenir 
presque égal à l'unité; en sorte que, selon lui, les pertes to- 
tales de chaleur, dans les hautes températures, seroient à peu 
près indépendanles de l’état des surfaces. Au reste, les lois que 
M. Leslie a proposées, celles qui l'ont été, soit par M. Dalton, 
soit, très-antérieurement, par Martine, peuvent toutes être ré- 
futées par un seul argument; car toutes ces lois font unique- 
ment dépendre la vitesse du refroidissement, de l'excès de tem- 
pérature du corps sur celle du milieu environnant, tandis que 
l'expérience prouve que, toutes choses égales d'ailleurs, cette 
vitesse change d’une manière très-notable avec la température 
du fluide qui entoure le corps. 

Il est donc inutile d'entrer dans aucune discussion à ce sujet; 
car, en admettant que les lois imaginées par les physiciens que 
nous venons de citer représentent les résultats de l'expérience 
dans les limites où elles ont été déterminées, il est certain, 
par tout ce qui précède, qu’en les étendant hors de ces li- 
miles, On arriveroit à des résultats fort éloignés de la vérité. 

On peut, par des considérations analogues à celles dont nous 
avons fait précédemment usage, déterminer de quelle manière 
la loi du refroidissement total change, pour un même corps, 
avec la nature et la densité des gaz. 

La vilesse totale du refroidissement est exprimée par 


m (a — 1) +nt. 

Si l'on considère un autre gaz, ou le même gaz sous une 
autre densité , la vitesse de refroidissement sera, pour le même 
corps , 

m (a —13)+ nt; 
car le coeflicient » est le seul qui, dans ce cas, doive changer. 
En comparant ces deux expressions, on trouvera que leur 


Tome LXXXVII. DÉCEMBRE an 1818. Kkk 


442 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


rapport devient égal à l’unité, soit qu’on fasse t—0 ou {= ; 
ainsi les vitesses totales de refroidissement, dans des gaz dif- 
férens , s’approchent de l'égalité pour des températures très- 
élevées , tandis que, dans la partie intermédiaire de l'échelle, 
ces vitesses peuvent être très-différentes. Ce résultat suflit pour 
faire sentir toute l’inexactitude des procédés dont M. Dalton et 
M. Leslie se sont servis pour comparer les perles de chaleur 
produites par le contact de plusieurs fluides élastiques; car ces 
procédés sont fondés sur la supposilion que les vitesses totales 
de refroidissement dans des gaz différens, conservent le même 
rapport à toutes les températures (1); mais, par une circonstance 
tres-singulière et sur laquelle il est inutile d'insister , la tempé- 
rature particulière'à laquelle ils ont opéré rend très-foible l'erreur 
dont il s’agit; aussi leurs déterminations sont-elles, ainsi que 
nous l'avons dit plus haut, assez approchées, en les restrei- 
guant toutefois aux circonstances dans lesquelles elles ont été 
faites. 

La nécessité d'évaluer séparément l'influence de chacune des 
causes qui modifient le progrès du refroidissement d’un corps, 
ne nous ayant pas permis de rapprocher les unes des autres les 
lois diverses auxquelles nous sommes parvenus, nous avons 
pensé qu'une récapitulation sommaire seroit d'autant plus utile, 
qu'on pourroit y rétablir l’ordre naturel que la description des 
expériences et la discussion des résultats ont souvent forcé d'in- 
terrompre. 

En distingant, comme nous l'avons fait, les pertes de chaleur 
dues séparément au contact des fluides et au rayonnement, on 
reconnoit bientôt que chacun de ces deux effets est assujéti à 
des lois particulières. Ces lois doivent exprimer les relations 
qui existent entre la température du corps el la vitesse de son 
refroidissement , pour toutes les circonstances dans lesquelles 
il peut se trouver. Il faut se rappeler que par vitesse de refroi- 
dissement, nous entendons toujours le nombre de degrés dont 
la température du corps s’abaisseroit pendant un intervalle de 
temps infiniment petit et constant. 


(1) Dans ses ingénieuses recherches sur la flamme (Transactions Philoso- 
phiques, 1817; Annales de Physique et de Chimie, tome III), M. Davy exa- 
mine aussi le pouvoir refroidissant d'un certain nombre de gaz; mais la 
méthode expérimentale dont ce célèbre chimiste a fait usage n'est propre qu'à 
faire distinguer les divers degrés de développement de cette propriété; ce qui 
suflisoit , au reste, pour le but qu'il se proposoit; mais elle ne sauroit conduire 
à la connoissance du rapport de ces pouvoirs. 


ET D'HISTOIRE NATUKELLE: 443 

Première Loi. Si l'on pouvoit observer le refroidissement d’un 
corps placé dans un espace vide terminé par une enceinte absolu- 
ment dépourvue de chaleur ou privée de la faculté de rayonuer, 
les vitesses de refroidissement décroitroient en progression géo 
métrique , lorsque les températures diminueroient en progression 
arithmétique. 

Deuxième Loi. Pour une même température de l'enceinte 
vide dans laquelle un corps est placé, ses vitesses de refroi- 
dissement , pour des excès de température en progression arith- 
métique, décroissent comme les termes d'une progression géo- 
métrique diminués d'un nombre constant. Le rapport de cette 
progression géométrique est le même pour tous les corps, et 
égal à 1,0077. 

Troisième Loi. La vitesse de refroidissement dans le vide, 
pour un même excès de température, croit en progression géo- 
métrique, la température de l'enceinte croissant en progression 
arithmétique. Le rapport de la progression est encore 1,0077 
pour tous les corps. 

Quatrième Loi. La vitesse du refroidissement , due au seul 
contact d'un gaz , est entièrement indépendante de la nature de 
la surface des corps. 

Cinquième Loi. La vitesse de refroidissement due au seul con- 
tact d'un fluide varie en progression géométrique, l'excès de 
température variant lui-même en progression géométrique. Si 
le rapport de celte seconde progression est 2, celui de la pre- 
mière est 2,55, quelle que soit la nature du gaz et sa force 
élastique. 

Cette loi peut encore s'énoncer en disant que la quantité de 
chaleur enlevée par un gaz est, dans tous les cas, proportion- 
nelle à l'excès dela température du corpsélevé à la puissance 1,233. 

Sixième Loi. Le pouvoir refroidissant d'un fluide élastique 
diminue en progression géométrique, lorsque sa tension diminue 
elle-même en progression géométrique. Si le rapport de cette 
seconde progression est 2 , le rapport de la première est 1,366 pour 
l'air, 1,501 pour l'hydrogène, 1,431 pour l'acide carbonique, 1,415 
pour le gaz oléfiant. 

On peut encore présenter cette loi de la manière suivante : 

Le pouvoir refroidissant d'un gaz est, toutes choses égales 
d’ailleurs, proportionnel à une certaine puissance de la pression. 
L’exposant de celte puissance qui dépend de la nature du gaz 
est 0,45 pour l'air, 0,315 pour l'hydrogène, 0,517 pour l'acide 
carbonique, 0,501 pour le gaz oléfiant. 


Kkk 2 


444 JOURNALDE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


Septième Loi. Le pouvoir refroidissant d’un gaz varie avec sa 
température de telle manière que, si ce gaz peut se dilater et 
qu'il conserve toujours la même force élastique, le pouvoir re- 
froidissant se trouvera autant diminué par la raréfaction du gaz 
qu'il est augmenté par son échauffement ; en sorte qu'il ne dépend 
en définitif que de sa tension. 

On voit, par l'énoncé de chacune de ces propositions, que 
la loi totale du refroidissement, qui se composeroit de toutes 
les lois précedentes, doit être très-compliquée; aussi n’essayons- 
nous pas de la traduire en langage ordinaire. Nous l'avons donnée 
dans le courant du Mémoire, sous une forme mathématique 
qui permet d'en discuter toutes les conséquences. Nous nous 
contenterons de remarquer que c’est sans doute à l'extrême 
complication de cette loi, considérée dans son ensemble, qu'il 
faut attribuer le peu de succès des tentatives faites jusqu’à ce 
jour pour la découvrir. On ne pouvoit évidemment y parvenir 
qu'en étudiant à part chacune des causes qui contribuent à 
l'effet total. 


RÉVISION 
DE LA FAMILLE DES BIGNONIACÉES; 
Par Cuarces KUNTH, 
Lue à la Societé Plilomathique, le 22 août 1816. 


IL existe parmi les plantes un certain nombre de genres sur 
la vraie classification desquels les botanistes ont encore des 
doutes, quoiqu’ils connoissent depuis long-temps l'organisation 
de leurs fleurs et de leurs fruits. Cette imperfection apparente 
de la méthode naturelle a souvent donne lieu aux reproches 
que Jui adressent si injustement ses antagonistes, tandis que 
nous devons l’attribuer à l’état actuel de nos connoissances. 
Nous sommes encore loin d’avoir découvert toutes les plantes 
qui peuvent ou lier les genres dont je parle, avec ceux qui 
sont bien classés, ou former peut-être avec les premiers des 
familles particulières. Cette imperfection doit aussi devenir plus 
apparente encore, parce qu'on circonscrit souvent avec trop de 
rigueur , les familles naturelles, en donnant plus de valeur qu'il 


ÊT D'HISTOIRE NATURELLE. 445 


ne faut à certains caractères secondaires. Mais quand on aura ap- 
précié la valeur de tous les caractères, qu’on aura abandonné cet 
esprit de système si nuisible aux progres de la Botanique, et qu'on 
aura exploré toute la végétation du globe, on ne trouvera plus 
de lacunes, plus de genres isolés , et on reconnoitra tout entier 
cet admirable enchainement, dont la contemplation fait un des 
principaux charmes de la science. 

Les familles des plantes à corolle monopétale irrégulière, of- 
frent, outre la difliculté de l'étude de leurs genres nombreux 
et souvent mal caractérisés, plusieurs exemples de genres en 
apparence isolés. Ayant étudié ces familles d’une manière parti- 
culière, je comptois d'abord réunir mes observations dans un 
seul travail, mais des occupations plus urgentes m'ont forcé à 
me restreindre, pour le moment, à la seule famille des Bi- 
gnoniacées. 

M. de Jussieu a tracé le premier avec cette sagacité et ce 
jugement profond qui caractérise tous ses travaux, les limites 
de cette belle famille. Il n’auroit peut-être rien laissé à desirer, 
s’il n’avoit pas lui-même élevé des doutes sur la véritable affi- 
nité de quelques-uns de leurs genres. Aussi le caractère qu'il 
a donné et la manière dont il a décrit les fruits du Sesamum, 
du Tourretia et du Martynia, me font croire qu’alors il n’ad- 
meltoit pas encore, dans cette famille, un fruit à plus de deuxloges. 

Un célèbre botaniste, M. Robert Brown, regardant également 
ce caractère comme essentiel, et ne le trouvant pas dans la 
troisième section de M. de Jussieu, l’a exciu de la famille des 
Bignones. Sans parler de la classification des autres genres de 
cette section, il en éloigne seulement le Pedalium pour en former 
conjointement avec le Josephinia, une famille particulière sous 
le nom des Pédalinées. Un fruit à plusieurs loges qui ne s'ouvre 
point, et dont les loges renferment une ou deux graines, la 
forme et la direction de ces graines distinguent, selon lui, les 
Pédalinées des Bignoniacées ; il les croit mème plus rapprochées 
des Verbenacées et des Myoporinées. Je doute que cette Sépa- 
ration soit admissible sans rompre des rapports naturels, je crois 
platôt que les genres Sesamum, Martynia et Craniolaria doivent 
former, conjointement avec les Pédalinées de M. Brown, une 
section de la famille de Bignoniacées. 

Examinons d’abord séparément chacun des caractères que 
M. Brown attribue à sa nouvelle famille. Sans m'arréêter à l’or- 
ganisation du calice, de la corolle et des étamines, qui ne pré= 
sentent aucune différence remarquable , je passe à l'examen du 


446 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMire 


fruit. Le nombre des loges est dans le genre Josephinia de 
quatre à huit, dans le genre Pedalium, seulement de deux. 
Le fruit du premier de ces genres renferme une graine dans 
cheque loge, celui du second en renferme deux. Dans l'un 
et l’autre, le fruit est une drupe sèche qui ne s'ouvre point. 
Le Martynia et le Craniolarta offrent la même structure dans 
leur fruit, à l'exception du nombre double des graines. Mais 
comme on admet dejà une et deux graines dans le même groupe, 
je ne crois pas qu'il y ait une raison d’en éloigner des plantes 
qui n'offrent d’autres différences essentielles qu’un plus grand 
nombre de graines. Quant au genre Sesamum, il présente au 
premier aspect plusieurs caractères qui paroissent s’opposer à 
sa réunion avec les quatre genres dont je viens de faire mention. 
Le fruit n’est plus ici une drupe, mais une capsule à quatre 
loges qui s'ouvre par deux valves. Il y a ensuite dans chaque 
loge un grand nombre de graines, dont la structure est la 
même que dans les autres genres. La même raison qui nous 
a fait rejeter le caractère tiré du nombre de graines dans le 
Martynia et le Craniolaria, nous engage également à ne lui 
donner aucune importance dans le cas présent. La nature du 
péricarpe ne nous paroît pas plus importante. Nous avons déjà trop 
d'exemples de plantes à capsule, à drupe et à baie dans la même 
famille peur hésiter un moment à donner sa véritable place 
à une plante qui offre ce caractère pour seule différence. 

Après avoir prouvé que les genres Sesamum , Martynia, Cra- 
niolaria, Pedalium et Josephinia appartiennent à un seul etmème 
groupe, que je désigne sous le nom des Sésamées, il me reste 
encore à démontrer que ces plantes doivent être rendues aux 
Bignoniacées el en former une section particulière. La seule 
différence consiste dans Ja structure du fruit, et particulièrement 
dans celle des graines. Elles sont entourées d’une membrane 
mince en forme d’aile dans les vraies Bignoniacées, et elles 
en sont dépourvues dans les Sésamées. Dans l'un et l’autre de 
ces groupes nous rencontrons un fruit à deux et quatre loges, 
mais le Cobæa offre dans le premier le seul exemple connu 
d'un fruit triloculaire, raison de plus pour attacher moins de 
prix au nombre des loges. Ici, comme dans plusieurs autres fa- 
milles, la direction des graines varie à l'infini, et elle ne peut 
pas même servir pour caractériser les deux sections naturelles. 

La famille des Bignoniacées, telle que nous lavons circon- 
scrite, a de nombreux rapports avec plusieurs autres familles, 
et surtout avec les Scrophularinées et les Pédiculaires réunies 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 447 


inconvenablement dans une seule famille. Elle offre aussi beaucoup 
d'affinités avec les Polémoniacées , les Gentianées,les Acanthacées, 
les Apocynées et les Verbenacées. Cette dernière ressemblance 
se rapportant principalement au port, est souvent si grande, 
qu'on seroit tenté de prendre certaines espèces de Bignones, 
quand elles n’ont point de fruit, pour des espèces de Vitex. 

Je termine ici mes observations préliminaires, et je vais es- 
sayer de tracer les caractères distinctifs de cette famille et des 
genres qui la composent. 


BIGNONIACEÆ. 


CALYX monophyllus , subcampanulatus aut spathaceus (77 
Spathodia et Craniolaria), corolla multo brevior, persistens aut 
deciduus. Limbus rarius integerrimus (in Bignontüs nonnullis ), 
sæpissime magis minusve profunde quinquedivisus ( guinque- 
dentatus in T'ecoma , Bignonia, Oroxylo et Jacaranda; quinque- 
Jidus in Incarvillea, Eccremocarpo et Martynia; quinquepartitus 
in Platycarpo , Cobæa, Sesamo, Josephinia et Pedalio), irregu- 
laris, interdum bipartitus (47 Catalpa) aut bilabiatus (12 T'our- 
relia), rarissime duplex (ir7 Amphilophio). 

COROLLA monopetala, hypogyna, campanulata, infundibu- 
liformis aut tubulosa, decidua. Tubus brevis, calycem vix su- 
perans , rarissime elongatus (ir Craniolaria). Faux magna, ven- 
tricosa. Palatum interdum maculatum. Limbus in plurimis 
quinque- aut interdum quadridivisus, lobis aut laciniis duobus, 
rarius unico (ir Catalpa), superioribus , tribus inferioribus, sub- 
æqualibus aut inferiorum medio majore (in Sesamo , Cranio- 
laria ; Josephinia et Pedalio); in nonnullis (in Amphilophio et 
T'ourretia) bifido-bilabiatus , labio superiore bidentato, subga- 
leato , inferiore tridentalo, superiorem subæquente (ir Amphi- 

.lophio) aut minima et dentiformi (4n T'ourretia). PRÆFLORATIO im- 
bricativa. 

STAMINA aut quatuor, didynama, absque vel sæpissime ad- 
jecto rudimento quinti, rarius quintum perfectum (17 Oroxylo); 
aut duo fertilia et duo (i7 Martyniæ specte ) vel tria (1n Catalpa) 
sterilia ; aut quinque, æqualia (in Platycarpo et Cobæa), (tubo) 
corollæ inserla, cum ejus lobis alternantia, inclusa. FILAMENTA 
filiformia, basi magis minusve dilatata. Anrurrx biloculares ; lo- 
culis medio longitudinaliter dehiscentibus; sæpissime bilobe ; 
lobis apice tantum cohærentibus ibique summo filamento in- 
serüs, insertione æqualibus; rarius basi duntaxat bilobæ (ir Co- 
bœa et Josephinia) aut indivisæ et dorso aflixæ (in Sesamo, Ec- 


448 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


cremocarpo et Platycarpo). Porren forma varia; granulis lenti- 
cularibus aut sæpissime globosis vel oblongis et sulcato-trigonis. 

PISTILLUM. Ovarium disco hypogyuo impositum, liberum , 
lineare, oblongum aut ovatum, sæpe biloculare, rarius uni- (?) 
(ir Eccremocarpo), wi- (in Cobæa), quadri- (in Spathodia , Tour- 
retia, Sesamo, Martynia et Craniolarta), sex- aut octoloculare (1) 
(in Josephinia); ovula sæpissime complura in quolibet loculo, 
rarius pauca (&2 Martynia et Craniolaria), duo (in Pedalio) aut 
unicum (in Josephinia). SryLus terminalis, simplex, stamina 
longitudine subæquans. Sricma sæpissime bilamellatum, raris- 
sime trifidum (ir Cobæa), quadrifidum (in Josephinia) autsimplex 
et uncinatum (22 T'ourretia). 

FRUCTUS.Pericarerumin plerisque capsulare, valvulis duabus 
aut rarius tribus (2 Cobæa) dehiscens; in nonnullis (ir Mar- 
tynia, Craniolaria , Joseplunia et Pedalio) drupaceum ; sæpis- 
sime bi-, interdum uni- (?) (ër Eccremocarpo), li (in Cobæa), 
quadri- (ir Spathodia, Tourretia, Sesamo, Martynia et Cranio- 
laria), sex- aut octoloculare (in Josephinia); inerme vel spinis 
(in Pedulio) aut echinis (ir Josephinta et Tourretia) armalum , 
interdum in rostrum desinens (22 Martynia et Crantolaria). Dis- 
sepimentum valvulis contrarium aut is parallelum, sæpe demum 
liberum. Loculi in plerisque (17 Bignomaceis veris, excepto Pla- 
ty carpo eLin Sesamo) poly-,in nonnuilisoligo- (ir Martynia et Cra- 

._niolaria), di- (in Pedalio et Platycarpo) aut monospermi (ir Jo- 
sephinia). SEMINA seriata aul superposila, circumdala membrana 
ad Jatera in alas excurrente (ix Bignoniaceis veris) aut aptera (22 
Sesameis), sæpissime transversa, interdum obliqua (in Cobæa), 
erecta (ix Sesamo et Josephinia) aut pendula [i2 Pedalio, Tour- 
retia (?), Martynia (?) et Craniolaria (?)]. Epispermium (membrana 
propria seminis) duplex, ulrumque tenue ; exterius sæpissime 
(in Bignontaceis veris) margine membranaceo-alatum;interius (Æn- 
dospermium?) exteriori plerumque arcte adhærens. Emsryo rectus, 
semini conformis , magis minusve compressus. COTYLEDONES 
foliaceæ , carnosæ. Rapicura ad hilum spectans. PLumura in- 
conspicua. 

HABITUS. Arbores aut frutices plerique scandentes et cirrosi, 


QG) Dans les ovaires à 4, 6 ou 8 loges, les cloisons qui se trouvent entre les 
deux loges principales, quoïqu’elles atteignent la cloison transversale, n’y sont pas 
fixées d'une manière intime; on doit plutôt les considérer comme de fausses 
cloisons. On découvre dans les ovaires biloculaires (comme dans le genre Bi- 
guonia) à la place de ces cloisons un sillon saillant. 


rarius 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 449 


rarius herbæ. Folia opposita, interdum terna aut alterna , sim- 
plicia, conjugata, ternata, digilata, simpliciter aut composite 
imparipinuala , rarissime pinnalifida, paucis exceptis integerrima. 
Stipulæ sæpissime nullæ, duæ petiolares in Spathodiis nonnullis. 
Inflorescentia sæpius terminalis, interdum axillaris aut alaris, 
rarius oppositifolia, paniculata aut spicata, bracteata, nonnun- 
quam flores solitarn. 

PATRIA et DISTRIBUTIO GEOGRAPHICA. Species omnes 
hucusque notæ crescunt inter tropicos utriusque hemisphærit 
aut in régione limilropha. Ex 117 speciebus (adjectis nostris) 
proveniunt in hemisphærio occidentali. . . 93 (=) 


in America meridionali inque insulis Antillarum. . . 88 
in Virginia, Carolina et Florida. . . . . . . . « 5 


in hemisphærio orientali.. . . 24(—=;) 


inbindia onentalite dec de eo da EE te E1O 
NN DINAN EMIAPONIA- = NN ND e 4 
ina Vadacascatia qe Lie AE. 2e UE D 0 ie (NO 
MSeneRanDie ere Pete ee EEE 1e 
ad promontorium Bonæ-Spei. . . . . . « + . + 7 
ineNoya- Hollandais Leur nel penis AUS 


Inter genera hujus familiæ sunt peculiaria Incarvillea Chinæ, 
Pedalium et Sesamum Indiæ orientali, Amphilophium, ‘Four- 
retia, Jacaranda , Eccremocarpus, Cobæa, Platycarpum et Cra- 
niolaria Americæ, Josephinia Novæ-Hollandicæ. 


CONSPECTUS GENERUM. 
Secrio L. PBicnonwr1cex rErx. Semina membranaceo-alala. 


1. Ivcarvirtea, Juss. Calyx quinquefidus. Corolla tubo brevi; 
fauce infundibuliformi-campanulata ; limbo quinquelobo, bila- 
biato. Stamina quatuor, didynama (absque rudimeuto quinti ?). 
Stigma bilamellatam. Capsule siliquæformis , bilocularis, bivalvis; 
dissepimentum valvis contrarium (?). Semnina biseriata (?), im- 
bricata, alata, pendula (ex Browu). 

Herba (Chinensis). Folia alterna, bipinnatifida. Flores termi- 
nales, laxe spicati, purpurei. 

2. CaTarpra, Juss. Calyx bipartitus. Corolla tubo brevi; fauce 
ventricoso-campanulata ; limbo quadrilobo, bilabiato, Stamina 
quinque ; duo fertilia, tria castrata. Sigma bilamellatum. Capsula 
siliquæformis, bilocularis, bivalvis; dissepimentum valvis con- 


Tome LXXXV1I1. DÉCEMBRE an 1818. Lil 


450 JOURNAL DE PUYSIQUE, DE CHIMIE 


trarium. Semina biseriata, imbricata, alata, transversa, utraque 
extremitate pilosa. 

Arbores foliis simplicibus, ternis ; floribus paniculatis, albis; 
fauce punctata. 

5. Trcoma, Juss. Calyx campanulatus, quinquedentatus. Co- 
rolla tubo brevi; fauce campanulata ; limbo quinquelobo, bila- 
biato. Stamina quatuor, didynama, cum rudimento quinti. Stigma 
bilamellatum. Capsula siliquæformis , bilocularis; dissepimentum 
valvis contrarium. Sernina biseriata, imbricata , alata , transversa. 

Arbores aut rarius frutices. Folia opposita , digitata aut sæpius 
imparipinnata, Flores terminales , panieulati, flavi aut incarnali. 

4. Bicnonra, Juss. [Bignoniæ species, Linn. (1)]. Calyx 
campanulatus, quinquedentatus aut interdum integerrimus. Co- 
rollz tubo brevi; fauce campanulata ; limbo quinquelobo, bila- 
biato. Stamina quatuor , didynama, cum rudimento quinti. Sigma 
bilamellatum. Capsula siliquæformis , bilocularis ; dissepimentum 
valvis parallelum. Serina biseriata , imbricata, membranaceo- 
alata , transversa. 

Arbores aut frutices sæpissime scandentes et cirrosi. Folia 
Opposila, simplicia, Conjugala, ternala, digitata autpinnata. 
Flores axillares et terminales, sæpius paniculati. Corollæ albæ, 
flavæ , aurautiacæ , purpureæ, violaceæ aut roses. 

5. OroxyLum, Ventenat (2). Calyx campanulatus, subdentatus. 
Corolla ivregularis; fauce ventricosa; limbo quinquelobo. Sta- 
mina quinque, fertilia, intermedium brevius, Sigma bilamel- 
latum. Capsula sitiquæformis, bilocularis; dissepimentum valvis 
parallelum. Semina membranaceo-alata. 

Arbor monticola. Folia opposita , impari- bi- ant tripinnata. 
Racemi terminales, elongati, bracteati. Flores secundi. (Cha- 
ract. gen. ex Ventenat.) 

6. SparmonrA, Beauv. R. Brown. Ca/yx spathaceus, hinc 
fissus , inde dentalus aut integerrimus. Corolla subinfundibuli- 
formis; limbo quinquefido, inæquali. Stamina quatuor, didy- 
nama, cum quinto slerili. Sigma bilamellatum. Capsula sili- 
quæformis , falcata | pseudoquadrilocularis ; dissepimentum 
contrarium ,suberosum (ex Brown). Serina membranaceo-alata(?), 
transversa (?). 


Frutices aut arbores, Folia opposita, rarius alterna, conju- 


(1) Bignonia echinata Jacq. est probabiliter generis distincti. 
(2) Decas gen. noy. 


ET D'MISTOIRE NATURELTE. 451 


gata, imparipinnata aut interdum simplicia. Flores subpaniculati, 
aurantiaci, flavi aut violacei. ts 

7. AmpniLormium, nobis. Calyx campanulatus ; limbo duplici; 
exteriore laxo, undalato-crispo ; interiore bilabiato ; labiis sub- 
integris. Corolla subcoriacea; tubo brevi; fauce magna, ven- 
tricosa, antice sulcato-compressa; limbo bilabiato; labio superiore 
majore, galeato, bidentato ; inferiore recto , tridentato, supe- 
riorem subæquante. Stamina quatuor , didynama, cum rudimento 
quinti. Sigma bilamellatum. Capsula ovata, sublignea, bilo- 
cularis, bivalvis. Semina imbricata, membranaceo-alata, trans- 
versa (?). 

Frutices (Americani) scandentes, cirrosi. Folia opposita, con- 
jugata. Flores paniculati, rosei aut rubri. 

8. Jacaranna, Juss. Calyx campanulalus, quinquedentalus. 
Corolla tubo brevi; fauce infundibuliformi-campanulata ; limbo 
quinquefido, bilabiato. Stamina quatuor, didyuama , cum ru- 
dimento quinti. Sigma bilamellatum. Capsula suborbicularis , 
lignea, compressa, bilocularis, bivalvis; dissepimentum valvis 
contrariis adnatum. Semina seriata , imbricata, membranaceo- 
alata, transversa. 

Arbores (Americanæ) excelsæ, facie mimosæ. Folia opposita, 
paripinuata, pinnis imparipinnalis. Flores axillares et terminales, 
paniculau, violacei. 

9. Prarycarrum, Bonpl. Calyx quinquepartitus, æqualis. Co- 
rolla tubo brevi; fauce infundibuliformi; limbo quinquefdo, 
subæquali. Stamina quinque, æqualia. Stigma bilamellatum. Cap- 
sula didyma, lignea (?), compressa, bilocularis, bivalvis; dis- 
sepimentum valyis contrarium iisque adnatum; loculi dispermi. 
Semina membranaceo-alata. 

Arbor (Americæ meridionalis). Folia opposita, simplicia, in- 
tegra. Paniculæ terminales. 

10. Eccremocarpus, Ruiz. et Pav. Calyx magnus, laxus, 
quinque-, iuterdum quadrifidus. Corolla tubulosa; limbo quinque- 
fido , reflexo, inæquali. Stamina quatuor, didynama, cum ru- 
dimento quinti. Ségma bilobum. Capsula ovata, subletragona, 
unilocularis (?), bivalvis ; receptacula duo, medio valvis adnata(1). 
Semina imbricata, membranaceo-alata. 


Suffrutices ( Americæ meridionalis ) scandentes. Folia oppo- 


(1) Ex Ruiz et Payon. An capsula rectius bilocularis; dissepimento valvis 
contrario, adnato ? 


LI] 2 


452 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHEMIF 
sila, composile pinnala, apice cirrosa. Pedunculi oppositifohi, 
multiflori. Corollæ flavidæ (semper ?). 

11. ConÆa, Cavan. Calyxæ magnus, quinquepartitus; laciniis 
orbiculatis, Corolla campanulata ; tubo brevi; limbo quinquelobo, 
subæquali. Stamina quinque, æqualia. Sigma trifidum. Capsula 
oblonga , trigona, calyce persistente tecta, trilocularis, trivalvis ; 
dissepimentum triquetrum , angulis valvis oppositis. Semina bi- 
seriala, imbricata, membranaceo-alata, obliqua. Radicula in- 
ferne spectans. 

Frutex (Americanus)scandens. Folia opposila, paripinnata, cir- 
rosa. Pedunculi axillares, solitarti, umiflori. 

12. T'ourrerra, Domb., Juss. (Dombeya, L'Herit.). Calyx bi- 
labiatus; labio superiore integro, inferiore apice dilatato, cre- 
pato, interne dente instructo. Corolla tubulosa; limbo bilabiato ; 
labio superiore maximo , galeato ; inferiore minimo, dentiformi, 
truncato. Stamnina quatuor , didynama. Sigma acutum, subunci- 
natum. Capsula oblonga, compressa , uncinalo-spinosa, Coriaceo- 
lignea, quadrilocularis, bivalvis; dissepimentum valvis paral- 
lelum, per dissepimentum transversum valvis medio adnatum. 
Semina uniseriata, membranaceo - alata, pendula (?). Radicula 
supera. 

Herba (Americana) repens et scandens , dichotoma. Folia op- 
posita, geminalo-lernata, cirrosa. Flores spicati, alares, bracteali. 


Secrio IL Srsamezx. Semina aptera. Folia simplicia. 


15. Sesamum, Linn. Calyx quinquepartitus; lacinia superiore 
minore. Corolla tubo brevi; fauce campanulata ; limbo quinque- 
fido, bilabiato ; lacinia inferiore longiore. Stamina quatuor, di- 
dynama, cum rudimento quinti. Sugma bilamellatum, Capsula 
lineari-oblonga, compresso-tetragona, quadrilocularis, septicido- 
bivalvis; dissepimentum valvis contrarium, bipartibile. Serina 
complura, uuiseriata, subimbricata, obovata, compressiuscula, 
dptera, erecla. 

Herbæ. Folia opposita aut alterna. Flores axillares , solitark. 
Pedunculi biglandulosi, bibracteati. Corollæ albæ, pallide roseæ 
aut lutecæ. 

14. MarrynrA, Linn. Calyx quinquefidus, subæqualis. Co- 
rolla subcampanulata ; limbo quinquelobo, inæquali. Stamina 
quatuor, didynama, sæpius omnia fertilia, rarius duo castrala ; 
rudimentum quinti. Stgma bilamellatum. Drupa oblonga, bi- 
cornis; nuce lignosa, quadriloculari ; loculis oligospermis. Semns 
evala, compressiuscula , pendula? Radicula supera. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 453 

Herbæ. Folia opposita aut alterna. Flores spicati, axillares 
aut terminales. 

15. CranrozarrA, Linn. Calyx campanulatus, spathæfor- 
mis, hinc fissus. Corolla tubo longissimo ; fauce campanulata ; 
limbo bilabiato ; labio superiore bi-, inferiore trifido ; lobo medio 
latiore. Stamina quatuor, didynama, cum rudimento quinli. 
Stigma bilamellatum. Drupa ovata, acuta; nuce lignosa, apice 
breviter bicorni, quadriloculari. Semina in quolibet loculo 
quatuor aut sæpe solitaria, ovala, compressiuscula, aptera. 

Herba (Americana) villoso-viscosissima , dichotoma. Folia op- 
posila, quinquelobata. Flores alares , racemosi. Corolla candida, 
fauce picta. 

16. Josepmnia, Ventenat, R.Brown. Calyx quinquepartitus, 
subæqualis. Corolla tubo brevi; limbo campanulato, quinquelobo, 
patente ; lacinia inferiore longiore. Stamina quatuor, didynama , 
cum rudimento quinti. Stigma quadrifidum. Drupa exsucca , 
subglobosa, echinata , 6-8-locularis ; loculis geminatim approxi- 
malis, monospermis. Semina erecta. Radicula infera. : 

Herbæ (Novæ-Hollandiæ) diffuse. Folia opposita, integra. 
Flores axillares, bibracteati, purpurascentes. (Character gene- 
ricus ex R. Brown, Prodr. pag. 519.) 

317. Pepauum, Linn. Calyx quinquepartitus, subæqualis. Co- 
rolla tubo brevi; fauce campanulata ; limbo quinquelobo , inæ- 
quali. Starnina quatuor, subdidynama , cum rudimento quinli. 
Sugma bilidum. Drupa exsucca , lignea , ovala , telragona, qua 
drispinosa, bilocularis; loculis dispermis. Serrina superposila, 
pendula, oblonga, compressiuscula , aptera. Radicula supera. 
. Herbæ trichotomæ. Folia opposita. Flores axillares , subso- 
litarii, bibracteati. 
. Ce sont les 17 genres connus, que je crois appartenir à la 
famille des Bignoniacées. Je ne connois le Tripinnaria de Lou- 
reiro et le Millingtonia de Linné, que par la courte description 
de ces auteurs; c’est pourquoi je n'ose pas encore prononcer 
sur leur véritable affinité. Mais d’après une note de M. Brown, 
le second de ces genres paroïit très-voisin du Bignonia. Le 
Sessea de MM. Ruiz et Pavon, et le Gelsemium de M. de Jussieu, 
que quelques botanistes ont rangés parmi les Bignoniacées, en 
Gifiérent essentiellement , surtout par l’organisation de leurs 
graines, Nous croyons que le premier tient le milieu entre les 
Solanées et les Polémoniacées, et qu'on doit, à l'exemple de 
M. de Jussieu, placer le second à la fin des Apocynées. 

Il me reste encore à parler du genre Crescentia, mis par M. de 


454 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

Jussieu, avec doute, à la fin des Solanées. La grande ressem- 
blance des fleurs du Calebassier avec celles des Bignonia, et la 
circonstance qu'on trouve dans trois espèces (Crescentia pinnata, 
Jacq., Crescentia aculeata et alata, nobis) des feuilles composées, 
me font croire que ce genre doit être classé près des Bigno- 
niacées. Mais comme je n’ai pas pu me procurer des ovaires 
ou des fruits de ces plantes, il reste encore à vérifier si leur 
structure répond à ce rapprochement. M. Richard, qui a exa- 
miné le fruit de cette plante, lui trouve plutôt des aflinités avec 
les Beslerées (1). Mais je suis persuadé toutefois qu'en se dé- 
cidant pour cette dernière opinion, on doit placer le Crescentia 
entre les Beslerées et les Bignoniacées. 11 est probable que le 
T'anæcium de M. Sywartz fait également partie de la famille des 
Bignoniacées. Mais quoique je lui trouve une grande ressem- 
blance avéc le Crescentia et surtout avec le Craniolaria, je n’ose 
rien décider jusqu'a ce que j'aie eu occasion d'examiner en 
nalure les deux espèces de ce geure. 

Observation. Depuis la publication de ce Mémoire, nous avons 
trouvé quele genre Aragoa, qui paroîtra dans le troisième volume 
des Vova genera et species plantarum æquinoctialium*), et que nous 
croyions d’abord appartenir à une autre famille , doit ètre rap- 
proché des Bignoniacées, quoique plusieurs caractères paroissent 
s'opposer à ce qu'il soit définitivement réuni à cette dernière 
famille. 

*) Ar4coa. Calyx tetra- aut pentaphyllus. Corolla hypocra- 
teriformis ; limbo quadripartito, patente, regulari. Stamina qua- 
tuor, summo tubo inserta, æqualia, exserta. Ovarium ovatum, disco 
bypogyno impositum. Stylus unicus. Sigma subgloboso-obtusum. 
ce calyce persistente cincia, bilocularis, quadrivalvis; lo- 
cuhs telraspermis. Serina bina superposita, peltata, membraua 
reticulata involuta et alata. Û 

Frutices ramosissimi. Folia octofariam imbricata, carnosa, in- 
tegerrima. Flores axillares , solitarii, subsessiles, albi. 


© —————_—_——_]_——_—_—_—_——_———— re 


(1) Il met dans cette famille les Orobanches. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 455 


SE 


NOTICE 


Sur le parti utile que l’on pourroit tirer de divers Oxides 
ferrugineux ; 


Par M. C. PAJOT DESCHARMES. 


Les savans chimistes qui se sont occupés de l'analyse des 
substances salines, nous ont appris que le sulfate de fer con- 
tenoit environ 23 pour cent d'oxide; les entrepreneurs qui 
décomposent le muriate de soude à l'aide de ce sulfate , re- 
tirent dès-lors , par suite de leurs opérations, cette quantité de 
métal, à la vérité, sous une forme pulvérulente. Ce résidu, 
qui ne tarde pas à embarrasser par -sa surabondance, n’a point, 
que je sache, trouvé jusqu'ici d'emploi dans les arls. Ayant eu 
occasion d’en avoir sous ma main une parlie considérable, j'ai 
cherché à l'utiliser. Les travaux auxquels je me suis livré dans 
ce but, en 1810, n’ont pas été infruclueux ; on va tout à l'heure 
être en état d’en juger. Toutefois, avant de donner connoissance 
du résultat de mes essais, je crois qu'il convient d'indiquer les 
qualités de cette substance dans son élat naturel, afin qu'on 
puisse les comparer avec celles que lui procure le traitement 
que je lui fais subir. 

Quel que soit letemps que dans son état d'oxide, celte matière 
reste exposée soit à l'air sec ou humide, soit à l’action d’une chaleur 
rouge cerise, elle conserve son brillant métallique, ainsi que 
la couleur brune ou violacée qui lui est propre; elle n’est point 
altirable à l’aimant, ni dissoluble par l'acide sulfurique; elle 
ne convient point en outre aux feux pyrotechniques ni aux 
arüficiers. 

Les divers Traités de Chimie annoncent bien la possibilité 
de réduire les oxides métalliques par les corps gras, résineux 
et aussi par le charbon, mais ils ne donnent pas la méthode à 
suivre; et si des expériences directes en grand ont été faites 
à ce sujet, les résultats en sont restés inconnus, ou point suf- 
fisamment expliqués et détaillés; c’est peut-être à ce défaut 
que l’on doit attribuer l'inapplication, en fabrique, de l’un ou 
de l’autre mode de réduction. Quoi qu'il en soit, voici celui 
dont j'ai fait usage. 


ds \ 
456 JOURNAL DE PINYSIQUE, DE CHIMIE 


Dans des pots ou creuses d'argile grise, et tournés en facon 
de cylindres hauts de 10 pouces sur 6 pouces dans œuvre, je 
disposois sur environ 8 à o lignes d'épaisseur , un lit de poudre 
de charbon de chêne, passé préalablement au tamis de crin, et 
légèrement humecté. Je posois sur ce lit, un plateau en bois 
d'un pouce d'épaisseur sur 4 pouces + de diamètre, et je pla- 
COIS avec pression sur son pourtour une semblable poudre de 
charbon, Avant d'enlever ce plateau, je l’appuyois foiblément 
sur cette poudre, afin que, comprimée, elle pût se soutenir 
d'elle-même, lorsque le plateau éloit Ôté ; je remplissoit alors 
le vide qu'il laissoit , par notre oxide ferragineux un peu humecté 
à l'avance, et provenant de la décomposition du muriate de 
soude par le sulfate de fer; Je meltois dessus un nouveau lit 
de charbon, qui lui-même étoit surmonté d'une nouvelle couche 
d'oxide, et ainsi de suite, je stratifiois jusqu'a ce que le pot 
füt plein, en ayant l'attention de finir par un lit de charbon 
qui éloit recouvert par un plateau en terre cuite, à rebord en- 
trant dans le creuset, et dont la jointure avec le dernier étoit 
soigneusement lutée avec de la terre à four mélée de fiente de 
cheval. 

Comme il importoit d'obtenir la conversion que j'avois en 
vue, avec Îe moins de frais possible, le fourneau dont je me 
sulS servi, et qui étoit placé à dessein sous une espèce de 
hotte de cheminée particulière, se composoit tout simplement 
de barres de fer d'un pouce carré formant grille, et espacées 
l’une de l’autre de 5 à 4 pouces. Les quatre faces de ce fourneau, 
autour duquel on circuloit, et dont la grille de fond étoit 
élevée de 15 pouces au-dessus du sol, étoient formées de quatre 
grilles semblables , laissant entre elles un espace vide d'environ 
15 pouces de profondeur, sur 6 pieds de longueur et 4 pieds 
de largeur. 

Le combustible destiné à alimenter ce fourneau ne consistoit 
qu'en des espèces de galettes ou de mottes informes , d'environ 
5 à 6 pouces carrés sur un pouce + à 2 pouces d'épaisseur, 
et fabriquées ou avec des cendres pyriteuses, ou vitrioliques 
bien effleurées et légèrement humectées d’eau pour pouvoir les 
façonner, ou avec les mêmes cendres arrosées d'une dissolution 
concentrée de muriate de soude ; dans l’un et l’autre cas dé- 
lerminé par la nature des travaux de l'usine , la consistance né- 
cessaire à ces sortes de galettes pour leur transport, leur mou- 
vement et placement, étoit obtenu naturellement en moins de 
24 heures. Les creusels éloient posés sur un bout de brique 

porté 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 457 


porté dessus la grille de fond, et rangés à la distance de 4 à 5 
pouces l’un de l’autre, de telle sorte qu'on pouvoit placer 
peurs mottes entre deux, de même qu'entre les creusets et 
e tour des grilles de faces. Ces creusets, bien assis et enve- 
loppés de galettes dans toute leur hauteur , en étoient aussi re= 
couverts de 9 à 10 pouces. S’agissoit-il de mettre le feu au 
fourneau , c’étoit chose très-facile , 1l ne falloit pour cela qu’al- 
lumer des brindilles de fagots, ou quelques copeaux disposés 
à cet effet sur l’âtre ; bientôt le feu se communiquoit aux galettes 
inférieures, et de proche en proche le feu devenoit général; 
il étoit alors abandonné à lui-même. Sa durée, sous le rapport 
de fa flamme, pouvoit être de 3 heures + ou 4 heures. 

Afin de ne pas perdre le calorique qui s’échappoit par la 
surface supérieure du fourneau, je plaçois dessus au besoin, 
une chaudière susceptible d'être enlevée à volonté, et dans 
laquelle s’évaporoient des eaux sulfatées (1). 

Les creusets refroidis et délutés, on trouvoit entre chaque 
lit de charbon , un tourteau métallique bien aggloméré et bril- 
lant dans les rayures produites avec un instrument acéré. Quel- 
quefois lorsque le feu n’avoit pas été assez vif, le centre de 
ces tourteaux étoit légèrement agglutiné et sous forme pulvé- 
rulente noire. Alors cette matière éloit renfournée, et le résultat 
de la nouvelle exposition à l'influence de la chaleur donnoit des 
galettes métalliques , à l’instar de celles sorties de prime abord. 
Sous cette forme cette substance éloit attirable à l’aimant, elle 
s’oxidoit à un air humide, et elle se laissoit dissoudre par l'acide 
sulfurique. Il est à observer que mes creusets composés de moitié 
argile grasse de Picardie, et moitié de la même argile cuite, 
pouvoient être employés à un très-grand nombre de fournées, 
et que la même poudre de charbon pouvoit aussi servir plu- 
sieurs fois. 

Afin de m’assurer si cette espèce de plaque ferrugineuse étoit 
susceptible de remplacer la ferraille que l’on est obligé de plon- 
ger dans les chaudières où l’on réduit les eaux qui ont lessivé 
les terres pyriteuses, pour achever la combinaison de l'acide 
qui s’y trouve non saturé, lorsqu'on les concentre pour la cris- 
tallisation des sulfates, j'en ai adressé à des fabricans de ces 
sels. Ces masses métalliques ont très-bien produit l'effet desiré, 


QG) Dans un Mémoire particulier, je me propose de faire connoître l’avan 
tage que présente la décomposition du muriate de soude par les pyrites ou le” 
terres pyriteuses. 


Tome LXXXVII. DÉCEMBRE an 1818. Mmm 


458 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


et elles ont suppléé parfaitement au fer jeté dans les bains des 
chaudières qui se trouvent dans le cas mentionné. 

Il est à remarquer que la quantité nécessaire de ferraille con 
sacrée à la saturation des eaux dans une fabrique de couperose 
tant soit peu achalandée, et qui travaille avec des pyrites où 
des terres sulfuriques , est souvent très-considérable. Il est rare 
que l'achat annuel ne s’en élève pas à 5 ou 6 mille francs. 

J'ai pensé que la communication des résultals qui viennent 
d’être transcrits, ne pouvoit qu'inspirer de l'intérêt, puisqu'elle 
tend, 1°. à faire rentrer dans la fabrication du sulfate de fer. 
la matière qui, après avoir servi à la décomposition du mu- 
riate de soude, se présente sous une forme qui la fait mettre 
au rebut; 2°, à procurer un emploi analogue à celui qui a été 
indiqué, aux ocres jaune et rouge précipitées dans les’ diverses 
opérations des manufactures de couperose. Les amas de ces sub- 
Slances qui encombrent plusieurs établissemens, et qui sont au- 
jourd'hui perdues, recevroient ainsi une valeur et une utilité 
précieuses. Je présume même qu’en poursuivant ce travail d’une 
manière raisonnée et économique, il seroit possible de donner 
à ces matières, qui deviendroient en quelque sorte des mines 
locales, une disposition métallique sous telle ou telle forme, après 
en avoir soumis les produits à des opérations ultérieures faites 
dans ce but. 

Avant de terminer celte Notice, je ferai observer que l’oxide 
particulier sorti de la décomposition du muriate de soude par 
le sulfate de fer, est susceptible , dans son état naturel et bril- 
lant, de plusieurs emplois. J’en ai fait l'application, 1°. à la pein- 
ture en bâtiment et à celle des carosses ou équipages. Les objets 
qui en éloient couverts, étant vus au soleil, présentoient un 
effet singulier par le châloiement que produisoit sa réflexion; 
2°. à la peinture à la colle sur papier pour appartement. Si la 
couche de couleur dans laquelle entre notre oxide , est glacée, 
elle offre alors un coup-d'œil très- agréable; son jeu, en cet 
élat, tient beaucoup du jeu de l’aventurine. 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 459 


é 


GENERA ET SPECIES PLANTARUM, 


Quæ aut novæ sunt, aut nondim rectè cognoscuniur ; 


Auctore MARIANO LAGASCA. Matriti, 1516. 


Quorqur cet Opuscule du savant botaniste espagnol porte la 
date de 1816, il n'est connu en France que tout récemment ;, 
ce qui nous a empêché de l’annoncer plutôt. 


Les bolanistes y trouveront les descriptions d'un grand nombre 
d'espèces nouvelles, et de vingt-six genres nouveaux, avec de 
bonnes figures de deux de ces genres, le Cevallia et le Fer- 
dinanda. Ms remarqueront surtout le Cevallia, que l’auteur rap- 
porte à la famille des Borraginées, quoiqu'il aït le port d’un 
Æchinops, l'ovaire adhérent au calice, les étamines périgynes, 
et point de corolle. Cette plante, recueillie par Née à la Nou- 
velle-Espagne , est très-singulière. 

La famille des Synanthérées offre, dans cet Opuscule, quatorze 
nouveaux genres. 


Nous profitons de celte occasion pour rappeler la belle Dis- 
serlation du même auteur sur les Chénantophores, très-rare en 
France jusqu'a présent, et dont M. Dafour, ami de M. Lagasca, 
vient de recevoir- plusieurs exemplaires, ainsi que de l'Opuscule 
que nous annonçons. 


Amm 2 


OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES 


A compter du 1% janvier 1818, Les hauteurs du Baromètre 


. = 
2 THERMOMETRE EXTERIEUR BAROMÈTRE MÉTRIQUE. ë mn 
= CENTIGRADE. 2 Ë 
: Se 
Si MINIMUM. MAXIMUM. À MIDI. MAXIMUM. F3 

Nr heures= heurese heures* mille 

1 | àmidi. H1460| àgis. + 875] +14,60] àgis....758,94 145 
2 |à3s. +4,40] à 7m. + 9,25] H14,00| à gm....758,27 13,6 
8 | à midi. 14,00! à 1os. + 7,25] H14,00| à 9 m. ...754,98| à 14,1 
4 |à3s +5,50 à7m + 4,75] 15,50] à 7m....748,74 1 4 14,5 
5 | à3s. “+iy,oo à7m. “+u1,10] H16,10| à 9 m....742,60 à 9s.....799,91| 741,D2| 15,0 
6|à5s. +15,75| àgss. <+10,40| +15,00| à 9 35....748,50| à 7 &m...741,82| 744,29) 14,1 
7 |à5s. +2,92) à 7 5m. + 4,90! 11,75] à 95s....7b4,54| à 75m...790,98| 7b2,19| 14,6 
8 | à midi. +19,50| à 7 Em. + 5,75] 412,60 à 105....75b,19) à 77 m...754,97| 754,98 15,8 
9 [à3s. “+Hi1,00| à 7 im. + 6,75] H10,85| à gs..... 756,79 à 73m...709,62 756,18 13,0 
10 | à5s. —+ur,io| à 7 Em. + 6,25] +10,60| à 10 3m..756,50| à42s....75b,39] 766,10] 13,5 
111 à93s. —+io,85| à 7im. + 8,00| + 9,60) à 105m..754,89 à 25....7b5,36| 754,63] 12,0 
12 | à3s. 13,00! à 7 4m. + 5,00! 11,50 à gm....750,49| à $s.....749,02| 749,77 15,2 
13 à midi. 13,95] à7 £m. + 7,50] +13,75 à 105....751,D9) à 7 3 m...720,02| 790,44| 12,9 
14 | à5s. Hib,1o| à7 4m. + 6,75] +14,10| à 10m, ..7b5,96| à 8 5... 752,91| 753,b0| 14,2 
19 là midi. +9,50] à71s. —Æ 8,75] 12,50! à9s....754,54 à7 3 m...751,62 752,55] 14,6 
16 làgs. +H14,00! à 71m. + 8,75] +12,75| à 71 m...755,59 àgs..... 760,18] 751,29] 12,7 
17 à midi. 19,75] à10s5. + 9,25] 12,75] à 105....758,50| à 7 : m...7b2,58| 754,79] 14,6 
18 | aämidi. 19,75] àgis. + 7,25] +1,75] à gis....761,20| à 7 1 m...759,58| 760,82] 15,1 
19 fà5s. + 9,50 à7im. + 5,50] + 6,50] à 101m..761,33| à 105....757,98| 760,76| 12,4 


20 las. + 7,75] àg+s. + 2,75] + 7,10] à7 2m...755,19| à 9: s...751,09| 753,81] 11,8 
21 là5s. + 515] à7 1m. + 0,55] + 4,95] à 912s....749,49| à midi... .748,09| 748,09] 10,2 
29 | à3s. + 5,75| à7!m. — 0,10] + 4,25] à midi....7b1,05 à7z m...7b0,8b| 751,53 8,9 


28 là3s. —io,75| à10s. + 6,25] 10,90] à 10 s....753,5g| à 72 m...750,64| 751,75] 10,0 
24 l'ämidi. 413,50] à 71m. + 9,10] H14,50| à g1s....758,41| à 7+m...751,79| 702,77] 11,5 
25 | à3s. + 8,50! à 72m. + 6,75] + 7,90] à gs... 765,25] à 7:m...763,0b| 764,09! 10,7 
26 | à53s. +10,75| à 7 °m. + 7,25] + 9,bol à 105....768,16 à7am 766,00! 767,12] 10,6 
27 | à14s. 19,60] à 6$m. + 9,00] +12,00! à105.....769,9b| à 7 ?m...769,54 769,52 10,9 
28 | à3s. 19,75] à 7 5 m. + 9,25| H11,50| à g m....770,09| à 105... 768,34| 769,40] 11,6 
29 | àmidi. + g,5o| à1os. + 5,90] + 9,50! à 10 m...768,58| à 105....767,02| 768,07| 11,1 
50 | àmidi. + 4,60| àgs. + 92,00| H 4,60] à 101m..766,92| àg ss... 764,87| 766,18] 9,5 


Moyennes. 11,77 —+ 6,61 Hirio! 757,05 754,601 755,781 12,6 
EE, 


RECAPITULATION. 

Milïm. 
Plus grande élévation du mercure. .... 770°09 le 28 
Moindre élévation du mereure........ 739,91 le 5 
& Plus grand degré de chaleur.......... 1700 le B 
Moiïndre degré de chaleur........... — 0,10 le 21 

Nombre de jours beaux........ 12 

de couverts, ....,.,.. 18 

dOPPIRIE rene date 9 

de vent... DST oo 30 

dergelée: cs octets 3 

de tonnerre.....,.... C4 

de brouillard......... 30 

JEMEPE A eee lseie o 

GOT ENS OEEEER 0 


A L'OBSERVATOIRE ROYAL DE PARIS, 


sont réduites à la température de zéro du Thermomètre. 
NOFEMBRE 1818. 


SE POINTS VARIATIONS DE L'ATMOSPHERT. 
S VENTS. ; LE DEP EE 9 LP COU 
e [à midi. LUNAIRES. LE MATIN. A MIDI ÉE Fo 
—  —— qe nn 
1 | 77 lO. [Lune périgée. Couv., br., pl. av. le j: Très-nuageux. Beau ciel, 
2 | go |S. Couvert, brouil. épais.|Couvert, brouillard. |Couvert. 
3 | 97 | Idem Couvert, brouillard. |Très-nuageux. Nuageux. 
4| 731 Idem Nuageux, brouillard. [Nuageux. Couvert. 
5 | 67 |S.-E. P.Q.àgh33m.| dem. Idem. Idem, pl. à 4. 
6 | 86 |S.-O. Couvert, brouillard. |Couvert. Couvert. 
7 | 77| Idem Nuageux, brouillard. |Beau ciel, brouillard. [Beau ciel, brouillard 
8 | 73 |O. Couvert, brouillard. [Nuageux, brouillard. [Quelques éclaircis, 
9 87 IN.-O. Idem. Couvert, brouillard. |Couvert, 
10 | 82 [E-.S.-E. Nuageux, brouillard. |Nuageux, brouillard. | J4em. 
11 97 |S.-E. Pluie , brouillard. Pluie, brouillard. Nuageux, brouillard. 
12 | 79 [E.-S.E. |P.L.ioh59s.[Nuageux, brouillard. Nuageux. Nuageux. 
13 | go |S.E. Idem. Couvert, brouillard. |P/ure à ok. 
14 | 87 |S.-O. Idem. Nuagéux. Pluiïe dans la nuit. 
15 | 72 |[O. Pluie, av. le jour, br.| Idem. Très-nuageux. 
16 | 97 |S.-O. Lune apogée. | Pluie abondante. Pluie par intervalles. | Pluie par intervalles, 
17 65 IN.-O. Nuageux. Nuageux. Couvert. 
18 77 | Idem Idem, brouillard. |Couvert, brouillard. |Beau ciel. 
19 88 |S.—E. Brouil. épais et humid.|Beau ciel, brouillard.| dem. 
20 | 7o |E. Beau ciel ,légerbrouil.| dem. Idem. 
21 76 | Idem D:Q:à2h35m.| /dem. Légers nuages. Idem. 
22 | 84 [N.-E. Couvert, brouillard. |Couvert, bruoillard, |Brouill épais. et hum. 
23 | 96 |S. Nuageux, brouillard, | dem. Couvert , br. humide, 
24 | go | Idem. Petite pluie , brouill. | dem. Idem. 
25 96 |O. foible. Brouill. épais. et hum.|Brouill. épais et hum, Idem. 
26 | 91 |S.-O. Petite pluie, brouill. |Couvert, brouillard. [Couvert par intervall. 
27 | 93 |O. foible. Couvert , brouillard. Idem. Quelques éclaircis. 
28 | 96 | Idem. [N.L.ï4h25m| dem. Idem. Couvert, brouillard. 
29 88 |[S.-O.. {Lune périgée. |  Jdem. Idem. Beau ciel. 
30 | 97 |S.-S.-0. Idem, brouil. épais.| dem. Idem. 
31 
Moyen 83 : 
RECAPITULATION. 
NEC LLraute o 
IN DT ES LE Et. 
Fe nie 4 
Jours dont le vent a soufflé du ce RE ae 4 
SO se. sante D 
OL NS TETE 6.,; 
NO SECTE 6 
le 1°, 19°,086 


Eau de pluie tombée $ 


Thermomètre des caves 


le 16, 12°,086 


dans la cour....... 59"%,95 — 1 p. 5 lig. 
sur l'Observatoire. 


| centigrades. 


RD ro 0 


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RE em 


462 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


OBSERVATIONS 
Sur les Combinaisons qui dépendent des Affinités foibles; 


Par M. BERZELIUS. 


EXTRAIT du VIE volume des Afhandlinger i Fysik, Kemi och Mineralogi, 
publiés par une Société de Sayans Suédois. Stockholm, 1818. 


M. Berzeuus fait voir que les substances douées d'affinités 
chimiques foibles, se combinent das des rapports beaucoup 
plus variés que les plus fortes, qui par leurs aflinités sont tou- 
Jours ramenées aux rapports les plus simples et à des combi- 
naisons qui se forment de préférence. C’est pour cette raison 
que, par exemple, la silice produit un si graad nombre de si- 
liciates à différens degrés de saturation , et des siliciates doubles 
et triples, qui fort souvent n’ont puiai d’analogues dans la classe 
des autres sels. Dans les siliciates doubles, il arrive fort souvent 
que dans l'un des siliciates la base est plus saturée de silice ue 
dans l’autre, comme, par exemple, dans la mésotype où la silice 
du siliciate de soude contient trois fois l’oxigène de la soude, 
tandis que dans'le siliciate d'alumine, la silice et l’alumine en 
contiennent la même quantité, c’est-à-dire que cette pierre est 
composée d'un tri-siliciate de soude et de siliciate d’alumine. 
Jusqu'ici les sels doubles produits dans nos laboratoires, n'ont 
point présenté quelque exemple de celte sorte de combinaison, 
qui ail pu constater la justesse de.ces idées sur la composition 
de plusieurs minéraux. M. Berzelius a cru que ces exémples 
ne devoient point être cherchés parmi les sulfates, nitrates, elc., 
c'est-à-dire parmi les combinaisons qui dépendent d’aflinités fortes. 
Il les a plutôt cherchés dans la classe des carbonates et des hy- 
drates, qui, par la foiblesse de leurs affinités, se rapprochent 
des siliciates. Il vient de trouver que si l’on verse une solution 
de sulfate où de muriate de maynésie dans une solution de 
bi-carbonate de potasse, il se forme, après quelques jours, des 
cristaux réguliers dans le liquide. Ces cristaux sont un sel double, 
qui, d'apres. l'analyse que M. Berzelius vient de donner, est 
composé: d’une molécule de bi-carbonate de potasse combinée 
avec deux dé carbonate de magnésie, el avec 18 molécules 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 463 


d'eau. D’après les formules dont se sert M. Berzelius pour ex- 
primer les compositions chimiques, et dont nous avons donné 
quelques idées dans le tome LXXX VIE, là composition de ce sel 
double peut être représentée par KC‘aq°+ 5MnC?A45. Cette éom- 
posilion fait donc voir que des sels, à différens degrés de’ sa- 
luration, peuvent s’unir, et justifie par conséquent les idées 
qu'on s’étoit formées de la composition de plusieurs siliciates 
doubles. 

Pour donner à l'analyse présentée la plus grande exactitude 
possible, M. Berzelius a examiné de nouveau la composition 
de la magnésie, en la déterminant d’après l'analyse du sulfate 
de cette terre. Il à trouvé que 100 parties d'acide sulfurique 
se combinent avec 51,55 parties de magnésie, et que par con- 
séquent celte terre contient 58,708 pour cent d'oxigèene , ce qui 
se rapproche de ses anciennes analyses qui avoient donné 38,8 
pour cent. , 

Ensuite il a examiné la composition du carbonate de ma= 
gnésie. crislallisé,, qui se, laisse exprimer par la formule... 
MnC: + GAg. 

Il examine ensuite la composition de la magnésie blanche 
des pharmaciens. Il prouve qu’elle n’est point une combinaison 
stable, et qu’elle varie en proportions d’après les circonstances 
dans lesquelles elle a été préparée. M. Berzelius a tàché de la 
ramener à un point fixe ; 1l trouve qu'il y a un sel, mais que 
Sa composition ne se laisse point comprendre alors, si l'on ne 
veut point admettre qu'elle peut ètre composée d'un Eydrate 
combiné avec le carbonate. Dans ce cas, l'acide carbonique 
contient deux fois l'oxigène de la base dans le carbonate , et 
dans Yhydrate l'eau contient huit fois loxigène de la base. 
La formule qui représente la composition de la magnésie blanche, 
est 3Mn C*+MAg%. Cette combinaison est done de la même 
nature que le cuivre bleu, que M. Berzelius, dans son Mé- 
moire sur le Système chimique de Minéralogie, a prouvé être 
composé de carbonate et d'hydrate d’oxide de cuivre. 

M. Berzelius examine ensuite la composition du carbonate de 
zinc artificiel, qu’il trouve être la même que celle du carbonate 
de zinc terreux de Carinthie, analysé par M. Smithson, lequel, 
de son côté, l’avoit déja regardé comme une combinaison dé 
carbonate et d’hydrate de zinc. La formule qui représente sa 
composition est, d’après M. Berzelins, 32rl+7ZnAgf. 

M. Berzelius finit son Mémoire par. des expériences sur la 


464 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


nature des précipités qui se forment dans le sulfate et le mu- 
riale de magnésie , par l'addition d'ammoniaque caustique , et 
qui, tous les deux, ont un aspect entièrement différent. Le pré- 
cipité du premier contient 1,6 pour 100 d'acide sulfurique, 
qu'aucune lixiviation ne lui peut enlever, et celui du dernier 
contient de même environ 1 pour 100 d'acide muriatique. Ces 
petites quantités appartiennent donc d’une manière bien réelle, 
à la composition de ces précipités, quoiqu'il soit fort difficile 
de se former une.idée d’une telle combinaison: « Ces recherches, 
ajoute M. Berzelius, nous indiquent l'existence d’une espèce 
de combinaisons que jusqu'ici on n’avoit point remarquée, Ou à 
laquelle on n’avoit point donné assez d'attention. Il est cependant 
clair que, les aflinités d'où dépend cette espèce de combi- 
paison , doivent avoir joué un rôle dans la formation de la partie 
solide du globe, et que leur étude peut devenir extrêmement 
utile, pour ne pas dire indispensable, dans l'examen des sub- 
slances: minérales. » 


EC 


SUR LES OXIDES DE MANGANÈSE ; 
Par M. Aucusre ARSVEDSON. 
Extrait du même Ouvrage que les Observations précédentes. 


M. Arsvepson voulut examiner un oxide noir de Manganèse, 
qui se distinguoit par une forme cristalline très-prononcée , et 
qui dérivoit d'une mine de Manganèse à Undenais en Wes- 
tragothie. Il trouva que cet oxide de Manganèse donnoit de l’eau au 
lieu d’oxigène , et que ce n’étoit qu'à une très-forte chaleur qu’on 
pouvoil en reurer une très-pelite quantité de ce gaz. Il obunt 


Oxide de Manganèse brun. . . . . 86,47 
annee Eee ee D AA F1.1110;08 
Gaz oxipele:. PEER DENT UT 


Pour déterminer la constitution de ce minéral, il falloit con- 
noître la composition de l'oxide brun. Par une suite d'expé- 
riences dont il seroil trop long de donner ici l'exposition, il 
le trouva composé de 


Manpanèse! A isl.1f. cet) 72:784 
Oxinène pr SM. 0e Nam at 


Il 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 465 


Il vérifia ensuite que la composition de l’oxidule de Manganèse 
et de son oxide noir, telle que M. Berzelius l'avoit donnée dans 
un Mémoire publié il y a long-temps , étoit exacte. Mais cet 
oxide, qui est entre les deux, n’est dans aucun rapport mul- 
tiple, quant à sou oxigène, avec ces deux oxides. 

M. Arfvedson le compara alors à la combinaison des deux 
oxides de fer que M. Berzelius avoit nommés oxidum ferroso- 
Jerricum , et dans laquelle l’oxide rouge contient trois fois autant 
d’oxigène et deux fois autant de radical que l'oxide noir. Il 
trouva sa composition d'accord avec cette idée, puisque le calcul 
fondé sur elle donne 27,25 pour 100 d’oxigène , et l'analyse en 
avoit donné 27,216 pour 100. M. Arfvedson nomme cet oxide 
dans la nomenclature latine oxidum manganoso - MangAriCUM . 
En appliquant ensuite les résultats de ces recherches à l’analyse 
de l’oxide hydraté, il s'ensuit que les 86,41 parties d'oxide brun 
combinées avec les 3,51 parties d’oxigène font l'oxide de ma- 
ngauèse noir, et que l'eau obtenue a été combinée avec cet 
oxide. M. Arfvedson fait voir que l’oxigène de l’eau est 3 de 
celui de l'oxide, c’est-à-dire que ce dernier contient trois fois 
autant d'oxigène que l’eau avec laquelle il se trouve combiné. 

M. Arfvedson examina ensuite l'oxide de manganèse nalif 
(le peroxide), dont on se sert en général pour la préparation 
du gaz oxigène. Il trouva sa composition telle, que si dans l'hy- 
drate de l'oxide on ôte l'hydrogène de l’eau, il en reste le per- 
oxide. 11 suit donc de ces expériences, que l'espèce minérale 
considérée comme le peroxide de manganèse, contient en effet 
deux différentes combinaisons , qui se ressemblent beaucoup 
quant à leur aspect. L'une est l'hydrate de l'oxide, qui donne 
une poudre brune, plus ou moins claire, et qui, chauflée dans 
un bout de tube de baromètre, donue beaucoup d’eau , et 
l'autre est le peroxide, dont la poudre est noire, et qui ne 
donne point d'eau qu'autant qu'il est mélangé de l’hydrate. Il 
est clair que cette distinction est essentielle pour ceux qui se 
servent du peroxide de manganèse pour la préparation des li- 
quides à blanchir, puisque le peroxide leur fournit trois fois 
autant de gaz oxi-muriatique que l'hydrate de l'oxide, en em« 
ployant la mème quantité d’acide sulfurique et de sel marin. 


Tome LXXXV1II. DÉCEMBRE an 1818. Nnn 


466 JOURNAL DE PHYSIQUE ,; DE CHIMIE 


APN EEE RER LEO» 


Siculorum Plantarum centuriæ I, II. In-4°, fis. Auctore ANT. 
Bivona-BEernarpi. Palerme, 1806, et seq. 


Ejusdem Monographia delle Tolpide. Zn-folio, fig. italicè et 
latine. Palerme, 1800. 


Ejusdem Stirpium rariorum minus que cognitorum in S'icilia sponte 
Provententium descriptiones; Manipuli 1— III. In-4°, cum fig. 
Palerme, 1815— 1816. 


La Sicile se trouve, par sa position géographique, très-fa- 
vorablement placée pour la végétation ; aussi le botaniste ne 
sauroit manquer d'être satisfait de ses recherches. En effet, elle 
offre, indépendamment des espèces de plantes qui lui sont propres, 
un grand nombre de celles qui croissent sur les diverses côtes 
baignées par la Méditerranée. Cependant, malgré cet avantage, 
nous connoissons peu les plantes de la Sicile, et la richesse 
végétale de cette île est seulement entrevue par les ouvrages 
que Cupani, Boccone et Bonanni publièrent il y a un siècle 
environ. Quel motif pour enflammer le zèle de celui qui, 
par goût, s’est consacré à l'étude de la Botanique, et l'exciter 
à concourir à nous faire connoîlre les plantes d’une île aussi 
célèbre. M. Bivona-Bernardi semble s'être imposé cette tâche, 
et nous ne saurions trop l’encourager dans une entreprise aussi 
ulile à la science. Il est assez remarquable que depuis Cupani, 
et les auteurs ses contemporains jusqu'à M. Bivona, aucun na- 
turaliste n’ait entrepris un pareil travail. 

Les Centuries des Plantes siciliennes, par M. Bivona-Ber- 
nardi font connoître des espèces nouvelles et inconnues jusqu'ici 
aux botanistes. L'auteur fait voir que Cupani et les autres phy- 
tologues siciliens, sont loin d’avoir décrit toutes les plantes de 
la Sicile. Il démontre que beaucoup de celles indiquées par 
ces auteurs, ont élé rejelées des Specres on confondues avec 
d’autres, sans doute, parce que leurs descriptions ou leurs fi- 
gures éloient inexactes. M. Bivona-Bernardi ajoute à chaque 
espèce, une synonymie convenable, et il donne une description 
des espèces nouvelles. Les figures représentent ces espèces ou 
celles anciennement connues, mais mal figurées , ou même non 
figurées jusqu'ici. 

Les trois Fascicules des Plantes rares de la Silice sont ré- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 467 
digés dans le même esprit; ils sont plus propres que les Cen- 
turies à démontrer la quantilé de végétaux nouveaux que la Silice 
présente. f 

La Monographie du genre T'olpis, est un ouvrage de M. Bi- 
vona-Bernardi qui appartient à la fois à la Flore sicilienne et 
à la Botanique en général. L'auteur décrit einq espèces, dont 
une, le T'olpis quadriaristata, doit être considérée comme nou- 
velle, bien que Cupani et Bonanni l’aient mentionnée ; mais elle 
avoit été negligée par les botanistes. 

Ces divers ouvrages doivent être accueillis favorablement par 
tous ceux qui s'occupent de cette belle branche de l'Histoire 
naturelle, la Botanique, et ils ne manqueront pas d’être satisfaits 
des peines et des soins que M. Bivona-Bernardi se donne pour 
concourir à l'avancement d’une science qui fait les délices de 
ceux qui la cultivent; ils encourageront ce naturaliste instruit 
à continuer des travaux qui ne peuvent tourner qu'à sa gloire. 
C'est surtout pour la continuation des Centuries des Plantes si- 
ciliennes, qu'on doit faire des vœux; elle amènera nécessai— 
rement une Flore complète de la Sicile, ouvrage qui manque 
totalement, et qui est d'autant plus à desirer, que les ouvrages 
de Cupani ne sont point complets, et qu’ils ne sont pas rédigés 
dans cet esprit méthodique que le grand Linnæus sut introduire 
si heureusement en Histoire naturelle, et qui assure les pas de 
ceux mêmes qui osent le critiquer. 


RSR ESRI CERCLE PEIEST DEN INTEL MEURT EEE PT DIN LTE DT REP EL LT EE REEE TETE PLESEES ETES 


TRAITÉ SUR LES CHAMPIGNONS CGMESTIBLES, 


Contenant l'indication des espèces nuisibles ; précédé d'une intro- 
duction à l'Histoire des Champignons , avec quatre planches 
coloriees ; 


Par C. N. PERSOON. 
Paris , chez Belin-Leprieur , Libraire, quai des Augustins , n°55. In-8°, 1818. 
(EXTRAIT...) 


La plupart des ouvrages qui traitent des Champignons, 
ont pour but d'augmenter la masse de nos connoissauces 
en Botanique, d'occuper et d'instruire les botanistes et les 
amateurs de plantes, et de leur procurer ainsi quelques jouis- 
sances d'esprit, souvent la seule récompense de leurs tra- 
vaux et de leurs sacrifices. Voici une sorte d'ouvrage d’appli- 


Nan 2 


458 JOURNAL DE PHYSIQUE, PE CHIMIE 


calion desliné pour ceux qui font des Champignons un usage 
plus substantiel, mais qui aussi leur devient souvent funeste, 
s'ils n’ont pas assez de connoïissance pour distinguer les espèces 
alimentaires d'avec celles qui sont délétères; et sous ce point 
de vue, les livres des naturalistes sont évidemment plus mé- 
ritoires , s'ils parviennent, en répandant l'instruction, à con- 
server la santé et la vie de leurs concitoyens. 

Dans ce Traité sont décrites avec exactitude, 95 espèces 
de Champignons, plus où moins comestibles, dont quelques- 
unes sont tout-à-fait nouvelles, appartenant à 12 genres. A la 
fin de chaque description, et sous une rubrique particulière, 
sont aussi signalées comparativement, les espèces nuisibles que 
l'on pourroit confondre avec les bonnes, soit par la couleur, 
soit par la forme. Les meilleures figures de tous ces Champi- 
gnons , leurs noms botaniques et les noms vulgaires, qui pa- 
roissent extrêmement variés suivant les localités, sont aussi in 
diqués. Les moyens de conserver les Champignons et de les 
préparer pour la cuisine n'ont pas même été oubliés, et avec 
raison, puisque l'expérience nous apprend qu’une espèce assai- 
sonnée d’une certaine manière, perd une qualité un peu nui- 
sible qu’elle auroit eu apprètée d’une autre façon; ainsi, en gé- 
néral, une légère macération dans le vinaigre, paroit enlever 
la qualité nuisible des espèces les plus délétères. On trouvera 
également indiqués dans cet ouvrage, les remèdes à opposer 
aux accidens occasionnés par les espèces vénéneuses, si l’on ne 
peut avoir de suite les secours des médecins, lesquels, au reste, on 
ne doit point négliger de consulter. Le plus eflicace est, d’après 
les observations à ce sujet, l'emploi d'un éméto-cathartique , 
même huit ou dix heures après l’ingestion des Champignons 
délétères, leur action étant très-lente , ainsi que leur digestion. 

La première partie, ou l'introduction de cet ouvrage, est pu- 
rement théorique, et contient une analyse concise, mais bien 
Suflisante, de l’histoire naturelle des Champignons; un excellent 
aperçu de leur classification, contenant, à ce qu’il nous a semblé, 
un grand nombre de remarques nouvelles, fruits des recherches 
de l’auteur, qui, comme le savent sans doute nos lecteurs, s’est 
Spécialement attaché à cette partie de la Botanique, sur laquelle 
il a publié un ouvrage classique il y a quelques années , et qui, 
étant allemand, est bien au courant de tout ce qui s’est fait 
de plus récent sur cette matière en Allemagne où l'on s’en oc- 
cupe beaucoup; en sorte que comme les espèces vulgaires ou 
curieuses, el même nouvelles, de presque tous les genres de 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 409 


ce singulier groupe de corps organisés, dans lequel il nous 
paroit qu'on réunit des choses bien disparates , ÿ sont aussi 
traitées , il est vrai d’une manière succincte ; ce livre, sous un petit 
volume, peut en même temps servir comme un manuel extrème- 
ment utile, à ceux qui ne regardent ces productions que sous les rap- 
ports scientifiques, en les mettant au courant de l’état dela science, 
ainsi qu'à ceux qui les envisagent d’une maniere évidemment 
plus utile, mais aussi souvent plus dangereuse, et cela en leur 
indiquant avec soin, non-seulement les caractères des espèces 
hpnnes, innocentes, ou plus ou moins délétères, mais encore 
les différences qu’elles offrent suivent leur âge, ce qui étoit 
fort important; les lieux où elles se trouvent, et enfin l’accom- 
modement ou le remède qui leur convient. D'après cela, il 
nous sembleroit fort utile, pour tirer tout le parti possible de 
cet ouvrage, dont le peuple ne peut immédiatement faire usage, 
comme le fait justement observer l’auteur, que les autorités 
locales, les maires, les curés, etc. , en fissent une application 
aux espèces de leur canton, en employant les noms vulgaires, 
ou mieux, locaux, dans une très-courte instruction aflichée à 
_la porte des églises et dans les marchés. Les accidens qui ar- 
rivent chaque année dans les campagnes, en deviendroïent sans 
doute moins nombreux. 


== 
SUR LES RÉSULTATS 
DE L'EXPÉDITION ANGLOISE AU NORD. 


LE principal but de cette expédition, dont nous avons déja 
cu l’occasion de parler, et qui consistoit à chercher de nouveau 
un passage au nord-ouest de l'Océan atlantique dans l'Océan 
pacifique du nord, et par conséquent d'aller aux Indes sans 
doubler le cap de Bonne-Espérance , est entièrement manqué. 
Les deux vaisseaux commandés par le capitaine Buchan , qui 
devoient s'élever plus au nord à l’est, n’ont pas dépassé le 80° 
de latitude, et sont revenus les premiers dans les ports d’An- 
gleterre, et les deux autres, sous le commandement du capi- 
taine Ross, qui étoient chargés d'explorer la baie de Baflin, 
sont également de retour depuis le mois de novembre , sans 
avoir perdu un seul homme. Mais cette expédition est bien loin 
d’avoir été perdue pour les Sciences; en effet, outre les dé- 


470 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


terminations SORTE des points principaux de toute cette 
grande baie de Baflin, faites avec le plus grand soin par le ca- 
pilaine Ross, qui lui permettent d'assurer qu'il n'existe pas de pas- 
sage entre l'Océan atlantique et l'Océan pacifique, parle détroit de 
Davis, ou la baie de Baffin, qui est toute entourée de terres élevées, 
Ja Physique et l'Histoire naturelle auront à recueillir plusieurs 
faits intéressans. Ainsi le capitaine Ross a déjà publié quelques- 
unes des observations qu'il a faites sur l'inclinaison et la décli- 
naison boréales de l'aiguille aimantée, où l’on trouve une incli! 
paison de 84° 25/, c’est-à-dire de 2° 16! plus forte que la plis 
grande observée par le capitaine Phips, et une déclinaison bo- 
réale de 87° à 75° 5’ de latitude et 62° 12/ de longitude occidentalé, 
tandis que la plus forte connue n’avoit pas dépassé 45°. Le 
même capitaine a découvert au fond de la baie de Baffin, entre 
le 76° et le 77° de latitude, une nation tout-à-fait sans relations 
avec le reste de l'espèce humaine; d’après les renseignemens 
qu'il a pu prendre à l’aide d’eskimaux qu'il avoit à bord, et 
qui n’entendoient, il est vrai, que fort difficilement sa langue, 
ce peuple n’a jamais goûté des fruits de la terre , etson unique 
nourriture consiste en poissons et en huile de baleine. Il n’a, 
dit-on , aucune idée de l’Etre suprême ni d’un état à venir, 
et n'a jamais vu d’ennemis; il se regarde comme le maître de 
la terre, dans la persuasion , il est vrai, où il est, qu'au-delà de 
son pays il n’y a que des glaces. La figure, le langage et les 
mœurs mêmes de ce peuple, paroissent se rapprocher des Kamts- 
chatkadales de l'extrémité de l'Asie. Ils se servent en effet de 
traineaux tirés par des chiens , ils se vêtissent de peaux; il paroît 
cependant qu'ils connoissent le fer, car on leur a trouvé des 
couteaux ; les harpons dont ils se servent pour atteindre les petites 
baleines, sont faits de dents de narwbal; ils n’avoient aucune 
idée du bois, au point qu'un de ces naturels monté sur le 
pont du vaisseau, voulut soulever un mat comme s’il avoit été 
sans pesanteur. À l’arrivée des vaisseaux anglois, leur curiosité 
fut considérablement stimulée; ils regardoient, disent les re- 
lations, les vaisseaux comme de grands oiseaux de proie, ve- 
nant de la June pour les dévorer. Lorsqu'on leur fit entendre 
que les anglois venoient du sud, ils répondirent que cela étoit 
impossible, parce que de ce côlé tout étoit couvert de glace, etc. 

Mais, outre ces observations sur cette nouvelle peuplade, 
M. le Dr Leach vient de publier un apercu des richesses z00- 
logiques déposées au Muséum britannique. 

Parmi les mammifères, nous citerons, 1°. une nouvelle va- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 4gi 


riété de chien que M. Leach dit approcher du loup sous certains 
caractères extérieurs et par la voix, etqui manque de pouce aux 
pieds de derrière (1); 2°. le renard arctique qui n'exbale pomt 
la mauvaise odeur du renard commun, et vit sur la côte du 

Spitzherg ; 3°. une espèce de lièvre qui, suivant M. Leach, 
paroït former une espèce probablement distincte du £epus va- 
riabilis de Pailas, et certainement du lièvre blanc de Brisson. 
Elle est de la taille du lièvre commun, et de couleur blanche. . 
Le dos et le sommet de la tête sont saupoudrés de poils d’un 
brun noirâtre, annelés de blanc; les côtés du cou sont couverts 
de poils de la même couleur, entremélés de blanc. L’extrémité 
des oreilles est noire, avec quelques poils blancs, et sur les 
côtés, ceux-ci sont beaucoup plus nombreux. Elle a été tuée 
sur la côte ouest de la baie de Baflin au 74° de latitude; 4°. enfin 
le renne venant de la côte du Spitzherg; et comme l'individu 
tué avoit ses bois à l’état de refait, on a fait l'observation que 
les poils qui les recouvrent sont beaucoup plus longs que sur 
les individus domestiques. 

. Parmi les oiseaux déposés au Muséum britannique, nous 
citerons 1°. Falco smirillus, 2°. Vitiflora ænante, 5°. Emberiza 
nivalis , 4. Hæmatopus ostralegus , 5°. Pelidna alpina, 6°. Tringa 
islandica, 7°. Lobipes hyperboræus, 8°. Rallus sericeus , 9°. Uria 
francsii , nouvelle espèce de Guillemot dont M. Leach a lu la 
description à la Société linnéenne; 10°. Grylle scapularis, x1°. Mer- 
gulus melanoleucos, 12. Fratercula glacialis, nouvelle espèce 
dont la description a été également communiquée à la Société 


() Voici ce que nous avons observé sur l'individu femelle envoyé vivant 
par M. le D° Leach au Muséum d'Histoire naturelle. L'aspect général et surtout 
celui du poil et des dents, indiquent un individu âgé ; sa taille et sa physionomie 
générale sont celles de la variété de chien que nous nommons chien-loup; en 
effet, le museau est tout-à-fait semblable, en ce que la mâchoire inférieure semble 
se terminer obliquement par la longueur de la symphyse; la tête a la meme 
Forme ; les yeux, médiocres, ont la pupille ronde ; les oreilles sont droites , 
médiocres et ovales; la queue est forte, un peu excayée en dessus, très 
chargée de poils, surtout inférieurement ; l'animal la tient presque horizon- 
talement, cependant un peu de côté. Les membres sont ass2z greles; il 
n'y a en effet aux pieds postérieurs, aucune trace de l'ergot ou du pouce 
que l’on trouve dans beaucoup de chiens domestiques. Tout le poil est long, 
presque vertical et de couleur d’un blanc sale , avec de grandes taches d'un 
brun noir, assez irrégulières. Il n’aboie nullement, il se laisse approcher, 
et même caresser aisément, mais ne donne aucun signe de joie par le mou- 
vement de sa queue , même aux personnes chargées de le nourrir. 

Cette variété me semble évidemment être la souche de notre chien loup. 


472 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 

linnéenne par M. Leach; 13°. Procellaria glacialis, 14°. Larus 
churneus, 15°. L. rissa, 16°. L. canus, 17°. et 18°. deux grandes 
espèces de Zarus non déterminées, 19°. L. sabini, nouvelle 
espèce sur laquelle M. Sabine a lu un Mémoire à la Société 
linnéenne , et qui doit ,suivant M. Leach, former un genre inter- 
médiaire aux genres Larus et Sterna; 20°. Sterna hirundo, 21°. Ster- 
a cepphus, 22. Catarracta fusca, 23°. Somateria ,mol- 
éssima. 


EE 


NOUVELLES SCIENTIFIQUES. 


GÉOLOGIE. 
Sur la Fille petrifiée d'Afrique. 


Plusieurs ouvrages de compilation, et même sur les pétri- 
fications, parlent encore d'après le 7iumvirat de Barbarie, par 
le père Pascal Canto, Paris, 1657, et surtout d’après le Voyage 
de Paul Lucas, fait en 1714, dans la Turquie, l'Asie, la Syrie, 
la Palestine et l'Egypte, 5 vol. in-12, d’une prétendue ville 
pétrifiée avec ses habitans, qui existe dans l’intérieur de l'Afrique 
septentrionale. M. le capitaine W. H. Smith, au servie de l’Au- 
gleterre, s'étant trouvé à Zeptis Magna, occupé à faire des 
fouilles , en prit l’occasion de pénétrer plus avant et de faire des 
recherches sur cette fameuse merveille, dont les Arabes et les 
Turcs parlent comme d’une chose certaine. Après être arrivé 
à Ghirrza, lieu où l’on disoit qu’elle existoit, il n’apercut que 
quelques misérables maisons de construction fort moderne. Il 
vit cependant dans un ravin sur la pente d’une colline , quelques 
tombeaux du plus mauvais goût, des ornemens avec des co- 
lonnes sans proportion , avec des chapiteaux extrémement lourds, 
construits sans aucune règle d'architecture, aucune division d’ar- 
chitraves, de frises, de corniches ; l’entablement surchargé de 
figures grossières et grotesques, représentant en bas-reliefs des 
guerriers , des chasseurs, des chameaux, des chevaux et d’autres 
animaux, plutôt éraillés que sculptés dans la pierre. Les pié- 
destaux éloient sans socles ; l'espace entre la base et la corniche 
étoit rempli d’arabesques les plus baroques. L’oubli de toute 
pudeur étoit remarquable dans plusieurs figures. 

Vers le sud-est, au milieu d'un vallou inculte et désert, re- 


paire 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 473 


prise d’une quantité considérable: d’antilopes et d’autruches, 
. Smith vit un obélisque d’une proportion lourde, entouré de 
cinq tombeaux dans le goùt de ceux dont il vient d’être parlé, 
sur lesquels il ne remarqua que trois inscriptions malheureu- 
sement indéchiffrables, ces tombeaux ayant élé ouverts et bou- 
leversés probablement pour y chercher des lrésors. 

Comme ces restes d’une grossière architecture sont très-près 
de la route de Fezzan, les voyageurs, venus de l'intérieur de 
l'Afrique, et passant par ces lieux, les auront sans doute beau- 
Coupadmirés, n'ayant jamais rien vu de semblable. Arrivés à Tri- 
poli, ils auront encore exagéré ce qu'ils avoient vu ; etles relations 
embellies par une imagination ardente et nourrie par l’histoire 
tragique de Nardoun, en firent à la fin une ville pétrifiée, qui 
avoit acquis avec le temps une telle célébrité, qu'elle fixa 
non-seulement l'attention de toute l'Europe, au point qu’en 1730 
M. de Maurepas proposa à M. de Lacondamine d'aller en faire 
pour ainsi dire la vérification, mais qu’elle trouva en Afrique 
une croyance si générale, qu'on fait à ce lieu une espece de 
pélerinage. Les caravanes qui passent, s’y arrêtent, et les pé- 
erins gravent sur la pierre des sentences, des prières pour le 
repos des âmes. de ces pauvres malheureux Moslems pétriliés: 
Les piédestanx sont tout couverts de ces inscriplions. (Extrait 
de la Correspondance astronomique du baron de Zach, 1° Cahier, 
août 1818.) : 


ZOOLOGIE. 
Sur un T'apir découvert en Asie. 


Dans la séance, du 7 décembre dernier de l’Académie des 
Sciences, M. G. Cuvier, d'après une lettre et une figure qui 
lui ont été envoyées par M. Diard, jeune observateur qui voyage 
actuellement dans l'Inde, a annoncé qu'il exisie une espèce de 
Tapir dans la partie méridionale de l’Inde. L'individu observé 
par M. Diard, et d’après lequel la figure qu'il a envoyée a été 
faite , étoit vivant dans Ja mévagerie du lord Moira, à Galcuta ; 
il paroït être encore jeune, et ne différer, de l'espèce d'Amé- 
riqüé, SOus aucun rapport, si ce n'est pour la couleur, qui 
est d'un brun noir sur tout l’avant-train et les membres pos- 
térieurs , le torse, la croupe et le bord des oreilles étant blancs. 
IL a été pris par des habitans de Sumatra, et vendu comme 
un animal qui leur étoit inconnu, à un capitaine anglois, par 
lequel il est parvenu au lord. M. Diard, ajoute qu'il a vu éga- 
Jlement.à Calcuta, le crâne ou la tête, osseuse d’un individu 


Tome LXXXVII. DÉCEMBRE an 1818. Ooo 


Er» 


474 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


adulte, n’offrant, sous le rapport dentaire, aucune différence 
avec le Tapir d'Amérique, Ce qu'il n'a Cependant jugé que 
d’après les figures données par M. Cuvier, dans son ouvrage 
Sur les OSsemens fossiles des animaux quadrupèdes. Le lord 
Mira, sachant qué ce crâne provenoit de la presqu’ile de Ma- 
lacca, a eu la complaisance de prendre des renseignemens au- 
près du commandant anglois dans ce pays, et il lui a eté répondu, 
de cet animal est aussi Commun dans les forêts de la presqu'ile 

e Malacca , où on le chasse, que les Rhinocéros et les! Éléphans, 
et que les vieux individus sotit d’un gris noirâtre, et les parties 
blanches d’un gris sale. En sorte que s'il étoit vrai que celte 
espèce d'animal quadrapède ne différat pas de l'espèce d’Ame- 
rique, ce qui paroïît fort probable, d’après la proportion dés 
parties données par le dessin, et surtout d’après la similitude 
du système dentaire , annoncé par M. Diard, et sur lequel il 
faut avouer qu'il est assez diflicile de se tromper, tant il est 
simple dans ce genre, la grande et belle loi établie par Buffon 
Sur la différence au moins spécifique des animaux des contrées 
chaudes des deux continens, se trouveroit fortement infirmée, et 
par conséquent il seroit déjà moins étonnant de trouver fossiles 
en Europe, avec des Rhinocéros où des Eléphans, des restes 
dé Tapir, si toutefois on doit regarder comme ayant appartenu 
à des animaux de ce genre, les o$semens fossiles qu’on leur 
a attribués. Mais si l’on fait l'observation que quoique nous n« 
connoissions pas encore Sûmatra et surtout Malacca, d’une ma- 
nière complète sous le rapport zoologique; 1l.est cependant assez 
dificile de croire qu’un si gros animal, et qu’on. dit y être si 
commun, ait échappé à d'Obsonyillé, à Marsden, etc.; qu'il 
n’en existe aucune trace dans les collections de la Compagnie 
des Indes, du moins à Londres; que cet, animal porte une livrée 
dans son jeune âge, et qu'il a également le: bord des oreilles 
blänc; enfin, que les navigateurs , et surtout les espagnols, ont 
souvent ainsi trausporté d'un pays dans un autre, des animaux 
dont la propagation pouvoit être utile, ét que le Tapir, bon 
à manger, est un animal presque doméstique en Amérique ; 


D Aue 2e JU 
on ne se hâtera pas trop d'ajouter'foi à cette singulière décqu= 


verte, et on en attendra la confirmation. 


NÉCROLOGIE. 


Sur la mort d'Horremann. 


md 


1 


Le 


Nos lecteurs se rappellent sans doute avec reconnoissance ; 


+ ET D'HISTOIRE NATURELLE. 475 
la mémoire de Frédéric Hornemann, natif de Hildesheim, dans 
la Basse-Saxe , à 6 lieues de Hanovre, et qui, après avoir fait 
d'excellentes études à l'Université de Goettingue, fut envoyé 
en 1797, par la Société africaine de Londres, pour faire des 
découvertes dans l’intérieur de l'Afrique. A des connoïssances 
vastes et variées, il joignoil un, courage extraordinaire, el tous 
les avantages d'une coustitution athlétique ; il étoit parvenu à 
parler l'arabe d’une manière si parfaite, qu'on ne le distinguoit 
pas d’un natif du pays. Les résultats de ses premiers travaux ont 
été publiés à Londres, dans les #frican Researches or Proceedings 
of the association for promoting the Discoversy of the interior 
parts of Africa(x), etdans plusieurs volumes de la Correspondance 
astronomique et géographique du baron de Zach, publiés à Gotha 
en Allemagne, depuis l'année 1798. On savoit bien que mal- 
heureusement il avoit succombé dans son entreprise hiardie, mais 
on ignoroit les détails de sa mort, que M. le capitaine W. H. 
Smith vient de faire connoitre dans ‘une Lieltre a M. le baron 
de Zach. 

Ayant séjourné quelque temps à la cour du dey de Tripoli, 
M. le capitaine Smith eut l'occasion d'y faire connoïssance avec le 
bey de feszan, homme de beaucoup de bon sens, qui venoit 
d'arriver de Mourzook. Entre autres communications fort intéres- 
santes surl'intérieur de l'Afrique, il luiraconta qu'il avoit voyagé, 
il y avoit environ 16 ans, avec Hornemann et son compagnon (2). 
D’après son récit, ils vouloient retourner de Tripoli à Fezzan, 
dans le dessein de pénétrer du côté du midi jusqu’au Niger, et 
de pousser ensuite sur cette rivière jusqu'a Tombucloo; mais 
Hornemann fut attaqué d’une fièvre, pour avoir bu imprudem- 
ment, apres une journée extrêmement fagante, de l'eau croupie 
en trop grande quantité. Il mourut bientôt après, et fut enterré 
à Aucalus. Son compagnon continua son voyage , mais il tomba 
malade à Æousca, où il s'arrêta dans la maison d'un négociant 
de Tripoli; ayant voulu se remettre, en voyage, avant d'être 
parfailement rétabli, il eut une rechute ei mourut à T'ombuctoo. 

M. Smith ajoute qu'il a appris par le Paska, que tous les 
D 

(1) Nous en avons une bonne traduction, sous le titre de Voyage de F. Horne- 
mann dans l'Afrique séptentrionale, etc., suivi d'éclaircissemens sur la Géo- 
graphie de l'Afrique, par Rennel , augmenté de sayantes notes par M. Langlès. 
Paris, 1813. (R.) ’ 

(2) Probablement Joseph Frendenbong, l'allemand mahométan qu'Horne- 
mann avoit pris à son service comme interprète. (R) 


Ooo 2 


476 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


effets de Hornemann, consistant en livres, manuscrits, instru= 
mens, hardes et plusieurs grandes lettres scellées, etc., avoient 
été envoyés par le dey de l'ezzan à Tripoli, pour être déposés 
au Consulat britannique, en sorte que nous devons avoir l’espé- 
rance qué les travaux de ce voyageur courageux ne seront pas 
perdus pour les sciences. (Extrait de la Correspondance astrono— 
mique du baron de Zach, 1° Cahier, août 1818.) 


Sur une Nouvelle Comte. 


Dans notre dernier Cahier, nous avons annoncé que M. Pons 
de Marseille avoit trouvé une Comète dans la constellation de 
Pégase, le 26 novembre 1811. Deux jours après, le même ob- 
servateur en apereut une autre dans la constellation de l'Hydre. 
D'après les observations de M. Blanpain, cette nouvelle Comète 
étoit le 30 novembre à 17* 37' de temps moyen, compté de 
midi, par 179° 58/ d’ascension droite, et 50° 17’ de déclinaison 
australe, Le 1° décembre, à 17" 57’ de temps moyen, l'ascension 
droite ‘étoit de 180° 39/, et la déclinaison 28°47': Cette] comète 
s’apercevoit Lrès-aisément avec une lunette de nuit; sa nébulosité 
étoit blanchätre , assez arrondie, et d'environ cinq à six minutes 
de diamètre; le noyau étoit très-confus ; son mouvement en dé- 
clinaison Ja transportoit vers le. nord. 


TABLE 
DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. 
ASTRONOMIE. 


Fin de l'examen critique des Hypothèses imaginées pour eX= 
pliquer l'apparence connue sous le nom de queue ou che- 


velure des Comètes; par H. Flaugergues. Pag. 81 
Sur la figure de la Terre , et la loi de la pesanteur à sa surface; 
par M. de Laplace. 136 
Sur deux nouvelles Comètes; par M. Pons. 391 et 476 
MÉTÉOROLOGIE, 


Sur une nouvelle chute dAérolithe. 228 


ET D'HISTOIRE NATURELLE. 477 


Nouveau catalogue des chutes de Pierre et de Fer, de Pous- 
sière ou de Substances molles, sèches ou humides, suivant 


l'ordre chronologique; par E. F. F. Chladni. Pag. 275 
Tableaux météorologiques; par M. Bouvard. 67 , 116, 226, 254, 
330, 460 

PHYSIQUE. 


Sur la Pesanteur spécifique des cristaux ; par M. Daniell. 75 
Mémoire sur la Chaleur produite par les rayons du Soleil et 

sur l'influence du vent sur cette Chaleur; par H. Flaugergues. 256 
Sur la Compression de l'Eau, par M. Le professeur OErsted, 503 
Sur la température des mines de Cornouailles ; par M. Thomas 

Léan. 304 
Recherches sur la Mesure des Températures et sur les Lois 

de la communication de la chaleur; par MM. Dulong et 


Paiit. 513, 393 
De la mesure de l'effort journalier d'un moteur animé ; par 
M. Hachette. 5a 
CHIMIE. 


Sur la condition nécessaire pour l'inflammation des gaz; par 
M. Th. de Grothuss. 77 
Sur lacide purpuriaue ; par le D' Prout. 
Sur la combinaison de l'Oxigène avec quelques Æcides; par 
M. Thenard. J 
Observations de M. Thenard sur les Combinaisons nouvelles 
entre lOxigène et diverses Substances. 385 


Sur un nouvel Alcali vegetal. 157 
Sur deux nouveaux oxides de Strontiane et de Caicium. 158 
Sur les Oxides de Mercure. Ibid. 
Sur le Platine fondu; par M. Prechtel. 157 
Sur le Cadmium. Lettre du professeur Stromeyer au D’ 
Schweiger. 287 


Lettre de M. J.-B. Villon au Rédacteur du Journal de Phy- 
sique, sur le Lithium, le Carbonite neutre d'Ether , le Si- 
rium, la précipitation réciproque à l'état métallique de l'Etain 


et du Plomb, l'Alun de Soude, l'Indigo, etc. 306 
Sur la combinaison de l'Alcool au moyen de la lampe sans 
flamme; par John Dalton. 308 


Sur la fausse Angusture, Angustura pseudo-ferruginea ; par 
MM. Pelletier et Caventou. 391 


478 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE 


ÎVotice sur le parti utile que lon pourroit tirer de divers 
Oxides ferrugineux ; par M. Pajot Descharmes. Pag. 455 

Observations sur les Combinaisons qui dépendent des Affinités 
Joibles; par M. Berzelius. 462 

Sur les Oxides de Manganèse ; par M. Auguste Arfvedson. 464 


MINÉRALOGIE rr GÉOLOGIE. 


Observations sur la mesure des angles des cristaux; par M. Haüy. 253 
Annonces de deux nouvelles espèces minérales et de gissemens 
nouveaux de deux espèces connues. 159 
Analyse de Minéraux; par M. le comte Dunin Borkowsky. 382 
Mémoire sur les terrains d'eau douce , ainsi que sur les Ani- 
maux et les Plantes qui vivent alternativement dans les 
eaux douces et dans les eaux salées; par M. Marcelle de 
Serres. SALTO, TO 
Rapport fait à la Société royale des Sciences, Lettres, Arts 
et Agriculture de Nancy, sur les éboulemens qui ont eu 
lieu à Norroy, près de Pont-à-Mousson, département de 
la Meurthe; par M. de Haldat. 352 
Notes sur les monts Himälä, par M. Fraser, lues à la So- 
cité Géologique (en Angleterre), le 20 février 1818, et ac- 


compagnées d'échantillons minéralogiques. 228 
Sur la découverte d'un grand, fleuve dans la baie de Van- 
Diémen, au nord de la Nouvelle-Hollande. 392 
Sur la Ville pétrifiée d'Afrique. 472 
. BOTANIQUE. 


Sur l'espèce de circulation de la Charagne, Chara fœtida, par 

M. Gazzi, et sur sa composition chimique , par MM. Che- 

valier et Lassaigne. 230 
Sur une anomalie remarquable du mode de Fécondation dans 

la campanule à feuilles rondes; par M. H. Cassini. 283 
Observations sur la Germination des. graines de Raphanus et 

d'autres Cruciferes; par le même. 202 
Fin des Observations sur la Famille naturelle des plantes 

appelées Composées, par Robert Brown; traduites de l'an- 

glois, et annotées par H. Cassini. 92199 
Note sur plusieurs espèces nouvelles de Rosiers des environs 

de Paris, et sur une nouvelle Methode de décrire les es- 

pèces du genre Rosa; par M. Léman. 358 
Révision du genre Opégraphe de la Flore françoise, et ob- 


ET D'HISTOIRE NATURELLE, 479 


* servalions critiques sur les espèces de ce genre; par Léon 

Dufour. Pag. 200 
Eclaircissemens sur plusieurs points d'Histoire naturelle; par 

J. N. Vallot. 141 
Révision de la famille des Bignoniacées; par Charles Kunth. 444 
Genera et Species Plantarum , quæ aut novæ sunt, aut nondüm 

reclé cognoscuntur; Autore Mariano Lacasca. (Extrait) 459 
Traité sur les Champignons comestibles, contenant l'indication 

des espèces nuisibles ; précédé d'une introduction à l'his- 

toire des Champignons; par C. N. Persoon. (Extrait) 467 
Observations sur les caractèresdu genre Atiplex; par M. Du- 

pont. 62 


ZOOLOGIE. 


Sur plusieurs Animaux de L Amérique septentrionale, et entre 
autres sur le Rupicapra americana, l’Antilope americana, 
le Cervus major ou Wapiti, etc.; par M. Georges Ord. 146 
Notice sur un Cétacé du genre Dauphin, échoué près Saint- 


Pol-de-Léon; par M. de Freminville. 71 
Note sur le Stylephorus chordatus de Shaw ; par H. de 
Blainville. 63 


Monographie de la Couleuvre couresse des Antilles, Coluber 
cursor de Lacépède; par le chef d'escadron Moreau de 


Jonnès. ATOS 
Sur le Serpent de mer de l'Amérique du nord. 317 
Note additionnelle au Mémoire sur le Poulpe et l'Argonaute; 

par H. de Blainville. 47 


Mémoire sur quelques Gastéropodes nouveaux , nudibranches 
et tectibranches , observés dans la mer de Nice ; par Risso. 368 
Lettre de M. Delorme, D. M. P., à M. Girard, sur le Ver 
de Guinée, Filaria medinensis. 155 
Sur les Mammifères sujets à la Léthargie périodique; par le 
professeur G. Mangili. 160 
Recherches anatomiques sur les Scolies et sur quelques In- 
sectes hyÿménoptères; par Léon Dufour. 178 
Sur le Poison des poissons; par le D' Dikson. Extrait d'un 
Mémoire lu à la Société Linnéenne , le 7 et le21 avril 1818. 309 
The Zoological miscellany, etc., c’est-a-dire, Mélanges de 
Zoologie, ou Description despèces nouvelles et inté- 
ressantes d'Animaux; par M. William Elford Leach. 
(Extrait) 297» 377 
Sur un Tapir découvert en Asie. 473 


480 JOURNAL DE PHYSIQUE, DE CHIMIE, lc: 
Sur les résultats de l'Expédition angloise au nord.  Pag. 468 
ARTS. 


Mémoire sur la propriété que le Fer acquiert dans certaines 
circonstances , de colorer le verre en bleu et de remplacer 
ainsi le Cobalt; par M. C. Pajot Descharmes. 54 

Recherches expérimentales sur les Chaux de construction, 
les Bétons et les Mortiers ordinaires ; par L. Vicat. Extrait 


par M. Gaultier de Claubrr. 189 
NÉCROLOGIE, 

Sur la mort d'Hornemann. . 74 

Prix des Sociétés savantes. 160, Sir 


AVIS A MM. LES SOUSCRIPTEURS. 


MM. les Abonnés au Journal de Physique, dont l'Abonnement expire ayec 
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ont paru depuis le tome 5o jusqu’à ce jour, est de 18 fr. pris à Paris ; ceux anté- 
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De l'imprimerie de Me V° COURCIER,, rue du Jardinet, n° 12. 


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